Vous l'aimez comment votre polar ? Noir et bien serré, je suppose?
Comme moi^^
Cool, donc vous aimerez le très bon polar de
Philippe Hauret:
Je vous livre la recette de ce roman noir et serré...😎
Munissez-vous des ingrédients suivants :
1. Des hommes et femmes d'univers radicalement différents :
Un flic un peu désabusé : le lieutenant Franck Mattis,
Un jeune des cités, roi de la glande et des trafics à la petite semaine: Kader Arouf
Un riche héritier mystique et psychopathe Rayan Martel,
Son épouse, Rosine, une desperate housewive portée sur la bouteille et le sexe,
Mélissa, une jeune maghrébine belle comme le jour, cultivée, volontaire mais coincée dans sa cité et le fameux ascenseur social,
Dan, un flic adepte des méthodes du III Reich, partisan d'une justice expéditive et sans concession.
Une compagne en mal d'enfant, Carole.
N.B : Tous ces personnages ont un point commun : la frustration et la colère.
2. Vous les essorez bien en les sortant de leurs territoires respectifs : barre de cités pour les uns, quartiers résidentiels ultra-chic pour les autres et commissariats de police défraîchis.
3. Vous laissez
Philippe Hauret les malaxer et les triturer en les mettant en présence pour X mauvaises raisons afin de ramollir leur jugement.
4. Vous les laissez mijoter 208 pages et vous comptez les morts au final.
Vous l'avez compris, tous ces personnages vont tous se télescoper pour former ce roman noir et serré.
Grâce… ou à cause de Franck Mattis....
Ce dernier croit en la réinsertion des jeunes de quartier et va imposer un deal au riche Rayan Martel. Il lui demande d'embaucher Kader pour le mettre au travail; en échange, il fermera les yeux sur ses excès de vitesse avec sa Porsche Panamera.
L'Enfer est souvent pavé de bonnes intentions et à vouloir jouer les bons samaritains, Mattis va générer les conditions des drames à venir.
La nature humaine est ainsi faite et forcément l'un des personnages va vouloir profiter et duper l'autre ou les autres.
Lequel? A vous de lire pour le savoir mais forcément cela va virer au bain de sang avec des victimes qui n'auront rien vu venir.
Mon avis :
Philippe Hauret fait partie des quelques auteurs que j'affectionne tout particulièrement.
Cynique ou sensible, peu importe, la frontière entre les deux traits est souvent mince mais cette particularité lui permet de poser une vision lucide et implacable sur la nature humaine. Tous ses personnages sont soumis à la colère, à la tentation et au pêché.
Philippe Hauret a un très bon sens de l'observation et pointe les petites lâchetés et avanies de nos congénères, toutes classe sociales confondues. Il les retranspose à merveille et la mise en présence de personnages aussi antagonistes permet d'ouvrir la boîte de pandore donnant un vrai ressort au roman. L'intrigue se met alors naturellement en place grâce aux clivages entre tous.
Que Dieu me pardonne passe tout à la moulinette : les jugements sociaux, le mépris de classe, les vieilles haines refoulées qui resurgissent dès que le vernis craque, la récupération des politiques dans les ZUP…
Vous apprécierez comme moi je l'espère, le passage relatif au petit politicard qui déboule dans la cité pour faire les photos nécessaires pour sa campagne et qui s'engouffre dans sa berline climatisée, sitôt celles-ci faites.
Le roman est court et efficace : cela m'a permis de le lire d'une traite. Une inquiétude pointe malgré tout à l'issue de cette lecture:
A quand le prochain?😃
Bref, je vous conseille mille fois de découvrir cette plume noire dont je suis devenue fan.
Pour info,
Que Dieu me pardonne a reçu le Grand Prix du jury POLE ART- Plaine Haute.