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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Lampedusa, ses paysages somptueux. Une petite île méditerranéenne de 20 km2 où une adolescente de dix-sept ans en villégiature peut s'ennuyer ferme. Mila redoute ce mois de juillet en huis clos avec ses parents, surtout que sa mère n'est pas en forme, voilà six ans qu'elle traîne sa dépression depuis le décès du petit frère.

Lampedusa, une île italienne entre Afrique et Europe. Une première étape prometteuse vers l'occident, le point à atteindre pour les Africains qui n'ont plus rien à perdre dans leur pays, victimes de pauvreté extrême, de la guerre et/ou d'une dictature.

Une dizaine de voix dans ce récit : celle de Mila, en alternance avec celles de jeunes Erythréens âgés de quatorze à vingt-deux ans, qui fuient pour un monde meilleur, forcément meilleur, ça ne peut pas être pire : « Je le sais depuis que je suis tout petit : l'Europe, c'est la promesse d'une vie meilleure. Je suis fort, courageux. La fatigue ne me fait pas peur. Là-bas, je serai discret, laborieux, je ferai les travaux dont personne ne veut. Je serai heureux de ce qu'on me donnera. Je n'irai pas pour prendre la place de qui que ce soit. J'irai parce que je suis né au mauvais endroit. J'irai parce que j'ai envie de vivre. » (p. 167)

Le parcours de ces migrants est long, dangereux, coûteux, l'arrivée incertaine, ils risquent la mort, le retour forcé et musclé au point de départ. « (...) la décision de quitter mon pays, le passage de la frontière, le camp des réfugiés, les mois de travail à Karthoum pour financer la suite du trajet, les voyages à pied, en bus, en 4x4 ou sous les bâches d'un camion, les passeurs, le sable, la chaleur, les matraques, les soldats, le froid, les coups, l'odeur des cadavres, le sexe, l'argent, l'argent, le sexe, les coups et enfin, alors que nous avions déjà survécu à la traversée du Soudan, alors que nous pensions déjà à Tripoli, les trafiquants libyens qui avaient arrêté notre véhicule, au milieu de la mer de sable du Fezzan. » (p. 146)

Superbe roman, bouleversant et révoltant, qui m'a beaucoup appris sur la situation politique en Erythrée : « (...) service militaire forcé de 17 à 47 ans, interdiction de la presse indépendante, arrestation et torture des opposants, limitation des déplacements, contrôles d'identité systématiques, giffa, camps d'enfermement... »

L'auteur trouve le bon dosage pour intéresser le lecteur adolescent, évoquant tour à tour les tourments d'une européenne (problèmes familiaux, deuil, mal-être) et le drame de jeunes africains défavorisés dont l'avenir est bouché. le sort de ces migrants clandestins est triste à hurler, surtout si l'on pense à ce qui les attend après - exemple des centres à Calais, insertion difficile une fois installés...

En (longue) conclusion, ces mots de l'auteur : « Même s'il est très difficile de produire des chiffres exacts, on estime a minima qu'en vingt ans, plus de 13 250 clandestins sont morts aux frontières de l'Europe. » Annelise Heurtier précise avoir « situé cette fiction en 2006, afin de mettre en avant le sort particulier des migrants érythréens fuyant leur pays, non pas pour "profiter" des aides sociales des pays européens mais bien pour échapper à l'intolérable répression mise en place quelques années plus tôt en Erythrée. » (p. 232-233)
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Mila est une jeune italienne, de retour pour l'été dans la maison familiale de vacances de Lampedusa après six ans d'absence suite au décès de son tout petit frère.

Alors que ses parents tentent de se reconstruire et décident de repeindre leur habitation, l'adolescente part à la découverte de l'île. Elle cherche à échapper à la tristesse mais aussi à la culpabilité qui la ronge.

Elle rencontre Paola, une insulaire qui va lui révéler les secrets de ce lieu et les fantômes qui le hantent.

C'est par la prise de conscience de l'existence de clandestins naufragés qu'elle va accepter de voir la vie autrement...

Un roman qui entrelace la voix des clandestins africains, notamment ceux venus de l'Erythrée qui fuient une situation politique impossible, à celle de la douleur d'une adolescente emprise avec le spectre de sa vie bouleversée.

Un récit qui résonne avec l'actualité. Que faisons- nous pour ces hommes, femmes, enfants qui meurent aux frontières de l'Europe ?

Au lieu de proposer un propos moralisateur, l'auteur incite ses personnages à s'engager dans des actions à taille humaine afin de ne pas se détruire devant l'ampleur du problème.

"Faire avec l'existant. Même avec le pourri, le moche, l'injuste. Même avec la mort, la maladie, la déception. L'absence."

Ne pas fermer les yeux, agir, transmuer la souffrance, partager sont des sujets qui reviennent dans les livres d'Annelise Heurtier. Elle traite à chaque fois ces thèmes durs avec délicatesse.

La voix fluette de Mila est ce qui donne un fil au récit entrecoupé des voix meurtries, des histoires terribles des candidats obligés à l'exil. Ils sont tenus de partir coûte que coûte dans l'espoir de pouvoir vivre tout simplement.

A la manière d'une partition de musique, le texte va crescendo, à la rencontre de ces autres, marqués par la peine et la misère. S'il nous secoue, c'est intérieurement, comme un hommage à ces petites voix qui n'ont plus la force de crier. A lire !

Lien : http://www.nouveautes-jeunes..
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Lampedusa, 2006. Mila revient avec ses parents sur l'île pour passer des vacances après le deuil qui a touché sa famille six ans plus tôt. Pour elle, ce sera l'occasion de redécouvrir un des lieux heureux de son enfance mais surtout d'en apprendre plus sur elle-même.
Mais Lampedusa, c'est aussi, et malheureusement, un endroit aujourd'hui connu pour les migrants clandestins venus de la Corne de l'Afrique dont les embarcations de fortune viennent s'y échouer après un long voyage...
J'aime beaucoup les romans d'Annelise Heurtier : son écriture sensible lui permet d'aborder des sujets de société afin de faire réfléchir les ados actuels.
En donnant la voix à une dizaine de jeunes Erythréens qui fuient le régime totalitaire en place, on comprend mieux les raisons de cet exil et les difficultés auxquels ces migrants sont confrontés.
Un roman fort et bouleversant qui donne des pistes de réflexion face à un sujet d'actualité !
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C'est toujours un plaisir d'apprendre qu'Annelise Heurtier a sorti un nouveau roman. On sait d'emblée qu'on sera amené à découvrir un mode de vie différent du nôtre, un quotidien moins rose et une réalité qu'on méconnait.

Après le Népal et la Mongolie, nous partons moins loin cette fois. Au sud de l'Italie, sur l'ile de Lampedusa. Un bel endroit qui fait trop souvent la Une des médias pour des raisons sordides. Alors que Mila y retourne en vacances dans la maison paternelle, espérant que ce retour aux sources sera bénéfique pour sa famille, un nouveau drame humanitaire se prépare. Loin de cette ile paradisiaque aux paysages enchanteurs qui réconforte Mila au fur et à mesure de son séjour, huit jeunes Erythréens s'apprêtent à forcer le destin au péril de leur vie. Leurs récits personnels ponctuent celui des vacances de Mila. Si l'ambiance familiale lui semble pesante, que dire de celle du quotidien de ces jeunes gens ?

Comme à son habitude, Annelise Heurtier nous propose l'histoire d'une jeune européenne à problème et la compare à celles d'adolescents d'ailleurs. Sans porter de jugement, elle pousse le lecteur à relativiser ses petits malheurs en le confrontant aux vrais problèmes du monde. Elle ne force pas le trait, elle nous présente la vie telle qu'elle est, dans un récit subtil, émouvant et fort. Son écriture très visuelle nous permet d'imaginer avec précision tant la splendeur des paysages décrits par Mila que la misère des conditions de vie des jeunes Erythréens. Loin de pousser à la culpabilité, l'auteure suscite cependant l'émotion et la réflexion à travers un récit réaliste et juste.

Mieux ficelé que « Là où naissent les nuages », plus abouti, ce roman poignant est une réussite et devrait être lu par tous les adolescents. Après sa lecture, on ne voit plus les immigrés clandestins de la même façon.
Merci beaucoup aux éditions Casterman pour cet envoi.
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Encore un très beau roman d'Annelise Heurtier sur un sujet peu traité en littérature jeunesse.
Mila est une jeune fille italienne de 17 ans venue en vacances sur l'île de Lampedusa avec ses parents dans la maison de famille. Elle a peur de s'ennuyer ferme avec ses parents et surtout elle redoute le comportement de sa mère qui est très fragile depuis la mort de son petit-frère. Heureusement, elle va rencontrer la très belle Paola, nièce de Gina amie de ses parents, qui va lui montrer toute la beauté de l'île, ses mystères, ses lieux secrets et aussi lui parler de son histoire et notamment des migrants qui s'"échouent" sur Lampedusa.
Justement, en parallèle à l'histoire de Mila, on découvre les histoires de huit migrants contraints à fuir leur pays et à risquer leur vie sur la méditerranée. Des histoires tragiques qui donnent un nom et un prénom à la foule des migrants dont on parle aux actualités.

Vraiment un très beau roman très émouvant et aussi nostalgique.
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Encore un très beau roman d'Annelise Heurtier sur un sujet peu traité en littérature jeunesse.
Mila est une jeune fille italienne de 17 ans venue en vacances sur l'île de Lampedusa avec ses parents dans la maison de famille. Elle a peur de s'ennuyer ferme avec ses parents et surtout elle redoute le comportement de sa mère qui est très fragile depuis la mort de son petit-frère. Heureusement, elle va rencontrer la très belle Paola, nièce de Gina amie de ses parents, qui va lui montrer toute la beauté de l'île, ses mystères, ses lieux secrets et aussi lui parler de son histoire et notamment des migrants qui s'"échouent" sur Lampedusa.
Justement, en parallèle à l'histoire de Mila, on découvre les histoires de huit migrants contraints à fuir leur pays et à risquer leur vie sur la méditerranée. Des histoires tragiques qui donnent un nom et un prénom à la foule des migrants dont on parle aux actualités.

Vraiment un très beau roman très émouvant et aussi nostalgique.
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Mila, adolescente en vacances à Lampédusa.
Mila n'écoutait plus.
La présentation de l'île par Paola soufflait dans le brouhaha des touristes qui venaient de s'installer non loin.
Mila n'était pas encore très à l'aise avec Paola, jeune nièce d'une amie de sa Grand-mère qui vécut sur la Pointe aux Orangers. Elles ne se connaissaient pas.
Paola. Belle, insouciante, épanouie dans sa robe légère, elle faisait preuve d'une grande bienveillance désintéressée qui agissait comme un aimant et attisait aussi la prudence pour tous les petits chats échaudés, les adolescentes en mal, en perte de soi.

Quelque part...A mir, 15 ans et 2 mois. Érythrée
Les contrôles lors des promenades, les contrôles d'identité de la Giffa, les possibles rafles au profit d'enrôlement pour la patrie.

Mila, adolescente en vacances, sauvage et blessée.
L'île de Lampeduse, île italienne, au sud d'Agrigente, entre l'île de Malte et la Tunisie. Les parents avaient pris le taureau par les cornes et s'était décidé à revenir sur les lieux de l'enfance du père pour conjurer le sort de la tristesse qui remonte comme une marée. La famille devait continuer ensemble, sans lui. C'était possible.

Quelque part...Saafiya, 19ans. Érythrée
Les projets d'études, l'avenir des possibles, les changements de cap, la rage d'échapper à la Giffa, aux piétinements des rêves à coups de bottes et de brutalités, l'urgence de se sauver vers un ailleurs.

Quelque part...Amanuel, 18 ans. Érythrée
Vivre et laisser, partir, une promesse de profiter d'une vie, sa vie, avec comme seul bagage la peine de ceux qui sont restés au creux du ventre et au fond du coeur. Partir.

Mila, adolescente en vacances.
S'autoriser à être légère comme les poussières, à déguster, à savourer, à rire.

Quelque part...Meron, 14 ans et 7 mois, Pietros, 20 ans et 2 mois, Meloata, 16 ans et 5 mois, entre Érythrée, ciel et la terre.
Les jeunes années d'insouciance gâchées par des parents, peu préparés, qui se laissent piégés par des passeurs sans scrupules. Souffrir de l'entassement des camions, du sable, des mésaventures, une captivité qui dure. Toujours, en cavale, toujours.
Un refuge, un jour, par la force du courage.

Mila, adolescente en vacances.
Paola. de nouveaux amis, une famille ici et la-haut, dans le coeur.
Arrivée de sa Rome, capitale agitée, soucieuse de ce que les prochains jours pourrait générer chez sa pauvre mère, cette perte, Mila reprend goût à l'adolescence.
Ce juillet ne s'avérait pas être un douloureux temps du souvenir, sa mère était debout, cuisinant, plaisantant, profitant du calme de Lampédusa. L'île était un vrai refuge.
Mila souriait, respirait, renouait avec quelque chose contre toute attente, jugée depuis son arrivée sur son petit vélo jaune et sillonnant les contours de l'île. Paola racontait que ce lieu où elles se trouvaient précisément avait accueilli aussi nombre de réfugiés venant d'Érythrée..

: Annelise Heurtier revient avec un roman ado de nouveau fort, émouvant et à la réalité percutante.
Entre fiction et état de faits, l'auteure croise adroitement les histoires, dans le temps et l'espace, Lampédusa étant le point de croisement de l'abscisse et l'ordonnée de ces récits d'adolescents en quête d'avenir et d'encore un peu d'insouciance .
Les paroles de ces jeunes d'Erythrée, passionnées, exaspérées, impatientes, craintives aussi nous permettent de nous pencher sur le cas des réfugiés échappant à la répression, à la violence et échouant sur le lieu d'accueil de Lampédusa au terme d'un périple dans des conditions effroyables. L'actualité nous racontera la suite, les vraies réalités de ces flux migratoires, pour promettre, protéger parfois aussi les familles car il n'y a plus rien à perdre, tout à gagner ailleurs.
L'auteure décrit le poids de ces décisions de survie propre, les scènes racontées sont éprouvantes, à l'intérieur et à l'extérieur. Oui, l'émotion est grande.
En regard, le récit de Mila raconte une autre réalité, un quotidien plus ordinaire et pourtant il y a un combat intérieure qui se livre pour empêcher le naufrage de sa propre famille.
Le quotidien de Mila, jeune adolescente vivant à Rome, que l'on peut juger plus léger ne l'est pas tant que cela car sa famille se redresse d'un deuil familial et l'escapade à Lampédusa représente un moyen de rebondir pour leur propre survie aussi. Les descriptions de ses escapades, de ses moments de liberté, de calme, de plaisirs retrouvés sont des souffles d'air frais et l'on retrouve ce qu'une adolescence devrait être, sans obstacles dramatiques. C'est un romans ado sur la rédemption, le courage l'amitié, la famille, l'adolescence,la liberté, la vie. Cela se lit absolument bien car Annelise Heurtier raconte si bien et arrive à prendre des sujets très lourds et les porter aux publics ados avec une distance qui permet aux lecteurs de s'y intéresser sans déplaisir. Encore une chouette lecture qui fera réfléchir.
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C'est l'été. Mila, une jeune italienne de 17 ans, vient passer des vacances sur l'île de Lampedusa où elle venait étant enfant. Cela fait quelques années que ses parents et elle n'y ont pas remis les pieds.

Depuis le drame qui a touché la famille, la souffrance était trop grande et les souvenirs trop présents pour retourner sur l'île.

Mila espère pouvoir passer un maximum de temps seule pour explorer les beautés de Lampedusa mais aussi partir à la recherche de ses souvenirs d'enfance.
Quelques jours après son arrivée, elle rencontre Paola, la belle et charismatique Paola. La jeune fille la trouble. Paola accompagne Mila dans ses escapades. Petit à petit, Paola va l'aider à voir la vie autrement.

Au milieu du récit du séjour de Mila, d'autres voix se font entendre. Ce sont celles de jeunes filles et garçons venant de la corne de l'Afrique et plus précisément d'Erythrée et d'Ethiopie.

Amir, Saafiya, Amanuel, Meron, Pietros, Meloata, Gebriel, Awat.

Comme des milliers d'autres avant eux, ils ont décidé de fuir un pays qui les oppresse pour la promesse d'un ailleurs meilleur. Mais à quel prix ?



Tous les livres d'Annelise Heurtier m'ont fait le même effet : un choc voire un électrochoc.
Elle aborde, dans chacun de ses romans, des thèmes d'actualité, forts et sensibles.
Après l'anorexie, le handicap, le racisme, le travail au sein d'une association humanitaire (entre autres), Refuges parle ici des migrants.

Là encore, Annelise Heurtier confronte deux points de vue et deux mondes complètement opposés.

D'un côté, Mila, cette jeune fille, aveuglée par ses propres problèmes, ne voit pas ou ne veut pas voir ce qui se passe autour d'elle.

Pour elle, Lampedusa est un lieu idyllique et elle n'a pas conscience des événements dramatiques qui s'y déroulent régulièrement. Pour qu'elle ouvre les yeux, il va falloir l'intervention de quelqu'un. Mila se rendra compte que Lampedusa n'est pas que le beau paysage de carte postale qu'elle s'était imaginée mais que l'île est aussi le théâtre de tragédies humaines.

De l'autre côté, on a le récit de tous ses adolescents qui ont fait le choix de quitter leur pays. Tous en ont conscience : le voyage sera difficile, horrible peut-être même fatal. Mais rester dans leur pays n'est plus une option. Rester veut aussi dire souffrir ou mourir. Leur point commun à tous : une détresse immense. Les passages les concernant sont tout simplement poignants.
Annelise Heurtier sait encore une fois s'y prendre. Elle nous met face à la sombre réalité à travers des témoignages, des parcours de vie tous différents mais qui convergent tous vers un même but : l'envie de s'en sortir, l'envie de vivre.

C'est habilement construit, merveilleusement bien écrit et terriblement émouvant. (je me répète, je me répète mais c'est tellement vrai!)

Comme l'explique Annelise Heurtier à la fin de son roman, l'écriture de ce texte a été influencée par le drame survenu en 2013. Pour rappel : 366 migrants avaient trouvé la mort au large de l'île de Lampedusa. Elle a néanmoins situé l'action de son livre avant. Parce qu'avant ce drame, il y en a eu de nombreux autres dont on n'a pas forcément parlé.

C'est un sujet très peu traité en littérature jeunesse. Et il fallait tout le talent de cette autrice (des compliments, des compliments mais elle le mérite ) pour l'aborder avec justesse et réalisme, mêlant la beauté de l'île et l'horreur de ce qui se trame sur ses rivages.
Magistral ! Ce roman fait passer un message, informe et sensibilise sans devenir assommant ou complètement plombant. C'est juste, c'est émouvant. C'est beau.

Annelise Heurtier est décidément une vraie passeuse d'histoires qui nous pousse à sortir des sentiers battus, à regarder ce qui dérange et à nous ouvrir aux autres. (je l'ai déjà dit aussi mais tant pis)

MERCI Annelise Heurtier!

Et encore une fois, je ne peux que vous inviter à vous plonger dans la bibliographie de cette autrice exceptionnelle.
Lien : https://www.hashtagceline.co..
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J'ai découvert Annelise Heurtier au moment de la sortie de Sweet Sixteen, il y a quelques années. Depuis elle est devenue l'une de mes auteures préférées, car à chaque fois c'est un coup de coeur, Refuges n'y fait pas exception.

Pourtant au départ, le pitch ne m'a pas vraiment interpellé, le problème des réfugiés et des migrants, on le connait bien dans ma région, je n'habite pas très loin de Calais. C'est un problème compliqué, qui vient en plus s'ajouter à la crise que connait notre pays.

Dans ce roman, nous faisons dès le départ la connaissance de Mila, une jeune Italienne en vacances dans la maison d'enfance de son père à Lampedusa. Mila n'est pas très heureuse, sa famille a vécu il y a quelques années un drame qui a détruit le bonheur familial. Sa mère survit tant bien que mal, malgré la dépression qui la ronge, son père la tient à bout de bras comme il peut, et Mila se retrouve au milieu. Ses vacances à Lampedusa, elle les voulait, pour y retrouver un petit peu le bonheur de son enfance, celui d'avant.

A côté de Mila, au loin, de l'autre côté de la mer, c'est la voix de huit autres jeunes qui se fait entendre. Amir, Saafiya, Méron, Amanuel, Pietros, Meloata, Gebriel, et Awat, ils ont entre quatorze et vingt-deux ans, et vivent en Erythrée, cette bande de terre au bord de la mer rouge. Un pays où la dictature fait rage, où le système politique est l'un des plus durs au monde, où l'état décide de votre vie, que vous soyez une jeune femme ou un homme. A partir de dix-huit ans où vous envoie à Sawa, un immense camp militaire, pour y apprendre à devenir docile, une fois le camp terminé, les jeunes gens travaillent pour le compte de l'état, jusqu'à leurs quarante-sept ans, où c'est la fin du service obligatoire, bien trop tard pour se construire une vie, dans un pays qui de toute façon reste totalitaire.

Vous avez bien évidement compris que ces jeunes gens, ces voix parmi des milliers d'autres vont tout faire pour quitter l'Erythrée pour rejoindre l'Europe, de l'autre côté de la mer, qu'ils voient comme la Terre Promise.

Le roman est organisé de façon à ce que nous ayons deux chapitres concernant Mila, puis un autre concernant l'un des jeunes Erythréens, j'ai énormément apprécié cette façon de faire. Ceci permet au lecteur de comparer les préoccupations et problèmes de chacun qui sont complètement différentes, sans les minimiser d'un côté ou de l'autre, il s'agit avant tout de vivre et survivre, et de trouver le bonheur.

Avec Refuges, Annelise Heurtier signe clairement un roman qui engage à la réflexion, qui expose et explique intelligemment, plutôt que de prendre parti. C'est beau, triste, et magistralement bien écrit ! Je suis tout simplement conquise.

Ce roman est disponible aux Editions Casterman depuis le 15 avril 2015.
Lien : http://milleetunepages.com/2..
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(...)
Mila, la jeune italienne et principale – en termes de pages à elle toute seule – héroïne de ce roman, partage également cette vision [idyllique de la Méditerranée], malgré le deuil et le déséquilibre familial. « de notre côté », elle tente de retrouver la paix, les sensations idylliques qu'évoque Lampedusa en temps normal grâce à ses paysages enchanteurs, sa situation isolée, sa tranquillité. C'est pour cela que sa famille a décidé d'y retourner : pour arriver à se défaire d'une manière ou d'une autre du passé, de le guérir, de réparer ce qui peut être réparé, et retrouver une vie normale constituée bien sûr de peines mais aussi de joies et de bonheur.

C'est un combat difficile, mais Mila et aidée dans sa quête par Paola, à peine plus âgée, qui se fait tour à tour amie, guide (en tant qu'habitante de l'île), et confidente. Mila est une adolescente qui est en fait plutôt bien dans sa peau, elle ne semble pas porter d'autre fardeau que le drame qui a touché sa famille, la laissant plus ou moins en lambeaux. Paola respire la bonne humeur et le bonheur mais n'en n'est pas moins naïve ou immature : elle est au contraire pleine de tact, à l'écoute, et très consciente de la réalité des situations parfois difficiles.
De l'autre côté Amir, Saafiya, Amanuel, Meron, Pietros, Meloata, Gebriel, Awat ne tentent pas seulement de faire face à leur passé et de le dépasser mais bel et bien de se construire un avenir, de se défaire du carcan que leur futur ne peut manquer d'être s'ils ne s'en échappent pas physiquement.

Pour eux la Méditerranée est la dernière étape avant la liberté, un endroit étranger et hostile, immense et incontrôlable : des centaines de kilomètres d'eau salée à traverser à tout prix, sachant que ce prix pourrait bien être leur propre vie.

Leurs histoires sont d'un poignant bien différent de celle de Mila, mais l'auteur a su très justement leur donner à tous une place sur et au large de Lampedusa, chacun une voix au chapitre : Mila n'a pas ni plus ni moins de légitimité qu'eux, pas plus ni moins de droit de prétendre à une vie et pas simplement à une existence, ce sont tous des jeunes gens qui expriment leur souffrance à leur manière, et qui essaient de s'en défaire par leurs moyens propres. le ton est juste, les mots choisis. le quotidien révoltant, violent et horrible (enlèvements, chantage, viols, torture) – des jeunes Erythréens m'a pris aux tripes et me fait penser que je ne conseillerais pas ce livre aux plus jeunes lecteurs mais plutôt à des adolescents. Certaines images, des détails, ne s'enlèveront pas de ma tête de sitôt, je ressors de ma lecture satisfaite d'en avoir appris sur les migrants fuyant l'Erythrée et sa région peu hospitalière vers nos rivages « plus prometteurs », leurs motivations, une certaine vision de leur histoire commune, mais également bouleversée par le fait que cette lecture ne s'inscrit malheureusement pas dans un univers fictif (façon de parler, c'est assez vite clair, hein.) Combien d'autres pays, d'autres drames socio-politiques nous échappent totalement ? Comment ne pas se sentir à la fois concernés et impuissants, compatissants envers ces êtres humains trop éloignés géographiquement, trop intriqués dans des régimes de terreur pour leur porter une aide réelle et utile ?
Faisant écho aux titres d'actualité quotidiennement servis de façon sordide et tronquée, l'Histoire se mêle ici d'une finesse tantôt douce tantôt cinglante qui fait mouche.
Lien : https://croiseedeschemins.wo..
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