[...] J'aurais voulu que tu le lises dans mes yeux au moment où je te l'aurais dit... mais peut-être est-il trop tard. Peut-être le temps qui nous était imparti est-il écoulé et que c'est le dernier moment qui me reste...
Je posais mon front sur sa poitrine. Et tandis que le monde s'éteignait avec moi, je lui confessai les seules paroles que j'avais gardées pour notre final.
- Je t'aime, Rigel, murmurai-je, le coeur en morceaux. Je t'aime comme on aime la liberté dans l'obscurité d'une cave. Comme on aime une caresse après des années de bleus et de coups. Je t'aime comme on aime seulement le ciel, d'un amour qui ne se brise jamais. Je t'aime plus que n'importe quelle couleur que j'ai aimée dans ma vie. Et je t'aime... comme je ne sais aimer que toi, toi et seulement toi, qui me fais du bien et du mal plus que toute autre chose, qui es la lumière et l'obscurité, l'univers et les étoiles. Je t'aime comme je ne sais aimer que toi, qui es mon fabricant de larmes...
Les pleurs me remuèrent jusqu'aux os et je me cramponnai aux pages de cette histoire avec tout ce que j'avais.
- Quelles que soient mes paroles, vous trouverez quelque chose à remettre dans le droit chemin. Peu importe la réalité, quiconque passe cette porte est destiné à être diagnostiqué. Le problème n'est probablement pas de savoir comment se sentent les gens, docteur, mais comment vous les faites se sentir. Le problème est que vous êtes convaincu qu'ils ont forcément quelque chose qui ne va pas, qu'ils doivent être soignés parce qu'ils sont inutiles, vides... comme des cadres cassés ou des morceaux de verre.
- Dans sa coquille, il est en sécurité. C'est sa maison, son refuge, son unique abri. Mais, si elle devait se fêler, ou se casser... les éclats s'encastreraient à l'intérieur et finiraient par le tuer. Il n'aurait aucun moyen d'échapper à une mort certaine. C'est triste, tu ne trouves pas ? murmurai-je, un peu amère. Ce qui le protège est aussi ce qui peut lui faire le plus de mal.
- C'est une menace ? demandai-je doucement tandis qu'il appuyait sur la poignée.
Il suspendit son geste et tourna son visage pour me fixer par-dessus son épaule. Je vis alors, un instant avant qu'il ne ferme sa porte, un sourire dangereusement cruel se former sur ses lèvres. Un sourire qui était ma condamnation.
- C'est un conseil, papillon.
- C'est toi que je veux, lui dis-je encore. Toi et uniquement toi. Quoi que tu sois, de quelque manière que tu te voies... moi, je te veux comme tu es. Tu ne m'enlèves rien, Rigel. Rien...
Je ne le laisserais pas seul parce que ce n'est pas seul que l'on apprécie la vie, mais aux côtés de quelqu'un, main dans la main, le coeur fort et de la lumière sur le visage
Tu sais ce qui rend les choses si belles?
Les épines.
Il n'y a rien de plus beau que ce que tu ne peux pas serrer entre tes doigts.
Peut-être que notre plus grande peur est d'accepter que quelqu'un puisse sincèrement nous aimer pour ce que nous sommes.
Il existe une force qu'on ne peut pas mesurer. C'est le courage de celui qui ne cesse jamais d'espérer.
Parce que chaque fin n'est jamais une fin.
Chaque fin...
Est juste un nouveau départ.