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Citations de Jean-Luc Coatalem (197)


Du jardin, on sent la présence magnétique du fleuve, ses lents glissements de boues et d'alluvions, ses miroitements gras, sa mélopée fertile. Le grand fleuve Paraguay, cousin du Parana, passe au ralenti à moins de deux kilomètres de là, léchant les quais d'Asuncion…
Derrière moi, un gosse au teint encaustiqué ramasse les balles du tennis défoncé pour au autre gosse en pull bleu marine et aux cheveux bien peignés qui s'obstine à parler anglais.
Il est cinq heures. La nuit noire du Paraguay est déjà là, surgie du jardin qui semble y infuser, et où naviguent, poudrés, de pâles et zigzagants papillons.
Mardi jette son torchon, mercredi relève le gant. Au bout du ténébreux tunnel, ce sera déjà demain.
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Pour les nouilles froides, il y a deux écoles de pensée. Faut-il les déguster l'été pour qu'elles vous rafraîchissent ( froid dans le chaud = effet froid ) ou l'hiver afin qu'elles produisent un choc salutaire ( froid dans le froid = effet chaud ) et vous requinquent ? Je n'ai pas su trancher, on était au printemps.
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La vie est un cadeau à saisir, Lucas,un cadeau décevant, certes, mais un cadeau quand même.
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Vous avez eu froid, très froid. Affolé, votre coeur tapait comme un tambour. Comme un appel. Le ciel pesait de tout son poids. Vous avez bu ce qu'il y avait dans le gobelet, sucé la dernière orange du pique-nique, puis, à demi allongé, fini par lâcher la rampe des instants, et c'est alors que vous avez cru percevoir quelque chose, un frôlement, un feulement, un bris de branches, petites notes fragiles et discontinues, une forme se hissant sur le tertre. Du secours ? Non, cette fois, personne de ce bas monde, mais la licorne, la licorne de jadis aux grandes ailes duveteuses, celle au fin sourire, qui venait de son pas ample pour adouber son chevalier. Auriez-vous la force de sauter sur son dos musculeux, de serrer les jambes derrière ses ailes, d'aller avec le vent ?
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Le vent fait bruisser les arbres, les agite - ils dansent et tanguent. Vous relevez la tête en souvenir du marcheur surmené que vous avez été. Mais l'ascension s'est suspendue ; vous ne redescendrez jamais au camp de base. «Présence... Absence», répétiez-vous dans une ultime lettre. Voilà, enfin, la licorne au regard diffracté qui s'en revient entre les hêtres. elle vous sourit et vous lui souriez, en retour, c'est l'instant des évidences. Vous lui tenez si fermement la crinière que vous ne savez plus si cette amie du vent vous précède, vous suit ou cous accompagne. Alors la pluie bretonne délave vos yeux gris et morts.
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Pourquoi ce nom absurde de Louis Noel ? Pourquoi pas Marc Pentecôte ou Gabriel Toussaint ?
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Mais qui allait dire ce qui m'étouffait à soixante-dix ans de distance ? Et pourquoi me fallait t-il en tant que fils, depuis que je m'étais décidé à écrire là-dessus, raconter à mon père, contre sa volonté, le destin broyé du sien ? Paradoxalement, ce manque originel de récit familial, ce trou généalogique, aura fait de moi un écrivain. À tout, si j'y réfléchis, j'allais préférer les histoires exotiques, les personnages et les décors tropicaux, comme si j'avais à multiplier les hypothèses. Et même mes livres précédents, je m'en rendais compte avec du recul, comme ceux consacrés à Gauguin ou au Brestois Victor Segalen, artistes démangés par l'inconnu et poussés par le secret, en portaient l'écho. Ils appelaient déjà celui à venir.
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Vous n'êtes pas d'un naturel liant. vous ne jouerez au bridge avec personne. Vous ne commenterez pas l'actualité des journaux avec quiconque- les étudiants chinois qui se soulèvent à Pékin, les répercussions de l'assassinat du révolutionnaire Zapata au Mexique, les affrontements entre syndicalistes et forces de police à Paris, auxquels vous êtes indifférent. Vous vous montrez très poli mais en tenant toujours les autres à distance
. Vous affichez et revendiquez votre solitude. L'entourage la respecte. Tout juste quarante et un ans et ce mélange extraordinaire chez vous, sur votre visage comme dans votre allure, d'homme mûr et d'enfant. Fébrile et très fatigué. (p. 11)
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Sans doute est-il préférable que vous restiez ainsi, apparaissant ou disparaissant dans le chantier de vos écrits ou sur les pointillés des cartes de la Chine. Si étrange, si attachant, dans le vent des royaumes qui vous redonnent vie. Taiseux, secret, plein d'élans, cherchant le son juste, le dessin sûr, la ligne exacte. Insaisissable comme ces chats que vous aimiez tant, qui vont et viennent quand bon leur semble, partagent leur territoire sans le céder, pris dans un songe sans fin et solidaire.
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Il y avait des gouttes de lune dans l'herbe rêche. Les talus étaient à la fête. Les oiseaux endormis dans la lande jetaient des pépiements. Qui étaient-ils? Des autochtones ou des migrateurs? Puis tout ça s'étouffait. L'été avait été chaud, et la tempête, en mouillant les terres, laissait s'exhaler une odeur de pierre à feu entre les rochers, de genêt mouillé et d'embruns.
Plus bas, dans les à-pics, la brume salée maquillait les criques effilées de Penn-Ar-Ru-Meur. Une onde sonore en montait, grosse d'écho, de réverbérations acoustiques. Vivante. Autour, le granit ajoutait fantasmagorie, fêlures et sifflements.
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Allais-je avoir une chance de mettre mes pas dans les leurs, et de rattraper ce qui m'aura été dissimulé, si peu transmis ? Un souvenir, des éclairs, une présence profonde dans la bruine. Leur énigme.
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Aujourd'hui, la propagande répète sans sourciller que, lorsque le Guide se promène dans les champs, tous les arbres fleurissent à son passage. Que la glace fond sous ses après-ski et que les oiseaux gazouillent l'hiver en l'apercevant. Et s'il renverse un flacon d'encre sur une carte d'état-major, un typhon se déchaîne sur la région en question - c'est à chaque fois le (maudit) Japon ! Ou s'il déplie un plan ou des papiers en rase campagne, par exemple sur le blindage d'un char, le vent cesse aussitôt afin qu'il puisse donner ses ordres aux tankistes. De même lorsque le maître s'approche de la frontière avec le Sud, une brume opportune l'enveloppe-t-elle pour absorber ses pas - les sentinelles ennemies ne le tiendront jamais dans leur ligne de mire !
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Longtemps, je ne sus quasiment rien de Paol hormis ces quelques bribes arrachées. Elles menaient toutes au gouffre de l’Allemagne nazie. Pareils à ces mandarins subalternes de la Chine ancienne, qui ne devaient pas souiller de leurs lèvres le nom illustre de l’empereur, nous laissions du vide entre nos mots dès qu’il s’agissait de lui. Certains paysages et ce prénom feraient défaut ; il y avait des trous dans nos cartes géographiques, dans les itinéraires, les faits. La douleur n’était jamais sujet.
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Vivant coincé entre les saisons - l'une sèche et brûlante comme un four, l'autre moite comme une éponge - on a, pour vivre, tout l'élan que peut avoir un homard patinant dans l'évier et promis au bain-marie.
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C'est alors que son épaule heurta celle de Sélim qui s'était rapproché. Une fraction de seconde, leurs deux regards se croisèrent comme des lames ; Tropney se sentit vaciller.
Une vague de terreur montait en lui pour l'étouffer, tandis qu'une voix sourde, détachant les syllabes, résonnait à ses oreilles :
l'Ange exterminateur ! l'Ange exterminateur !
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Et qu'importe si vous trouviez la mer «nauséeuse et bête», du moment qu'elle vous emmenât ailleurs avec un peu de patience, et vous ramenât ici, Brest même, sur les quais, l'esplanade aux ancres, les rues en pente, au pied de son château. Recommencé. Bouleversé d'avoir encore tant d'espace et de vent dans chaque fenêtre.
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De là, on voyait bien que la côte était râpée, qu'aucun arbre ne pouvait tenir, que les deux baies, Calgrac'h et Béninou, essuyaient en permanence les vents, que le passage du Poulpe écumait. Qu'il n'y aurait ici jamais que des pelouses basses, des abris à moutons, et ces amas chaotiques mangés de lichens, imitant des tours étêtées, des pans de murailles. Sans oublier l'Iroise aux quatre coins de l'horizon, si coléreuse parfois - comme le racontaient les vieilles femmes, de celles qui avaient perdu des frères et des maris dans les tempêtes - qu'elle faisait exploser les lanternes des phares et, par défi, venait lécher le début du ciel. N'étions-nous pas à la barre d'un vulgaire radeau de terre et de roches? Celle que les anciens surnommaient "la plus lointaine" se montrait fidèle à sa réputation.
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Mais à chaque retour, ce bout de Finistère nous happait, lessivé de marées, bruissant de vents. Avec ses châteaux de rochers, ses landes, ses dix hameaux. Et son drame en filigrane : la question était posée là, elle attendait. Nous étions chez nous, heureux mais bancals...
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«  Je comprenais la peine énorme de mon père. Il s’était forgé avec elle , il avait dû composer avec la déflagration originelle. Elle le constituait . La vérité d’un homme, ce peut être aussi sa souffrance .Mais même si elle était insoluble, insécable, jamais partagée, elle pesait sur moi par contrecoup . Ce poids de mémoire close était devenu le mien. J’en restais meurtri , dépossédé de ma propre histoire .... »
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Sur la table, ce bouddha en jade, de même qu’un modèle réduit de la fusée d’Hergé achetée à Bruxelles, damier blanc et rouge, imitée d’une fusée V2 nazie, allaient servir de presse-papiers pour le courrier ou la documentation à éplucher. Si, comme tout le monde, je menais une vie normale dans la journée, je me réservais chaque matin une heure d'investigations, nourrissant des cahiers et établissant des fiches sur du bristol, limier lancé sur les traces de Paol, en chasse. Il était devenu ma figure centrale. Que pouvais-je faire de plus nécessaire que de le ramener à la lumière? Et tenter de nouer ce dialogue singulier avec lui…
Pour autant, plus les choses se ramifiaient, plus elles se complexifiaient. Un témoignage venait en contredire un autre, les dates ne se recoupaient plus, il manquait des pièces et des interactions. Tout aurait-il été embrouillé? A qui s’adresser? M’égarant dans la fourmilière des réseaux et des mouvements, des sous-groupes et des cellules, manquant d’interlocuteurs, le puzzle restait incomplet. Hormis ce que nous en répétions de manière automatique – résistant, déporté, mort en Allemagne –, je ne trouvais pas grand-chose de concret sur cet homme ordinaire…
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