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Citations sur L'épaisseur d'un cheveu (72)

Leur bibliothèque était imposante, elle mangeait une bonne partie des murs de leurs quarante-sept mètres carrés, Étienne avait toujours chiné beaucoup de livres d'occasion, doublés d'un fonds déjà imposant qu'il avait hérité de sa mère Dahlia en même temps que l'appartement, Vive y avait ajouté sa collection de livres d'art et de photographie.

Étienne avait alors développé la manie de classer sa bibliothèque par ordre alphabétique des titres des ouvrages. Vive soutenait que personne ne faisait cela, que ça n'avait aucun sens. Les ouvrages d'un même auteur se trouvaient dispersés aux quatre vents, les gens, les genres et les siècles se mélangeaient, pour elle un classement devait apporter de l'aide, de la clarté, une lecture d'ensemble.

Mais Etienne aimait cette lecture poétique où les Confessions de Rousseau se trouvaient accolées aux Confessions d'Augustin d'Hippone, où L'Œil le plus bleu de Toni Morrison rencontrait L'Œil qui écoute de Paul Claudel. Un réseau invraisemblable d'intertextualité jaillissait pour Étienne de ce méticuleux classement, sa bibliothèque ne ressemblerait jamais à aucune autre, elle était vivante comme un animal rebelle.

Comment veux-tu retrouver un bouquin là-dedans ? se plaignait Vive. Critique qu'il n'entendait pas, puisqu'elle n'avait qu'à chercher à la bonne lettre du titre. Mais où fais-tu commencer le titre ? Au premier nom, ou au déterminant ? renchérissait-elle. Au nom, à l'évidence, ou à l'adjectif, mais il y avait bien sûr des cas particuliers, c'était la beauté de son rangement vivant et organique. Et si je cherche un livre, mettons, de John Le Carré, dont je ne me souviens plus du titre, qu'est-ce que je fais ? demandait-elle. Tu n'as qu'à chercher au mot « Espion », il y a des chances pour que tu tombes dessus, lui répondait-il en riant ; car au début, tout cela, ça les faisait rire ensemble.
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Qu'est-ce que l'on comprend de l'amour, si l'on n'en connaît pas la durée ?

Si l'on N'ENDURE pas ?!
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C'est vrai qu'en rejoignant sa femme à l’exposition de Sigmar Polke, Étienne ne l'avait pas remarquée, la nouvelle coiffure de Vive.

Il n'avait rien vu de ce changement qui lui conférait un air de défi.
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Ils venaient tout juste de sortir du vernissage, qui s'était révélé une fournaise doublée d'une ruche, et ils s'évertuaient à trouver un bar où s'échouer pour décortiquer l'événement et manger une assiette, comme avait lancé Vincent, l'ami de Vive qui s était joint à eux ce soir-là, tout plein de sa gaieté mondaine. On ne se mangerait pas une petite assiette sur le pouce ?

Étienne avait eu envie de le moucher : II y a peu de chances que tu parviennes à manger une assiette, à l'inverse de son contenu. Mais il s'était abstenu, parce qu'il ne pensait pas que Vincent aurait ri à sa boutade. Vincent lui aurait peut-être répondu avec un rictus de bouche, pince et méditatif : Ben, Étienne, c'est comme boire un verre, non ?

Oui, c'était comme boire un verre, c'était une figure de style ; une métonymie, très exactement ; et Vincent n'aurait pas compris que l'agacement d'Ëtienne le poussait à faire une remarque qu'il espérait caustique, et qui peut-être ne l'était pas assez, en tout cas, dont son interlocuteur ne partageait pas la même communauté de signes.
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Son mari explosa.
- BIEN SÛR que je réécris les textes, ce sont des navets illisibles sans intérêt ! J'ai une éthique professionnelle, moi ! Heureusement que je nettoie ce caniveau, qu'est-ce qu'ils feraient, sinon ? Ils publieraient des torchons ! J'ai une éthique professionnelle, j'ai une déontologie !
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Souhaiteraient-ils un appareil de correction automatique pour le remplacer, une connectique sans états d'âme ni goût de l'excellence ? Ils pourraient tout aussi bien créer une machine qui scannerait les textes comme des codes-barres, l'algorithme lisserait le bazar pour le transformer en un insipide brouet de mots creux. Voire, concevoir directement un logiciel qui écrirait les textes ! Ça ne devrait pas être si ardu quand on voyait le niveau actuel !

On y était presque avec leur ChatGPT qui faisait trembler tout le monde. Comme s'il fallait craindre qu'une machine puisse être Kafka ou Céline ! Insensé ! Ha ha ha. Ça allait faire un grand tri. Et les journalistes de prononcer à l'anglaise Tchate Gi Pi Ti. Pour ne pas prononcer GPT ! Chatte j'ai pété !

Oui, ça pétait des textes bien foireux et on se bouchait le nez avec des airs de duchesse qui s'excuse à peine de l'odeur, et Katia Rollman de lui dire qu'il fallait cesser d'utiliser des post-it avec des codes couleur, que ce n'était pas l'usage. Mais il le savait parfaitement que ce n'était pas l'usage, Étienne l’améliorait, l'usage ! Il le transcendait !
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Non, Vive proposait d’arrêter son cours de sport, avec des airs douloureux. Elle y allait bien les premières semaines, essaimant dans l’appartement un tapis de yoga, un justaucorps aux couleurs criardes, de mini-haltères de Barbie, une bouteille d’eau entamée. Et puis, elle sautait un cours, trois, dix. L’année était pliée. De quel sacrifice lui parlait-elle ?
Elle parlait aérobic. Étienne Lechevallier parlait de Richard Strauss. 
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Ça ne devrait pas être si ardu quand on voyait le niveau actuel ! On y était presque avec leur ChatGPT qui faisait trembler tout le monde. Comme s’il fallait craindre qu’une machine puisse être Kafka ou Céline ! Insensé ! Ha ha ha. Ça allait faire un grand tri. Et les journalistes de prononcer à l’anglaise Tchate Gi Pi Ti. Pour ne pas prononcer GPT ! Chatte j’ai pété ! Oui, ça pétait des textes bien foireux et on se bouchait le nez avec des airs de duchesse qui s’excuse à peine de l’odeur,et Katia Rollman de lui dire qu’il fallait cesser d’utiliser des post-it avec des codes couleur, que ce n’était pas l’usage.
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Étienne tenta de maîtriser la colère diffuse qu’il sentait percer en lui ce soir-là depuis le premier pied qu’il avait posé dans cette galerie d’exposition prétentieuse, il se concentra pour garder un flegme apparent, et finit par dire que bien sûr que si, il avait remarqué la nouvelle coiffure de sa femme, mais qu’il n’avait rien dit par galanterie, pour ne pas sous-entendre qu’elle était mieux qu’avant, parce que lui la trouvait belle tout le temps, enfin quelque chose de cet acabit. Vive fuit son regard, Vincent tenta d’alléger l’atmosphère, il sortit sa carte bleue et lança d’un ton très détendu C’est pour moi, je vous invite ! On se prend quand même un dernier verre ?
Étienne avait envie de le choper par le col et de lui hurler Arrête de nous inviter à chaque fois que l’on se voit, connard, je peux inviter ma femme, je n’ai pas besoin de ta charité ! Mais il prit sur lui, avalant l’humiliation que Vincent paye, sans protester. Il respira, força un sourire fade et articula Allez, un dernier alors, et se convainquit qu’il appréciait Vincent au fond. Il faisait partie intégrante de leur décor, comme un témoin rassurant de leur couple. Il était déjà là quand Étienne avait rencontré Vive presque dix ans auparavant.
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Elle riait de tout chez lui, elle trouvait tout drôle et original. Ses agacements, son attention minutieuse aux détails, son incapacité à lâcher prise, ses extrapolations permanentes, sa difficulté à vivre son époque, mais aussi sa délicatesse, elle l'avait rendu beau. Parfois Etienne avait l'impression qu'ils s'étaient fabriqués ensemble, pour que chacun tombe parfaitement ajusté dans les gouffres de l'autre.
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