Un beau roman sur la savane africaine, ses populations autochtones et sa faune extraordinaire.
Kessel ressent les lieux et sa fascination est contagieuse.
Ce roman est avant tout sur l'Afrique, et il est à placer, au plan du succès populaire, au niveau de celui de "Tintin au Congo". Je vais tenter la comparaison de ces deux oeuvres.
Si on se remet le contexte de chaque oeuvre en tête. L'un sert en gros de propagande à la colonisation belge et l'autre se situe, 25 ans plus tard, juste avant la décolonisation.
Concernant le point du racisme, "Tintin" a récemment défrayé la chronique à cause de la représentation des populations noires qu'en faisait
Hergé. Il est vrai qu'elle n'était pas flatteuse mais lire "Tintin au Congo" depuis plus de trente ans ne m'a pas fait raciste pour autant et avec du recul on peut aussi se moquer de la façon stéréotypée dont l'homme blanc envisageait l'homme noir.
Alors si
Hergé a choqué sur le sujet du racisme que dire de
Kessel?
Dans "
Le lion", le paternalisme blanc y est moins visible, les autochtones sont moins naïfs, moins spectateurs et plus actifs dans le récit. On sent même un respect pour le peuple Masaï même si on y déplore qu'un jeune guerrier puisse tuer un lion pour prouver sa bravoure alors que la chasse à outrance par l'homme blanc de la faune africaine est un fait à cette époque.
Cela dit cette exploitation de la faune est à de nombreuses reprises dénoncée. le patron de la réserve, Bullit, est un chasseur repenti. Dans ce roman, l'Afrique et ses habitants semblent y être plus représentés et respectés.
Mais il y a un passage qui gâche cet ensemble pourtant en progrès. Celui-ci:
"Et, bien que cet homme fut un Noir, c'est à dire une peau abjecte sur une chair sans valeur et que ce Noir eut lui-même voulu et poursuivi sa perte[...]" (page 233, Ed Folio)
Il faut resituer le passage dans le contexte d'un combat crucial entre un homme noir et une bête mais il y a quand même quelque chose dans les mots choisis par
Kessel d'au moins... troublant.
Toutefois, cette oeuvre de
Kessel n'a pas eu le procès que l'on a fait à celle d'
Hergé.
Dans ce décor idyllique où le Kilimandjaro demeure, vie et mort se succèdent selon un rythme immuable. Seuls éléments du désordre de cet écosystème quasiment stable: certains représentants de l'espèce humaine.
Au premier rang desquelles j'ai choisi l'héroïne: la capricieuse Patricia, onze ans environ. On lui a offert un lion. Elle a grandit avec lui. Elle est le personnage de premier plan, une personnalité forte à qui rien ne résiste. Il est son terrible jouet.
Patricia ne m'a pas semblé très sympathique. Elle provoque et attise les êtres qui l'entourent jusqu'au drame final. C'est ce que l'on appelle aujourd'hui un enfant-roi.
Si la fin est prenante et soulève le coeur, les 100 pages d'introduction donne bien le temps de s'impatienter, pour ne pas dire s'ennuyer, avec les états d'âme de Sybil (la mère de Patricia).
Un incontournable malgré tout.