En lisant les premières pages du livre, il fut frappé de stupeur : "Bienvenue dans la tribu des Zippoli, Guillem. Tu as mis très longtemps à nous découvrir, mais ne sommes pas fâchés…" Le livre manqua de lui tomber des mains. D’un geste brusque, Guillem le referma et respira profondément. Ensuite, il se mit à réfléchir : c’était peut-être une coïncidence. Il y avait beaucoup de Guillem dans le monde, non ?
Avec un livre, on ne joue pas au ballon, on ne fait pas de batailles de boules de neige, mais avec un livre, on peut rire ou pleurer, et parfois on connaît tellement bien les personnages que c'est comme si on les avait vus ou qu'on avait rêvé d'eux.
Tu dois comprendre qu'avant, il avait l'habitude d'être le roi de la maison. D'abord il était le seul enfant, et ensuite tu es né et il a perdu son trône. Il n'était plus le fils unique et chéri de M. et Mme Caldara, parce que tout à coup un autre enfant était arrivé, tout mignon, sympathique, enchanteur. Toi ! C'est pour ça que parfois il t'asticote, pour continuer à commander. Mais il ne se rend même pas compte qu'il le fait.
Il s'assit sur le rebord de la baignoire et ouvrit "Le Trésor de Rackham le Rouge" à la première page. Avec ses deux pieds comme deux poissons nageant dans l'eau chaude, Guillem lut les aventures de Tintin.
Mais ce qu'il ne savait pas encore, c'est que lorsqu'il en aurait fini avec les "Tintin" et qu'il ouvrirait le livre mystérieux qu'il avait emprunté à la bibliothèque, il allait avoir une drôle de surprise. (p.25)
Nous avons remarqué que Nicolau te fait parfois enrager. Tu aimes ton frère?
Quelle drôle de question. Bien sûr qu'il aimait Nico, à sa façon. Parce qu'on aime toujours ses frères, non? Même quand ils vous font enrager.
Il voyait tout ce fouillis de lettres et de signes sur la page et ça lui donnait le vertige, parce qu'il était incapable de comprendre comment ça marchait, la lecture.
Alors, Mme Milstein ouvrit le livre et chercha la cote pour la noter sur la fiche de Guillem. Mais brusquement elle s'exclama :
- Doux Jésus ! Ce livre n'est pas catalogué !
- Et qu'est-ce que ça veut dire ? demanda Guillem.
- Ça veut dire, Guillem Caldara, que tu ne peux pas l'emprunter, parce que si tu le perdais nous n'en aurions aucune trace. Tu sais que la bibliothèque a des règles très précises. (p. 20)
- C'est inadmissible ! hurla le baron, furieux. Ça ne devrait pas être sorcier de localiser un garçon de six ans aux pieds plus grands que ceux d'un joueur de basket ! C'est le seul petit Allemand avec cette particularité, j'en suis sûr et certain !
Le garçon, Franck Underwood, se mit debout et le dévisagea, étonné pour deux raisons : tout d'abord, il était émerveillé que ces empreintes puissent être celles d'un enfant de son âge. Il ne s'agissait donc ni d'un monstre, ni d'un extraterrestre, simplement d'un garçon avec de très grands pieds. Ensuite, il fut surpris qu'il s'adresse à lui en allemand et cela lui plut. Car il avait beaucoup de tendresse pour cette langue [...] Et voilà que, soudain, dans un coin perdu et humide de Brighton, un enfant aux pieds démesurés lui parlait allemand !
Il avait mal au dos, ses yeux le piquaient, il avait la tête lourde, mais rien ne pouvait arrêter la lecture. Il lisait, lisait et lisait, parce qu'il savoir comment tout cela allait finir.