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4,06

sur 1029 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le style éblouissant de Lilia Hassaine m'a enchanté tout au long de la lecture de « Soleil amer » qui romance quatre décennies d'une famille immigrée algérienne de 1959 à 1997.

Le soleil brule les paysages méditerranéens et chauffe les coeurs des femmes et des hommes de part et d'autre de la Méditerranée ; il allume les passions et réchauffe quelques haines cuites et recuites.

L'amertume noit les familles, souvent nombreuses, qui ont du mal à boucler les fins de mois, écartelées entre les tentations occidentales, réservées aux hommes, et les traditions orientales emprisonnant les femmes, parfois mariées dès quinze ans, à l'insu de leur plein gré, pour hériter d'une nationalité offerte en dot.

L'amertume est renforcée par les freins ou les refus d'intégration qui conduisent au repli identitaire dans des ghettos devenus au fil des ans l'apanage de réseaux de dealers. La drogue, le sida, le chômage font des ravages qui réveillent la nostalgie des temps anciens et du pays originel.

Les personnages forment une palette riche et colorée et la romancière offre les beaux rôles aux femmes et aux jeunes filles en lutte pour sortir des carcans culturels et sociaux imposés par l'entourage familial.

L'intrigue est réduite à l'observation de la vie quotidienne dans un paysage de banlieue et d'immeubles se fissurant progressivement avec quelques rappels de la guerre d'Algérie dont les événements d'octobre 1961 (page 38) présentés de façon manichéenne en reprenant les affabulations du GPRA. Précisons que pour la nuit du 17 octobre, Benjamin Stora cite trois nombres : 38 morts selon un rapport commandé par Jean-Pierre Chevènement, 48 selon celui demandé par Élisabeth Guigou et 98 selon les recherches menées par Linda Amiri et lui ; soit, en élargissant aux semaines précédentes et suivantes, environ 300 morts en 3 mois.

Cette réserve étant exprimée, ce titre mérite largement sa sélection dans plusieurs listes de rentrée et révèle une romancière aussi jeune que talentueuse ; une magnifique découverte.
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Lorsqu'au début des années soixante, Naja quitte l'Algérie avec ses trois filles pour rejoindre son mari Saïd, ouvrier dans l'industrie automobile, son arrivée en France est un désenchantement. Leurs conditions de vie rendent même problématique l'élargissement de la famille au quatrième enfant à naître…


De la création pleine d'espoir des cités HLM à leur ghettoïsation progressive, c'est l'histoire de l'intégration des populations algériennes en France qui défile dans ces pages, en une cascade de désillusions toute entière contenue dans l'oxymore du titre emprunté à Rimbaud. Arrivé le premier, Saïd, le père, est loin d'avoir pu préparer pour les siens une existence aussi séduisante qu'escompté. En mère-courage et au prix d'un impossible secret qui rejaillira, leur vie durant, sur toute la famille, Naja tâche d'élever au mieux ses enfants, sans parvenir à les préserver complètement. Tandis que les filles se voient, en plus, confrontées aux limitations de la condition féminine traditionnelle, tous se retrouvent coincés dans une dualité biculturelle qui les condamne à n'être aux yeux de tous, en France comme en Algérie, que d'éternels intrus sans complète appartenance. Et pendant que leur cité HLM, symbole de confort et de modernité dans les années soixante, se vide peu à peu de ses classes moyennes pour ne bientôt plus regrouper que les déshérités incapables de partir vivre ailleurs, préjugés et déterminisme social génèrent chez les jeunes générations de bien cruelles désillusions.


Construit autour de personnages multiples que l'on perçoit volontiers représentatifs, le récit pose sans candeur ni misérabilisme les questions de l'intégration et des obstacles à l'ascension sociale. La narration résonne particulièrement des difficultés propres aux femmes, qui, entre tradition et modernité, peinent encore davantage à trouver leur place. Pourtant, s'inscrivant bien avant la violence qui enferment les cités sur elles-mêmes aujourd'hui, elle évoque une situation alors encore ouverte sur l'espoir. Ainsi, chacune des trois filles de Saïd et Naja réussit un peu plus à s'émanciper que la précédente, l'accès à l'éducation ouvre de nouvelles portes, et le roman s'achève sur une réconciliation identitaire réussie pour un des fils et pour ses propres enfants.


Relativement courte, la narration épouse le rythme « stroboscopique » d'une succession commentée de flashes photographiques. Placé en observateur extérieur, le lecteur n'y trouvera ni grande émotion, ni intensité psychologique, mais une chronique efficace et pertinente, agréable à lire et pleine de beaux passages.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Un petit livre (180) pages pour aborder un sujet aussi délicat que l'immigration des algériens vers la France , pourrait passer pour un exercice irréalisable .L'art de Lilia Hassaine , qui écrit vraiment trés bien , est d'avoir su cerner son propos sans se disperser , sans partir vers des évènements qui , pour autant intéressants qu'ils auraient pu être , auraient dilué la force du propos .Nous allons d'abord faire la connaissance de Saïd qui , en 1959 , quitte l'Algérie pour venir travailler dans une usine automobile en France .
Deux petits extraits pris au tout début:" de manoeuvre , il était devenu ouvrier spécialisé ;il savait qu'il n'évoluerait plus .Sa seule fierté était d'avoir économisé assez d'argent pour faire venir sa famille ."
Sa femme , c'est Naja et ses trois enfants Maryam ,Sonia et Nour ....
" Naja imaginait que tout serait plus facile à Paris .L'horizon était dégagé .La vraie vie commençait . "
Et l'on va suivre cette arrivée et ces retrouvailles rapidement ponctuée par une grossesse et ....des difficultés supplémentaires .
Pour moi , c'est là que l'on pourra sans doute trouver un peu étrange le choix de l'auteur mais , on le respectera puisqu'il va être le moteur du roman , le facteur déclenchant de comportements représentatifs des difficultés d'intégration des filles de la famille . et ....
Je l'ai dit , c'est un plaisir de lecture une belle photographie de la France de cette époque , vue d'un regard partagé entre l'espoir et la réalité qui ont bien du mal à se rejoindre .
Un mélange de tendresse et de cruauté , un bon livre .
A trés bientôt .
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« Quitter un pays qu'elles aimaient, suivre un mari qui trimait, perdre leurs enfants un par un, se demander si elles avaient fait le bon choix, être mère c'était ça, accumuler les erreurs, apprendre sans cesse, échouer encore. Les héroïnes, c'était elles. »

Plus précisément, L'héroïne, c'est Naja, contrainte de quitter sa terre natale, l'Algérie, avec ses 3 filles pour rejoindre son mari Saïd, ouvrier spécialisé en France . de laisser ses racines et sa famille pour une vie de labeur, de déchirements entre son pays et sa terre d'accueil, et de compromissions. de subir le joug (et l'alcoolisme) d'un mari malheureux et de voir pendant 30 ans , sans jamais se plaindre, ses enfants s'éloigner, ployer sous le poids des traditions et chercher vainement leur place (étrangers en France, étrangers en Algérie) ; 30 ans pendant lesquels, en effet, Maryam, Sonia, Nour et Amir vont tenter de construire leur propre chemin.
Un texte court, une écriture élégante pour narrer l'exil, la difficile intégration, le racisme du quotidien, l'amitié (forte avec Michèle, Nora, les autres femmes de la cité), la vie dans tous ses états…
Une vie avec quelques joies, beaucoup d'amertume et un seul leitmotiv : se taire, se taire, se taire.
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Après « L'oeil du paon » que j'avais beaucoup aimé, c'est avec une légère crainte que j'ai ouvert « Soleil amer ». Lilia Hassaine allait-elle tenir le choc du "roman d'après", celui d'après la découverte d'une bien jolie plume et d'un coup de coeur ?
La réponse est totalement positive. Quelle joie de voir une jeune auteure confirmer son talent et je l'espère s'imposer comme un future grande !

J'ai aimé suivre Naja venue en France rejoindre son mari.
Depuis l'Algérie, elle s'était imaginé un pays idyllique où il serait facile d'être heureux.
Durant quatre décennies, sous suivons cette femme, épouse, mère face au malheur, mais fière, elle garde la tête haute envers et contre tout.
« Soleil amer » c'est aussi l'histoire de deux frères jumeaux que la vie a séparés.
C'est aussi l'histoire d'une communauté au sein d'un quartier, les voisins, les amis qui partent, le centre social qui ferme, la drogue qui s'invite chez les jeunes et les moins jeunes.
L'écriture est agréable. le personnage de Naja est magnifique par la force de l'amour qu'elle dégage.
« Soleil amer » est un profond et superbe roman sur l'amitié, la richesse des relations humaines, l'évolution des individus au fil de la vie ainsi que celle des rapports entre les êtres humains.
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Soleil amer, un superbe titre extrait d'un vers du Bateau ivre de Rimbaud.
« Les Aubes sont navrantes,
Toute lune est atroce et tout soleil amer. »
Bateau ivre comme celui que va prendre Naja, une jeune femme algérienne, qui va émigrer avec ses 3 filles sous le bras pour rejoindre en France son mari, Saïd, ouvrier chez Renault.
Nous allons suivre la vie de Naja sur quatre décennies des années 60, jusqu'en 1997.
Une fois arrivée dans son HLM de banlieue, Naja va voir ses rêves d'effriter peu à peu. Entre ses quatre murs, elle vit pour ses enfants, pour les autres, elle s'oublie, ne prend pas de temps pour elle, ne fait pas de pause.
Son horizon est limité à ses voisines et surtout sa belle-soeur, Eve, une « vraie » française, raffinée, qui n'a pas froid aux yeux, et qui l'intimide un peu… Saïd va conclure un pacte hors du commun avec son frère Kader et sa belle-soeur qui n'arrivent pas à avoir d'enfant. Lorsque Naja tombe à nouveau enceinte, Saïd décide que son frère adoptera l'enfant à naître. Naja n'osera pas dire non. Mais, le plan ne se déroulera pas exactement comme prévu, car le jour de l'accouchement, deux garçons seront au rendez-vous au lieu d'un seul …
Lilia Hassaine dépeint les liens familiaux, les joies et les peines de l'enfance, puis de l'adolescence, avec une grande justesse, les répercussions terribles du secret de la naissance des deux garçons, qui n'en finiront pas de diluer leur poison.
Au-delà du huis-clos familial, des tensions et incompréhensions entre les générations, l'autrice décrit l'évolution de la vie en banlieue, et la lente mais inexorable dégradation de leurs conditions de vie.
Lilia Hassaine a voulu traiter un peu trop de sujets à mon gout dans ce court roman, ce qui l'amène à les survoler. C'est foisonnant, beaucoup d'amorces d'histoires sont lancées, mais elles n'aboutissent pas sur une suite tangible, ce qui laisse une impression un peu brouillonne et d'inachevé. J'aurais aimé des pages supplémentaires pour suivre les personnages, certains sujets auraient mérités d'être plus amplement développés ; l'attirance incestueuse de Daniel pour Nour, la vie de Maryam après son mariage, la détresse d'Amir ….
Je regrette aussi une accumulation de clichés ; le mari violent, la femme soumise, la belle-soeur française sûre d'elle, la fille docile mariée de force au pays, la fille rebelle, la drogue… J'aurais aimé être un peu plus surprise, un peu plus bousculée.
J'ai quitté à regret Naja et ses enfants, un beau roman sur les liens familiaux pas complètement abouti d'une jeune auteure à suivre.
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« Les enfants d'émigrés portent en eux l'exil et l'ancrage. On les a perfusés à la mélancolie »

Trente ans de chronique familiale, tel un journal d'évènements, de petits bonheurs, drames et de secrets pour un couple d'algériens et leurs enfants, de la France du Général à l'aube du nouveau siècle. Des années faites d'efforts, de colère, de défaites et de bien peu de réussites pour la génération suivante.
La focale est placée sur le destin de deux jumeaux « pas tout à fait frères », illustrant deux trajectoires sociables offertes ou imposées à la naissance, en forme de loterie.

Un réel désenchantement pour cette immigration ouvrière qui s'engagea dans un choix de vie/travail pour raison économique, créant un melting-pot équilibré dans les premiers grands ensembles immobiliers des années 60, avant de devenir la problématique sociale des cités HLM.

Dans la suite des efforts consentis par les parents se stigmatise une désillusion pour la première génération issue de cette immigration, entre capacité à se valoriser ou difficultés à s'assimiler, avec le poids des contraintes, mentalités et traditions du pays d'origine.

Dans un livre assez court, Lilia Hassaine reste synthétique dans son talent de conteuse, les faits s'imposent sans dialogues, les personnages sont modelés, très crédibles et incarnés.
La part belle est faite aux femmes, soumises ou déterminées, tenaces, résolues, nourricières et si peu valorisées.
Un très beau roman sur l'identité, la double culture et la séparation, quelle qu'elle soit.

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Au moment où les débats sur l'immigration sont plus que d'actualité, quelle surprise de lire dans Soleil amer, que le président Valérie Giscard d'Estaing en 1977 a instauré une prime « d'aide au retour » de 10000 francs aux immigrés.

"10 000 francs, c'est ce à quoi avaient droit tous ces gens pour laisser derrière eux vingt ou trente ans de vie. Les citoyens étrangers non productifs, c'est à dire les chômeurs, après s'être usés pendant des années pour construire les routes, les canalisations et les immeubles, étaient invités à rentrer chez eux, sous entendu « vous n'êtes pas chez vous ». La valeur d'un homme c'est sa valeur de main d'oeuvre, sa valeur d'outil. C'est le message qu'on leur délivrait. Sans quoi ils devenaient des parasites sociaux."

Joli et brillant parcours que celui de Lilia Hassaine, révelée aux yeux du grand public grâce à l'émission Quotidien de Yann Barthès en 2017, avec une chronique qui décryptait des images d'actualité.

Lilia Hassaine a écrit, dans la foulée de cette belle fenêtre médiatique, deux romans dont le très acclamé "Soleil amer"

Soleil amer nous raconte l'histoire d'une famille algérienne venue vivre en France, de 1959 à 1987, une famille qui porte un lourd secret pendant trois générations. C'est aussi un portrait de femmes malmenées par la vie.

Porté par une écriture finement aiguisée et viscérale , ce roman nous éclaire sur une expérience d'immigration, avec ses lumières et ses désillusions
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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J'ai bien aimé ce roman qui nous apprend beaucoup de choses sur les familles Algériennes venues s'installer en France.
On suit ainsi Naja, son époux Saïd et leurs enfants sur une période allant de 1960 à 1980.
Saîd est venu le premier travailler en France dans les usines Renault, il fait venir ensuite sa famille. Au départ, ils n'ont qu'un petit logement puis ils trouvent un appartement neuf en HLM.
Le frère de Said, Kader, vit aussi à Paris, il a une meilleure situation financière car il dirige une usine de chocolats.
L'auteure aborde la place des filles dans les fratries et ce qu'on attend d'elles, à savoir pas d'instruction et un mariage rapidement. Elle évoque le côté patriarcal de cette éducation.
J'ai trouvé qu'elle montrait avec beaucoup de finesse la difficulté pour ces immigrés à s'intégrer car ils ne se sentaient pas complètement Français, ils essayaient d'être le plus discret possible. Mais, en même temps, ils devenaient aussi des étrangers en Algérie.
Un roman très intéressant.
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En Algérie, dans les années 1960 Saïd et Naja ont trois filles, Maryam, Sonia et Nour. Saïd appelé par les besoins de main d'oeuvre des trente glorieuses en France, rejoint son frère Kader qui l'avait précédé dans cette voie. Puis, Naja et leurs trois filles le rejoignent. Toutes les difficultés d'intégration sont évoquées et l'arrivée du petit quatrième-cinquième ne facilite pas les choses. Malgré le bon accueil de Kader et de sa femme Eve, le déracinement, la pression du travail, l'alcoolisme et un secret de famille rythment une narration d'une grande justesse et d'une grande sensibilité. L'auteure nous offre un roman court qui balaie néanmoins l'essentiel des thématiques de l'immigration au travers de cette famille qu'on suit sur une génération.
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