L'Iran et les dérives de son régime politique m'ont toujours intriguée. Rares sont les livres qui abordent ce pays sous le prisme de la jeunesse en perdition, alors que l'on peut trouver beaucoup de documentaires. C'était aussi l'occasion de découvrir une nouvelle plume, dont la voix porte au-delà des frontières, pour alerter l'opinion publique. Publiée depuis plusieurs années,
Mahsa Mohebali, a beau avoir du succès dans son pays, elle y est interdite d'expression.
Le contexte politique depuis quelques mois, ouvre une brèche aux dénonciations et permet à ce livre d'émerger et il a le mérite d'avoir été écrit par une femme et dont le récit évoquant la drogue, ainsi que de nombreux sujets tabous, montre une jeunesse confrontée aux désirs, aspirant à une liberté plus que légitime.
Dans cette ville où tout s'écroule, les riches fuient et ceux qui n'ont pas le choix vivent le chaos. Dans cette atmosphère étouffante, et pesante, l'obsession de Shâdi, c'est d'avoir sa prochaine dose. Nous la suivrons sur une journée, dans sa quête, au gré de ses rencontres, une galerie de personnages se profile, tous aussi perdus qu'elle, dans ce contexte de temps suspendu entre découragement et désillusion.
Shâdi, se pose à la fois en spectatrice, sans être complètement actrice, parce que l'espoir pourrait briser ses rêves, être étouffé au point de rompre la moindre envie de vivre. L'opium l'aide à oublier, mais par moment, un sursaut de vie apporte une fulgurance à ses désirs, à ses réflexions.
C'est un texte fort, brillant, touchant, qui frappe les esprits par sa narration au détachement introspectif, avec un parallèle incroyable entre les états d'âme d'une junkie dont le seul rêve est d'émerger et un pays, à la jeunesse en ébullition qui aspire à profiter de joies simples, là où d'autres quittent l'Iran et ses privations.
C'est aussi un texte déstabilisant, qui oscille entre réalité et fiction, au rythme des tremblements de terre, allégorie aux secousses politiques, face à cette jeunesse qui rêve de transgresser les règles, entre espoirs, déceptions et courage.
Mais c'est aussi une allégorie, sur la condition de la femme et ses aspirations, où l'auteure, place l'Iran au coeur d'une apocalypse, pour nous faire découvrir une jeunesse désenchantée, mais pleine d'espoir.
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