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Boris Czerny (Autre)Dan Ben-Amos (Autre)Lubomir Hasejko (Autre)
EAN : 9782847432077
386 pages
Editions Pétra (15/06/2018)
3.5/5   1 notes
Résumé :
Les textes contenus dans cet ouvrage ne sont pas ordinaires. Certes, il y est question de bergers et de princesses, de héros vaillants au coeur généreux et de magiciens aux pouvoirs surnaturels. Mais les montagnes des Carpates qui servent de cadre naturel aux exploits de Dovbouch, le bandit houtsoule, là où le fondateur du mouvement hassidique, le Baal Shem tov, vient chercher la communion avec Dieu, sont peu ou mal connues et apparaissent nimbées d'un mystère favor... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Un livre assez etonnant, qui, en creusant les contes et chants populaires des houtsoules (ruthenes du sud de l'Ukraine) et des juifs de la region, montre la complexité de leurs relations.

Dans les récits et légendes ukrainiens, les Juifs occupent généralement la fonction d'intermédiaires économiques entre les paysans ruthènes et les seigneurs polonais.
Les Juifs présents dans les récits que presente l'auteur correspondent aux clichés habituels véhiculés par le folklore populaire et la doxa « antisémite ». Ils sont cupides et fourbes. Mais souvent aussi, ils sont considérés par les villageois comme des hommes et des femmes comme les autres, des voisins un peu stupides et naïfs dont il est plaisant de se moquer plus ou moins grossièrement.

Si l'on trouve des Juifs dans des récits ukrainiens, des personnages ukrainiens sont également présents dans des contes et légendes juives.
Boris Czerny confronte surtout les traditions populaires sur deux heros mythiques, Dovbouch (ou Dobouch) le houtsoule, un chef de bandits, oprychky, qui lutte contre les polonais, le clerge catholique et les juifs, et est considere parmi les premiers nationalistes ukrainiens, et le Ba'al Shem Tov, le fondateur du hassidisme juif, qui ont vecu au meme moment dans les memes parages.

Dans les contes ukrainiens rapportes, les juifs servent de repoussoir et de revelateurs de l'identite nouvelle. Mais au dela des cliches emerge un monde juif peu concerne par la religion et dont le mode ce vie est etroitement lie a celui des houtsoules.
En general les juifs essaient de rouler les houtsoules et finissent toujours par prendre des coups. Mais dans les contes avec Dovbouch c'est souvent different. Une fois, Dovbouch provoque un juif tres fort et le juif n'accepte de se battre que si Dovbouch promet de ne pas le tuer. C'est le juif qui gagne le combat et Dovbouch tient sa promesse. Une autre fois il se contente de faire peur a un juif et ne lui prend rien. Il aime plutot jouer des mauvais tours aux juifs, et ceux ci lui font meme des dons. D'habitude il se contente de leur prendre les registres ou sont notes les dettes des paysans. Pour les faire disparaitre. Une sorte de Robin Hood ukrainien.

Ce qui m'a le plus surpris (et interesse) est la place qu'occupent les oprychky, et Dovbouch a leur tete, dans les contes juifs. Une place qui change avec le temps, d'apres celui-ci, qui date du debut du 20e siecle (conte ou temoignage?): “Autrefois meme pour venir a la ville un Houtsoule etait arme comme pour aller a la guerre. Un fusil en bandouliere, trois pistolets a la ceinture, quatre poignards, une hache dans une main et les poudrieres bien remplies. Quand il entrait dans une boutique il se servait, il prenait tout ce qu'il voulait, et s'il t'attrapait, c'en etait fini de toi, il te saisissait par la barbe, crachait dedans et te secouait, et si tu prononcais un seul mot tu etais un homme mort. Et quand c'etait jour de foire, on prenait tous la poudre d'escampette, car le climat devenait etouffant, pire que la mort. Et dire que de nos jours on peut voir des Houtsoules sans meme un baton pour se defendre! Et si l'un d'entre eux entre dans une boutique, on le traite de cochon, on le prend par les epaules et marche en avant, direction la porte! Ha, aujourd'hui ce n'est plus comme avant!”

Mais revenons a l'epoque de Dovbouch et du Ba'al Shem Tov, que les contes rattachent, meme s'il n'est pas du tout sur qu'ils se soient rencontres dans la realite. Que penser de celui-ci? “Un jour, alors que le Baal Shem Tov était perdu dans ses pensees et allait tomber au fond d'un precipice, Dovbouch et ses hommes virent les montagnes se rapprocher et le fosse se combler devant leurs yeux. Fascines par ce spectacle, les brigands demanderent au Baal Shem Tov de prier pour eux et de mettre sa magie à leur disposition. le saint homme accepta a condition qu'ils arretent de persecuter les Juifs et qu'ils assurent leur securite. Selon un disciple du Baal Shem Tov, Menahem Nahoum Tverski (1730-1790. Dandine), le rebbe dit aux oprychki : « Vous serez les feuilles de la vigne et nous serons les raisins que ces feuilles protègent »".
Quelle idylle! Comme quoi les rapports entre houtsoules et juifs ukrainiens ne seraient pas forcement, ou pas toujours, conflictifs. Ecoutez ce poeme du poete yiddish Naftoly Gross:
“Le chant du Ba'al Shem Tov et de Dobouch.”
Chemins et sentiers ont disparu sous la glace,
Monts et vallons sont couverts de neige,
Quand le Ba'al Shem Tov et Dobouch se deplacent,
Devant eux s'ouvrent les cavernes, les portes des maisons et des auberges.
[...]
Devant le Ba'al Shem Tov et Dobouch
Tombent les frontieres et les barrieres,
Et tombent les hommes dans la devotion et la priere,
L'orgueuil apaise se soumet et s'incline,
Tandis que l'amour vers eux s'etire,
etc. etc.

Beacoup d'autres auteurs et compilateurs juifs rapprochent ces deux hommes, le bandit heros national et le rabbin thaumaturge. Que ce soit Dov Ber Horowitz dans un conte intitule “Dobouch” (dans ses Contes miraculeux, Varsovie 1923, en yiddish), ou il le fait rencontrer le celebre rabbin; ou le folkloriste Dan Ben-Amos, dans un recueil de legendes hassidiques (In praise of the Ba'al Shem Tov 1970), qui en rapporte une ou les oprychky montrent au Besht (le diminutif de Ba'al Shem Tov) un raccourci vers la Terre Sainte, et une autre titree: Comment le Ba'al Shem Tov et Dobouch le bandit se rendirent a Jerusalem.

Meme des auteurs plus modernes, ecrivant en hebreu, brodent sur les rapports de Dovbouch avec le Besht, que ce soit Meir Bossak, dans son livre “Le Besht et Dobouch le brigand” (Tel Aviv 1960), ou Shimshon Meltzer, avec “Dovbouch et le Ba'al Shem Tov” dans son “Livre des poesies et des ballades" (Tel Aviv 1976). Meme le grand Agnon, qui recut le Nobel de littérature, inclut un conte sur Dovbouch dans son roman “Au coeur des mers”.
Comme quoi des juifs, sans oublier les pogromes, surent aussi mettre l'accent sur la vie en commun et sur l'entente dans les periodes de calme, en fait les plus longues periodes. L'histoire ne peut etre peinte seulement en noir et blanc.

J'ai donc apprecie les tres nombreuses legendes, truculentes et sympathiques, que ce livre rapporte, et aussi l'etude de l'auteur, tres bien equilibree. Un regard sensible et normalisant sur l'histoire.
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