Comment accepter de la quitter ? Le médecin m'a parlé entre quatre yeux, ce matin. C'est maintenant. On y est.
Un brouillard de larmes aveugle mes yeux.
L'eau est partout, dedans, dehors, le monde n'est qu'une eau courante qui glisse et qui s'échappe, mes larmes comme la mer, la mer comme nos corps, rien que de l'eau qui coule sans fin.
Angèle.
...Angèle a émis des râles en dormant, de faibles râles, toutefois cela a suffi pour me réveiller. Les bruits d'Angèle sont les seuls qui peuvent me tirer du sommeil. J'ai si peur qu'elle ne meure sans bruit à côté de moi, sans prévenir, sans mon regard pour lui dire au revoir, que le moindre gémissement me fait sursauter.
... deux vieux sur un banc, et le temps file sans s'occuper de nous, il n'a pas besoin de nous pousser trop fort, il sait qu'il nous aura, nous ne sommes qu'en sursis.
Elle appuie sur sa gorge pour parler. C'est un peu comme un talkie-walkie, on appuie pour parler, on relâche pour écouter.
Beaucoup de galériens, dans un étrange paysage où la beauté altière des montagnes se marie aux installations rouillées des usines abandonnées.
Jean Servein ne se départ jamais de son infinie courtoisie, mais on devine en lui une dévotion possessive envers sa femme qui nous tient fermement à distance.
Il veille sur elle comme sur un trésor convoité par des mercenaires, qu'il aurait pour mission d'amener à bon port.
Notre curiosité bute en vain, refoulée sans trêve, sur son souriant mystère.
Je marche vite, pour semer derrière moi le bruit des hélicoptères et le sourire de mon frère. Pour semer mes larmes et ma colère. Me purifier dans l’effort, dans le silence habité de la nature, dans la beauté minérale des aiguilles rocheuses.
La soirée touche à sa fin.
On regagne la voiture.
Pendant le retour, personne ne parle, on savoure juste, les yeux perdis dans l'étroit faisceau des phares, tandis que la tête de Justine dodeline, appuyée contre le bras de sa mère.
Quand j'ai déposé tout le monde, je rentre, et je m'aperçois que j'ai encore ce sourire béat collé à la bouche. C'est la meilleure soirée que j'ai passée depuis longtemps. Promis, la prochaine fois, je me lance, je danse.
Annette y est allée, elle a farfouillé dans le bac des livres pour les petits, et elle a trouvé un livre où le héros était un robot. Elle a dit à la petite fille : « Tu vas voir, personne ne fait la voix de robot aussi bien que moi! » (p. 146)
J'imagine qu'à mesure que la vie passe, on est hantés par de plus en plus de fantômes.