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Frank Lestringant (Éditeur scientifique)Claude Lévi-Strauss (Préfacier, etc.)
EAN : 9782253907077
668 pages
Le Livre de Poche (01/12/1994)
3.33/5   62 notes
Résumé :

Jean de LéryHistoire d'un voyage faict en la terre du BrésilCe livre est un enchantement. C'est de la littérature. Qu'on laisse l'ethnologie aux ethnologues et que le public lise l'Histoire d'un voyage faict en la terre du Brésil comme une grande oeuvre littéraire. Et aussi comme un extraordinaire roman d'aventures. Faites le bilan de ce que raconte Léry : pendant un an et demi, ça n'arrête pas. Au cours du voyage a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
La langue de Jean de Léry, pasteur calviniste envoyé en mission dans la colonie de "Nouvelle-France", est tout à fait accessible à un lecteur habitué au français moderne et classique : elle n'a pas les difficultés de celle de Rabelais ou de Montaigne. Cette facilité ajoute au plaisir de lire le récit du séjour de l'auteur parmi les cannibales du Brésil dans sa propre langue, avec la verdeur et la fraîcheur du français de 1550. Ajoutons que ce premier livre ethnologique sans le savoir, fut à l'origine de la vocation de Claude Lévi-Strauss, qui l'emporta au Brésil où il séjourna et étudia, pendant que son peuple subissait en Europe des persécutions qui rappellent, de loin, celles des protestants en France. Enfin, la préface, écrite par Franck Lestringant, seiziémiste et spécialiste de la question, est excellente.
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Un livre passionnant dans la langue savoureuse du XVIe siècle et pourtant parfaitement compréhensible. Un livre qu'on ne peut pas lâcher tant il fait partager sur le vif et de façon sensible ces moments exceptionnels de l'Histoire où deux humanités séparées depuis 100.000 ans se découvrent.

Le point saillant est peut-être le chapitre XV qui décrit les moeurs des cannibales toüoupinambaoults de la baie de Rio.
Certaines scènes prêtent à rire. Les Toüoupinambaoults ne mangent pas de dinde ni de raie car se sont des animaux lents. Ils craignent d'acquérir cette lenteur qui les priverait de rester alerte au combat. Aussi s'étonnent-ils de voir les Français se déplacer normalement après en avoir mangé. Ils pensent que les oeufs ne sont pas comestibles et s'étonnent de voir les Français s'en régaler.
Les Toüoupinambaoults ne parlent et ne boivent jamais pendant les repas, et trouvent les Français très mal élevés de faire autrement…

Les Toüoupinambaoults ont abondance de terre et de vivres ; ils ne se battent pas pour cela. le véritable ressort de leur extrême violence est la vendetta. La guerre n'est faite que pour venger l'ancêtre, le parent, tué par l'ennemi.
De Léry décrit une bataille durant laquelle des Margajas sont faits prisonniers. A la surprise du lecteur, les prisonniers sont très bien traités. Ils sont nourris abondamment des meilleures viandes, le chef toüoupinambaoult leur donne ses filles.
Puis, après plusieurs jours de ce gavage, vient l'exécution. Les prisonniers sont assommés et aussitôt rôtis. On comprend alors que les bons traitements avaient pour seul but de rendre leur chair plus savoureuse.
Mais le plus terrifiant est ce qui advient des enfants qu'ils ont faits aux filles qu'on leur a données. Ces enfants ne sont pas considérés comme ceux de leur mère toüoupinambaoult mais comme ceux de leur père margaja et ils sont eux aussi dévorés.
Donner sa fille à son ennemi pour qu'elle enfante de lui est ainsi pour eux faire un prisonnier de plus et donc jouir encore davantage de sa vengeance…
Le lecteur a alors le vertige en pensant aux horreurs dont l'esprit humain a pu être capable dans le passé.

Le récit du retour jusqu'en Bretagne est assez terrifiant. L'auteur montre comment, à bord d'un navire qui prend l'eau, l'équipage frappé par la famine en est réduit à manger le cuir de ses vêtements.
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Voyageons de l'autre côté de l'océan et dans L Histoire : direction le Brésil du XVIe siècle ; voici Histoire d'un voyage faict en la terre du Brésil de Jean de Léry écrit en 1578.

Jean de Léry (1536 - 1613?) est un cordonnier protestant de la Renaissance. Dans cette époque déchirée par les guerres de Religion opposant catholiques et protestants, les nouvelles terres (re)découvertes quelques décennies plus tôt par Christophe Colomb attirent les gouvernements européens pour étendre leurs territoires et leurs pouvoirs. Certains y voit l'occasion de tout quitter pour partir fonder des colonies protestantes et y vivre en paix. C'est ce que fit en 1556 Nicolas de Villegagnon : avec deux cents hommes, il installe un fort français dans la "France Antarctique" (soit la baie de Rio de Janeiro). Léry est envoyé avec 13treize autres Genevois par Jean Calvin prêter main forte à Villegagnon. Il restera au Brésil du 7 mars 1557 au 4 janvier 1558. Cependant, l'aventure française ne résistera pas aux guerres spirituelles : les grandes divergences théologiques ont embarqué avec les hommes en direction du Brésil et elles feront des victimes par-delà les mers.
Léry reviendra en Europe avec plusieurs carnets de note dont est tiré Histoire d'un voyage faict en la terre du Brésil. L'un des avantages de cet ouvrage est la possibilité de le lire comme un récit d'aventures ou comme une histoire naturelle brésilienne. Léry arrive à passer aisément de l'un à l'autre, parfois en les séparant, parfois en les mélangeant.
Le premier aspect à souligner est celui de la narration : Histoire d'un voyage faict en la terre du Brésil est un récit de voyage (et quel voyage!) entrecoupé de passages décrivant la faune et la flore. le récit s'ouvre et se clôt sur les traversées aller et retour. Et Léry a eu du mérite : des tempêtes plus monstrueuses les unes que les autres, les vivres et l'eau qui viennent à manquer, des tentatives d'abordages échouées, des échouages quasiment réussis, la mort frôlée à plusieurs reprises... Bref, Léry a affronté tous les dangers de la mer, qu'ils viennent de l'océan, du ciel ou des animaux marins. Ulysse est un petit joueur à côté.
Léry est un homme de son temps : il fait partit de cette génération de découvreurs. le monde vient d'être considérablement élargi et remis en question, tout est à inventorier, à classer, à décrire, etc. Et c'est ce qu'il fait tout au long de sa narration : Léry nous décrit les trésors du Brésil avec la précision la plus pointue possible. Ainsi, les descriptions procèdent beaucoup de l'auto-correction. Par exemple, pour décrire l'ananas (trésor ultime pour le voyageur européen), Léry utilise quatre comparaisons rien que pour son aspect extérieur : l'ananas a la taille d'un chardon mais la grosseur du melon, a la même écorce que la pomme de pin mais la raideur de l'artichaut. Léry voit et nous transmet le Brésil à travers ses yeux d'enfant avides de tout voir et de tout comprendre, tout en essayant d'être le plus clair possible pour que le lecteur européen puisse à travers sa lecture voyager et voir le fameux ananas.
Si la narration est là pour plaire, la description l'est pour instruire. Tout comme la réflexion "anthropologique" qui se dessine en filigrane. En plus de décrire la faune et la flore, Léry fait le portrait des indiens Toüoupinambaoults avec qui le fort commerce. La description se fait de manière factuelle : les hommes ont le crâne tondu mais les cheveux longs sur l'arrière et portent une pierre verte dans leur bouche percée ; les femmes ont les cheveux longs mais n'ont pas de piercing à la lèvre, elles ont les oreilles entièrement parées de boucles en os blancs. Ces descriptions et la narration de scènes plus ou moins quotidiennes permettent donc de dresser un portrait complet de l'indien Toüoupinambaoult.



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Ce récit de voyage, publié en 1578, est difficile à lire, d'une part à cause de la langue utilisée, le moyen français, et d'autre part à cause des très longues descriptions des moeurs indiennes. Ces descriptions détaillées et méthodiques laissent peu de place aux aventures de l'auteur pendant son voyage en France Antarctique (Baie de Rio de Janeiro). Ce récit peut donc paraître monotone et provoquer l'ennui chez le lecteur.
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La lecture est rendue difficile par la langue, qui n'est pas notre français moderne. Cependant les nombreuses notes permettent de rendre cette lecture plus fluide.
J'ai trouvé les divers chapitres intéressants, chacun permettant d'avoir des informations nouvelles sur de multiples sujets. La répartition des chapitres permet de débuter et de clore le livre sur les récits de voyages en eux-mêmes, où Léry et ses compagnons se trouvent confrontés aux dangers de l'océan. le point de vue de Léry sur la question des indiens, de leur mode de vie, de leurs croyances, est nouvelle dans le sens où il se place comme l'un de leurs amis, allant jusqu'à préciser que lui et certains de ses compagnons auraient voulus rester vivre en terre du Brésil si des obligations ne les avaient forcés à revenir en leur pays.
Je pense donc qu'il faut réussir, ce qui n'est pas simple, à dépasser la barrière du langage pour véritablement se plonger dans des chapitres intéressants, et emplis d'idées nouvelles prêtant parfois à sourire.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Mijouet aimerait rectifier un peu le tir de Clio15 qui critique avec un regard de lecteur de romans, un ouvrage quasi scientifique, écrit de la main d'un éthnographe avant la lettre, qui n'est en rien romanesque loin de là.

Voilà ce que répond Claude Lévy-Strauss aux questions du Figaro Littéraire.
En 1935, lorsque vous avez débarqué au Brésil, songiez-vous à cette antique amitié ?* Saviez-vous que vous mettiez vos pieds dans ceux de Jean de Léry, votre prédécesseur du XVIe siècle, que vous surnommerez le «Montaigne des vieux voyageurs» dans Tristes Tropiques ?
-J'avais lu, avant de partir, son Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil. Je ne sais plus exactement dans quelles circonstances, il ne devait pas être facile de se procurer ce livre. A la bibliothèque du Musée de l'Homme, où j'entreprenais mes recherches, il y avait sans doute une ancienne édition du XIXe siècle. Ce fut extraordinaire de découvrir les côtes du Brésil, la baie de Rio de Janeiro, la faune, la flore et les indigènes dans la relation d'un voyageur qui m'avait précédé de quatre siècles. Le regard de Léry est d'une grande fraîcheur, sa rigueur celle d'un ethnographe contemporain, son Histoire d'un voyage faict en la terre du Brésil, une grande oeuvre littéraire.
* Amitié franco-brésilienne
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D'autant que quelques Cosmographes et autres historiens de nostre temps ont jà par cy devant escrit de la longueur, largeur, beauté et fertilité de cette quastrième partie du monde appelée Amerique ou terre du Bresil.
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Or si tost que le prisonnier aura esté ainsi assommé, s'il avoit une femme (comme j'ay dit qu'on en donne à quelques-uns), elle se mettant aupres du corps fera quelque petit dueil: je di nommément petit dueil, car suyvant vrayement ce qu'on dit que fait le Crocodile: assavoir que ayant tué un homme il pleure aupres avant que de le manger, aussi apres que ceste femme aura fait ses tels quels regrets et jetté quelques feintes larmes sur son mari mort, si elle peut ce sera la premiere qui en mangera.
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