La pleine lune est pour les non-humains… Elle peut en rendre fou plus d’un, quand on s’y attend le moins…
« Y aurait-il, de par ce vaste monde, des hommes qui jamais empestent la ţuica ? » La Marika de s’interroger à haute voix. « Papa empeste, l’amant empeste, le mari de même, le voisin à l’avenant… Des gueules de brandevin, tous autant qu’ils sont, au point qu’on saurait même plus les imaginer d’une autre façon. Embrasser une bouche propre, qui refoule plus de puanteurs… c’est comme se trouver au paradis ! »
Ça ne nous gênait pas trop, qu’elle se fit culbuter par autant de coquins que son croupion pût tenir, le chiendent c’est qu’elle s’était mise aussi à se frotter à des hommes mariés, on eût dit que ça la démangeait de la tête aux pieds, et qu’elle pût se gratter qu’avec des membres dressés … !
Mes perplexités devaient de la réalité toute particulière incarnée par Mère-vieille elle-même et par le hameau de Petra. Un hameau en train de perdre son souffle. Un hameau grouillant d’étranges histoires insensées, qui allaient me happer telle une toile d’araignée.
Si certains personnages de ce livre sont un pur produit de mon imagination, moi-même ne pourrais-je pas être un produit de l’imagination de mère-vieille ?
Ses cheveux sont coupés en brosse, à deux centimètres environ du crâne, comme ceux d'un boxeur... Telle une auréole blanche. Qui lui donne comme un air de jeunesse, carrément voyou, il ne lui manque plus qu'une touffe teinte en vert, juste au milieu, pour qu'elle soit une vraie punk... Une blague idiote.
"C'est fou ce que ça vous rajeunit, vous devriez renoncer à porter ce foulard...
- Et pourquoi pas ces nippes, les troquer contre une minijupe et aller faire un tour dans les collines, sifflant après les garçons ", mère-vieille de dire, tout en remuant le foulard sous son menton.
"J'aimerais bien vous prendre en photo...
- Tu te fous de moi, là, ça va pas la tête ?!
- Ben alors, pourquoi les avoir coupés ?" arrive ma question candide, comme un cheveu sur la soupe.
"Surtout pas pour que tu me tires le portrait. C'est pour que... je sois plus obligée de les laver trop souvent. Tu sais, me pencher sur la bassine, ça devient de plus en plus dur pour moi... T'en as parfois, de ces idées stupides, ma parole..."
Un portillon troublant par son inutilité. Un portillon troublant de beauté, qui ne demande as à être ouvert, mais juste admiré. On passe outre en le contournant, sans le toucher surtout, tel un objet rare… Une image de la solitude orgueilleuse…