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PLAIDOYER POUR LA PLANÈTE BLEUE



C’est d’abord un kaléidoscope d’existences.

Un patchwork de vies, d’hommes, de femmes, d’animaux qui a priori n’ont pas grand-chose à voir entre eux.

Et pourtant…

Les premières pages sont donc un peu déroutantes, mais avec ce je ne sais quoi d’hypnotique, d’attirant, comme un « suis-moi » chuchoté entre les lignes par cette baleine qui s’éloigne sur la couverture…



Et puis il y a Émeraude. On la découvre d’abord par flashes, dans son enfance, son adolescence avec son père et alors peu à peu les pièces du puzzle s’organisent.

Les histoires fragmentées sont finalement les fragments de notre monde au bord du précipice. Un monde qui semble avoir atteint les limites de sa survie, constitué d’êtres vivants aux abois et d’une nature trop malmenée, surexploitée, et qui, pourtant toujours belle et colorée, s’essouffle dans un monde lui-même en pleine asphyxie.



L’histoire d’Émeraude se situe ici, dans une projection dystopique très proche de notre époque, et surtout extrêmement réaliste sous la plume de J.D. Kurtness. Émeraude est une biologiste marine passionnée qui tente coûte que coûte de sauver des espèces et d’en découvrir de nouvelles. Elle passe des mois dans l’Arctique coupée d’un monde prisonnier d’une fin qu’il a lui-même programmée.

Et pourtant, rien n’est totalement perdu.

Le monde au plus bas, comme dans les abysses sous-marines, peut encore se relever.



Et c’est là une des grandes forces de ce texte dense aux allures a priori apocalyptiques.

Dans un monde où le chaos prend des formes multiples, les mots de J.D. Kurtness n’oublient pas de voir s’ouvrir derrière ce désordre extrême, l’ESPOIR.

Ainsi, la fin est puissante, très émouvante, car elle éclaire et soulage en quelque sorte le lecteur des lourdes vies à la dérive qu’il a traversées, d’une planète au paroxysme de l’expression de son étouffement, de réfugiés climatiques ou victimes d’une pandémie de plus, de baleines trop longtemps sacrifiées…

et finalement la conclusion n’est pas aussi noire qu’on aurait pu l’imaginer. Les êtres vivants réunis autour d’une nature à renaître restent les clés d’un monde nouveau à construire.

À lire.🩵
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Les Poules des prairies partent en tournée

1972. Originaire d'un réserve amérindienne de la province canadienne de la Saskatchewan, la troupe des Poules des prairies, oest censée se rendre en Europe ( Suède, Allemagne, Italie ) pour une tournée de festivals mais à la veille du départ, les danseurs autochtones sont tous malades à cause d'une intoxication alimentaire. En catastrophe, des danseurs de remplacement sont recrutés. Ce sont leurs quinze jours d'aventures européennes que l'on suit.



En réunissant un groupe improbable de personnages qui ne se connaissent pas, aux objectifs, perspectives et modes de vie très différents, Dawn Dumont a composé un irrésistible casting au potentiel comique forcément réjouissant. Soit John, un cow-boy solitaire, célibataire endurci trentenaire très convoité par les femmes de sa réserve, dix ans qu'il n'a pas dansé ( il a cessé après l'enterrement de sa kukum Yellow Belly qui l'a initié à la danse et aux pow-wow ). Soit Desiree, beauté de 19 ans qui flirte avec tout ce qui est de sexe masculin et attire toutes les attentions. Soit Edna, sa tante chaperon, vieille fille bigote qui fait le voyage dans l'espoir de rencontrer le pape pour un miracle sur sa hanche arthritique. Soit Nadine, la romantique fondatrice de la troupe de danse, elle cherche désespérément l'amour. Soit Lucas Pretends Eagle, jeune homme incontrôlable mais excellent danseur.



«  - C'est quoi une poule des prairies ?

Un oiseau. Une espèce de petite dinde obèse.

C'est gracieux ?

Ça vole pas, mais ça se déhanche en masse. »



L'autrice leur a contacté une intrigue pétaradante remplie de rebondissements inattendues et rocambolesques, portés par des dialogues enlevés et mis en valeur par une écriture d'une grande spontanéité. Grâce à la choralité des chapitres, le lecteur a une vision panoramique de leur évolution dans un monde qu'ils ne connaissent pas, avec un accès direct à leur psyché dont les secrets et mystères sont progressivement révélés. On se rend compte ainsi que leur identité est bien plus complexe que celle initialement perçue.



C'est sans doute le roman le plus joyeux que j'ai lu ces derniers temps, et ça fait un bien fou ! D'autant qu'il y a du fond. En arrière-plan, des sujets sérieux sont soulevés, restituant le contexte des années 1970, toujours d'actualité aujourd'hui, notamment l'acculturation à l'oeuvre dans les réserves et le rôle des pensionnats amérindiens dans ce drame. Ou encore, le rôle invisibilisé des soldats autochtones durant la Deuxième guerre mondiale.



« On est encore en train de faire l'inventaire de ce qu'on a perdu » dit un des personnages. « Le simple fait de naître autochtone est un acte politique » insiste un autre. Lorsque ces Amérindiens dansent en Europe, ils revendiquent leur culture, s'approprient une identité qui a été niée par les gouvernements nord-américains, et leur danse est un acte de résistance, même inconscient. Chacun est conscient des stéréotypes de l'Indien qu'ils représentent et entend en jouer ou les briser.



Oui, on rit beaucoup dans cette critique sociale nuancée, de nombreuses scènes sont cocasses comme celle où la troupe découvre des Allemand grimés en Indiens, persuadés, jusqu'à l'arrogance, d'être plus Indiens que les « vrais » grâce à leurs tenues ridicules et leur maquillage outrancier qui craquèle au fil des heures.



Un vrai roman plaisir qui émeut, fait rire et réfléchir !
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De vengeance

La narratrice tue accidentellement un camarade de classe. Son crime demeure impuni. Coup de chance : elle vient de trouver sa vocation et s'en réjouit. Seul regret: elle ne peut s'en vanter. D'emblée le ton est donné : nous voici avec une tueuse en série qui va, peu à peu, monter en puissance et se débarrasser de ceux qu'elle estime nuisibles à des degrés divers: cela va de celui qui manque l'écraser à celui qui ne ramasse pas les crottes de son chien. Pour commencer.

Socialement bien intégrée, patiente (très patiente), intelligente et organisée, elle passe inaperçue et en joue.

Pour elle, c'est un "passe-temps" que de se venger. Mais elle pratique cette activité avec beaucoup de distance et ne connaît pas toujours le résultat de ses actes, libre au lecteur de l’imaginer. Contrairement à d'autres tueurs en série, elle ne paraît pas outrageusement dérangée et tout l'art de l'autrice , pour peu qu'on apprécie l'humour noir (très noir), est de nous rendre acceptable son comportement...Une lecture intensément jubilatoire.
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