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Critiques de Ted Chiang (103)
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Expiration

Il s'agit d'un recueil de neuf nouvelles de science-fiction, plus ou moins rassemblées autour du thème du libre arbitre, de son bien-fondé et de ses conséquences ; loin de certains commentaires dithyrambiques, je l'ai trouvé inégal. ● La première nouvelle, « le Marchand et la porte de l'alchimiste » est d'inspiration orientaliste et prend pour modèle les Mille et une nuits, par le décor, les personnages et les récits intercalés. Elle évoque les voyages dans le temps et leurs paradoxes. Je l'ai trouvée brillante et très originale et elle m'a beaucoup plu : c'est la lecture de son début qui m'a décidé à acheter le recueil. ● La deuxième nouvelle, « Expiration », donne son titre au recueil en français comme en anglais (Exhalation). Il y est question d'une civilisation de robots et de leur anatomie. Là aussi, beaucoup d'originalité, mais aussi des longueurs. ● le troisième texte, « Ce qu'on attend de nous », est trop bref pour m'avoir marqué et je me rappelle déjà plus ce qu'il raconte… ● La quatrième nouvelle, extrêmement longue, « le Cycle de vie des objets logiciels », est celle que j'ai le moins aimée. Elle parle d'animaux digitaux, de leur élevage et de leur vie. Je n'en ai pas vu l'intérêt et les longueurs m'ont rebuté. J'ai failli passer à la nouvelle suivante mais ai tenu bon pour voir la fin, tout à fait quelconque : tout ça pour ça !... ● La cinquième nouvelle, « La nurse automatique brevetée de Dacey », dont l'histoire se passe au XIXe siècle, nous présente une nurse robotisée. C'est assez original et intéressant. ● le sixième texte, « Vérité du fait, vérité de l'émotion », m'a beaucoup intéressé : elle se demande ce qu'il adviendrait si nous avions la possibilité d'enregistrer l'intégralité de notre vie en vidéo. ● « le grand silence », la septième nouvelle, nous dit qu'il est vain de chercher des civilisations extra-terrestres lorsque nous avons sous les yeux une civilisation inconnue et en voie d'extinction : celle des perroquets. Pas mal, sans plus. ● le huitième texte, « Omphalos », est très étrange, mettant en scène un monde alternatif au nôtre où par exemple Chicago devient Chicagou. Il se présente sous la forme de plusieurs prières qui montrent la parfaite et curieuse adéquation entre la science et la religion dans ce monde. J'ai beaucoup aimé. ● Enfin, la dernière nouvelle « L'angoisse est le vertige de la liberté » s'appuie sur la physique quantique pour imaginer des prismes capables de nous faire explorer les branches divergentes de notre univers et ainsi de nous faire rencontrer d'autres versions de nous-mêmes : c'est avec la première, la meilleure nouvelle du recueil, malgré la fin qui est l'inverse même d'une chute. ● Il m'a semblé que dans l'ensemble ce qui ne m'a pas plu dans certaines nouvelles, c'est la propension de l'auteur à délaisser la tension narrative au profit de l'exposé didactique et scientifique, ce qui se reflète dans les titres eux aussi plats et descriptifs. Il est tellement à l'aise dans la description et l'exploration d'autres réalités que la nôtre qu'il en met de côté ce qui fait habituellement le sel du genre de la nouvelle : le brio narratif et l'art de la chute.
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La tour de Babylone

Ted Chiang est un genre littéraire à lui seul.



L'Uchronie est le genre qui consiste à créer un univers semblable au nôtre dans lequel il n'y a qu'un seul point de divergence. Un événement historique et se serait déroulé différemment.



Je dirais donc que Chiang fait de l'Uphysique. Un genre qui consiste à créer un univers semblable au nôtre dans lequel une loi de la physique est différente.



Chiang n'écrit que des nouvelles et chacune en vaut la peine. Il y a d'ailleurs celle qui a servi à faire le film Arrival de Denis Villeneuve.



Ce recueil, je l'ai lu il y a déjà plusieurs années, et j'y repense constamment. Ce n'est pas que pour les fans de SF. C'est bien écrit, les personnages sont humains, et les expériences de pensée ont des portées philosophiques intéressantes et travaillées.
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La tour de Babylone

Je suis presque raccord là.

Alors qu’en France sort le dernier recueil de nouvelles de Ted Chiang, je termine son premier : La tour de Babylone.



Huit nouvelles dans l’ensemble assez longues où se déploie une méthode plutôt unique mais habillée de couleurs très variées.

Quand je dis méthode, c’est parce que je sens que le scientifique dirige l’auteur. J’ai toujours eu l’impression de voir se déployer la résolution d’un problème selon une méthodologie bien établie : on pose le problème, on amasse des données, on teste des hypothèses. Les personnages ont dans l’ensemble tous accès à la raison bien qu’ils puissent être névrosés (de la même façon qu’un tueur en série peut déployer une méthodologie d’action d’une logique sans faille et d’une grande complexité). C’est un peu comme si chaque nouvelle était une expérience de laboratoire confinée.



Mais quand j’ai dit ça, je n’ai rien dit. Cette méthode sous-jacente s’habille d’une variété de forme remarquable. Les sujets traités et les décors dans lesquels ils s’animent dévoilent une imagination débordante. Une cosmologie antique prend vie dans La tour de Babylone. Les affres d’une mathématicienne devenant cinglée face à sa découverte dans Division par zéro rappelle les psychoses des grands logiciens (voir Logicomix). L’animation de la matière par l’intermédiaire du nom devient une vraie technique industrielle de la fin du 19ème siècle dans 72 lettres. Et la mythologie biblique prend réalité avec nombre de dégâts collatéraux dans L’Enfer, quand Dieu n’est pas présent. Quant à la possibilité d’éliminer le concept de beauté des relations humaines, il prend la forme d’un documentaire à multiples témoignages façon Antoine Bello dans Aimer ce que l’on voit : un documentaire.

Je garde le plus connu pour la fin : qui a vu le superbe film Premier Contact, de Denis Villeneuve ? Eh bien il s’agit d’une adaptation de L’Histoire de ta vie.



Contrepartie de la beauté formelle de ces nouvelles, le langage employé utilisant largement les sciences est parfois opaque quand on ne possède pas de connaissances détaillées. Ted Chiang fait parfois des efforts de vulgarisation – dans L’Histoire de ta vie par exemple, et il y en a besoin tellement les concepts nécessitant un éclairage sont nombreux. Mais quand on capte, c’est du plaisir à l’état brut – et parfois pas du tout comme dans Comprends (mais dans cette nouvelle l’opacité participe de la démonstration que le narrateur a atteint un niveau intellectuel qui dépasse les simples humains). Je crains que cela ne laisse du monde sur le bord de la route.



A noter aussi que la fin du livre contient une explication par l’auteur de la genèse de chaque nouvelle, du pourquoi il a eu envie de l’écrire. Un plus très apprécié.



Mais personnellement j’ai beaucoup aimé. A petite dose cependant. Je ne me sens pas de me lancer dès aujourd’hui dans son recueil récent.

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Expiration

Je ne suis pas fan de nouvelles, ni de science-fiction… et ce roman de Ted Chiang s’avère être un recueil de neuf nouvelles de science-fiction qui tournent toutes autour d’un sujet commun : le libre arbitre.



Pas trop ma tasse de thé à la base donc, mais vu que la lecture est non seulement conseillé par un certain Barack Obama, mais surtout par l’incontournable Yvan du blog EmOtionS, je me devais de l’ajouter à ma PÀL.



Force est de constater que ce recueil de nouvelles contient du bon et du très bon et je vous recommande d’ailleurs chaudement la première nouvelle (« Le Marchand et la porte de l’alchimiste »), qui aborde certes le voyage dans le temps, mais qui s’avère surtout très philosophique et poétique, sur fond d’ambiance orientale des contes des Mille et Une Nuits. J’ai adoré !



Par contre, à partir des suivantes, vous risquez de devoir ressortir votre cours de physique du placard pour suivre ces récits intégrant des civilisations de robots, des animaux de compagnie digitaux et une bonne dose de physique quantique… même si dans l’ensemble cela reste plutôt accessible. J’ai beaucoup aimé toutes ces intrigues particulièrement originales, malgré certaines longueurs, principalement lors de la quatrième nouvelle « le Cycle de vie des objets logiciels », où j’ai failli piquer du nez en compagnie d’espèces de Tamagotchis 2.0. Mais sinon, c’était du tout bon !



Ted Chiang propose de la SF intelligente, invitant les lecteurs à explorer des mondes certes futuristes, mais qui invitent finalement à réfléchir sur le monde d’aujourd’hui. A ce titre, je verrais d’ailleurs bien plusieurs de ces intrigues à la morale intéressante adaptées dans l’excellente série Netflix « Black Mirror ».



Bref, un roman qui ne m’a pas encore transformé en fan de SF, mais qui m’a tout de même donné envie de découvrir les ouvrages précédents de l’auteur… et… bonne nouvelle pour ma PÀL car visiblement Ted Chiang n’est pas très prolifique, privilégiant probablement la qualité à la quantité…
Lien : https://brusselsboy.wordpres..
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Expiration

Auteur discret (à peine 17 nouvelles depuis 1990), l’américain Ted Chiang s’est pourtant affirmé comme l’un des écrivains les plus importants du genre.

Détenteur de quatre prix Nebula et de quatre prix Hugo (rien que ça), il faut attendre la publication de son premier recueil, La Tour de Babylone (Stories of Your Life and Others en version originale) pour qu’il se fasse remarquer par le public et par un réalisateur des plus talentueux, le canadien Denis Villeneuve. Grâce aux efforts du scénariste Eric Heisserer, la nouvelle L’Histoire de ta vie devient en 2016 un long-métrage de science-fiction acclamé par la critique : Arrival (Premier Contact).

Depuis, Ted Chiang a continué à écrire des nouvelles dans diverses revues et anthologies. Les éditions Knopf ont donc rassemblé 9 textes de l’auteur, dont 2 inédits, à l’intérieur d’un second recueil intitulé Exhalation.



L’ouvrage s’ouvre sur un récit particulièrement connu de l’américain : The Merchant and the Alchemist’s Gate (traduit sous le titre français Le Marchand et la porte de l’alchimiste dans le septième numéro de la revue Fiction). Récompensé par le prix Hugo et le prix Nebula, la nouvelle nous parle de l’incroyable découverte faites par Fuwaad ibn Abbas dans une petite boutique de Baghdad tenu par un marchant et alchimiste du nom de Bashaarat. Celui-ci, non content de fabriquer des objets d’une rare finesse, a mis au point une porte permettant à celui qui l’emprunte de revenir vingt ans en arrière ou, au contraire, de se projeter vingt ans plus tard. Impressionné, Fuwaad demande au marchand si certains de ses clients ont déjà utilisé la porte en question. Après lui avoir raconté trois histoires à propos de voyageurs déterminés à changer leur passé ou à découvrir leur futur, l’alchimiste s’interroge : pourquoi Fuwaad est-il si intéressé par cette porte ?

Sur le modèle des contes des Mille et Une Nuits, Ted Chiang enchâsse quatre histoires dans son récit et analyse les conséquences de nos actes par le prisme de la conscience islamique. Cette sublime nouvelle, aussi intelligente que surprenante, prend à contre-pied les traditionnelles aventures temporelles qui tentent de changer tel ou tel événement de la vie d’une personne ou du monde. Ici, le futur et le passé s’avèrent identiques, ni l’un ni l’autre ne peuvent changer, peu importe ce que nous y faisons. Ted Chiang postule ainsi que l’avenir est déjà écrit et que le passé reste gravé dans la roche, le seul acte sensé consistant à accepter sa vie comme elle est, purement et simplement.



Le second texte, Exhalation (traduit sous le titre Exhalaison dans le numéro 56 de la revue Bifrost), a lui aussi décroché le prix Hugo de la meilleure nouvelle en 2009. Comme pour le précédent texte, Ted Chiang s’y interroge sur notre capacité à apprécier l’instant même lorsque notre futur semble déterminé à l’avance. Un scientifique d’une civilisation extra-terrestre — en réalité des êtres robotiques qui fonctionnent par de complexes mécanismes de ventilation et de pression d’air — s’étonne que de plus en plus d’orateurs (appelés crieurs) n’arrivent plus à terminer leur discours avant que ne retentisse le gong des tourelles à horloge de la ville. Bien déterminé à comprendre ce phénomène, et après avoir écarté l’hypothèse d’une défaillance des horloges, il entreprend de disséquer sa propre boîte crânienne grâce à un jeu de miroirs et d’outils de précision. Il comprend alors que l’air qu’il inspire, extrait directement du sous-sol de la cité, pourrait bien être la cause même de leur mort à tous dans un avenir proche.

Cette histoire aux doux relents de steampunk renvoie aux expériences des premiers anatomistes pour arriver à comprendre le fonctionnement du corps humain. Mais Ted Chiang, non content d’inventer cette civilisation mécanique délicieusement étrange, y mêle une réflexion sur l’entropie et l’équilibre thermodynamique de l’univers pour aboutir en réalité à une fin du monde d’une immense poésie où le narrateur, conscient de sa propre fin, incite son lecteur à prendre conscience de la valeur de l’existence elle-même. Superbe.

En guise d’intermède avant le gros morceau du recueil, l’américain nous propose What’s Expected of Us (traduit en français sous le titre Ce sur quoi il faudra compter dans la septième livraison de la regrettée revue Fiction ). Beaucoup plus courte que les deux précédents, cette histoire concerne l’invention du Predictor, une sorte de télécommande avec un seul bouton et une LED verte qui se déclenche une seconde avant que vous n’appuyez dessus. Le postulat, assez abscons, permet en réalité d’illustrer la difficulté de l’être humain lorsque celui-ci comprend que le libre-arbitre n’existe pas (un point commun avec The Merchant and the Alchemist’s Gate mais sous un autre angle). Même si l’idée est bonne, la brièveté de cette nouvelle la rend bien fade par rapport au reste. Un amusant amuse-gueule pour ce qui va suivre.



Car voici la pièce de résistance de ce deuxième recueil avec la novella de 110 pages intitulée The Lifecycle of Software Objects. Vainqueur des prix Locus et Hugo, le texte se concentre sur une créature artificielle et virtuelle appelée digient. Pour décrire simplement celles-ci, imaginez que les Tamagotchis deviennent des êtres conscients et sensibles dans des univers virtuels du style Second Life 2.0 où les hommes peuvent les élever et les éduquer. Créés par une jeune start-up du nom de Blue Gamma, les digients deviennent rapidement un phénomène qui, malheureusement, ne va durer qu’un temps. Lassé par la lenteur de l’apprentissage des bestioles — qui ressemblent à des animaux ou des robots tout mignons — le public s’oriente vers d’autres solutions et d’autres environnements plus modernes. Seuls Ana, experte en animaux, et Derek, l’un des designers de digients, persistent à conserver leurs compagnons virtuels. Malgré tous leurs efforts cependant, et avec l’obsolescente annoncée de leur environnement virtuel, les digients survivants sont menacés d’extinction pure et simple…à moins de faire un Pacte avec le Diable…

Ce long récit arrive non seulement à rendre des créatures purement virtuelles (et de surcroît fictives) attachantes et humaines, mais également à réfléchir sur l’importance que nous accordons à la morale quand on en vient à décider du sort d’entités non humaines (et donc animales dans un sens). Brillant de bout en bout, l’histoire surprend par son refus total de verser dans le coup de théâtre facile ou à dévier vers un chemin horrifique qui semblerait évident. Ted Chiang décrit avec minutie son univers et ses créatures, leur insuffle des questionnement et des réactions humaines tout en nous poussant à réfléchir sur la nécessité de conserver la vie, quelque soit sa forme et ses potentialités. Mieux encore, il s’interroge sur les droits que peuvent avoir des entités purement virtuelles et comment nous, êtres humains, sommes capables de nous émouvoir pour des choses qui, stricto sensu, n’existe pas. Et si cela ne vous suffit pas encore, vous pouvez y voir également une réflexion sur l’éducation des enfants et la perception des parents lorsque ceux-ci deviennent adultes trop rapidement (spoiler alert : c’est toujours trop rapide).

Passionnant, parfois poignant, toujours brillant.



L’humanité qui faisait donc cruellement défaut à nombre de nouvelles de son précédent recueil semble bel et bien de retour puisque le texte suivant, Dacey’s Patent Automatic Nanny (écrit à l’origine pour une anthologie intitulée The Thackery T. Lambshead Cabinet of Curiosities par Jeff VanderMeer et Ann VanderMeer) prend le prétexte de raconter l’histoire d’une invention surprenante, en l’occurrence une nounou mécanique, pour nous parler des hommes qu’elle a changé. Créé par Reginald Dacey, un mathématicien londonien particulièrement affecté par la découverte des mauvais traitements qu’infligeait la nounou engagée pour s’occuper de son propre fils, la nounou mécanique de Dacey ne semble malheureusement pas être une réussite puisque le seul garçon véritablement élevé par ses soins a fini dans une institution spécialisée…jusqu’au jour le Dr Thackery Lambshead décide d’élucider ce cas si particulier.

Mine de rien, cette histoire aux doux relents Victoriens fait preuve d’une humanité improbable, entièrement contenue dans sa chute et qui utilise le prétexte d’une invention farfelue pour parler de l’éducation (encore) et du besoin affectif qui en découle. Tout comme le précédent texte, outre le plaisir de l’inventivité de son auteur, la nouvelle se penche sur la nécessité de prendre son temps pour élever et éduquer un autre être conscient. Original et touchant.



Plus démonstratif, The Truth of Fact, The Thruth of Feeling croise deux histoires : celle d’un père en proie au doute dans une société où Remem change brutalement la façon de concevoir la mémoire humaine — l’invention donne la possibilité de tout enregistrer dans son existence et donc, incidemment, de tout se rappeler dans les moindre détails, comme dans l’épisode 3 de la première saison de Black Mirror — et celle de Jijingi, un villageois du peuple Tiv en Afrique qui voit l’arrivée des Européens et de leur missionnaire comme un changement majeur pour sa culture orale qui n’a jamais admis l’écrit jusque là. Si l’on peut reprocher à l’histoire d’enchaîner un peu trop mécaniquement les deux fils narratifs choisis, il faut concéder à nouveau l’intelligence de Ted Chiang pour illustrer le changement de paradigme dès lors que l’on change de support. De l’oralité à l’écrit, de la faillibilité à l’absolu.

Comment le fait de pouvoir se souvenir de tout va-t-il changer l’humanité ?

Le fait de pouvoir oublier ne fait-il pas parti des processus naturels vitaux pour le pardon et l’évolution ? Ou au contraire, le fait de pouvoir réécrire l’histoire ne brouille-t-il pas la conception que l’on a de soi et du monde ? À nouveau, l’histoire s’avère passionnante en n’oubliant pas le facteur humain qui, finalement, décide de tout.

Autre intermède avec The Great Silence où Ted Chiang compose un texte court et poétique sur la disparition de la seule espèce non-humaine capable de communiquer avec l’homme : les perroquets. Ce qui touche ici, c’est la façon de Ted Chiang d’illustrer la bêtise de l’homme qui cherche la vie à des millions d’années-lumière alors qu’il n’est déjà pas capable d’apprécier celle, extraordinaire, qui se trouve sur sa propre planète. Un exercice de style réussi qui permet de souffler avant de retomber dans une des marottes de l’auteur américain : le rapport à Dieu.

Première des deux nouvelles inédites du recueil, Omphalos imagine un monde où la théorie créationniste se serait vu renforcée par les découvertes scientifiques réalisées. Problème, lorsque l’on découvre grâce à l’astronomie que tout n’est pas aussi figé qu’on le croit, la croyance et la foi vacille. Et si les humains sans nombril n’étaient qu’une coïncidence et non une preuve ?

Écrit comme une suite de missives/prières, Omphalos s’amuse à décrire une uchronie où la science serait parfaitement en phase avec le religieux. Seulement voilà, il faut tout de même tordre les lois de la physique pour faire rentrer le tout au sein de la théorie divine. En déconstruisant avec malice les fondements de son monde uchronique, Ted Chiang renvoie cette fois aux grandes découvertes qui ont fait basculer notre façon de voir le monde et l’univers et en quoi cela nous a profondément affecté en tant qu’individu et société. Malgré tout, le texte manque ici singulièrement d’humanité dans le fond et convainc donc moins que les précédents.



Reste alors la dernière histoire du recueil : Anxiety is the Dizziness of Freedom.

Le Prisme a révolutionné notre façon de concevoir le monde. Avec lui, il est désormais possible pour tous d’établir une communication avec ses paramoi, d’autres versions de soi dans des branches d’univers parallèles.

Grâce à une technologie quantique avancée, il est possible de savoir ce que nos autres moi ont fait (ou n’ont pas fait) dans d’autres réalités que la nôtre.

Nat travaille pour Morrow, un revendeur-profiteur de Prismes, et assiste régulièrement à des séances de thérapie de groupe animée par Dana, une psychologue spécialisée dans les problèmes humains soulevés par les Prismes.

Et ceux-ci sont nombreux puisque non seulement certains n’hésitent pas à arnaquer leurs prochains (par exemple en soutirant de l’argent à une vieille dame sur le point de mourir sous prétexte de l’envoyer à son paramoi en bonne santé dans une autre branche) mais aussi parce que cela induit tout un tas de questions sur la nature profonde que cache les uns et les autres.

Clou du spectacle de ce second recueil, Anxiety is the Dizziness of Freedom réunit toutes les qualités des précédents nouvelles de l’auteur : un monde crédible de bout en bout, une invention géniale et pas si simple que ça (car ici, l’activation d’un prisme engendre un point de divergence du fait de son utilisation quantique, ce qui veut dire qu’il n’y a pas de possibilité de tomber dans une branche où l’ante-activation est différent), une humanité de plus en plus poignante à travers les récits de Nat et Dana et enfin un questionnement sur la nature humaine lorsqu’elle est confrontée à un libre-arbitre vacillant.

Une réussite à tous les points de vues !



Corrigeant toutes les erreurs de son précédent recueil, Ted Chiang offre ici un condensé de ce que peut produire de mieux la science-fiction moderne. Brillant dans les moindres détails, inventif et audacieux, Exhalation propose une multiplicité de fenêtres sur l’avenir et l’univers, réfléchissant sur notre libre-arbitre et notre existence avec une finesse d’esprit qui n’oublie jamais notre humanité derrière la technologie. Un coup de maître.
Lien : https://justaword.fr/exhalat..
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La tour de Babylone

Quand la science-fiction rencontre le récit biblique





Ted Chiang est un auteur américain de science-fiction qui a réussi l'exploit de recevoir 4 prix Hugo (le Saint Graal du genre) en ne publiant qu'une petite vingtaine de nouvelles depuis 1990. La tour de Babylone sera le premier de ses deux recueils à paraitre en France et sera publié en 2006, il rassemble 8 nouvelles qui s'étalent sur environ 400 pages. Le titre du recueil évoque le récit fameux et mythique de la Genèse qui symbolise à la fois la recherche perpétuelle du savoir et l'hubris démesuré de l'Homme. On le verra, ces thématiques sont présentes dans la majorité des nouvelles du recueil.





La tour de Babylone s'ouvre justement sur la nouvelle éponyme qui nous narre à la façon d'un récit biblique l'ascension grisante d'une tour si haute qu'elle touche (littéralement) le ciel. Un texte inspirant et réussi. À sa suite, on découvre le texte "Comprends" une nouvelle très prenante, plaisante et bien rythmé qui renouvelle plutôt bien le thème éculé du surhomme. À sa suite division par 0 explore les limites des mathématiques, et nous plonge dans le désarroi d'une mathématicienne qui découvre l'incohérence monstrueuse de son domaine de recherche. Quatrième nouvelle du recueil, "l'Histoire de ta vie" est un excellent texte, ambitieux, très bien construit et extrêmement agréable à lire qui a été adapté au cinéma en 2016 (Premier contact). Passé cette première moitié de recueil, cela se gâte un peu : la nouvelle "Soixante-douze lettres" mélange la théologie façon ancien testament (et le thème du golem) avec la hard SF pour un résultat indéniablement original mais dont j'ai déploré le manque de rythme et que j'ai ressenti comme un passage à vide après les superbes textes qui précédait la nouvelle. Suit un court texte, que j'ai trouvé relativement quelconque et typé hard SF "L'évolution de la science humaine". Enfin le recueil se clôt sur deux bons crus, "L'enfer quand Dieu n'est pas présent" nous plonge dans un monde parallèle : une Amérique où la vie après la mort, les apparitions des anges chrétiens, les miracles et les destructions associés sont des phénomènes aussi tangibles qu'un tsunami ou qu'un incendie. On découvre ce monde déroutant par le petit bout de la lorgnette en suivant quelques individus déboussolés. le récit est vivant, original et joue avec le sentiment d'empathie du lecteur en maniant une ironie un peu cruelle. le recueil s'achève sur "Aimer ce qu'on voit, un documentaire", là aussi c'est un texte à la fois accessible et ambitieux qui peut rappeler des auteurs comme Ken Liu ou Greg Egan. La nouvelle nous place à une époque proche et dans l'univers "familier" des campus américains et se fait sous la forme d'un faux documentaire (type L'homme qui mit fin à l'histoire de Ken Liu) : une technique neurologique permet de désactiver nos réactions face à la beauté ou à la laideur des individus, au sein d'une université américaine, un débat (qui va peu à peu prendre une ampleur nationale) s'organise sur l'utilisation de cette technique et son application obligatoire pour les étudiants. Discriminations, sens esthétique, mécanismes sociaux si ancrés en nous qu'ils ne sont pas questionnés, transhumanisme, influence de la publicité et des médias... Sans prendre parti mais avec beaucoup d'acuité, l'auteur soulève nombre de thèmes intéressants et très actuels. Un texte aussi divertissant que réflexif.





Si le plaisir de lecture n'est pas le même pour toutes les nouvelles du recueil je ressors de ce livre impressionné par cet auteur que je ne connaissais pas mais dont le talent me parait certain. J'ai trouvé les textes globalement intéressants et j'admire la capacité de l'auteur à renouveler le genre en en repoussant les frontières, s'inspirant notamment de la Bible et de l'imaginaire judéo-chrétien. Les textes sont ambitieux et questionnent les limites de l'Homme, de nos sociétés et notre relation au divin et à l'altérité. J'ai trouvé ce recueil globalement réussi et plaisant à lire : pas de doute, je me procurerai Expiration, le second recueil de nouvelles de cet auteur.

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Expiration

Je n'avais pas du tout aimé les nouvelles de La tour de Babylone de Ted Chiang, et je ne cours pas après les recueil de nouvelles.

Deux raisons qui me donnent un à priori négatif en ouvrant Expiration.

Mais au fil des pages, il faut avouer que là, Ted Chiang fait preuve d'un grand talent.

Voici neuf nouvelles de qualités différentes, avec souvent des moments de de grandes intelligences et de maitrises dans le choix des sujets (tous très variés), mais gâchées parfois par des longueurs, des incompréhensions, ou de passages que l'on survole. Je ne les détaillerai pas, d'autres l'ont fait parfaitement.

Mes préférées :

Le marchand et la porte de l'alchimiste / le cycle de vie des objets logiciels / L'angoisse est le vertige de la liberté.

Intéressant :

Les notes à la fin du recueil qui donnent les raisons et les idées qu'a eu Ted Chiang pour écrire ces nouvelles.

En résumé, de grandes trouvailles, un talent indéniable, des idées à foison, mais curieusement un ressenti moyen lorsqu'on ferme ce livre.




Lien : https://laniakea-sf.fr/
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La tour de Babylone

Pour faire court, c'est "wouaouh".

Pour moi qui n'aime pas les nouvelles c'est 5 étoiles et la nécessité d'arrêter et reprendre mon souffle entre chaque texte.

Mon édition n'intègre pas les remarques de l'auteur sur chaque nouvelle ce qui est bien dommage car j'aurais aimé en savoir plus sur la façon dont il arrive à ces résultats: des gemmes ciselées à la perfection.



Le langage de Chiang est très maîtrisé et en "sous régime" comme s'il ne voulait pas qu'une langue trop riche vienne s'interposer devant les idées développées dans les nouvelles. Aussi étonnants que soient les concepts, le ton reste toujours calme et rationnel, ce qui amplifie l'effet obtenu (Cf. Quand Dieu n'est pas présent où aimer Dieu, c'est l'enfer).

Il utilise des concepts de SF "dure" avec une approche très humaine. Voir par exemple Division par zéro, ou l'effet d'un théorème sur un personnage… Pourtant c'est probablement la nouvelle la plus émouvante contenant autant de références mathématiques!



Ce qui m'a surtout fascinée, c'est la façon dont la forme même des nouvelles reprend leur contenu.

La tour de Babylone me fait penser aux dessins récursifs d'Escher. Quand la structure du monde se révèle semblable à un cylindre de sceau, le personnage se retrouve au même endroit qu'au début de l'histoire, en approche de la tour.

Dans Histoire de ta vie surtout toute l' histoire est structurée un peu comme le langage extraterrestre qu'étudie l'héroïne, avec 2 lignes narratives aux directions temporelles opposées, sans que cela vienne perturber la compréhension du texte et perturber l'émotion qui s'en dégage.



Bref, lisez-le - même si vous n'aimez pas lire des nouvelles!

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Expiration

On ne présente plus Ted Chiang, le maître incontesté de la nouvelle et de la novella de genre, mais pas seulement. De la grande, de la vraie littérature, le genre d'auteur qui devrait vous faire (définitivement, je ne sais pas, mais on peut toujours rêver) oublier de classer les romans par genre. C'est tellement réducteur, cette histoire de classement par genres. Bref.

À ranger aux côtés du non moins excellent Ken Liu, Ted Chiang est avant tout un conteur extraordinaire, profondément humaniste, totalement original et aux propos proprement inouïs.

Un nouveau chef-d'oeuvre.
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Expiration

Voyage en science-fiction avec ce recueil de nouvelles de Ted Chiang, intitulé Expiration.

J'avais beaucoup entendu parler de ce recueil dans la presse. Les critiques étaient élogieuses et même mon libraire, dont le rayon littératures de l'imaginaire frôle l'anorexie, s'était fendu d'un billet enthousiaste sur la couverture de cet ouvrage



La première nouvelle m'avait convaincue de me procurer ce livre. Le voyage dans le temps, les personnages intéressants et une chute bien trouvée m'avaient tapé dans l'oeil.

Au final, hormis la première nouvelle, je n'ai pas apprécié ma lecture. Tout d'abord le format des nouvelles est assez déconcertant. Certaines sont très longues quand d'autres mériteraient un développement plus long pour une meilleure compréhension.

Je suis passée à côté de plusieurs textes, je n'ai pas compris où l'auteur voulait en venir.

Une petite déception. N'étant pas une grande lectrice de SF, il m'aura peut-être manqué quelques clés pour mieux apprécier cette lecture.

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Expiration

Le bonheur d'un lecteur : lire deux pépites à la suite.

Après l'excellent Room de Emma Donoghue, nouveau coup de coeur, avec ce recueil de nouvelles de science fiction. Je m'étais laissée happée par le bandeau indiquant "auteur de SF, préféré de Barack Obama". Ce qui m'avait fait sourire, car je ne sais absolument pas si mes gouts littéraires se rapprochent de ceux de l'ancien Président des Etats Unis. J'ai toute confiance en lui sur sa capacité à gérer un pays, mais au niveau littérature, qui peut dire "ah oui, Barack Obama m'a recommandé un super livre la semaine dernière". Des collègues de bureau oui, mais pas lui.

Alors j'ai creusé le sujet et quand j'ai vu la collection de prix Nebula et Hugo qu'il avait reçu pour ses nouvelles, je me suis dit que je pouvais prendre le risque d'avoir sur ma table de chevet le même livre que Barack Obama.

Et ce fut un bonheur. Il y a dans ce recueil, tout ce qui me fait adorer la science fiction : des univers à la fois si étrangers et si familiers, des questionnements philosophiques sur le libre arbitre, la place de Dieu, la conscience. La magie des nouvelles qui en un claquement de doigts vous emmènent ailleurs. Un véritable portoloin (comprendront les fans d'Harry Potter).

Coup de coeur pour la première nouvelle qui a des accents des mille et unes nuits. J'ai bien aimé aussi les Digimos sur la conscience des être virtuels.

La vérité du fait, la vérité de l'émotion est à mon sens la plus remarquable, mettant en parallèle l'arrivée de l'écriture avec celle de caméras qui filmeraient nos vies sans arrêt. Se pose alors la question de l'impact sur la mémoire. le risque de transformation de souvenirs sublimés par des souvenirs enregistrés froids et trop concrets.



J'ai retrouvé des sensations et cette curiosité sur le monde que j'avais ressenties en lisant les nouvelles d'Isaac Asimov.

Je continue sans relâche à militer pour cette branche mal aimée de la littérature. Pour moi la science fiction est à la littérature classique, ce que le jazz est à la musique classique.

J'ai d'ailleurs la chance d'avoir dans la ville où je réside, la médiathèque de mes rêves : les romans fiction sont rangés par ordre alphabétique d''auteur, sans tri entre la fiction, les policiers et la science fiction.



Alors, faut-il le lire ? Oui oui oui. Un bon recueil de nouvelles, c'est comme un bon 33 tours : on se demande quelle chanson on préfère, et ça change selon son humeur.

Je prévois La Tour de Babylone bientôt. je vous en donnerai des nouvelles.
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La tour de Babylone

Le titre de ce recueil me semble inapproprié, cette nouvelle n'étant pas du tout représentative des autres. Très concrète et loin des tortures de l'esprit des autres, la lire pourrait vous induire en erreur sur la suite. Les autres nouvelles laissent l'auteur creuser les sujets - parfois longuement - en racontant moins d'histoires mais avec une telle densité de réflexion et d'étonnement !

Les notes de fin de l'auteur, sorte de commentaire sur chaque nouvelle, sont un régal, bien que parfois un peu difficiles à rapprocher de ce qu'on a lu.



La Tour de Babylone : très belle histoire qui n'est pas de la SF mais m'a passionné car j'ai toujours voulu imaginer ce que serait la vie et l'ascension de la tour de Babel. Occasion de découvrir l'écriture de l'auteur, très agréable et fluide. Déception légère à la conclusion, l'explication finale ne m'ayant pas convaincu, sur un strict plan logique et technique. J'aurais à la limite préféré une explication fantastique, cela m'aurait évité de m'interroger sur ce qu'il a voulu dire.



"Comprends" est excellente et extrapole les pensées d'un homme devenu surdoué / surhomme. On glisse dans l'abstraction et aussi, décidément, je ne comprends pas trop la fin et le titre "comprends", mais je ne suis pas certain qu'il y ait plus à comprendre que cela !



"L'histoire de ta vie" commence très bien et l'on pourrait dire que, dans l'ensemble, c'est une excellente idée et qu'on découvre réellement le style de Ted Chiang. Il traite de la communication avec des extra-terrestres qu'il a su créer bien différents et il évoque donc des moyens bouleversant notre vision des choses. Il y ajoute une complexité dans sa réflexion technique et mathématique, ainsi qu'un parallèle avec une autre vie. La nouvelle est très originale et ce style est bien étrange, il ne plaira pas à tout le monde, d'autant qu'elle est très longue et se résumerait en très peu ! Cette nouvelle a inspiré le film Premier Contact.



"Soixante-douze lettres" est très longue et introduit un univers steampunk lui aussi fort original, basé sur la culture hébraïque. Les automates ont des qualités en fonction de leur nom. Esotérique. Il y a beaucoup de longueurs jusqu'à la scène d'action finale qui est superbe.



Toujours dans le religieux dans "l'Enfer, quand Dieu n'est pas présent" qui m'a beaucoup plu. L'intervention d'anges visibles de tous et provoquant autant de guérisons miraculeuses que de décès ou malheurs interroge sur les sujets classiques du christianisme : l'intervention de Dieu dans tout ça, le libre arbitre de l'homme, l'injustice et la rébellion devant les horreurs de la vie. Avec un final sur la foi assez fort et allant dans le sens de la chrétienté. Mais qu'il est difficile de l'avoir, cette foi, qui ressemble à un état d'esprit !



"Aimer ce que l'on voit" est ma préférée. Traitée sous forme d'un documentaire (comme chez un certain Ken Liu), elle entre dans ma catégorie favorite en SF : "et que se passerait-il si ?". Là c'est très fort avec un processus qui permet à chacun de décider de "lisser" la beauté ou la laideur physiques chez les personnes que l'on croise. L'auteur joue avec nos nerfs, nous avons une opinion, puis une autre, sommes émerveillés par toutes les implications de cette invention. Cela peut aller très loin et s'étendre à d'autres domaines de la pensée. Terrifiant, génial et horrible car il s'agit d'anticipation ! A rapprocher de certains épisodes de la série "Black Mirror" et de ma nouvelle "La Pire".



"L'évolution de la science humaine" est un article d'anticipation ou prospective très amusant.



"Division par zéro" : je suis totalement passé à côté. D'ailleurs le hachage de la nouvelle par des considérations mathématiques ne m'a pas intéressé plus que ça, ne voyant pas le rapport avec le texte.



J'évite toujours le biais de la critique orientée par les prix ou la renommée, je suis donc allé voir le palmarès impressionnant des nouvelles de ce recueil après ma lecture !




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Expiration

Des prix Hugo bien mérités



J'ai découvert Ted Chiang, écrivain américain contemporain de science-fiction, il y a un peu plus d’un an avec son recueil La tour de Babylone que j'avais bien aimé. Cette fois, j'ai vraiment été estomaqué par l'excellente qualité de ce recueil de nouvelles de S-F qui tournent autour de la notion de libre arbitre. Fait rare, sur les neufs nouvelles présentes dans cet ouvrage, trois ont reçues le prix Hugo (sans doute le plus prestigieux prix pour les récits de science-fiction récompensant, entre autres, les meilleures nouvelles/novella pour une année donnée).





S’il est toujours permis d’interroger sinon de critiquer les choix d’attribution d’un prix (en littérature comme ailleurs), je crois comprendre ce qui a pu séduire autant dans les nouvelles de Ted Chiang : Cet auteur, pourtant peu prolifique (En 25 ans d’écriture, il ne publia en tout et pour tout que deux recueils de nouvelles dont celui-ci publié en 2019 aux Etats-Unis) sait mélanger avec talent des éléments appartenant à différents genres et sous-genres littéraires qui ne se rencontraient pas ou peu : ici, peuvent cohabiter la religion et la science, l’imaginaire américain et oriental et s’entrecroiser des influences très disparates. Mieux, il innove dans chacun de ses récits et tout au long de l’ouvrage.





Ted Chiang débute son recueil sous la forme d'un petit conte philosophique qui emprunte son atmosphère aux mille et une nuits et qui explore l'hypothèse d'une destinée immuable et inflexible pour chaque humain à travers une porte permettant de voyager à travers le temps. J’ai retrouvé dans ce texte bien des ingrédients que j’apprécie chez l’auteur argentin Jorge Luis Borges : gouts pour les mythes et les légendes, amour des paradoxes et jeux de miroirs entre les doubles et les époques.

Un peu plus loin dans le récit, Expiration, qui donne son titre au recueil, se situe dans un monde mécanique de robots conscients. Cette nouvelle qui m'a rappelé Les dieux eux-mêmes d'Isaac Asimov explore également l'absence de libre arbitre.

Après cela, on enchaine directement sur « le cycle de vie des objets logiciels », contrairement à ce que le titre un peu froid pourrait laisser penser, on retrouve là une nouvelle invitant à la réflexion sur les limites de l’humanité, la réalité des sentiments tout en laissant une grande place à l’empathie pour les personnages (humains et « animaux numériques »). Du grand art !

Quelques nouvelles plus loin, le récit « Omphalos » nous immerge dans un monde où les preuves scientifiques du créationnisme abondent mais dont les chercheurs découvriraient à leur grande déception que la Terre n’est néanmoins pas le centre de la création. On retrouve ici le mix réussi entre l’imaginaire judéo-chrétien et la science-fiction qui était très présent dans le précédent recueil de l’auteur La tour de Babylone.

Les autres récits sont peut-être un peu moins mémorables mais restent d’une très bonne facture et j’ai rarement trouvé autant d’excellentes nouvelles dans un même livre.





Je recommanderai très volontiers Expiration de Ted Chiang à toute personne appréciant de près ou de loin la science-fiction. Via cette lecture, j’ai pensé aux textes les plus aboutis d’auteurs contemporains comme Greg Egan ou Ken Liu qui ont (avec bien d’autres) réussi à repousser les limites du genre science-fiction et ont souvent préférés à l’exploration de l’espace extérieur, l’étude des espaces intérieurs. Mieux, j’ai eu l’impression que Ted Chiang parvenait à creuser des thèmes plutôt typiques de la hard SF tout en ouvrant largement son ouvrage à tout type de lecteur et en y apportant une sensibilité qui manque souvent aux textes de ce sous-genre. Ce livre fut mon second coup de cœur de 2022 et un immense plaisir de lecture.
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Expiration

Il s'agit d'un recueil de nouvelles dans mon genre de prédilection en matière de science-fiction : le "et que se passerait-il si… ?" dans lequel Ted Chiang excelle. Quel est son secret ? Une grande capacité à penser à tout. Au-delà de l'idée, du concept, il faut que tout fonctionne et que les questionnements du lecteur et les incohérence soient évacuées. Et il sera aussi nécessaire d'avoir un scénario pour mettre en valeur tous les éléments, en faire une belle démonstration, en somme.

Dans ce recueil, Ted Chiang offre plus de matière à réflexions qu'il ne raconte d'histoires.



Il ne conviendra pas à tous les lecteurs de SF. Il faut en plus apprécier la démarche scientifique, celle de la recherche et du travail méthodique. L'auteur balance souvent entre l'article scientifique et l'histoire. Il est indispensable de faire l'effort de comprendre la technologie ou la bizarrerie exposée. La démonstration tourne à la prouesse car il aborde les conséquences humaines avec le plus grand soin. C'est en général pour nous offrir un plaisir immense de partager avec lui ces situations hors normes.



Petite sélection, je ne mets ici qu'un paquet des quatre meilleures - ou plutôt celles qui m'ont le plus interpellé, fort différentes de celles qui ont été primées - mais sans tentative de classement (les autres sont sur le billet de blog disponible en suivant le lien) :



L'angoisse est le vertige de la liberté

Jubilatoire d'un bout à l'autre. Une machine quantique nous permet de communiquer avec des mondes parallèles au notre, des branches de nos vies. Imaginez un peu l'inventaire des cas et des possibles. L'auteur nous offre une magnifique histoire, véritablement passionnante, doublée d'une réflexion sur le libre arbitre et la personnalité.



Ce qu'on attend de nous est un petit bijou de quatre page qui revisite encore le niveau temporel en évoquant le déterminisme, le libre arbitre. Lu deux fois pour être sûr de me délecter de chaque mot. Totalement fictif car partant d'un postulat de base peu crédible (en l'état actuel de nos connaissances) qui entraine des conséquences un peu folles.



Le grand silence est géniale et fort étrange. Et pour cause. Il s'agit des textes appuyant une exposition d'artistes. Passionnante réflexion sur l'absurdité de la recherche de civilisations extraterrestres alors que nous ne comprenons même pas les civilisations qui nous côtoient. La réflexion qui en ressort est celle-ci : les animaux sont des civilisations à part entière et nous ne savons pas les comprendre. Pis que ça : nous ne cherchons pas à les comprendre !



La vérité… est tantôt un traité, tantôt une chronique qui nous emmène dans un monde où l'on peut revoir les souvenirs filmés par nos yeux. Cela rappelle un épisode de Black Mirror mais ici l'auteur n'est pas obligé de faire dans le sensationnel. Il reste dans l'humain avec des problèmes de personnalité et de perception de la vérité. Le final est sublime et la réflexion de cette nouvelle est parfaite sur deux points : la nécessité de prendre conscience de l'impact des sauts technologiques comme l'écriture et les enregistreurs ; la manière dont nous nous percevons et nous agissons. Il a réussi à me faire reconsidérer certains points de ma personnalité. Objectif dépassé, et merci !


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Expiration

C’est peu dire que ce recueil était attendu, tant le premier avait marqué les esprits. Et, pour moi, c’est une promesse tenue, tant certains textes sont puissants et prenants. Mais surtout, lire des nouvelles de Ted Chiang, c’est l’occasion de s’interroger sur notre monde et sur son avenir. Sur nous et sur nos actes. Car il pose des questions essentielles sur la direction que peut prendre notre civilisation grâce à certains potentiels progrès technologiques. Mais pas seulement. Parfois, l’invention n’est qu’un prétexte à une réflexion profonde sur nous.



Ces nouvelles sont passionnantes par les thèmes abordés, mais aussi par leur traitement : Ted Chiang observe son sujet sous toutes les coutures et nous le présente sous forme claire, mais emplie de réflexions, d’arguments, d’exemples, qui enrichissent la réflexion, mais sans lourdeur (pas comme cette phrase). Les personnages sont souvent attachants, sans être trop creusés. Les trames se répondent : l’auteur utilise souvent plusieurs personnages ou arc narratifs parallèles pour apporter du relief aux histoires, mettre en perspective les points abordés. Et, en découvrant des tranches de vie, on se retrouve à se poser des questions sur notre façon de vivre. Et les possibilités que nous réserve l’avenir.



« Le marchand et la porte de l’alchimiste » : prenez un conte digne des Mille et une nuits et ajoutez une pincée de science-fiction avec le voyage temporel et vous aurez la recette de cette nouvelle enthousiasmante. Quel bon départ ! Un homme découvre chez un marchand une porte qui lui permet d’aller dans l’avenir. Une autre, dans une autre ville, lui permettra de retourner dans le passé. Sa propre histoire est entrecoupée d’autres contes qui lui donnent à réfléchir.



« Expiration » : Le narrateur est un robot. Dans son univers, les habitants vont régulièrement changer leurs réserves d’air, utile pour le fonctionnement de leur cerveau. Mais peu à peu, ils s’aperçoivent de dysfonctionnements. Le narrateur va disséquer son propre cerveau afin d’en comprendre le fonctionnement et imaginer les raisons de ces problèmes.

Une réflexion un peu trop désincarnée pour moi.



« Ce qu’on attend de nous » : Une invention, le Déducteur, met à mal notre libre arbitre : elle est capable de s’allumer une seconde avant que nous ne pressions sur son bouton. Autrement dit, elle semble savoir avant nous le geste que nous allons faire. Comment réagirions-nous devant ce phénomène plus que déstabilisant ? L’espèce humaine y survivrait-elle ?



« Le cycle de vie des objets logiciels » : pièce de résistance de ce recueil, puisqu’elle en compose presque le tiers, cette nouvelle imagine des êtres numériques, les digimos. On doit les élever afin de les voir se développer. Les problèmes se multiplient avec les années qui passent. L’entreprise à l’origine du projet fait faillite. Puis c’est la plate-forme qui leur sert d’univers virtuel qui va devoir migrer vers une autre, plus moderne. Chaque étape apporte sont lot de questions, d’abandons.Une réflexion au long terme sur les créatures numériques, loin des fantasmes sur les I.A. toutes puissantes. Autrement plus réaliste, et donc indispensable.



« La nurse automatique brevetée de Dacey » : Dans l’Angleterre du XIXe siècle, élever son enfant ne va pas de soi. Trouver une bonne nurse en qui on a confiance n’est pas nécessairement chose aisée. Aussi, le mathématicien Reginald Dacey invente-t-il une nurse mécanique. Mais un accident va mettre fin au projet. Le fils de Dacey, Lionel, voudra plus tard venger l’honneur de son père en prouvant qu’il avait raison. Quelles conséquences pour un jeune enfant que d’être élevé par un être mécanique ?



« La vérité du fait, la vérité de l’émotion » : Et si nous pouvions enregistrer tous les moments de nos existences ? Et si nous pouvions accéder à chacune des scènes où nous sommes apparus ? Mais si la « vérité » est toujours accessible, que reste-t-il des émotions nées de souvenirs retravaillés nuit après nuit. Si nous avions le choix, que choisirions-nous ? Mais, de toute façon, aurons-nous le choix ?



« Le grand silence » : Quelle émotion de lire cette nouvelle quelques jours après la destruction du radiotélescope d’Arecibo dont il est question ici ! De ce texte émerge déjà une certaine tristesse, une mélancolie désabusée. Avec la coïncidence de l’actualité en plus, elle devient encore plus forte. Un perroquet s’adresse à nous autres, humains, qui recherchons de la vie extraterrestre, alors que nous détruisons une « civilisation » proche, celle des perroquets. Et nous restons sourds à leurs messages, la tête tournés vers les étoiles.





« Omphalos » : Dans ce monde, la science est liée à la religion. Elle sert à prouver que Dieu a créé le monde à telle date, même si elle paraît trop récente. Mais une découverte astronomique va bouleverser tout cela : la planète où habite la narratrice ne serait pas le centre de l’univers, comme on pouvait le penser jusqu’ici. Une autre planète a cette chance. D’où une intense remise en question par une partie de la société. Tandis que l’autre s’accroche à ses croyances.



« L’angoisse est le vertige de la liberté » : une nouvelle invention, le prisme, permet de communiquer avec son (ou ses) parallêtre(s), double d’un autre monde, parallèle au nôtre, mais issu de choix différents. Quoique, les scientifiques ne sont pas aussi affirmatifs. Mais là n’est pas le centre de l’histoire. Ted Chiang, dans cette nouvelle, s’interroge sur notre libre arbitre (encore). Si une version de nous-mêmes est capable de tuer, pourquoi pas nous? Si une version de nous-mêmes est heureuse en mariage quand notre couple bat de l’aile, comment supporter longtemps cette injustice ? Encore des questions d’une grande pertinence insérées dans un récit bien mené, qui tient en haleine jusqu’au bout, avec ses personnages criants de vérité.



Vous l’aurez compris, lire Expiration a été pour moi une évidence et un moment de détente pour tous ces récits envoûtants, mais aussi la source de bien des réflexions qui nourrirons encore longtemps mes pensées.
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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La tour de Babylone

Beaucoup d’auteurs se lancent dans l’écriture en commençant par des nouvelles, comme si c’était réservé aux débutants. Et pourtant, j’ai toujours considéré ce format comme un genre à part entière, difficile à maîtriser. En effet, l’auteur doit être capable d’immerger le lecteur dans un univers très rapidement, de tisser une histoire cohérente et de l’emmener vers une vraie fin, si possible surprenante.



Dans ce recueil de Ted Chiang, tout est là : style, personnages, histoires. Chaque nouvelle nous entraîne dans un monde à part, parfois très proche du notre. L’auteur met souvent en scène une quête de l’Homme, qui aboutit à une chute étonnante et absurde, sur des sujets qui font réfléchir : Dieu, notre avenir sur Terre, l’impact des apparences sur notre société… Tous ces sujets sont vraiment bien amenés et peuvent être sujet à réflexion, à débat. Personnellement, la dernière nouvelle sur le dictat de la beauté m’a vraiment percutée. Si un jour, la science en arrivait à ce point, est-ce que je pourrais me laisser tenter ?

Dans toutes les histoires, les protagonistes prennent une décision, ont un avis. Mais l’auteur ne donne pas l’impression de trancher. Il laisse le lecteur libre de son propre débat intérieur.

Les personnages sont parfaitement bien construits, leur psychologie est finement analysée. On ressent la tension et la paranoïa de Leon, le désespoir de Renée, le questionnement de Tamera. Le lecteur vit avec eux intensément pendant quelques pages.

A la fin du recueil on trouve des notes de l’auteur sur chacune des nouvelles, expliquant d’où vient l’idée du sujet. Cela permet d’éclaircir quelques points flous, d’avoir la sensation de partager un moment avec l’auteur. J’aime cette idée.

Globalement, ces nouvelles m’ont laissées une très bonne impression, et certaines me marqueront d’ailleurs plus que les autres : La Tour de Babylone, L’histoire de ta vie et Aimer ce que l’on voit : un documentaire. Sur les 8 nouvelles, il n’y en a qu’une pour laquelle je suis totalement passée à côté, L’évolution de la science humaine. Mais comme elle est vraiment très courte et que les 7 autres sont remarquables, je la laisserai de côté et considère que le manque de compréhension vient de moi.

Je lui attribue donc 4 étoiles : une pour le style fin et agréable, une pour les personnages crédibles bien que dans un univers de Science-fiction, une pour les différentes histoires émouvantes et intéressantes et la dernière pour la recommandation.
Lien : http://lesnouvellesplumes.ov..
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Expiration

Merci à la communauté de Babelio !



Je n'avais pas plus que cela accroché au premier livre de nouvelles de l'auteur et le fait de savoir qu'Obama avait adoré ne me semblait pas vraiment un argument majeur pour acheter ce livre. Je dégaine mon portable, bigre, plus de 4 étoiles de moyenne sur mon site préféré pour un livre de nouvelles, c'est rare... Je me laisse tenter.



Je ne vais pas détailler chaque nouvelle ni me lancer dans un commentaire détaillé, il y a de très bons avis ici déjà, j'assume donc, avec libre arbitre et bonne conscience, cette défausse.



En revanche je veux partager mon plaisir et recommander cet ouvrage. Il réussit à être brillant (Je pense à Greg Egan par exemple) tout en étant accessible ; à être humain et profond sans être lourd et pontifiant et à nous placer en abyme un peu à la façon de Black Mirror quant à l'évolution de notre monde et des questions qu'il nous pose. Réunir ces 3 points pourrait sembler une gageure mais elle est réussie. En prime chaque nouvelle est très différente des autres et l'ensemble du livre a un rythme propre, une structure.



Ce que j'ai lu de mieux en SF cette année, à découvrir pour qui aime le genre mais aussi par qui est simplement curieux "des hommes, des choses et de ce qui les lie".

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La tour de Babylone

Je me rappelle avec nostalgie du premier roman de science-fiction que m’ont conseillé un libraire et un autre client. J’étais venue pour acheter Dune. Ils avaient jugé que pour une entrée en matière dans ce genre littéraire, c’était trop ardu. A la place je les avais laissé me refourguer La Stratégie Ender. Et je pense qu’ils ont eu raison. Ce recueil de nouvelles a lui aussi des côtés assez exigeants, tout à tour très mathématique, scientifique, voire théologique.

J’avais déjà lu Expiration du même auteur, et vraiment apprécié la précision et la richesse des mondes et des réflexions qu’il nous offre. Dans ce recueil, c’est toujours le cas : c’est fascinant, déroutant, vraiment intelligent. Ce qui fait du bien dans ce monde où le risque est grand de tomber sur des écrits médiocres.

Là promis, pas de médiocre, de tiède ou d’approximatif. Vous allez partir plus loin que votre imagination ne l’avait prévu. Vous allez sortir du cadre. Parfois cela demandera une certaine gymnastique cérébrale. Preparez-vous aux courbatures de matière grise. Pour ma part j’ai été un peu perdue par les principes mathématiques et scientifiques de Division par zéro et L’histoire de ta vie. J’ai retrouvé mon aversion pour ces matières dont l’utilité me paraissait trop théorique pour être dignes d’intérêt. Alors oui, je l’avoue : il m’est arrivé de lire des romans pendant ces heures de cours. Ce qui a certainement participé au fait que je suis ici aujourd’hui à écrire sur ce recueil. Et si les mathématiques menaient à la littérature ? J’ai adoré la nouvelle qui donne son titre au recueil, et coup de cœur aussi pour la dernière, qui s’interroge sur le sens de la beauté.

En fait, comme tout bon recueil de nouvelles, je m’attends à ce qu’elles reviennent titiller mon intellect, venant superposer des réflexions sur les choses que je vais vivre dans les prochains mois. D’où l’expression : je vous en donnerai des nouvelles !!

Alors, faut-il le lire ? Oui si vous êtes déjà familiarisé avec la science-fiction. Pour les autres, on n’apprend pas à conduire sur une Ferrari. Alors allez-y molo pour démarrer. Tentez un Bordage, Silverberg ou même La Stratégie Ender de Orson Scott Card.
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Expiration

Après tous les prix reçus pour ses deux livres, et après ce qu'en dit B. Obama ("Le meilleur de la SF"), nos avis de simples mortels sont presque insignifiants. Alors autant faire court : cet ouvrage c'est de la haute gastronomie. Cette imagination si variée, qui paraît si simple, et cette écriture minutieuse, c'est de la broderie cousue d'or. Chaque nouvelle demande une réflexion, un arrêt, un temps. C'est assez rare.

Les explications finales du pourquoi de chaque nouvelle est une excellente idée aussi.
Lien : https://www.facebook.com/liv..
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Expiration

Il y a quelques années, je lisais le premier recueil de Ted Chiang, La tour de Babylone, auréolé de critiques enthousiastes. Pour ma part, j'avais trouvé cela moyen et très froid, malgré quelques bons textes comme celui qui a donné le film The Arrival. Je n'étais donc guère chaud pour lire ce nouvel opus, mais les premiers retours m'avaient donné l'envie d'y jeter un oeil. Et au final, j'ai bien fait de changer d'avis, les différentes nouvelles sont plutôt pas mal, voire très bien, Ted Chiang ayant abandonné en grande partie sa froideur pour un peu plus d'humanité.



J'ai lu Expiration il y a un an environ, certain d'avoir publié mon avis. Lors d'un tri de mon bloc-notes, un doute survint : L'ait je vraiment fais ? Après moult recherches, il s'avère que non. Pourtant, je me souviens l'avoir fait, donc deux solutions : le phénomène du déjà vu, ou les réalités parallèles existent... Peut-être avez vous donc déjà lu cet avis, ce qui signifie que nous nous connaissons dans une autre réalité. Quoiqu'il en soit, dans ta grande chance, j'avais rédigé mon avis après chaque texte.



Le Marchand et la porte de l'alchimiste

Un conte oriental autour du voyage dans le temps. J'ai été de suite transporté dans ce récit qui interroge la notion de libre arbitre. Un très bon démarrage.



Expiration

Rares sont les textes qui ne comportent aucun être humain, en voici un à ajouter à cette courte liste. (liste que vous pouvez trouver sur le FB Fan de SF) Dans une ambiance steampunk, une autodissection d'un robot va interroger une nouvelle fois la notion de libre arbitre.



Ce qu'on attend de nous

Un nouvel objet a fait son apparition, le déducteur, un simple gadget, un casse-tête : quoique que tu fasses, le boîtier clignotera une seconde avant que tu n'appuies dessus. De quoi tenter par tous les moyens de trouver comment faire mentir la machine. Mais si tu n'y arrives pas, est-ce à dire que tout est déjà joué par avance ? De quoi en perdre son esprit...

Texte court et rigolo. Mais flippant.



Le cycle de vie des objets logiciels

Fatigant, ronflant, chiant. Littéralement. J'ai mis 4 jours à lire ce texte de 130 pages qui a eu l'effet d'un somnifère surpuissant sur mon organisme. Je n'ai jamais autant dormi de toute ma vie en si peu de jours. Un texte qui devrait être remboursé par l'assurance maladie. Une approche non médicamenteuse pour traiter l'insomnie. Je n'ose même pas vous en faire un résumé tellement j'ai peur de me rendormir...



La nurse automatique brevetée de Dacey

Il s'agit ici d'un article universitaire autour de l'éducation des enfants. Quelle méthode pédagogique pourrait être la meilleure ? Un robot ? Mais qu'en est-il de l'attachement dans ce cas ?

Rare de voir cette thématique abordée en SF, et ce texte pose beaucoup de questions et d'interrogation qui m'ont bien plu.



La vérité du fait, la vérité de l'émotion

Voici une histoire contée par un journaliste sur une nouvelle technologie naissante, une sorte de moteur de recherche indexant notre vie filmée. Non sans rappeler un épisode de la série Black Mirror, il le dépasse largement par son analyse de cette technologie. Voilà un texte magnifique, qui lie histoire orale et histoire écrite, souvenirs réels et souvenirs fabriqués. Cela faisait longtemps qu'un texte ne m'avait pas autant transporté. Tout simplement excellent.



Le grand silence

Un texte qui porte bien son nom, car je n'ai pris aucune note dessus et je suis bien en peine de vous en toucher un mot. Alors soit il était génial et m'a coupé le sifflet, soit c'est une grosse merde et j'ai été trop atterré pour en dire un mot. A vous de choisir.



Omphalos

Un monde où science et religion sont en osmose pour décrire la création. Bienvenu chez les créationnistes. Une démonstration par l'absurde où l'auteur crée un univers du point de vue des adeptes de cette théorie. On perd un peu ses repères face à ce changement de paradigme, difficile de mettre en question ses certitudes sur le commencement. Un texte fort intéressant dans son propos, moins dans son récit, ayant eu l'impression de voir un texte à message. Démonstration brillante, mais froide.



L'angoisse est le vertige de la liberté

Et si ? Nous nous sommes tous posé cette question à propos d'un événement qui nous est arrivé. Dans ce texte, un ersatz d'ordinateur crée des réalités parallèles quantiques dès son activation. En achèteriez-vous un pour connaître une version alternative de vous ? Ted Chiang explore les conséquences individuelles et sociales d'une telle découverte. Mis à part la morale finale bienveillante (on peut tous devenir quelque qu'un de mieux si on s'en donne les moyens), un très bon texte.



L'ensemble se clôt par quelques mots de l'auteur sur l'origine des textes et ce qu'il a voulu y exprimer. Un petit plus fort appréciable. Seule ombre au tableau, le prix et les DRM.
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