« La boxe n’est peut-être qu’une tentative désespérée de se battre contre l’injustice et la mort. » (p. 17)
Tu ne vois pas ce qui se passe dehors, ces uniformes, ces regards menaçants, I'air est devenu irrespirable, les fauves sont tapis dans les rues, prêts à bondir, pour l'instant, ils repèrent leurs proies, on essaie de se convaincre que ce qui se prépare ne peut pas arriver, qu'il y aura bien quelqu'un pour se dresser contre Hitler.
Pour les Tsiganes, un enfant qui naît est un cadeau du vent, une promesse, un souffle nouveau. Et c'est ainsi que Rukeli est décidé à l'accueillir. Malgré l'époque, malgré le fascisme, malgré la montée de la violence, malgré la haine, malgré le racisme, malgré la peur, malgré la peine, malgré la mort, malgré la honte.
Chacun a sa place dans l'ombre.
De la boxe sans danse, ce n'est plus qu'une bagarre, se dit Rukeli. Soudain, il n'est plus sûr d'avoir encore envie de combattre.
Imagine, un Tsigane champion d'Allemagne, ce serait un pied de nez formidable, une façon de lutter et de rester debout.
« Olga dit qu’il est plus que beau. Son regard est magnétique, il a le visage d’un ange qui ne sait même pas qu’il est tombé du ciel. Ce sont ses mots. Rukeli se les enroule autour de l’âme comme des écharpes de laine. » (p. 15)
On ne parle plus que de peuple, de race, les destins personnels s'effacent devant les adhésions de masse.
Il est vrai que l'époque n'est plus aux individus. Hommes, femmes, enfants sont pris dans un tourbillon infernal : on ne parle plus que de peuple, de race, les destins personnels s'effacent devant les adhésions de la masse. Pour la réussite du grand projet que les nazis poursuivent, il est d'abord nécessaire de gommer chaque visage. Perte des repères, humiliation, uniformisation, anonymat, indifférence aux autres et à ses propres émotions. Il faut élaguer l'humain, déposséder I'homme de ses rêves pour bâtir les fondations d'un Reich millénaire.
Passer du côté des bourreaux pour espérer ne jamais faire partie des victimes.