Roman qui a fait parler de lui cette année,
Crépuscule vous plonge au sein d'un Empire imaginaire troublé par un meurtre odieux quand le curé de la ville est retrouvé assassiné par des enfants ; deux policiers, Nourio et son adjoint Baraj mènent
l'enquête sur ce sujet terriblement sensible, sous le regard inquiet d'une communauté musulmane en minorité dans la région. Comment se fabrique une contre-vérité à partir d'un fait divers ?
Fable sur les travers des sociétés humaines et satyre de notre époque, le propos aurait été intéressant s'il n'était pas traité de façon aussi caricaturale et simpliste : l'Eglise a toujours bon dos quand il s'agit de dénoncer la bêtise et la veulerie qui caractérise notre société occidentale pourtant si déchristianisée. Il faut voir l'Evêque - vieux, ridicule, azheilmérien - et son vicaire illuminé hurlant à la pénitence, tel Philippulus dans l'Etoile Mystérieuse d'
Hergé. Mais l'auteur ne réserve pas l'exclusivité de ce ridicule à ce nouveau bouc émissaire contemporain, il élargit le propos à toute forme de religion quand il lâche que "les lieux de culte devenaient des lieux de spectacle". En effet, il s'agit pour ici d'une comédie humaine. L'homme sans transcendance n'est n'est pas très joli à voir. Il n'est que
l'ombre de lui-même, les meilleurs étant devenus des chiens au terme de cette parabole.
Livre d'atmosphère situé dans cette contrée reculée que l'on devine arriérée telle l'Albanie d'
Avril Brisé d'
Ismael Kadaré, il plonge le lecteur dans une noirceur trop systématique (les vieilles sont édentées, on ne boit pas mais on lape, la lumière est chiche, les hommes ont des allures de lémuriens ou des nez de poivrot, le héros policier est en fait un obsédé sexuel tourmenté, etc). Trop souvent il use de ficelles qui pourront éventuellement faire penser au lecteur de droite
Crépuscule est une suite de tableaux à l'ambiance macabre que j'ai lu, comme l'écrit son auteur, "jusqu'à la nausée, jusqu'à la stupeur, jusqu'à l'abrutissement", porté malgré tout par un style puissant et évocateur. L'auteur nous questionne ici et nous conduit au bord de cette falaise qui craquelle, dont l'érosion intérieure menace d'affaissement subit. Notre société sans doute.
Thomas Sandorf
Merci à Netgalley et à Stock pour cette lecture
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