N'est-ce pas cela le mariage ? Une chance de se débarrasser de la solitude ?
– Est-ce toujours vous qui cuisinez ? demanda-t-elle.
– Oui, mais nous n'en parlons pas. Ma mère préfère que nos pensionnaires croient que la cuisine est tenue par un chef professionnel.
– C'est absurde ! Il n'y a pas de honte à cuisiner ni à manger. Ce sont d'ailleurs les deux plus grands plaisirs de la vie.
Les gens les plus pauvres ne peuvent acheter que ce qu'il y a de pire : le pain le plus sale, la bière la plus nauséabonde et des feuilles de thés mélangées à des copeaux de bois.
Jack se trompait quand il a dit que Dieu était dans un quignon de pain. Dieu, me dis-je dans un élan blasphématoire, est dans une gorgée de café.
Je cherche furieusement mes mots pour expliquer pourquoi je veux des lecteurs, pourquoi je veux voir mon propre nom sur mes ‘griffonnages’ : c’est cela, précisément cela, qui me donne le sentiment de faire partie d'un monde plus vaste, plus profond, plus riche où je suis reliée aux autres, un monde où je compte.
Comment y parvenir si je ne ‘griffonne’ que pour moi ? Si je suis transparente, anonyme ? (p. 35)
- Moi, je crois plutôt qu'elle veut vivre comme un homme.
- Comme un homme ?
- Elle veut gagner de l'argent par elle-même, pas épouser un gentleman qui en a. Elle ne veut pas qu'on lui dise ce qu'elle a à faire.
Je me suis mise à voir de la poésie dans les choses les plus étranges : de la noix de muscade bosselée au panais pâle strié de terre. Et je me demande si je pourrais écrire un livre de cuisine empreint de la vérité et de la beauté de la poésie. Pourquoi l'art culinaire ne serait-il pas poétique ? Pourquoi un livre de recettes ne serait-il pas quelque chose de beau ?
Une dame n’a pas à se mêler de poésie.
Avant d’aller travailler, Mr Whitmarsh fait quelque chose qui ne lui ressemble pas du tout. Il m’offre un cadeau. Bien enveloppé dans du papier brut. Pas de ruban, juste une ficelle. Mais un cadeau quand même.
Londres est pleine de toits qui tanguent, se cabrent, hauts et noirs, sur des miles. Les rues sont un champ de bataille : chariots, charettes à bras, ânes tirant des chariots à eau, fiacres, voitures légères qui cahotent appelées cabriolets, garçons en haillons se précipitant entre leurs roues pour ramasser les trognons de pommes jetés ou des pièces tombées. Le bruit est assourdissant ( ...).