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Citations sur Après l'Histoire (38)

Et encore : "On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l'on n'admet pas d'abord qu'elle est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure."
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C'est une inondation, Noël, et c'est un éboulement. Les guirlandes sont des muscles démesurés qui s'enroulent et gonflent pour étouffer le peu qui restait de la réalité. Les lumières clignotantes rampent vers les immeubles et les escaladent pour les aveugler. Des éboulis de boules hétéroclites deviennent des giboulées de grêlons impitoyables. Les vitrines se couvrent de mille chiures d'étoiles. Des étages sans fin de fausse joie pétillante s'empilent au-dessus des rues. Il n'y a plus d'autre géographie que celle du cataclysme. Qui peut se vanter d'avoir surpris, à l'aube ou en pleine nuit, les malfaiteurs municipaux grimpés dans leurs nacelles pour accrocher toutes ces décorations terrifiques? Lorsqu'on les aperçoit, il est déjà trop tard. Noël vous saute dessus comme une bête féroce. Chaque façade reçoit ses coups de griffe. Des sapins hystériques fument comme des feux d'enfer. Dans les centres-villes meurtris de sonorisations, il ne reste plus qu'à marcher courbé entre des magasins fardés de neige empoisonnée et remplis de post-humains qui se ressemblent tous parce qu'ils sont habités de la même peur qu'ils camouflent en allégresse.
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Notre temps est si rongé de bonnes intentions, si désireux de faire le bien qu'il voit le mal partout;
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dans ce délire indifférenciant, tout le monde s'accroche à une seule différence vraie : je ne suis pas comme le Front national
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Le féminisme d'il y a trente ans, dont se réclament les neo-féministes de la post-histoire, était déjà précisément l'un de ces discours amplifiés et sur-ajoutés, l'une de ces superstructures décoratives et emphatiques venant envelopper, et faire semblant de déclencher, alors qu'ils n'arrivaient qu'après coup, un fait accompli : l'irréfutable transformation des femmes, le changement de leur "place" dans la société, et toutes sortes d'autres réalités qui n'étaient nullement les conséquences du féminisme ; d'où, bien sûr, la rage de celui-ci à en rajouter ; et à faire semblant de conduire une évolution qui se produisait sans lui.
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Le "programme" de l'opposition et celui de la majorité voguent dans les mêmes eaux pour s'y dissoudre et y mêler leurs ultimes déchets. Et la fête est tout ce qui reste quand les contenus idéologiques se sont à peu près egalisés ou indifférenciés.
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Et d'ailleurs aucune question ne peut plus être posée sur quoi que ce soit, du moment que l'on a établi la victimisation, la diabolisation ou l'ostracisme de ce que l'on entend protéger contre les attaques.
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« Quand on peut entendre la déplaisante romancière Darrieussecq, sur un plateau de télévision, affirmer qu'elle vote "naturellement" à gauche, il est évident que tout s'est renversé, que la désagrégation de toute pensée est arrivée à son terme, et que ce vocable, "gauche", ne désigne plus un ensemble d'idées politiques, ou une fraction de l'opinion, comme naguère, comme du temps de Marx, de Jaurès et de bien d'autres (où être de gauche représentait un véritable travail et un combat de la pensée, non un prétendu fait de nature et en réalité une paresse crasse de l'esprit, mais un effort constant du négatif, et un assaut contre les évidences, précisément, et contre le "naturel"), mais qu'il s'agit désormais du plus vautré des conforts intellectuels, et du plus poisseux des "être-ensemble" qui aient jamais été, transfigurés en position divine et sublime, ou encore d'un de ces termes non marqués d'où le conflit (l'Histoire) s'est évaporé miraculeusement, et dont le contenu n'a même plus besoin d'être argumenté puisqu'il relève du naturel et de l'universel : en ce sens, il correspond parfaitement à un monde qui se passe de réel et qui ne s'en porte que mieux, s'épanouissant dans les délices de Capoue d'une prétendue position politique qui n'est plus qu'une mystique de confort, et un naturisme routinier, présentés comme une exaltante conquête de l'esprit. » (p. 600)
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1. À quelque mois de là, paraissaient plusieurs livres sur Guy Debord, ainsi que le premier volume de sa correspondance. L'enthousiasme des plus grasses canailles de notre époque en faveur de Debord devrait être raisonnablement le début de la démolition de celui-ci. Il est temps d'entamer la critique méthodique de ce penseur ; et de dire pour commencer que, contrairement à ce qui se radote depuis si longtemps, l'époque n'a pas connu d'ami plus fidèle que le théoricien du spectaculaire intégré. On peut même avancer que l'ère hyperfestive, laquelle n'a plus rien à voir avec la société du spectacle, avait besoin de cet idéologue pour avancer masquée. Que des citoyens de la post-histoire aient commencé à canoniser l'ancien situationniste n' a rien de surprenant. Dans le premier volume de sa Correspondance, on voit justement Debord, en 1960, affairé à la réalisation d'un projet de manifestation artistique qui devait se tenir dans le Stedelijk Museum d'Amsterdam. Il s'agissait d'organiser l'espace du musée comme un labyrinthe ; et, surtout, d'y installer des portes. La nécessité de ces portes ne sautant pas aux yeux de certains autres situationnistes, Debord le leur explique inlassablement : "Les portes, telles que nous les avons fixées à Bruxelles, sont totalement nécessaires pour créer la possibilité de s'égarer, de revenir sur ses pas, de choisir des chemins différents", écrit-il à l'un. Il faut que "soient gardées toutes les portes telles que nous les avons fixées ensemble à Bruxelles", répète-t-il à l'autre. Ces précieuses portes initiatiques, qui finalement ne seront pas réalisées à Amsterdam en 1960, deviennent donc en 1999 la trouvaille essentielle du ministre de la Culture pour les festivités de l'an 2000 ; et aussi un indice parmi d'autres que, si les années soixante ou soixante-dix ont pu être rebelles à Debord, la nouvelle période ne l'est plus du tout. Contrairement à ce qui se raconte pour préserver l'abusive légende d'un penseur dangereux, l'âge posthistorique et hyperfestif lit Debord ; et il le lit très bien ; et, surtout, il l'accomplit. On en voit le résultat chaque jour, à travers le désastre de la "communication totale", le cauchemar du "dialogue" enfin rétabli entre les individus, le culte de l'horrible "contact, les malfaisances en expansion de l' "interactivité", la dictature du proximisme, l'éloge des "tribus", la dissolution programmée de toutes les "frontières symboliques" et de toutes les différenciations" ; et, bien entendu, la généralisation du festif comme vie quotidienne enfin augmentée. Partout le debordisme triomphe, jusque dans le rêve, exprimé aussi en 1960 par Debord lui-même, de dépasser le théatre en "mettant des acteurs dans la rue" ; et partout la vie, de ce fait, est devenue impossible. Homo festivus est le fils naturel de Debord et du Web. Nous subissons ce que le futur auteur de La Société du spéctacle appelait également de ses voeux en 1960 : " La fin de la séparation spécialisée entre "producteur de la culture" et le reste des gens vivants (donc, aussi, entre un "domaine culturel" plus ou moins moderniste, et le reste de la vie)." Le debordisme est au pouvoir ; mais ceux qui en portent les couleurs doivent toujours feindre aussi que l'idole dont ils se réclament est encore dans l'opposition. Mais elle n'est que dans leur opposition ; qui est, comme tout ce qu'ils touchent, un autre nom pour servitude (octobre 1999)
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La pseudo-existence d'un art contemporain n'est rien d'autre, de ce point de vue, on le sait, que la liquidation de l'histoire de l'art. Elle est sa plus violente négation. Elle tente d'ailleurs de s'imposer comme un absolu, et il faut sans cesse redire que c'est par la décomposition de l'absolu (de tous les absolus : Dieu, le mythe, l'éternité, le temps cyclique) que l'histoire a commencé.
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