AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782330097295
192 pages
Actes Sud (14/03/2018)
3.83/5   6 notes
Résumé :
Hilmi vit sous le toit de ses parents avec son épouse dans une bourgade de la Haute-Egypte. Son maigre salaire de professeur d'arabe ne lui offre nulle perspective d'évolution ni d'indépendance. Alors, comme des milliers de jeunes diplômés condamnés à une vie misérable, il décide d'émigrer au Koweït. Une fois sur place, il ne voit de l'Eldorado dépeint par son passeur que les quatre murs de la chambre insalubre qu'il partage avec deux congénères, et subit les tracas... >Voir plus
Que lire après L'ombre du soleilVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Grand Merci aux éditions Actes Sud et Sindbad qui nous permettent par cette traduction de lire ce texte courageux et critique de cet écrivain koweitien, débuté à la fin de l'année 1996; 1ère édition publiée en Egypte en 1998, et enfin 20 ans après, accessible en France ! Une découverte impromptue en fouinant dans le fonds "Littérature" d' une des librairies de ma ville. Lu d'une seule traite cet ouvrage, qui nous laisse la "gorge serrée" et interpellés par les souffrances endurés de'un grand nombre d'immigrés, qui tentent d'échapper à la misère!

L'auteur, dans son avant-propos, s'explique :
"(...) J'en suis arrivé à - L'Ombre du soleil-, après avoir passé près de quatorze années à travailler dans le domaine du génie civil, ce qui m'avait donné alors l'occasion de fréquenter les grands chantiers de construction et de découvrir les lieux de vie des ouvriers, leur existence marginale, leur vie obscure. " (p. 11)

L'auteur se met discrètement en scène [ Ingénieur-romancier] pour raconter un parcours significatif, qu'il a lui- même rencontré pendant ses années de travail comme ingénieur sur les gros chantiers koweitiens...

Ce parcours concerne Hilmi, professeur d'arabe en Haute-Egypte, payé une misère, devant vivre, cohabiter avec ses parents, avec sa jeune épouse et son fils... Sa femme, Sanya, excédée par le manque constant, la promiscuité avec sa belle-famille, les vexations, brimades de sa belle-mère supplie son mari de partir au Koweit, comme tant d'autres, pour gagner de l'argent, et vivre enfin décemment et indépendants. Hilmi, en dépit du violent désaccord paternel, se décide, et pour obtenir l'argent du visa, s'endette, vend sa bibliothèque de professeur, des bijoux appartenant à sa femme... Son visa lui coûtera trois années de salaire !!...Il devra quitter femme, enfant, et parents entre deux deux et trois années...

Parvenu enfin dans ce pays dit de Cocagne, il se verra encore et encore... taxé, racketté pour obtenir tel papier, tel timbre officiel... pour simplement avoir le droit de travailler...pour un salaire loin des promesses réitérées !

Je n'en dirai pas plus, surtout... car notre "anti-héros" va aller de déconvenue en déconvenue, d'angoisses en désespoir !...

"J'ai appris que l'exil, ce n'est pas seulement de vivre loin de son pays, mais qu'il consiste aussi à endurer l'avilissement, la misère, la fatigue, la peine et les regrets.
Cinq mois qui m'ont appris que les mots ne sont rien comparés à la douleur, à la mort que l'étranger porte en lui, et qu'il doit, en dépit de son immense peine, rester debout, résister. (p. 129)"

"J'étais derrière les barreaux. Je voyais devant moi un panneau sur lequel on lisait "Interdit de fumer".
J'ai imaginé de nombreux autres panneaux couvrant toute la pièce: "Interdit de changer de carte de séjour", "Interdit de travailler", "Interdit de gagner sa vie", Interdit de voyager", Interdit de repartir", "Interdit d'épargner de l'argent", "Interdit de monter", "Interdit de descendre", "Interdit de dormir", "Interdit de se réveiller" (...) , "La fille est interdite", "Le garçon est interdit", Interdit, Interdit...
Le Koweit est interdit.
La vie est interdite. (p. 184-185)"

Si on n'a pas regardé la nationalité de Taleb Alrefai, on est quasiment convaincu qu'il est égyptien... tant il défend les égyptiens, tant les ouvriers que les intellectuels, les écrivains [ de nombreuses références à Naguib Mafouz et Ihssan Abdelkaddous ]...mais il défend également tous les émigrés travaillant au Koweit, dans des conditions difficilement imaginables ...

Alors non, Taleb Alrefai n'est pas égyptien mais koweitien; il critique fermement certains de ses compatriotes, mais aussi les égyptiens [ mafia de sous-traitants] qui abusent leurs "frères émigrés", ainsi que la corruption régnante, en sachant que l'écrivain sait de quoi il parle, qu'il a vécu tout cela de l'intérieur...tout ce qu'il a pu observer des rouages abusifs supportés par la main-d'oeuvre étrangère !

Un témoignage social terrifiant narrant un drame universel et actuel : l'exploitation et le commerce des hommes,ainsi que la dévalorisation absolue du travail et de la dignité des êtres !!!

Un ouvrage dont on ne ressort pas indemne...même si dans les grandes lignes , on connaît ces réalités déshumanisantes (mais superficiellement); m'est revenu un documentaire sur ce sujet terrible, à la limite du supportable...entendu et vu il y a de nombreuses années...

"J'ai promis à mon père de ne pas rester longtemps au Koweit. La société Abou Ajaj est une pieuvre. C'est une société qui fait commerce des hommes et des titres de séjour. Elle nous dépouille de notre argent et nous laisse
à la rue." (p. 93)

Réalité existant aux quatre coins du monde à des degrés différents... Même si livre date de vingt-ans, les réalités économiques actuelles se sont durcies de façon générale, et malheureusement...les pays de Cocagne imaginés... ont toujours les mêmes revers brutaux !

Très heureuse d'avoir fait connaissance avec cet écrivain koweitien; je vais sûrement lire assez prochaînement, le premier écrit traduit et publié par les mêmes éditeurs, en 2016, "Ici même"... roman sur la condition de la femme dans le monde arabe...

Les deux sujets- pivots de cet auteur : les travailleurs immigrés et la condition féminine....
Commenter  J’apprécie          452
Les plaintes d'un narrateur (qui, je cite, "se lamente comme une femme") tout au long du livre, un auteur qui se met en scène en faisant la pub de son précédent livre, un travail d'édition peu digne d'Actes sud (des mots en trop, une concordance des temps étrange, peut-être due à la traduction de l'arabe), beaucoup d'éléments qui me déplaisent dans cette lecture, dont une partie vient probablement d'une culture trop éloignée de moi... j'ai du mal à trouver crédible la naïveté d'un professeur égyptien qui lit le Nobel Naguib Mahfouz même si je peux comprendre que la pauvreté fasse faire les mauvais choix. Mais le sujet - le Koweït et l'immigration esclavagiste sur les chantiers (comment ne pas penser au Qatar et sa coupe du monde de foot ?) - est intéressant car peu courant et le roman se lit facilement.
Commenter  J’apprécie          110
Ici même a permis en 2016 de faire connaissance avec Taleb Alrefai, romancier koweïtien, pour la première fois traduit en français. le voici à nouveau parmi les nouveautés en librairie avec L'ombre du soleil, paru en l'origine en 1998 puis réédité et légèrement retouché un peu moins de 10 ans plus tard. Même s'il date un peu, il est cependant douteux que la situation qu'il décrit ait beaucoup évolué. Elle est celle ses travailleurs immigrés, très nombreux au Koweït, et qui se chargent des travaux les plus pénibles. L'ombre du soleil raconte l'histoire d'un professeur égyptien, pauvre et incapable de faire vivre sa petite famille, qui en est réduit à s'exiler, séduit par le miroir aux alouettes du Golfe. L'enfer l'attend, une épuisante traversée du désert au cours de laquelle il ne se verra offrir qu'un métier d'ouvrier et encore, après un parcours administratif semé d'embûches, un univers kafkaïen, où chaque entrevue avec les autorités est synonyme de ponction financière. Il y a un côté néo-réaliste dans le roman de Taleb Alrefai, une volonté de montrer dans ses détails les plus précis, la vie d'un travailleur immigré au Koweït, très loin de l'opulent et luxuriant quotidien des habitants les plus privilégiés du pays. Mais L'ombre du soleil est aussi une fiction et comme dans Ici même, Taleb Alrefai lui-même apparait dans la vie de son héros, ou tout du moins quelques-uns de ses avatars, sous différents masques, comme des messagers du destin. La plume d'Alrefai est toujours aussi alerte dans un roman dont on perçoit des éléments d'humour noir et dont le seul défaut est d'être parfois répétitif pour évoquer la détresse morale de son personnage principal.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
Commenter  J’apprécie          92
L'ombre du soleil m'a permis de faire connaissance avec Taleb Alrefai et avec la littérature koweïtienne. L'ombre du soleil est un roman qui dénonce, et je salue la sincérité et le courage de l'auteur, qui nous livre un récit vrai mais glaçant.

Taleb Alrefai nous montre les conditions de vie des travailleurs immigrés dans les pays du Golfe, ici plus particulièrement au Koweït. Cependant, si vous vous renseignez, vous verrez rapidement que c'est la même chose aux Emirats Arabes Unis (à Dubaï), au Qatar, etc.

C'est le premier roman que je vois dénoncer cela. En effet, le héros du livre arrive d'Egypte, avec une licence et en étant en Egypte professeur d'arabe, et espère trouver un emploi de professeur, payé à sa juste valeur, pour cesser de vivre dans la misère en Egypte. Cependant, ce qu'il découvre en arrivant au Koweït c'est le manque d'emplois, la vie plus que précaire, le chantage et le racket de la part des employeurs, l'esclavage, etc.

C'est un roman plus que nécessaire, et j'invite tout le monde à le lire, malgré les choses terribles qu'on y découvre... C'est important je pense d'ouvrir les yeux sur ce qu'il se passe réellement derrière le bling-bling de villes comme Dubaï...

Merci aux éditions Sindbad/Actes Sud de nous permettre de lire de telles oeuvres !
Commenter  J’apprécie          53
Beau témoignage d'une réalité bien présente, celle des émigrés dans les pays du golfe. On en parle pas assez, mais c'est un vrai désastre humain, et l'auteur sait très bien leur donner la parole. Cette auto-fiction, avec une insertion de l'auteur comme personnage, bien que bien sûr il est évident que ce n'est pas autobiographique (et heureusement) est très bien trouvé et nous permets de nous transporter. On aurait pu en avoir plus !
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Mon père veut que je reste en Egypte. Qu'est-ce que je suis en Egypte ? Un enseignant d'arabe, raté. J'aurais dû partir au Koweït depuis l'obtention de ma licence à l'université, au pays u pétrole et de l'argent. Le salaire d'une journée au Koweït équivaut à un salaire mensuel en Egypte. (...)
Je vais faire mes adieux à la pauvreté et construire une maison à Sanya, la maison dont elle n'a jamais rêvé. (p. 60)
Commenter  J’apprécie          130
J'ai promis à mon père de ne pas rester longtemps au Koweit. La société Abou Ajaj est une pieuvre. C'est une société qui fait commerce des hommes et des titres de séjour. Elle nous dépouille de notre argent et nous laisse à la rue. (p. 93)
Commenter  J’apprécie          150
J'étais derrière les barreaux. Je voyais devant moi un panneau sur lequel on lisait "Interdit de fumer". J'ai imaginé de nombreux autres panneaux couvrant toute la pièce: "Interdit de changer de carte de séjour", "Interdit de travailler", "Interdit de gagner sa vie", Interdit de voyager", Interdit de repartir", "Interdit d'épargner de l'argent", "Interdit de monter", "Interdit de descendre", "Interdit de dormir", "Interdit de se réveiller" (...) , "La fille est interdite", "Le garçon est interdit", Interdit, Interdit...
Le Koweit est interdit.
La vie est interdite. (p. 184-185)
Commenter  J’apprécie          40
J'ai appris que l'exil, ce n'est pas seulement de vivre loin de son pays, mais qu'il consiste aussi à endurer l'avilissement, la misère, la fatigue, la peine et les regrets.
Cinq mois qui m'ont appris que les mots ne sont rien comparés à la douleur, à la mort que l'étranger porte en lui, et qu'il doit, en dépit de son immense peine, rester debout, résister. (p. 129)
Commenter  J’apprécie          50
Saniya ne supporte pas mon silence. Une fois, elle m'a dit : "Je sais bien que c'est dans ta nature, mais ton silence me fait peur. J'aimerais ouvrir ton crâne pour savoir à quoi tu penses " (p. 21)
Commenter  J’apprécie          70

Video de Taleb Alrefai (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Taleb Alrefai
'On the Map', 2012 : Taleb ALREFAI.
autres livres classés : littérature koweitienneVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (19) Voir plus




{* *} .._..