Toujours aussi violent et percutant dans ses idées, la proposition de Fujita dans Crescent Moon me séduit en cela, mais je suis plus critique en ce qui concerne les marqueurs de sa narration, que cette fois j'ai trouvés un peu trop lourds…
J'ai vraiment un goût tout particulier pour le sous-texte féministe victorien de cette nouvelle aventure signée par le maître du gothique japonais. J'adore suivre
Mary Shelley, fille de
Mary Wollstonecraft dans ses combats d'une autre époque pour la libération des femmes. L'auteur rend le compte dur et âpre, tout sauf évident et porté par une femme qui est elle-même en difficulté mais tente quand même de se battre. C'est inspirant.
Il y a aussi tout un sous-texte culturel et littéraire passionnant sur la création, les femmes dans la littérature et bien sûr l'invention et l'écriture de Frankenstein qui forcément me parle en amoureuse des textes que je suis. J'aime énormément ces passages dans le manga. Je trouve fascinant les parallèles fait entre la situation de Mary comme compagne de Shelley et l'écriture de son chef d'oeuvre. J'ai aussi aimé ici aller à la rencontre d'une figure emblématique comme Byron et voir un peu le microcosme culturel élitiste d'alors. L'auteur a vraiment su capturer l'essence de cette époque.
Cependant, il n'arrive pas à rester dans les frontières de l'acceptable si je puis dire. Il ne peut pas s'empêcher de tomber dans le volontairement virulent et tapageur, offrant des pages certes percutantes dans l'expression violente du combat comme l'oppression masculine et l'oppression de la société l'ayant acceptée et assimilée, mais qui manquent de finesse. le propos de l'auteur est assénée bien trop frontalement, sans la moindre nuance, faisant perdre de sa sombre poésie au contexte pourtant invoqué. Toute la première partie de ce tome en est la parfaite illustration. Mary se rend dans une école pour fille et l'auteur en profite pour dénoncer l'horreur vécue par les jeunes pensionnaires à cause d'une patronne qui a assimilé que les femmes devaient être soumises aux hommes. C'est très rustre, très bourrin. C'est d'autant plus dommage que ça tranche énormément avec la profondeur qu'il a en revanche pour écrire le personnage de Mary dans ses phases plus « d'autrice ».
Même si c'est sa marque de fabrique, j'ai ainsi eu beaucoup de mal avec la narration très chargé de l'auteur ici. J'ai eu envie de sauter de nombreuses bulles où ça palabre pour ne rien dire, juste pour le plaisir de s'écouter parler et en plus avec des propos qui semblent juste tirés d'une encyclopédie… La première partie bien qu'ayant l'intention de dénoncer un scandale de l'époque semble sortir de nulle part et a un côté anecdotique. La suite est plus puissante et efficace mais se perd encore parfois en théorie. Je trouve vraiment l'auteur bien plus efficace quand il se tait, parle moins et va à l'essentiel. Il a alors des fulgurances graphiques fascinantes, comme celles de la créature derrière
Mary Shelley ❤
Lecture un peu en-deça du tome 1, j'ai été déstabilisée par la narration trop dense et frontale de l'auteur alors que pourtant je sais qu'il fonctionne parfois ainsi, mais cela a manqué de finesse et profondeur pour moi. J'aime toujours autant ce contexte de lutte féministe portée par une autrice engagée, à la plume puissante qui la hante. Je suis moins fan de la mise en scène trop bourrine de Fujita. Ses quelques fulgurances graphiques gothiques ne pardonnent pas tout.
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