Félix Lemaître vous parle aujourd'hui de son premier roman « La Combinaison », et vous dévoile toutes ses inspirations, ses anecdotes, ses influences, et bien plus encore... !
C’est un assortiment de jouets pour adultes que ‘l’ambassadrice” est en train de sortir de sa mallette et d’agencer sur la table en chêne. De l’aérodynamique, du phallique, de l’animalier, du sexe à pile et de l’appendice doté du Bluetooth et rechargeable en USB. Cette réunion Tupperware 2.0, c’est la nouvelle idée de Nelly pour consolider son leadership et étendre son empire jusqu’aux petites lèvres des femmes de Saint-Fossé… la colporteuse d’orgasmes a quasiment terminé son installation, elle aligne les flacons de poudre de corps comestible : coco, vanille, mangue, chèvrefeuille. l’excitation monte d’un cran. La paille des chaises rustiques grince, une Marlboro est allumée à la fenêtre, les chips de légumes et les oeufs de lompe se font génocider. La vendeuse ajuste son chemisier. Son gloss cerise effet 3D articule :
Sachez qu’un sex toy ne remplace pas un homme… Mais il peut lui faire de la concurrence!
Au milieu de la verdure détrempée, deux fusils ballottent leur crosse sur des dos kaki. Le double canon de droite, c’est François Valérie. Oui il sait. Comme la nuque la plus soyeuse du disco français. Avec un i et un e, pas un y, nuance. Nuance dont tout le monde se pignole. Merci papa, merci maman, ça n'aurait pas été du luxe d’allumer son poste pour vérifier que le patronyme n’était pas squatté par un ringard. Être toute sa traité comme une sous -marque alors que c’est ce vieux blond l’imposteur, c’est un destin placé sous le signe de l’injustice. Parce que le vrai nom du roi du col pelle à tarte à face de meringue, c’est Jean-Louis Mougeot..
Claire, elle a, “N’oubliez pas les paroles” Un cadre sup taillade “Quand la musique est bonne” sur France 2 tandis qu’elle débite des tomates cerises sur la planche à découper. Dans la salle à manger, elle profite de son nouveau doudou. Quoi de plus rassurant que les tubes inoffensifs de la variété française de son enfance et des gens qui chantent plus mal qu’elle ? Nagui son pelage d’épagneul et ses rides de sourire. Elle ne voit pas qu’il est piégé comme Bill Murray dans "Un jour sans fin”. Son festival de la marmotte, c’est d’être coincé avec des zicos de kermesse grimés en boules disco.
- Manon ?
- Mais si, la petite que j’ai levé au Bugatti.
- La blonde au gros pétard ?
- Non, la brune aux beaux petits seins.
- La MILF aux lèvres en zodiac ?
- Non, la latina en poom poom short.
- La nana aux avant-bras de loup-garou ?
- Non, la belette au ventre de gymnaste.
- Ah, la louloute qui a un œil qui vote Mélenchon.
- Ouais, la fille qui a un léger strabisme.
- C’est pas bien grave. Déjà parce qu'elle n’aurait vu que la moitié de ta face de rat…
Christian a les narines qui palpitent. Il veut la disperser cette nuée de mouche. Comme une vache bat de la queue, il fait claquer dans l’air : “laissez-moi seul, putain de merde !”
Du vulgaire, il y en a parfois en ponctuation dans cette famille. les putain, bordel ou merde évacuent les frustrations à l’occasion. Réservés aux adultes, quelques connards ou poufiasses s’invitent, furieux, pour débiner les absents, du collègue pénible au politique.
Pas besoin ? Pas stressés ? Le petit obèse de la Corée du Nord peut appuyer sur le bouton atomique à tout moment, la moitié du pays est au chomdu, la forêt amazonienne fait la taille du terrain de foot municipal et ils sont pas stressés?Y a quoi qui cloche chez eux ?
Quand sa grand-mère avait retrouvé son cher mari, paysan franc comtois, assis sur le rebord du puits avec une envie de plongeon, elle s'était contentée d'un "tu vas gâcher de l'eau".
Tout ça avait dû débuter à la préhistoire, quand un australopithèque amoché par un tigre à dents de sabre, rampant jusqu'à sa grotte, sanglotant, s'était fait accueillir par un râle de dédain de sa moitié.
Il répétait souvent :
" gros bide, petites cannes et goitre qui pend : tu verras, fils, tous les hommes finissent comme des pélicans".
Avec ses pics teints en blond et ses incisives en pointe, Nelly a tout du mérou. S'il avait un harpon, il ne serait pas contre lui mettre les viscères en bandoulière.
Sa vie durant Christian avait résisté sans relâche face aux femmes qui percent les boutons, éclatent les points noirs et traquent le sébum.
Grand-mères, daronnes et tantines : il leur avait méthodiquement échappé. Malheureusement Claire aussi s'était avérée être ce celles-là, de la consoeurie de l'épouillage.
Vague instinct hérité de nos ancêtres les primates ou sadisme déguisé ....