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EAN : 9782246144199
81 pages
Grasset (01/01/1967)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
« MME Dézaymeries, dès l'aube, se levait et, après la messe, son baiser éveillait Fabien ; ce baiser avait un goût d'église, une odeur de brouillard. »
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Le mal / François Mauriac
Thérèse Dézaymeries, veuve très croyante et pratiquante, vit son veuvage comme un état de religion, suivant en cela les conseils de son directeur de conscience. Elle a deux fils. Fabien, le cadet qui n'a pas connu son père mort juste avant sa naissance, suit le rythme de la vie liturgique imposée par sa mère. Ils sont très proches. Joseph, le fils aîné, a quinze ans, et s'amuse de jeux où déjà sa vocation s'affirme : autels, processions, sermons. Il est pensionnaire chez les frères. Les deux adolescents vouent leur existence à Dieu, Joseph en souhaitant devenir prêtre, Fabien en se refusant à tout péché et toute tentation.
Deux fois par an, la visite d'une parente éloignée est un moment de fête. Fanny Barrett, jeune femme légère et rayonnante, apporte la joie dans la famille pour quelques jours. Entre elle et Fabien s'est établi une complicité trouble que la mère ne saisit que plus tard, lorsque Fabien a seize ans. Fabien est littéralement enivré par la présence de la jeune femme, et lutte contre des sentiments qu'il définit mal.
Depuis quelques temps, Fanny ne vient plus. Sentant le trouble de son fils, plus impatient chaque année de la prochaine visite de Fanny, Thérèse a demandé à la jeune femme, qui vient de divorcer et de se remarier, de ne plus désormais venir. Celle-ci, à la fois blessée et attirée par le jeune garçon, est partie en déposant un baiser sur les lèvres de Fabien, le laissant bouleversé par cette révélation sensuelle.
Les vacances venues, la famille quitte la ville de Bordeaux pour rejoindre les terres landaises où elle a une propriété. Fabien morose alors vit dans la solitude de longues promenades à travers les pignadas aux horizons sableux.
On admire alors le style magnifique de Mauriac :
« Rien de si nu que ce pays, rien de si plat ni de si uniforme : et pourtant des ruisseaux cachés y frémissent sous le couvert des aulnes, et des sources glacées sourdent d'entre les menthes. le soir, tel était le silence, qu'on entendait ces invisibles eaux où s'agitent les chevelures des longues mousses, nymphes noyées et vaincues, nymphes enlisées au fond d'un sable immaculé et d'une eau toujours pure. Les pins géants cernaient la maison de ténèbres. Les Dézaymeries étaient enserrés par l'armée indéfinie des pins qui se pressaient pendant quarante lieues jusqu'à cette suprême vague de sable où commencent les vagues écumeuses. Les chênes rabougris frémissent encore au vent d'avril de toutes leurs frondaisons sèches et l'amour ne s'y trahit qu'au chant d'une mésange. »
Quelques années plus tard, Madame Dézaymeries décide d'envoyer Fabien, qui vient d'avoir son bac, à Paris pour suivre des études d'histoire. Pour ne pas contrarier sa mère Fabien suit régulièrement les offices religieux, mais jamais chrétien si régulier ne fut si dépourvu de ferveur ! Aucun mot d'adoration, aucun soupir d'amour, hors son officielle oraison du soir ne montent à ses lèvres. Fabien cherche à vingt ans un sens à sa vie jusque-là absolument chaste.
Quant à Joseph atteint de tuberculose, il entre au séminaire en banlieue parisienne pour mourir peu après. C'est pour Fabien l'occasion de revoir Fanny aux obsèques, un choc qui ne sera pas sans conséquence surtout lorsque Thérèse finalement chasse Fanny de la maison. Fabien croyait avoir chassé Fanny de sa mémoire mais sa chair se souvenait d'une odeur et d'un souffle, celui du baiser unique.
Un voyage en Italie pour essayer d'oublier ne change rien. le destin poursuit Fabien et une liaison toxique va s'instaurer entre lui et Fanny, la pécheresse bannie, retrouvée à Venise, la chair le disputant à la grâce pour tenter de sauver ce corps et cette âme. Les retrouvailles à Venise suscitent une joie frénétique chez Fanny.
« Ce port des embarquements pour le néant devenait le léger décor de sa tendresse heureuse, l'humide et tiède pays de la langueur avant l'ardeur…Elle recueillait en elle cette voix mâle et fraîche d'un homme-enfant…Elle rouvrait le beau livre à la page interrompue…Le fruit avait muri pour elle à son insu et elle le cueillerait dans le temps de sa plus grande soif. Elle flairait que cette âme était démunie – au premier assaut elle s'en rendrait maîtresse. La jeune joie palpitait sous sa main, sans défense, sans résistance, ivre déjà de sa défaite… Chassée jadis de la maison, elle rentrait dans le coeur de Fabien et allait régner aussi sur son corps…Elle reverrait le soleil du matin brûler le désordre du lit. L'enfant qu'elle avait couvé et qui avait grandi pour elle seule, claquait des dents, frémissait.»
Suspendue au souffle de Fabien qui ne veut plus rien connaître hors la révélation charnelle, Fanny ressuscite. Sans une halte et sans jamais reprendre haleine, il vit dans un vertige de désirs. Dans le train qui les ramène en France, « cette nuit-là, le fracas du rapide à travers les gares inconnues pénétra d'angoisse leur caresses, comme s'ils eussent osé confondre leurs corps sur le rivage de l'éternité. » Une fois encore le destin vient brouiller les cartes quand une femme-enfant de dix-huit ans, trouble les vingt-deux ans de Fabien. Elle s'appelle Colombe et incarne la pureté. C'est alors que Fabien apparemment paradoxalement se posera la question cruciale : « Qu'est-ce que la foi si elle n'est vécue ? », ayant la révélation d'une volupté sanctifiée et de caresses dont les anges de l'ombre ne détourneraient pas leurs faces.
Ce roman de François Mauriac publié en 1924 est peu connu. Et pourtant il nous offre une belle et sombre histoire, certes d'un autre temps, mais dans un style superbe recréant une ambiance chère à l'auteur qui dit la constante lutte entre la chair et l'esprit dans un milieu bourgeois, avec en toile de fond le souffle de la brise marine dans la cime des pins de la forêt landaise.

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Une écriture qui accuse un sacré coup de vieux, plus encore que celle de Green, cet autre chrétien raffiné: au XXIe siècle, on pourra difficilement ne pas trouver le style du livre gourmé et à l'occasion grandiloquent (combien d'envolées lyriques!). Ici la phrase est reine et on a parfois l'impression qu'elle est écrite pour elle-même seulement, parce qu'elle brille... Un tel style, qui a l'allure d'un snobisme esthétisant et, à ce titre, a dû séduire une poussiéreuse Académie française, a maintenant quelque chose de précieux et de pédant.

Un texte qui, cela a son importance évidemment, date d'une époque où l'on s'exprimait oralement en déclamant, que l'on soit écrivain, homme politique ou speakerine. Pour ma part, cette écriture ampoulée, typique d'un temps et d'une culture (française), m'a gêné parce qu'elle étouffe l'histoire et les personnages. Une littérature trop aristocratique, trop "vieille France" à mon goût.

Le sujet du livre est lui-même suranné: le combat, vite perdu, contre le désir chez un jeune homme élevé par une mère dévote et qui peine à se situer par rapport à sa propre foi (on retrouve le canevas de Moïra, de Green, écrit 24 ans plus tard). Qui aujourd'hui, et même quel chrétien, se sent encore taraudé par le "péché de la chair"?...

Dans ces conditions, avec sa forme et son fond tout au plus pittoresques, je vois mal ce qui permettrait à ce court roman de retenir l'attention de la postérité autrement que comme une exemplaire "pièce de musée".
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