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EAN : 9782849412039
235 pages
François Bourin (09/11/2010)
4.4/5   5 notes
Résumé :
Le 3 janvier 2007, peu après minuit, dans la cellule 26 du bâtiment 2 de la maison d’arrêt de Rouen, Nicolas Cocaign agresse son codétenu.

Après l’avoir tué, il cuisine sur son réchaud ce qu’il croit être son coeur et lemange. Par cet acte, il devient le premier cannibale français connu de l’époque contemporaine. Acte d’un dément relevant de la psychiatrie ?

La justice en a décidé autrement. Condamné à trente ans de réclusion, « le can... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
IV - le meurtre et le dépeçage, vraisemblablement tous deux prémédités, en dépit des dires de Cocaign, de Thierry Baudry, sont la preuve du contraire. Si Nicolas Cocaign n'a pas sa place au coeur de notre société, il ne l'a pas non plus dans le monde carcéral : dans les deux univers, les anthropophages sont des déviants, atteint d'une perversion du goût et du comportement qui les rend extrêmement dangereux pour autrui.

Seule la sphère médicale est à même d'abriter des malades de ce type qui, obéissant à un désir insatiable de domination, de pouvoir, "chosifient" l'Autre à l'extrême, au point de ne plus voir en lui qu'une source de nourriture et/ou de plaisir. Avec Nicolas Cocaign, nous sommes aussi loin du cannibalisme purement "sexuel" d'un Jeffrey Dahmer que du cannibalisme dit "de survie", comme celui que furent obligés de pratiquer sur leurs co-passagers morts les malheureuses victimes du crash de l'avion uruguayen dans la Cordillère des Andes, en 1972.

Encore l'aspect sexuel de l'acte n'est-il pas ici à négliger complètement car, que les auteurs l'aient voulu ou non, le lecteur a parfois l'impression que, pour Cocaign, Baudry présentait quelque chose de "faible" et, partant, d'efféminé. Néanmoins, le cannibalisme "d'agression", celui qui place au-dessus de tout la quête de pouvoir, l'emporte en cette affaire.

Hanté et déséquilibré par une quête identitaire qu'on ne peut pas lui reprocher, Nicolas Cocaign a avoué songer depuis longtemps à absorber de la chair humaine. Est-il excessif de voir, en ce désir, la volonté de dominer enfin une situation sur laquelle il ne parvenait pas à avoir la moindre prise ? Rejeté par sa mère, par son père et, selon lui, rejeté par ses parents adoptifs et par tous ceux qui l'entouraient, puis, évidemment, par la société dans son ensemble, le violeur passe à l'acte et devient non seulement un assassin, chose somme toute assez banale à ses yeux, mais aussi un cannibale : en ingérant ce qu'il croit être le coeur de son co-détenu - et qui n'est en fait qu'un morceau de poumon - ne serait-ce pas tout ce qui, jusque là, s'est refusé à lui et l'a rejeté qu'il s'approprie, définitivement ?

Quand il retournera à la liberté - il a été condamné à trente années de prison - Nicolas Cocaign n'aura pas réglé son grave et douloureux problème. Bien au contraire, la sensation de rejet qui a empoisonné sa personnalité se sera accrue derrière les barreaux. Et que fera alors la société - que ferons-nous ?

Rien. Nous lui rendrons une liberté qui, pour lui, est une charge et, pour ceux qui le croiseront, se révèlera un péril aussi mortel que larvé. Nous ferons comme la DDAS, ce symbole inhumain de la bien-pensance : nous nous laverons les mains de ce qui pourra se produire. Dans l'état actuel de la science, il est certain que Cocaign n'est pas récupérable. On pourrait néanmoins l'astreindre à un traitement qui freinerait ses pulsions. Mais pour ce faire, il faudrait changer bien des lois et aussi - et surtout - une certaine façon "angélique" de voir les choses et qui demeure l'apanage de notre société depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Quel est le gouvernant qui osera ? Dans quels limbes se trouvent encore les associations et organisations qui feront bouger les choses ? ...

Alors, attendons. Attendons que Cocaign sorte de prison et qu'il tue et dépèce quelqu'un d'autre. Il en reprendra pour trente ans et, au bout de trente ans, avec un peu de chance, la Faucheuse sera passée le prendre ... Ah ! oui, Ponce Pilate savait comment y faire : dormez en paix, braves gens. ;o)
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III - A sa décharge, Nicolas fait de nombreux séjours dans des hôpitaux psychiatriques et ne fait pas faute de s'y proclamer dangereux - et même très dangereux - à qui veut l'entendre, insistant bien sur la pulsion sexuelle dont le déclenchement conditionne le déchaînement de sa violence. Au reste, quand on le soigne, il a toujours un traitement de cheval qui, s'il le poursuit, le transforme en semi-légume. Mais, comme de juste, les psys ne sont pas d'accord : certains le jugent, effectivement, très dangereux ; d'autres haussent les épaules et disent qu'il n'a pratiquement rien et que, si ses parents avaient été plus fermes avec lui ... Une psy ira jusqu'à déclarer aux malheureux Cocaign qu'ils n'ont qu'à se débrouiller pour que la DDAS reprenne Nicolas sous son aile. Où la psy en question a-t-elle pris l'idée d'une DDAS veillant, telle la Vierge Marie sur son illustre bambin, sur les enfants jadis remis à sa garde et devenus majeurs, on ne le saura jamais. :

Quand Nicolas, brandissant la 22 long rifle que lui avait offerte ses parents pour un anniversaire, chasse ceux-ci de leur petit pavillon et s'y installe avec sa compagne et les animaux qu'il affectionne (serpents et mygales), les voisins n'en croient pas leurs yeux. Se sentant probablement coupables - mais de quoi sinon d'avoir été, parfois, c'est exact, trop faibles avec lui - les Cocaign ne se plaignent pas à la police et vont vivre à l'hôtel et, pour que leur fils puisse s'acheter à manger, ils passent régulièrement déposer de l'argent dans leur ancienne boîte aux lettres. Les voisins, qui connaissent Nicolas depuis qu'il avait trois ou quatre ans, ne bougent pas plus, et pourtant, Dieu sait si le fils Cocaign, sous l'effet de l'alcool, de l'herbe, des médicaments et de ses problèmes personnels, fait un boucan du Diable dans tout le quartier !

Il faut dire que la DDAS, sollicitée, fait son Ponce Pilate et que les gendarmes ne peuvent pas grand chose tant qu'il ne s'est pas produit un meurtre ou au moins une tentative en ce sens. Quant au système hospitalier, Nicolas Cocaign étant majeur et non placé sous tutelle, il est impuissant. D'ailleurs, il faudrait déjà que les différents psys ayant connaissance du cas Cocaign s'entendissent sur lui avant de songer à agir ...

Il faudra attendre que Cocaign viole une jeune marginale pour que, enfin, le lourd appareil judiciaire se mette en branle. le résultat, Nicolas se retrouve en prison, à Rouen, où son physique imposant et ses tatouages macabres lui attirent le respect de détenus qui ignorent qu'il est tombé en tant que "pointeur."

Mais la prison - sans suivi médical - était-elle la solution adéquate ? (A suivre ...)
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II - Cette source, donc, quelle est-elle ? On est tenté d'écrire qu'il s'agit du parcours habituel : un enfant né sous X et volontairement abandonné par une mère dont l'équilibre mental semble avoir été assez fragile, le passage dans une famille d'accueil où, par exception, le petit se retrouve choyé et à laquelle la DDAS s'empresse de l'arracher pour le faire adopter par un couple de quadragénaires bien intentionnés certes mais qui commettent déjà l'erreur de remplacer le prénom de "Didier", seul "don" fait par la mère à l'enfant qu'elle s'apprêtait à abandonner, pour celui de "Nicolas." Partisans de la vérité - qui les blâmera ? - les Cocaign révèlent assez vite à celui qui est devenu leur fils l'histoire qui fut la sienne avant d'arriver chez eux. L'enfant, comme on peut s'y attendre, est choqué, peiné mais, comme il le fait remarquer à l'époque, "l'important, c'est qu'on s'aime."

Oui, Nicolas est aimé, choyé même (voire un peu trop), et ceci bien que ses parents adoptifs soient peu démonstratifs. Dès qu'il manifeste ses premiers troubles de la personnalité, immédiatement étiquetés comme comportement hyperactif, le couple Cocaign entreprend le terrible parcours du combattant que connaissent tant de parents avec des enfants qui, pour leur part, leur sont bel et bien alliés par le sang : psychologue scolaire, psychologue indépendant, réunions diverses, etc, etc ... Comme ils sont assez aisés, ils tentent à peu près tout pour "aider" Nicolas : stages dans des centres équestres pour s'occuper des chevaux - que l'enfant, puis l'adolescent, semble adorer - etc, etc ...

Mais rien n'y fait. Lentement, mais sûrement, Nicolas se fraie son chemin d'abord vers la marginalité, ensuite vers la petite délinquance. Il s'abrutit à l'herbe, évite soigneusement la coke - une drogue qui ne favorise ni les longues journées à ne rien faire, ni les interminables palabres creux - ignore l'héroïne, s'abandonne à des pulsions sexuelles qui, depuis son adolescence, relèvent visiblement de l'excès, fantasme sur le sado-masochisme, puis le met en pratique avec la mère de sa fille, se passionne pour le satanisme, veut se faire tatouer les cornes de Satan sur la tête (!!) - le tatoueur ayant refusé, il opte pour un crâne - bref, il file plein vent à la dérive. (A suivre ...)
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Ce livre est un document riche et complet basé sur une enquête de trois ans réalisée par les auteurs, Nicolas Deliez et Julien Mignot tout deux journalistes d'investigation. Pièces du dossier, entretiens avec la famille et l'entourage de Nicolas Cocaign et expertises s'imbriquent afin de nous narrer la vie de Nicolas Cocaign et tenter d'expliquer comme une telle spirale de violence a pu avoir lieu sans que personne ne soit en mesure d'enrayer la machine.

Dans la nuit du 3 janvier 2007 à la maison d'arrêt de Rouen Nicolas Cocaign a violemment agressé et tué un des ses deux codétenus. Il va alors inciser le flan de la victime agonisante, extraire de son corps un morceau de muscle intercostal (en pensant que cela est le coeur), le cuisiner et le manger. Par cet acte d'une incroyable violence Nicolas Cocaign devient « le cannibale », est-il fou ? Comment a-t-il pu en arriver à ce geste ?

La justice l'a jugé pour ce crime et condamné à trente ans de réclusion. S'il a été jugé c'est parcequ'un collège d'expert l'a déclaré apte à l'être pourtant à la lecture du livre on ne peu que le penser fou tout du moins cela nous rassure de ce dire que cet être ne peu pas être un être « normal ».

Son destin est une succession de violence, d'incompréhension, d'échec et parfois de tentatives d'appel au secours face à une justice et une administration autiste.

A la lecture de ce livre j'ai ressenti une immense tristesse pour les parents de Nicolas, leur acte d'amour d'adopter un enfant à été en fait le début d'un long chemin de croix fait de violence, de haine et de trahison. Nicolas est un enfant dur, difficilement gérable. le couple se retrouve très rapidement complètement démuni face à l'administration qui une fois l'adoption conclue répond aux abonnés absents puis plus tard face à la justice qui ne peut intervenir que sur des faits et non des intentions mais aussi face à aux services médicaux démunis :

(Dernière rencontre de Geneviève Cocaign avec le pédiatre qui suivait Nicolas depuis l'adoption)

- Votre fils ne change pas, il n'y a rien à faire, il n'y a aucune évolution positive.

- Je sais, pourtant nous faisons tout ce que nous pouvons…

- Nicolas ne s'arrangera jamais, ses traumatismes sont trop importants. Vous savez, à votre place, je le remettrais là où vous l'avez pris.

Nicolas est en guerre permanente avec lui-même mais il a besoin de se trouver des coupables. S'il a été abandonné c'est à cause de sa famille adoptive ; il est rejeté par les femmes, toutes des salopes ;… Il se positionne perpétuellement dans le rôle de la victime, à tel point qu'il en devient très rapidement antipathique. Ce petit garçon, victime d'un abandon, incapable d'aimer ses parents adoptif car ils ne correspondent pas à « sa » famille idéale (trop âgé, son père ne lui semble pas assez autoritaire et est trop effacé, sa mère ne lui montre pas assez ses sentiments) devient très vite un bourreau. Il ne veut qu'une chose, être différent, faire peur, inspirer la méfiance et la crainte. Il lui est impossible de s'intégrer dans la société.

Son attitude (pratique d'un sadomasochisme extrême, violence, alcoolisme, menace de mort, goût pour les armes, vie marginale en élevant des reptiles, des araignées, des chiens d'attaque,…) ses alertes auprès de la gendarmerie et des services psychiatrique, les démarches faites par ses parents, sa tantes, son ex-compagne auraient du être des signaux d'alarmes. Malheureusement rien n'a pu éviter le meurtre, la souffrance et la douleur de ses parents et de son ex-compagne.

Ce document est poignant et révoltant à la fois car à la lecture on se dit que tout cela aurait pu être évité. Ce livre invite à réfléchir sur la justice face à la folie, sur la réinsertion, et sur le traitement des psychotiques dans notre société.
Lien : http://mespetitesidees.wordp..
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I - Merci aux Editions François Bourin qui, dans le cadre d'un partenariat avec Blog-O-Book, nous a donné l'occasion de lire cet ouvrage.

Fort bien documenté et donnant la parole aux proches de son triste héros, ce livre co-rédigé (dans un style détestable) par deux journalistes, Nicolas Deliez et Julien Mignot, a le mérite de refuser tout sensationnalisme - ce qui est rare, de nos jours - afin de mieux mettre en évidence les dysfonctionnements non pas de notre système judiciaire ou de notre système hospitalier mais bel et bien de notre société : car c'est d'elle qui sont tous deux tributaires et accabler l'un pour épargner l'autre, ou vice versa, n'a aucun sens si, en parallèle, on mène, par rapport à notre société tout entière, dominée par la bien-pensance et le politiquement correct, la sotte politique de l'autruche.

A l'origine du livre, le meurtre de Thierry Baudry, l'un des co-détenus de Nicolas Cocaign dans leur cellule 26 du Bâtiment 2, à la Maison d'Arrêt de Rouen, le 3 janvier 2007. Après avoir roué de coups, puis poignardé à maintes reprises le malheureux Baudry, Cocaign l'achève en l'étouffant avec deux sacs plastique. Puis, avec une lame de rasoir, il lui incise le thorax, en arrache ce qu'il croit être le coeur de sa victime et part tranquillement cuisiner celui-ci, dans la petite poêle commune, avec de l'ail et des oignons. le tout sous les yeux exorbités de son second co-détenu, David Lagrue, qui, bien qu'ayant établi une excellente relation avec Cocaign, n'a qu'une seule peur : voir ce dernier se retourner contre lui. C'est pour cette raison, expliquera-t-il le lendemain aux surveillants et à la police, qu'il n'a pas appelé le gardien.

Après avoir établi les faits, sans trop patauger dans le gore, Deliez et Mignot entreprennent de remonter à la source de tout cela. Car enfin, à moins d'avoir été élevé dans une culture qui la pratique - et encore n'en use-t-elle que pour des cérémonies rituelles et dans des cadres très précis et sévèrement hiérarchisés - l'être humain, fût-il, comme l'est Cocaign, un délinquant violent et un violeur, ne pratique que très rarement l'anthropophagie. (A suivre ...)
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
[...] ... Le petit pavillon en briques aux volets bleus que possèdent [les Cocaign] au 23, rue Marcel-Sembat, un quartier tranquille du Petit-Quevilly, reprend vie. Geneviève a pris une disponibilité pour s'occuper à temps plein du petit. Il fait très froid en ce mois de février 1975, il y a de la neige. Le petit Didier passe ses premiers jours à jouer dans le jardin. Il est habillé en rouge de la tête aux pieds. Geneviève et François Cocaign sont aux anges. Ils font des photos avec lui. Les moments de joie simple que l'on partage avec son enfant, voilà qu'ils peuvent enfin les goûter après les avoir si longtemps espérés. Mais très vite les premiers ennuis arrivent. Didier ne comprend pas vraiment sa situation. Pour ne rien arranger, les Cocaign décident de rebaptiser Didier en Nicolas pour en faire définitivement leur fils. Dans les premiers temps, cela perturbe beaucoup l'enfant. Il ne répond jamais lorsqu'on l'appelle et n'utilise jamais son nouveau prénom. Il met du temps à s'habituer. L'enfant est très mignon mais aussi très remuant pour des parents qui ont dépassé la quarantaine. Il ne parle presque pas et n'écoute rien. Il n'en fait sans cesse qu'à sa tête. L'inspectrice de la DDASS qui accompagne la procédure d'adoption le conseille de le mettre le plus tôt possible à la maternelle. "Il faut le sociabiliser, ça le calmera", dit-elle aux nouveaux parents lors d'une entrevue. Le 22 septembre 1975, le TGI de Rouen prononce son adoption plénière. L'enfant est enregistré définitivement en tant que Nicolas Cocaign.

Il rentre à l'école du quartier quelques jours plus tard. Les maîtresses alertent très vite les parents : l'enfant est particulièrement turbulent. Mais rien d'anormal non plus pour un petit garçon de quatre ans. Les deux années de maternelle se passent tant bien que mal. A six ans, Nicolas rejoint l'école primaire Saint-Clément, dans le quartier Saint-Sever de Rouen, à proximité du lieu de travail de Geneviève. Parce qu'ils sont inquiets pour le comportement de Nicolas, les parents entament un suivi par une psychologue du centre de Rouen, Marité Bloomfield. L'enfant y va une fois par semaine, notamment pour ses problèmes d'expression. Avec elle, il se sent en confiance et se livre assez facilement. La plupart des voisins de la rue Marcel-Sembat sont des personnes âgées. Il n'y a aucune famille avec des enfants de son âge pour trouver des camarades de jeux. Très vite, ils se sent très seul avec ses parents qui lui paraissent trop vieux. Il lui manque les câlins, les gestes affectueux. Sa mère ne le prend jamais sur ses genoux. Bien sûr, il ne manque de rien au point de vue matériel mais il s'ennuie à mourir dans un quartier où les rues de petits pavillons se succèdent les unes aux autres sans qu'il y ait d'espaces verts ou d'endroits avec des jeux pour enfants. Il y a les réunions de famille du dimanche où il retrouve ses cousins. Mais dans la famille Cocaign, il n'y a quasiment que des femmes alors que Nicolas est toujours en recherche de la figure paternelle. François Cocaign ne lui renvoie pas l'image qu'il se fait d'un père. Il ne comprend pas que ce soit sa mère adoptive qui dirige tout. Il trouve son père trop faible, voire même effacé. Il se cherche. Ce qui n'empêche pas l'assistante sociale qui suit toujours la procédure d'adoption de mentionner dans un rapport : "Je pense que cet enfant a trouvé une vraie famille, qu'il s'est bien intégré." ... [...]
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[...] ... Dans son rapport, le médecin [pénitentiaire] précise qu'il voit dans [le cas de Cocaign] plus "un danger criminologique que psychiatrique," surtout au cas où il se retrouverait seul à sa sortie. Il décrit une personnalité "borderline", avec des troubles très profonds qui sont stabilisés par les médicaments. Il repère chez lui une banalisation de la violence et un manque de préparation à la sortie. En clair, le médecin n'est pas favorable à sa remise en liberté. Dès le lendemain, il est interné à l'hôpital du Rouvray. Il fait l'objet d'un placement en hospitalisation d'office sur pression des services de la DDASS et de la préfecture. Quelques jours plus tôt en effet, Geneviève Cocaign avait adressé une lettre au préfet dans laquelle elle expliquait longuement avoir peur de son fils ; qu'il avait de graves problèmes psychiatriques et qu'elle pensait qu'il était schizophrène et qu'il fallait absolument empêcher sa remise en liberté en l'hospitalisant d'office. Cette fois-ci, l'alerte de Geneviève Cocaign a porté ses fruits. De leur côté, les services sociaux pénitentiaires ont également écrit un courrier au procureur pour l'alerter de leurs craintes de laisser sortir un détenu qui évoque sans arrêt des "projets de viols, tortures et barbarie" et qui menace de "passer à l'acte pour être pris au sérieux." Le préfet ordonne alors son hospitalisation d'office durant deux mois. Nicolas Cocaign fait un nouveau séjour psychiatrique à l'hôpital du Rouvray, dans le service du professeur Isabelle Lefebvre. A l'issue de ces huit semaines d'hospitalisation, elle estime qu'il peut ressortir. Elle rencontre même les parents adoptifs pour leur dire ce qu'elle pense du cas de leur fils. Dans son bureau, elle ne prend aucun gant pour leur livrer son diagnostic : "Pour moi, votre fils n'est pas schizophrène ! Ou alors peut-être seulement à la hauteur de 5%. C'est ridiculement bas. Si on devait hospitaliser tous les gens qui ont 5% de schizophrénie, pensez donc, il faudrait ouvrir des hôpitaux supplémentaires. Je pense plutôt que ses troubles de la personnalité sont dus à son éducation. Vous avez eu le tort de l'adopter car vous étiez trop âgés. Il manque de repères normaux, d'ailleurs, il n'arrête pas de parler de sa cousine Catherine comme celle qui aurait dû être sa mère."

François et Geneviève Cocaign sont des gens raisonnables : ils ont écouté le médecin. Ils ne sont pas du genre à contredire un spécialiste même s'ils sont choqués par son discours. Ils auraient préféré ne rien entendre. En tous cas, cela va à l'encontre de l'avis précédent. Les parents, sachant que leur fils va ressortir, décident pour la première fois de renoncer à lui venir en aide. Ils ont vraiment peur de lui et craignent pour leurs jours. Geneviève Cocaign voudrait encore tenir son rôle de mère mais, cette fois-ci, peut-être pour la première fois d'ailleurs, François Cocaign estime que la situation est trop critique. Il prend la situation en main et convainc sa femme de renoncer à lui venir en l'aide et de se cacher. ... [...]
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