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4.03/5 (sur 265 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Maitre de conférence à l’Université Paris-Est / Marne-la-Vallée, chercheur associé au CRFJ.

Historien rattaché au Centre de recherche français à Jérusalem, il a publié en 2013 "Jérusalem 1900 : la Ville sainte à l’âge des possibles" (Armand Colin).

Il anime également le projet Open Jérusalem.

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Citations et extraits (41) Voir plus Ajouter une citation
Finalement, la Jérusalem hasmonéenne est une ville composite, pleine de contradictions. D’un côté, les traditions juives ancestrales se codifient avec la fixation de la Bible en hébraïque, qui pourtant par sa traduction en grec, dans le cadre d’une hellénisation culturelle qui se poursuit. À l’est de la ville, le Temple est agrandi et embelli, il attire chaque année des milliers de pèlerins. Vers l’ouest, de somptueuses villas de style grec sont construites sur les hauteurs du mont Sion. Le mot Judaïsme apparaît à cette époque, pour désigner une stricte observance religieuse et se distinguer des traditions grecques. Mais au même moment, en -104, Aristobule Ier, roi de Judée, prend le surnom de Philhellène et le titre grec de Basileus. Pour obéir aux interdits religieux, les représentations humaines et animales disparaissent sur les monnaies hasmonéennes, qui s’ornent cependant de motifs typiquement grecs, comme l’ancre séleucide ou le laurier, emblème de Zeus et d’Apollon. Ces processus contradictoires coexistent au sein de la société urbaine de Jérusalem. La dynastie hasmonéenne navigue entre ces différentes influences, mais ses héritiers se déchirent. Le royaume résiste aux menaces de l’Égypte ptolémaïque (au sud) et des séleucides (à l’est), mais la puissance de Rome ne cesse de grandir à l’ouest. En -63, pour mettre fin aux guerres fratricides des Hasmonéens, le général romain Pompée s’empare de Jérusalem, après avoir conquis la Grèce et l’Anatolie. En -40, un jeune potentat local profite de ces désordres pour se faire proclamer roi de la Judée par le Sénat romain : Hérode. Né d’une mère arabe et d’un père iduméen, fraîchement converti au judaïsme ; Hérode entre à Jérusalem en -37, extermine les prêtres et les derniers Hasmonéens. Sous son règne, Jérusalem connaît une prospérité inégalée.
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Pas facile de comprendre comment cette petite ville perdue au milieu des montagnes est devenue le nombril du monde. D’abord, Jérusalem est presque dépourvue d’eau potable. Jusqu’au milieu du 20e siècle, ce sera une vraie contrainte pour son développement. Il y a bien une maigre source, le Gihon, qui coule au pied du mont des Oliviers. C’est autour de ce point d’eau que les premières populations sédentaires se sont installées il y a environ 4000 ans, à l’époque où je suis né. J’ai alors vu apparaître les premières sépultures, sur le versant oriental du Cédron… et cela n’a jamais cessé depuis. Je suis bien placé pour savoir que le climat de Jérusalem est particulièrement rude. Pas une goutte de pluie pendant six mois de l’année, entre avril et octobre. Des hivers rigoureux, des tempêtes de neige, des étés suffocants, des nuits froides, des orages, du vent. Dans la Ville sainte, le ciel se rappelle souvent au bon souvenir des hommes. Et puis, Jérusalem a toujours été située à l’écart des routes commerciales. Il suffit de regarder une carte, ou de demander à mes amis les oiseaux. Les marchands passent plus au sud, dans le désert du Néguev, pour commercer entre la péninsule arabique, l’Égypte, via le Sinaï. D’autres routes passent plus à l’est, dans la vallée du Jourdain, entre l’Anatolie et la mer Rouge. Où plus à l’ouest dans la plaine littorale. De fait, Jérusalem est une ville assez inaccessible, on n’y vient pas par hasard. Dans ce relief accidenté, trois collines dominent. À l’est, le mont des Oliviers. Dans les traditions monothéistes, c’est sur cette colline que se déroulera le jugement dernier Yom HaDin en hébreu, Yawm ad-Dyn en arabe. Le jour des comptes. Au centre, la colline de l’Ophel. Une acropole qui était déjà un sanctuaire à l’époque pré-biblique. Aujourd’hui on l’appelle Haram ad-Sharif ou mont du Temple. À l’ouest, la colline de Sion, tantôt intégrée aux murailles, tantôt à l’extérieur, comme c’est le cas aujourd’hui. C’est elle qui a donné son nom au sionisme. Ces trois collines sont séparées par trois vallées profondes. La vallée du Cédron, à l’est, sépare la ville du mont des Oliviers ; elle abrite la source du Gihon. La vallée du Tyropéon, au centre, moins profonde, coupe la ville intra-muros en deux. Et elle a donné son nom à l’actuelle rue al-Wad, la vallée en arabe. La vallée du Hinnom, à l’ouest, très encaissée, rejoint les deux autres vallées en contrebas du village de Silwan, au niveau du puits de Job. Au Moyen-Âge, on y avait creusé un énorme bassin pour abreuver les troupeaux, le bassin du Sultan. Aujourd’hui, c’est une salle de concert en plein air. Imaginez un paysan qui puise de l’eau dans le puits de Job pour arroser un arbre au sommet du mont des Oliviers. Il doit gravir deux cents mètres de dénivelé pour à peine un kilomètre de distance ! C’est sûr qu’on n’est jamais venu ici pour faire fortune dans l’agriculture. La roche calcaire affleure presque partout, les sols sont minces, la terre dévale les pentes au premier orage, il faut la retenir avec des terrasses en pierres, que les hommes reconstruisent obstinément depuis des millénaires. Cette roche est percée d’une multitude d’alvéoles et de grottes, dont les habitants de Jérusalem ont toujours fait des nécropoles, des sanctuaires ou des citernes, après les avoir exploités en carrière… un vrai gruyère ! mes racines savent bien que la ville souterraine est aussi importante que la ville en surface : c’est là que sont conservés les morts, les vestiges, les traditions… et l’eau potable. Une dernière chose pour compléter ce tableau idyllique : Jérusalem est située sur la ligne de faille du grand Rift, qui sépare les plaques tectoniques de l’Afrique, de l’Arabie et de l’Eurasie. Vers l’Est, la ville domine le fossé jordanien, le point le plus bas du globe. Les tremblements de terre sont fréquents, destructeurs et meurtriers.
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En 381, le concile de Constantinople confirme la doctrine trinitaire et envoie l’évêque Grégoire de Nysse à Jérusalem, pour une tournée d’inspection. Grégoire en revient très réservé sur la pratique pèlerinage, alors en pleine expansion. Faut-il aller voir les lieux saints de Jérusalem et les signes du seigneur dans sa chair ? Le seigneur n’a pourtant jamais indiqué le voyage à Jérusalem parmi les bonnes actions. L’esprit saint souffle où il veut : un changement de lieu ne procure donc aucun rapprochement avec Dieu ! Qu’aura-t-il de plus, celui qui se sera rendu en ces lieux ? Comme si le seigneur vivait toujours corporellement à Jérusalem et qu’il était absent de chez nous ! D’ailleurs si la grâce de Dieu était plus grande à Jérusalem, le péché n’y serait pas aussi répandu. Fornications, adultère, vol, idolâtrie, meurtres… Comme des bêtes sauvages, ses habitants se jettent continuellement les uns sur les autres !
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Chateaubriand visite Jérusalem en octobre 1806.
« Les maisons de Jérusalem ressemblent à des prisons... ou à des sépulcres.
Partout des maisons de pierre enfermées dans un paysage de pierres...
... On se croirait devant un cimetière au milieu d’un désert ! »

(Itinéraire de Paris à Jérusalem – 1811)
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Préoccupée par sa croisade intérieure contre les protestants, l’Europe catholique a oublié Jérusalem. L’Esprit des Lumières n’a fait qu’accentuer ce fossé. […]. Pourtant, au crépuscule du 18e siècle, l’Occident s’apprête à redécouvrir la Terre sainte, à la faveur d’une singulière expédition militaire … Le général Bonaparte a fait publier une proclamation dans laquelle il invite tous les juifs d’Asie et d’Afrique à se ranger sous les drapeaux … pour rétablir l’ancienne Jérusalem !
En fait, Bonaparte n’est jamais venu à Jérusalem … et on sait aujourd’hui que cette fameuse « Proclamation aux Juifs » n’a jamais existé ! Ce n’est pas la première fois qu’un récit légendaire détourne le trajet d’un grand conquérant pour le faire passer à Jérusalem… comme si cette onction symbolique forgeait les destins hors du commun … Souvenez-vous d’Alexandre le Grand, en -332. Ainsi s’écrit la légende de cette sacrée ville-monde …
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Ce soir-là, le jeune Amos Klausner (futur Amos Oz) âgé de 8 ans, qui grandit dans un quartier Juif du nord-ouest de Jérusalem a conscience de vivre en direct un moment historique.
On écoutait tous la radio comme assoiffé la bouche ouverte.
― 33 votes pour, 13 votes contre, 10 abstentions …
Un Etat juif officiellement reconnu … Il y eut quelques secondes de saisissements … puis un hurlement d’allégresse envahit notre petite rue Kerem Avraham … le Juifs chantaient dansaient et embrassaient les policiers anglais ahurit !
Pourtant Amos Oz compris que cette résolution ne sera jamais appliquée concernant Jérusalem. (Amos Oz. Une histoire d’amour et de ténèbres. 2002)
Dès le lendemain du vote de l’ONU, les arabes de Jérusalem se soulèvent, sous les yeux de Wasif Jawharriyyeh.
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En 1610, le poète anglais George Sandys découvre à son tour Jérusalem, qu’il décrit comme un « vulgaire théâtre de mystères et de miracles ».
― Les juifs … des barbares ridicules. Les chrétiens … des fous et des sauvages. Les célébrations de Pâques … des fêtes païennes dignes de Bacchus !
Ces protestants exaltés rêvent de fonder une « nouvelle Jérusalem ». George Sandys part pour l’Amérique en 1621.
― Ces colonies seront notre terre promise ! nous sommes le nouveau peuple élu ! Sion sera rebâtie en Amérique … puis nous ramènerons chez eux les enfants d’Israël .. ; et alors la fin des temps s’accomplira !!
En fait l’ancienne et la nouvelle terre promise n’ont jamais cessé de dialoguer à distance. N’oublions pas qu’en 1492 Christophe Colomb rêvait déjà de libérer Jérusalem par l’est ! En Amérique, les colons protestants ont fondé des dizaines de villes baptisées Jérico, Bethléem, Sion ou Nazareth, en références aux lieux bibliques … Et quelques siècles plus tard, les chrétiens évangéliques américains seront les plus fervent sionistes …
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― Au 17e siècle, j’ai vu arriver François-Charles Du Rozel, un aristocrate originaire de Normandie enthousiasmé par ses découvertes.
Le guide musulman de Du Rozel est intarissable sur les croyances locales.
― Jésus était un grand prophète, presque aussi grand que Mahomet ! Mais le Loi qu’il avait enseigné était trop rigide. Alors Dieu nous a envoyé Mahomet, pour la mitiger.
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De l’autre côté il y a Mary Clawson, une expatriée californienne installée à Jérusalem Ouest dans les années 1950, qui livre dans sa correspondance un portrait sensible de la ville israélienne.
― en arrivant ici, je ne savais même pas que la ville était coupée en deux. Quelle frustration de voir la vieille ville si proche et si lointaine sans pouvoir y accéder. C’est une expérience difficile à comprendre. Je crois que le sabbat est mon jour préféré. Chaque vendredi après-midi, le calme tombe sur la ville, comme une neige silencieuse. Les boutiques ferment, les bus cessent de circuler … même les enfants deviennent plus sages …
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Bonjour !
Shalom !
Salam !
Je m'appelle Zeitoun...
... Ou Olivia si vous préférez.
Je suis né il y a environ 4000 ans...
... Au sommet d'une colline qui porte mon nom : le mont des Oliviers.
Har Ha-Zeitim en hébreu...
Jabal al-Zaytoum en arabe...
Derrière moi, le soleil levant...le désert à perte de vue, la Mer Morte.
Devant moi, Jérusalem, le soleil couchant...la plaine fertile et la Méditerranée.
Sur cette ligne de crête, à 800 mètres d'altitude, entre la terre et le ciel, entre les hommes et les dieux, entre le monde des vivants et le monde des morts...
... Jérusalem est le point de contact entre tout cela.

(INCIPIT)
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