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Critiques de Chris Vuklisevic (237)
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Du thé pour les fantômes

En ce moment j’ai tendance à ne songer à rédiger un avis que quand il est négatif, ce n’est pas très sympa pour vous d’autant plus que j’ai quand même fait dernièrement des lectures que m’ont plus.



Du thé pour les fantômes de Chris Vuklisevic fait partie de ces dernières et dire que cette lecture m’a plu est un euphémisme car c’est tout simplement l’une de mes meilleures lectures de l’année pour le moment. J’ai été totalement embarqué dans ce roman qui sent bon la Provence.



J’ai choisi cette lecture sur un gros coup de tête aimant bien la couverture et intrigué par son résumé, curieux de découvrir la plume de Chris Vuklisevic, la lauréate du concours de Folio SF pour ses 20 ans avec son roman Derniers jours d’un monde oublié.



Comme j’ai bien fait car je me suis laissé totalement charmer par le récit que déploie ici avec talent Chris Vuklisevic, cette ambiance singulière, les personnages, l’histoire. Un vrai régal.



Commencé juste après ma lecture de Ici et seulement ici de Christelle Dabos et d’Où s’imposent les silences d’Emmanuel Quentin, je voulais quelque chose d’un peu plus conventionnel, moins barré et si d’une certaine manière ce que propose ici Chris Vuklisevic est un peu plus classique, un peu moins étrange, il n’a clairement pas à rougir de ces deux derniers car il propose lui aussi quelque chose d’atypique avec une atmosphère très particulière de la première à la dernière page que j’ai vraiment adorée.



Car d’atmosphère ce roman n’en manque pas, il a même un charme fou porté par une plume que j’ai trouvée très agréable. J’ai aimé que l’on me raconte une histoire au coin du feu dans un salon de thé un peu étrange ou il semble y avoir plus de fantômes buvant leur thé que d’humains. J’ai aimé cette narration particulière qui nous raconte l’histoire d’une famille composée de trois femmes aussi étrange les unes que les autres. De ces deux sœurs jumelles aussi différentes par certains aspects que semblables sur d’autres et qui après 30 ans de silence se retrouvent à la suite du décès de leur mère. Une mère pleine de mystère, aux personnalités multiples que l’on découvrira tout au long du roman face à la recherche de son fantôme par les deux sœurs afin d’avoir enfin des réponses à leurs questions.



J’ai aimé aussi le cadre provençal mis en avant que j’ai trouvé très plaisant, l’univers que propose ici Chris Vuklisevic de manière plus général qui fourmille de bonnes idées, l’aspect magique de cette lecture : tout ce qui tourne autour des thés, les fantômes, les papillons. Il y a vraiment beaucoup de belles choses dans ce roman et le tout fonctionne à merveille.



J’ai vraiment passé un excellent moment à la lecture de ce roman, c’est une très belle découverte et je ne peux qu’avec enthousiasme recommander la lecture de ce beau roman de fantasy française. C’est typiquement le genre du roman que je serais capable de relire dans quelques mois ou années car je sais que j'y retrouverais avec plaisir ce qui m’a tant plu lors de cette première lecture.

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Du thé pour les fantômes

Comme je voulais l'aimer ce livre.

De sa couverture, sobre et ouvragée

Son titre plein de promesses

(Comme j'ai sauté de joie en l'attrapant)

Des souvenirs des Derniers jours d'un monde oublié que j'avais tellement aimé.

De la plume magnifique de l'autrice que je voulais tant retrouver

De toutes les autres enthousiastes critiques que je voulais égaler.



Alors j'ai mis toute ma volonté

Trop peut-être

A faire infuser des thés par cette fin d'août si fraîche quand auparavant elle ne respirait plus.

J'ai rangé ma maison

Fait un bouquet de feuilles tombées

Mis une jolie robe confortable

Et repris à chaque fois ma lecture là où je l'avais laissée



Rien à faire

J'ai essayé pourtant de passer outre un début de roman un peu lent pour pénétrer le cœur du récit

Pesté contre cette forme de narration qui m'a éloignée, rejetée comme le ferait un esprit frappeur.



Sacrément en colère l'esprit du bouquin.



Mais à chaque fois la forme d'écriture m'a desenvouté et j'ai peiné trop fort à essayer de démêler le destin de Carmine et de ses filles Félicité et Agonie. Alors tant pis. Je réessaierai le prochain roman que l'autrice imaginera. Celui-là, hélas, n'était pas pour moi.
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Du thé pour les fantômes

Avoir de l’imagination est un plus, ce livre en est thé-moin. Du thé pour les fantômes est un petit bijou, Chris Vuklisevic mettant beaucoup de chaleur et d’esprit dans cet étonnant roman.



Il était une fois deux petites sœurs jumelles, l’une choyée, l’autre honnie par leur mère autant que par les gens du village. Ce n’est pourtant pas le vrai début de toute cette histoire. Adultes, l’une est devenue une sorcière hideuse, cachée de tous ; l’autre entremetteuse officielle avec les spectres, en utilisant du thé. Une quête va les réunir pour retrouver le fantôme de leur mère, récemment décédée. Pour comprendre aussi. Les révélations sur leur passé et celui de leur mère seront fort surprenantes.



Cette quête va se faire enquête autant que virée à travers les ruelles du vieux Nice, de l’arrière-pays et même de l’Espagne. Et surtout s’apparenter à un voyage intérieur.



L’étrange-thé du roman, expression joliment utilisée par l’autrice, est assez vite envoûtante si on sait se laisser porter par l’écriture atypique, se laisser emporter par les émotions qui transpirent de cette merveilleuse imagination. A partir du moment où on arrive à se coller au rythme de la narration, tout coule de source.



Le récit regorge d’idées folles, mais tellement belles, comme ces troupeaux de théières sauvages qui n’en font qu’à leur tête. Mais toujours au service de l’histoire qui se révèle bien plus sombre qu’il n’y paraît, un récit enchanté pour raconter les parts d’ombre de deux sœurs s’étant perdues.



Elles vont se retrouver à travers la recherche de leurs racines qui déploient très loin leur généalogie.



Voilà un très beau spécimen de fantasy pour tous, à conseiller aux lecteurs curieux. Le texte est tellement riche de sens, d’esprit et de corps qu’il a toutes les qualités pour contenter bon nombre d’entre eux.



Il faut dire que le thème des secrets familiaux est universel, tout comme la difficulté de se construire sans amour véritable. Le réalisme magique du roman emporte par la grâce d’une écriture vraiment étonnante. L’écrivaine a autant soigné la forme que son histoire. Avec talent et inventivité !



C’est un récit à la fois touchant et dur, tout en atmosphère(s) et en nuances, où les esprits frappeurs touchent le cœur. Avec beaucoup de traits d’esprit qui créent un décalage pour mieux aborder les sujets graves.





Du thé pour les fantômes est autant un conte fantastique que philosophique, autour d’une histoire de famille égarée.



Le récit de Chris Vuklisevic, loin d’être empo-thé, démontre un talent fou et une vraie personnalité qui illumine chaque chapitre. Pour un roman qui est une magnifique preuve que l’imaginaire peut parler à tous.
Lien : https://gruznamur.com/2023/1..
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Derniers jours d’un monde oublié

Challenge plumes féminines 2021 – n°16



Livre reçu dans le cadre de la dernière Masse Critique. La couverture m'a beaucoup intrigué, toute de bleue vêtue. le résumé a fini de me convaincre de l'ajouter à ma longue liste de choix. C'est le premier roman de cette auteure et j'espère découvrir un univers vraiment à part.



Le début est très intrigant avec ce peuple perdu sur une île et entouré de règles très strictes liées à la survie. J'aime beaucoup comment l'auteure a construit son histoire et son alternance de personnages. La magie qui opère sur cette île est très originale mais également très complexe et très réglementée. Tout le monde n'a pas forcément le droit de vivre comme les autres. Certains ont également plus de pouvoirs que d'autres, ils peuvent s'octroyer des bénéfices que d'autres n'auront jamais. Malgré l'univers très original et à cause de la fatigue, je n'avançais que de quelques pages par jour dans l'histoire, je l'ai donc abandonné temporairement pour pouvoir le finir pendant le week-end et au calme. Il m'a fallu un peu de temps pour me remettre dans l'histoire et de me rattacher aux personnages. J'ai quand même une préférence pour la Main. J'ai eu un coup de coeur pour l'univers qui est unique mais, je ne sais si c'est dû à la fatigue, j'ai fini par perdre le fil de l'histoire et à avoir du mal à lire certains passages. L'auteure reprend les tares de l'humanité pour faire son histoire, j'ai trouvé ça un peu dommage car le reste était rempli d'imagination même si les personnages restaient assez manichéens. J'aurais aimé avoir une histoire originale de bout en bout, j'ai donc été un peu déçue par les évènements qui se produisent à certains passages. L'alternance des personnages et de certains écrits permet malgré tout d'avoir une vue d'ensemble de ce monde en miniature.



Comme vous l'aurez compris, ce roman a été une excellente découverte, la fin rehausse un peu le milieu de cette histoire. Elle reste malgré tout une nouvelle auteure à suivre si elle continue à écrire. Je remercie donc Babelio et Folio SF pour l'envoi de ce roman. Je conseille aux amateurs de SF de découvrir cette auteure et son univers original.



Sur ce, bonnes lectures à vous :-)
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Derniers jours d’un monde oublié

Pour ses 20 ans, Folio-SF a eu une idée pour le moins originale et enthousiasmante : organiser un concours d’écriture pour publier un premier roman français d’imaginaire.

Un an plus tard, après moult débats, voici donc la lauréate et son oeuvre : Chris Vuklisevic pour Derniers jours d’un monde oublié !

Au programme : de la fantasy où noirceur et anachronisme(s) cohabitent, des personnages fascinants bourrés de surprises et un univers original prêt à s’ouvrir au monde…et aux lecteurs curieux !



Un île perdue

Terre en vue ! Terre en vue !

Tout commence par la découverte par Erika et ses compagnons pirates d’une île inconnue en plein milieu du Désert Mouillé.

Inconnue, vraiment ? En réalité, Sheltel a disparu plus de trois cents ans auparavant, durant la Grande Nuit.

Sous l’implacable autorité de Kreed, la capitaine du vaisseau pirate La Couronne, Erika fait route vers ce mystérieux îlot.

Sur Sheltel règle le Natif, sorte de roi affligé d’une bénédiction (ou une malédiction, qui sait ?) et dont le corps se couvre d’écailles reptiliennes à moins de s’enduire d’une substance appelé Prystine.

Seul le roi a le droit d’arborer ces écailles, les malheureux qui s’en retrouvent affublés sont impitoyablement punis.

La population de Sheltel se divise en deux ethnies : les Dusties (peuplant Dust, la principale ville de l’île) et les Ashims (rescapés de la Grande Nuit échoués sur Sheltel et qui y ont trouvé refuge dans des conditions pour le moins précaires).

La toute-puissance des Natifs est remise en cause depuis quelques années par l’influence de la Bénie, sorte de prêtresse d’un culte pour miséreux sous la coupe d’un vieux marchand du nom d’Arthur Pozar.

Pour réguler sa population, Sheltel abrite également une figure particulièrement terrifiante : la Main. Considérée par beaucoup comme une sorcière, la Main et ses Phalanges (au nombre de cinq : Petit, Anneau, Majeur, Index et Pouce) tiennent l’arbre généalogique de l’île d’une poigne de fer, depuis ses racines jusqu’à ses branches naissantes…et parfois pourries.

Car dans un espace clos comme celui de Sheltel, la consanguinité guette et les naissances monstrueuses se doivent d’être promptement éliminées…

Dans cette société à l’équilibre précaire, l’arrivée des pirates risque de tout remettre en question car derrière Erika, Kreed et les siens, le monde attend.

Chris Vuklisevic construit son roman par petites touches, alternant trois points de vues : celui d’Erika, celui d’Arthur Pozar et celui de la Main.

Entre ces chapitres, la française intercale des documents divers, de la proclamation officielle à l’extrait de journal en passant par la missive privé et la publicité. D’aspect anodin, ces ajouts prennent pourtant toutes leurs importances mis en rapport avec le reste, ajoutant des éléments historiques et sociaux, annonçant certains développements de l’histoire sans passer par des pages et des pages d’explications et, surtout, jonglant entre anachronisme, humour et noirceur. Le lecteur sera ainsi surpris de trouver parfois des publicités ou des pages de journaux étrangement proches des nôtres dans le ton comme dans la forme. Un décalage qui permet le sourire dans un monde pourtant au demeurant infiniment cruel.



Vivre en reclus

En effet, bien loin du conte de fée ou du récit feel-good, Derniers jours d’un monde oublié vous parle des méfaits du repli sur soi et des conséquences de la mainmise des puissants sur un peuple pris au piège. Sur Sheltel, la probabilité de marier son cousin ou son demi-frère n’a rien d’exceptionnelle. Pour maintenir l’équilibre (et un pool génétique acceptable), la Main tue les malformés et interdits les unions contre-nature. Cette sorcière régulatrice et sans pitié possède une autorité quasiment sans limite et ses acolytes, les Phalanges, s’assurent du reste. Car la menace génétique n’est pas la seule à peser sur Sheltel et Chris Vuklisevic nous parle également d’un autre danger que nous connaissons bien, celui de la surpopulation. Vivant sur un territoire congru avec des ressources (notamment en eau) très limitées, Sheltel ne peut se permettre la fantaisie d’une population pléthorique. Ainsi la Main, en sus de son penchant eugéniste, a également la charge de réguler la population en éliminant les inutiles ou en troquant la vie d’un parent contre celle d’un enfant. Évocation à peine voilée d’une problématique très actuelle (avec l’épuisement des ressources et la pression du réchauffement climatique), l’emploi de la Main fascine autant qu’il horrifie. Peut-on moralement accepter cette solution à un problème pourtant évident et incontestable ?

La tendance à vivre replié sur soi est l’un des traits fondamentaux de la société établie sur Sheltel. L’arrivée des pirates va donc permettre la découverte d’un autre monde pour ceux qui avait oublié l’existence d’un ailleurs et entraîner des conséquences forcément très importantes pour les puissants qui, jusqu’ici, régnaient sans partage sur l’île.

Le cœur du roman se retrouve donc dans cette ouvertures au monde et aux autres et sur ce que le changement peut avoir de terrifiant.



Une part de lumière au cœur des ombres

Ce qui permet pourtant à Derniers jours d’un monde oublié de se distinguer définitivement du tout-venant, outre sa langue affûtée comme une lame de rasoir, c’est la facilité avec laquelle Chris Vuklisevic construit des personnages cruels et apparemment inhumains pour finir par les humaniser même après les pires révélations.

Chacun des trois personnages que nous suivons exercent une forme de terreur sur le quidam moyen. Arthur, sous ses apparences de vieillard décati, contrôle le marché du Feu Origine (un feu éternel qui ne brûle pas), élimine la concurrence en enfermant les personnes avec des dons surnaturels pouvant lui faire de l’ombre au fond des sinistres cellules rouges, n’hésitant jamais à manipuler tout ceux qu’il peut pour asseoir son autorité. Erika, elle, vit dans la violence et tue sans même réfléchir depuis son enfance, comme une seconde nature. Enfin, la Main…fait ce que la Main doit faire, prenant la vie et l’espoir d’une famille, éprouvant les limites du tolérable et gardant son faciès monstrueux à l’écart du monde.

Pourtant, avec malice et subtilité, Chris Vuklisevic infiltre de la bonté et de la nuance à ces personnages en apparence monstrueuse. L’enfance d’Erika et sa volonté de liberté, les sévices endurés par la Main et sa soudaine humanité retrouvée face à une difformité qui lui rappelle la sienne, l’attachement d’Arthur à son petit fils aveugle et ses origines miséreuses, ici, rien n’est aussi simple qu’il n’en a l’air et la capacité à nuancer les personnages permet de sortir avec brio des stéréotypes du genre.

Mieux, l’autorité incarnée par chacun permet un message plus politique encore puisque la toute-puissance des uns et des autres repose sur la violence, la terreur et la cruauté. Mais que se passe-t-il quand tout cela ne suffit plus et que la révolte gronde ? Que se passe-t-il une fois que l’on se confronte à ses propres insuffisances ?

En filigrane, les marginalisés retrouvent une voix, eux qui, pourtant, possèdent des dons bien plus impressionnants et puissants que la plupart et qui semblent s’être convaincus eux-mêmes de leur impuissance et de leur nature indésirable. Et si l’oppression ne tenait qu’à l’illusion d’une infériorité entretenue par des puissants impitoyables et inhumains prêts à tout pour conserver leurs pouvoirs ?



Magistrale entrée en matière dans le monde de la fantasy, Derniers jours d’un monde oublié convoque une galerie de personnages tout en niveaux de gris pour peupler un univers fascinant au possible où la peur de l’autre et l’ouverture au monde s’affrontent dans une ultime confrontation lourde de sens. Chris Vuklisevic fait ainsi une entrée fracassante dans le monde de l’imaginaire.
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Du thé pour les fantômes

Après un premier roman remarqué puisque lauréat du concours organisé par Folio SF pour célébrer ses vingt ans (« Chroniques d’un monde oublié »), Chris Vuklisevic revient cette année avec un nouvel ouvrage relevant cette fois davantage du fantastique que de la fantasy. L’action se déroule à Nice et ses environs et met en scène deux sœurs jumelles ainsi que leur mère, toutes trois vivant sur le mont Bégo, à l’écart du reste du village et de ses habitants. Un isolement prompt à la prolifération de rumeurs toutes plus farfelues les unes que les autres, surtout après la naissance tumultueuse des jumelles : Félicité et Agonie. Si certaines de ces allégations sont clairement fantaisistes, d’autres comportent tout de même un fond de vérité, la petite famille étant loin d’être ordinaire. Les deux filles possèdent par exemple la capacité de voir les fantômes (elles grandissent, littéralement, avec celui de leur père) tandis que la mère semble habitée par une puissance extraordinaire lui permettant de convoquer l’orage. Les pouvoirs d’Agonie sont toutefois sans commune mesure avec ceux des deux autres mais bien plus handicapant : des papillons flétrissant tout sur leur passage lui sortent de la bouche dès qu’elle parle, des fleurs endémiques poussent partout où elle s’installe… Bref, la vie quotidienne avec elle n’est pas de tout repos. Est-ce la raison pour laquelle sa mère la traite si différemment de sa sœur qu’elle choie et avec laquelle elle entretient une relation fusionnelle tandis qu’elle ne reçoit que brimades ou indifférence ? Les deux sœurs, elles, s’entendent plutôt bien et se protègent l’une l’autre de cette mère tour à tour attentionnée ou maltraitante, jusqu’au jour où leur chemin se sépare brutalement. Une banale histoire familiale, serait-on tenté de penser. Sauf que cette séparation marque également la disparition du village de Roquebillière situé lui aussi sur le mont Bégo, et c’est justement pour expliquer cette surprenante désertion qu’un archiviste va être envoyé pour recueillir le témoignage des deux sœurs. Plusieurs années après les faits, le voilà qui rapporte la curieuse histoire dont il est parvenu à recoller les morceaux à une simple touriste de passage, tous deux confortablement installés dans un salon de thé.



Ce roman de Chris Vuklisevic n’est pas banal et, si la forme comme le fond peuvent s’avérer déconcertants dans un premier temps, on prend finalement beaucoup de plaisir à plonger dans le passé pour le moins surprenant des deux sœurs et de leur mère. Le récit est intimiste et accorde une place centrale à la relation conflictuelle entre les deux sœurs qui se retrouvent bien des années après leur séparation afin d’enquêter sur l’histoire de leur mère. Devenue détective spécialisée pour les esprits errants, Félicité craint en enfin que celle-ci ne soit devenue un fantôme lors de sa mort brutale survenue sur le mont Bégo, et elles ne seront pas trop de deux pour enquêter. L’autrice opte pour plusieurs récits imbriqués, avec un conteur principal qui intervient régulièrement mais qui rapporte surtout les témoignages des principaux acteurs des événements survenus à Roquibillière. Aucune information ne nous est donné sur l’auditrice à laquelle il s’adresse, si ce n’est qu’elle n’est pas originaire de la région, si bien qu’on se glisse facilement dans sa peau et que l’on suit avec attention le récit du vieil archiviste. Il faut dire que son enquête n’est pas banale puisqu’elle nous entraîne de bibliothèques en petites boutiques insolites en passant par un cimetière, un désert ou encore une maison abandonnée. Des lieux que l’on retrouve fréquemment dans le genre fantastique pour l’imaginaire effrayant qu’ils convoquent, mais qui est ici contrasté par le décor niçois. A l’évocation du mot « fantôme », on pense en effet davantage à des lieux glauques et sordides qu’à des plaines ensoleillées et à la plage. Le contraste est saisissant et rajoute au caractère insolite du roman qui joue également sur tout le folklore imaginé par l’autrice concernant le thé et les esprits. Le récit prend alors un tour presque humoristique, certaines trouvailles à propos des troupeaux de théières, des étranges-thés et de tout le cérémonial qui les accompagne, s’avérant assez savoureuses.



Outre l’humour, le roman est également habité par une touche de poésie appréciable, certains concepts à l’image du majordome-cartographe ou du jardinier-photographe ouvrant la porte à un imaginaire qui sort de l’ordinaire et se mêle harmonieusement au réel pour mieux le réenchanter. L’autrice se fend également de quelques expérimentations sur la forme qui s’avèrent réussies et renforcent la poésie de l’ensemble tout en permettant de s’attacher plus étroitement encore aux personnages. Difficile en effet de ne pas se prendre d’affection pour ces deux sœurs si différentes et que tout oppose, mais qui sont parvenues dans l’adversité à tisser un lien que même les années ne parviendront pas à atténuer. Central dans le roman, le personnage de Félicité est sans doute celui que l’on comprend le mieux et, en dépit de ses premiers abords froids et sévères, l’héroïne se révèle finalement pleine de contradictions, de regrets et d’affection. Egonia, elle, provoque dans un premier temps des sentiments ambivalents chez le lecteur, mélange de dégoût devant la sombre magie qui l’habite, et pitié face aux mauvais traitements qu’elle a subi pendant son enfance. Ces deux sentiments se muent progressivement en respect, si bien qu’on en vient au fil de l’ouvrage à considérer avec autant d’affection l’une ou l’autre des jumelles. Leur mère, enfin, est un personnage complexe particulièrement bien construit qu’on déteste mais qu’on ne peut aussi s’empêcher de comprendre et dont on est impatient de découvrir tous les secrets. Ces derniers se révèlent peu à peu au fil de l’enquête des deux sœurs et mettent en lumière une histoire familiale chaotique et captivante.



« Du thé pour les fantômes » est un roman étonnant qui relate la quête de deux sœurs qui se plongent dans le passé de leur famille afin de retrouver le fantôme de leur mère. Peuplée de rencontres avec les esprits, de thés aux propriétés magiques, ou de déserts enchantés, l’histoire convoque un imaginaire qui sort de l’ordinaire, mêlant le caractère glauque et inquiétant des récits fantastiques aux décors ensoleillés de la région de Nice dans un contraste saisissant. Le fond comme la forme sont travaillés et accordent une grande importance à la poésie et aux sentiments des personnages que l’on se réjouit de suivre dans leur enquête, d’archives en cimetière, de maison hantée en plage pluvieuse. Une belle découverte, donc, qui confirme le talent de Chris Vuklisevic dont il s’agit ici du deuxième roman.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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Derniers jours d’un monde oublié

Lauréate du concours organisé par Folio SF pour les 20 ans de la maison d'éditions, Chris Vuklisevic livre son premier roman, une fantasy noire où les intrigues foisonnent.



L'Ile de Sheltel se dresse comme un phare au milieu des océans. Sur ce petit territoire, les habitants pensent être les derniers survivants de l'humanité, décimée par la Grande Nuit, 300 ans auparavant.

La population se divise en 2 clans : les Dusties qui habitaient l'île avant l'apocalypse et les Ashims, descendants des naufragés rescapés de la Grande Nuit.

Sur ce peuple qui cohabitent précairement, règne le Natif, un être réputé magique dont le corps est partiellement recouvert d'écailles.

L'isolement et le rationnement ont commencé à faire des ravages auprès des populations. Consanguinité, malformation des nouveaux-nés et le manque d'eau marquent le quotidien.

Aussi, le jour où un navire pointe les voiles à l'horizon, la révolution s'empare des habitants et divise les esprits. Certains y voient l'occasion de mettre un terme à leur isolement et à s'enrichir, comme autrefois grâce au commerce, quand d'autres déplorent déjà la fin de leurs traditions.



Un récit assez dur marqué par la cruauté des conditions de vie et des traditions qui ont permis à ce peuple de survivre sans s'entre-tuer.

J'ai aimé découvrir les différentes histoires de chacun des personnages. Le gros point fort de ce récit est la dimension réaliste donnée aux protagonistes.

Ainsi, La Main, une sorcière aux pouvoirs mortels et les Phalanges, ses apprentis, ont endossé le rôle de régulateur pour les habitants. Chaque naissance doit donner lieu à un décès et les personnes les plus fragiles et les plus inutiles sont désignées au sein de chaque famille pour laisser la place à ceux qui naissent. Meurtrière, généalogiste, les qualificatifs ne manquent pas pour ce personnage sombre qui voit d'un mauvais œil l'arrivée du navire et l'ouverture au monde qui se profile.

Arthur Pozar est commerçant et représente ceux qui voient l'espoir avec cette arrivée inespérée. J'ai aimé suivre ses intrigues et sa relation particulière avec la Bénie, une femme qui dirige un sanctuaire dédié aux enfants handicapés dont les parents ont les moyens de payer le placement.

Enfin Erika, la jeune pirate, est d'abord surprise de découvrir une île au milieu de nul part. Elle voit enfin l'occasion d'échapper à son enrôlement forcé et surtout, au capitaine Kreed, la capitaine du navire, aussi cruelle que rusée.

Trois regards différents sont ainsi portés sur les événements et le dynamisme du récit s'en ressent. L'écriture est fluide, le style plaisant et l'histoire est assez intéressante pour que l'on ne se lasse pas pendant la lecture.

Un bon moment.

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Du thé pour les fantômes

Une mère élève seule ses jumelles sur les hauteurs de Nice. Dès leur naissance, elle traite les fillettes différemment, appelant l'une Félicité et l'autre Agonie. Le ton est donné. Tout d'abord complices, elles se sépareront à l'adolescence quand Félicité ira au pensionnat et se fera des amies tandis que sa soeur restera dans son grenier de la maison familiale. Ah, autre particularité, ce sont des sorcières: Félicité vit avec les fantômes, qu'elle apprendra à convoquer grâce à des tasses de thés rares et précieux, et Agonie, elle, crache des insectes quand elle parle.

Pur roman de fantasy, genre que je maitrise mal, je l'ai cependant apprécié car les personnages sont très développés et il y a une belle histoire. Au final, il est tout à fait possible de ne pas trop tenir compte de leurs dons car c'est avant tout une belle histoire de soeurs jumelles, différentes et mal aimées de leur mère (enfin une surtout), rejetées par les villageois parce qu'elles ne sont pas dans la norme.

Une belle histoire donc.
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Du thé pour les fantômes

est en 2021 que Chris Vuklisevic arrive dans toutes les bonnes librairies de France avec Derniers jours d’un monde oublié, son premier roman de fantasy. Remarquée par le public comme par la critique, l’autrice n’en reste pas là puisqu’elle revient deux ans plus tard avec un second ouvrage énigmatique et envoûtant : Du thé pour les fantômes.

Que nous réserve-t-elle pour sa première incursion dans le monde du fantastique et des esprits ?



Fantômes et papillons

C’est un roman en poupées russes qui s’offre à nous, comme un coffre aux merveilles qui empile les trouvailles les unes sur les autres.

Dans les environs de Nice, au creux d’un endroit qu’on appelle la Vallée des Merveilles, se trouve de petits villages perdus dans le nul part.

L’un deux, Bégoumas, a vu tous ses habitants déserter dans la nuit du 15 au 16 août 1956, devenant de fait un endroit mort où une seule personne s’est accrochée, une certaine Carmine.

Mandaté par le directeur des archives départementales des Alpes-Maritime, un homme se met en quête de la vérité et tombe à la place sur une drôle de vieille femme nommée Félicité.

Félicité, fille de Carmine, réside à Nice et gagne sa vie en tant que « Passeuse ». Elle aide les gens à rencontrer leurs parents défunts et à les questionner, à répondre aux interrogations laissées en suspens, le tout armée d’une théière et de quelques thés-étranges.

Félicité vivait jadis à Begoumas avec sa mère… et sa sœur jumelle, Egonia (ou Agonie, c’est selon). Deux sœurs très particulières qui ont chacune hérité de pouvoirs à la fois fascinants et maudits.

Félicité, joie de vivre de sa mère, peut voir les défunts et communiquer avec l’au-delà.

Agonie, indésirée et réprouvée, crache des papillons vénéneux à chaque mot une fois sa muselière enlevée.

Une passeuse et une Sorcière, et le drame familier de deux sœurs qui se quittent et s’oublient.

Voilà qu’un jour, Carmine passe de vie à trépas et Félicité, dernier témoin de cette mère devenue fragmentée, se met en tête de reconstituer le puzzle de son existence.

Dans une tasse de thé, sa sœur Agonie lui répond car elle aussi veut savoir.

S’ensuit une aventure poétique et grandiose dans Nice et ses environs, jusqu’au désert d’Almeria et sur les rives d’une guerre oubliée.

Chris Vuklisevic invente un monde fantastique, celui des théiologues qui parlent aux fantômes, celui des sorcières qui font pousser des fleurs de mort et celui des noms qui capturent tout de vous à moins que ce ne soit l’inverse.



Poésie hantée

Quelle langue prodigieuse pour vous servir cette histoire brumeuse et lumineuse, qui retrouve les couleurs du monde à travers les souffrances des femmes qui peuplent cette quête des origines.

Quelle langue, quelle plume que celle de Chris Vuklisevic, délice de tous les instants, poésie raffinée qui ose la prose et les confrontations, qui ose et ose encore parce qu’elle aime les images qui imprègnent la rétine.

Mais que serait des mots et un style aussi raffiné sans l’aventure qui va avec, celle qui résonne en nous et nous fait vibrer, risquant de briser le carcan de nos perceptions d’êtres humains limités ?

Le fantastique, pour Chris Vuklisevic, c’est l’occasion d’exposer les entrailles de ses personnages au monde alentour, de les retourner et nous retourner dans un même mouvement pour nous montrer le sublime, le morbide et l’indicible. Car oui, Du thé pour les fantômes est un roman de drames intimes et de quêtes impossibles.

Nous y suivons deux sœurs que tout semble opposer, aux prénoms particulièrement éloquents et qui, dès l’instant des premières souffrances, deviennent impossible à oublier. On trouve cette force et cette profondeur qui font souvent défaut ailleurs, on trouve la beauté dans ce qui ne devrait être que du noir, comme l’enfance d’Agonie ou celle de sa mère, Carmine.

On trouve l’envie de saisir la personnalité de ces femmes non pas d’un tenant mais par une approche fractale, comprenant la multiplicité de l’esprit, les nombreuses vies qui nous habitent.

Chez Chris Vuklisevic, la simplicité n’est pas une option, elle n’existe simplement pas et la complexité du monde, des histoires et des êtres de chair ou d’ectoplasme, est une réalité palpable qu’on ne remet jamais en doute. Il faudra s’accrocher pour découvrir les facettes multiples de ces deux sœurs, tristes et belles à la fois, fortes et brisées en secret.

Vient alors l’évidence : ce ne sont pas elles qui occupent véritablement le centre de cette histoire mais bien la mère défunte, celle que l’on déteste autant que l’on aime, qui nous a construit autant que détruit, Carmine aux noms multiples.



Le nom de toutes choses

Du thé pour les fantômes montre Carmine, Carmen, Caridad, Carine.

Explorant leurs histoires, leurs drames et leurs joies, leurs fiançailles et leurs guerres. Trouvant des noms différents, des « outrenoms » mêmes tissés de magie et de malédictions, que l’on s’impose ou que l’on impose.

Agonie, Egonia. Félicité. Clé.

Et dans tout cela un cri. Celui de femmes qui veulent exister sans devoir rendre de compte, supportant le poids des années et des terreurs qui les hantent. On trouve dans le roman de Chris Vuklisevic une fascination pour la recherche et l’histoire, pour l’envie de retrouver les origines et comprendre d’où l’on vient pour apaiser qui l’on est devenu.

Tout le roman se construit sur cette envie de découvrir le passé, de le faire sien pour répondre au présent et se construire un futur enfin véritable.

Ainsi, un homme tente de résoudre le mystère d’un village disparu, deux sœurs veulent comprendre leur mère défunte et le lecteur, lui, se plonge dans l’existence de ces deux sœurs chassées de chez eux.

Tissant des liens complexes entre sœurs, Du thé pour les fantômes explique patiemment, comprenant que nous ne sommes rien tant que nous ne savons pas d’où nous venons et pourquoi.

Dans ce tourbillon d’émotions, de passions, de larmes, voici pourtant que s’installe une mythologie à base de thés qui permettent des choses extraordinaires, de théières sauvages et de troupeaux que l’on dompte, comme une touche d’apaisement et de calme dans l’orage.

Mais oui, Chris Vuklisevic le sait, toute cette magie reste précaire, elle demande du temps, de l’attention, et parfois réparation tel le Kintsugi, cet art japonais pour recoller les morceaux mais sans cacher les fissures.

Du thé pour les fantômes, c’est tout à fait cela, l’art de rassembler les choses brisées pour faire de ces fractures les futures lignes de force de ceux qui ont eu l’audace de savoir.

À la façon des Voleurs d’innocence, la française s’invite dans le monde des morts pour mieux saisir les vivantes, roman de femmes sorcières et de fantômes tenaces, magnifiant la sororité et la beauté d’un apaisement enfin retrouvé avec soi-même.



Dès son second roman, Chris Vuklisevic signe un chef d’œuvre.

Quand les fantômes prennent le thé, les langues se délient et les émotions fleurissent, libérant les papillons du passé pour peupler le présent des tourments et des espoirs de toutes celles qui vivent encore. Magnifique, sublime, formidable.
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Du thé pour les fantômes

Un récit doux et amer, comme le thé, au centre des rencontres dans ce roman.

Carmine a accouché de jumelles. Une sera son soleil auquel elle donnera et apprendra tout et l'autre ses ténèbres dans lesquelles elle déversera sa haine et ses colères. Une sera passeuse de fantômes, l'autre une sorcière générant mort et pourriture autour d'elle.

Pourtant lorsque la mère meurt, elles doivent composer ensemble pour comprendre la mémoire de cette femme très secrète.



Comment se construit-on quand on est une enfant rejetée et non-aimée ? La préférence maternelle induit-elle obligatoirement la jalousie entre soeurs ?

Autant de schémas de l'enfance que l'autrice explore avec beaucoup de talent et de poésie dans ce beau récit, très touchant et intime, utilisant une narration qui emprunte beaucoup au réalisme magique.

Le roman nous emmène à la découverte d'outrenoms, en compagnie de fantômes presque tous choupis et d'un troupeau de théières sauvages, le tout dans la belle Nice et sa région.

Du Thé pour les Fantômes est un récit de sorcières, d'ombres et de lumière, une histoire de famille qui charrie un cortège de fantômes extraordinaires.

J'ai beaucoup aimé.
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Du thé pour les fantômes

En passant à la médiathèque, j'ai repéré cette superbe couverture. En me voyant, la bibliothécaire m'expliqua son dilemme face à ce roman auquel elle n'accroche pas ... Il ne m'en fallait pas plus pour piquer ma curiosité!

Entrons donc dans une atmosphère cosy, un narrateur anonyme (au début n tout cas) me raconte une histoire au coin du feu dans un salon de thé un peu étrange où fantômes et humains savourent leur thé.

Partons à la rencontre d'une famille composée de trois femmes aussi étrange les unes que les autres, la mère et les deux sœurs jumelles, Félicité et Agonie-Egonia, aussi différentes que possible et qui après 30 ans de silence se retrouvent à la suite du décès de leur mère.

C'est à ce moment qu'elles font équipe pour trouver le fantôme de leur mère et obtenir des réponses sur le passé familial qui semble si flou.

J'ai aimé la plume de l'autrice et l'aspect magique de cette lecture, avec les propriétés des thés, les fantômes, les papillons ou encore l'attribution d'un outrenom.

Une lecture envoutante!

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Du thé pour les fantômes

J’ai été perdue parfois entre les temporalités et les personnages, mais je pense que c’est essentiellement dû au format audio et à ma tendance à décrocher parfois à cause de pensées parasites… Ce roman mérite beaucoup d’attention, et même si l’interprétation de la version audio est vraiment excellente et donne beaucoup d’atmosphère à ce récit, je regrette un peu de ne pas l’avoir lu de manière classique. Je le ferai peut-être un jour, d’ailleurs, parce que j’ai vraiment beaucoup aimé ce qui se dégage de ce texte, sa poésie, son humour, sa délicatesse, sa dureté, la façon dont les mots sont tissés, de manière à la fois fluide et complexe, recherchée et parfaitement naturelle.

C’est avant tout un roman d’ambiance, on ne peut pas dire qu’il soit bourré d’action, mais j’ai tout de même été profondément happée par l’histoire de ces vies qui s’entremêlent, qui se séparent, qui se percutent et qui se répondent. On peut vraiment parler ici d’œuvre d’art, c’est très technique et en même temps c’est beau, c’est un bel exemple de coopération réussie entre talent et travail.

Bref, c’était une belle aventure.
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Derniers jours d’un monde oublié

J'avais dit: je fais une pause dans l'imaginaire.



Et puis tout récemment j'ai lu de chouettes avis du thé pour les fantômes, fuck ai-je pensé, celui là aussi je l'aurais bien gagné lors de la dernière masse critique (forcément c'était mon thème préféré)(j'avais une belle liste d'envies) (mais there can be only one toussa) et j'ai lu également de bons avis de ce livre, que par chance je peux emprunter, alors zou, c'est parti on y va.



Le titre présage du funeste. Pourtant on l'oublie vite, plongés dans cet univers riche, généreux en types et caractères de personnages et leurs but distincts.



Il y a eu une presque fin du monde, depuis les habitants d'une île qui se croient seuls rescapés ont rebâti une hiérarchie, qui se partage l'amour de son peuple, qui s'octroie les richesses, qui les terres les plus fertiles. Sauf qu'un navire-pirates survient un jour, à la grande joie ou crainte des différents iliens.



J'ai trouvé que c'était très fort, les intérêts et croyances de chacun, l'équilibre précaire qui s'écroule de rien. Les deux mondes qui se confrontent et contemplent une situation qui leur semble impossible. J'ai particulièrement aimé suivre la sorcière, sorte de Moires à elle seule, qui doit justement affronter la perte de son pouvoir. J'ai aimé aussi Erika, jeune pirate, qui connaît le monde de son "Désert mouillé". Arthur, que j'ai appris à aimer sur la fin. Et puis surtout l'écriture. Belle, poétique parfois mais jamais élitiste. Une heureuse surprise. Un régal. Avec des petites pages de vies, decrets, messages qui donnent à l'ensemble quelque chose de très concret pour nous. Ça faisait longtemps que je n'avais veillé bien trop tard pour être raisonnable pour terminer un livre. Et ça fait du bien.



Il m'a manqué une chose. Qui n'aurait servi à rien. Une carte de Sheltel, l'île de ce roman.

Je vais la dessiner, demain, si je peux.
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Du thé pour les fantômes

Alors lui, qu'est-ce que je suis déçue de ne pas l'avoir aimé ! J'étais vraiment certaine d'être embarquée par l'histoire comme la majorité des lecteurs, pourtant ce ne fut pas le cas.



Commençons par ce qui m'a le plus dérangée : la narration. Ma déception est intimement liée à ce procédé, en effet, l'histoire nous est contée par un narrateur, dont l'humour n'a eu de cesse de me sortir du récit. C'est très particulier, peut-être qu'en audio ça passe mieux et rajoute même un petit quelque chose, en revanche, en lecture papier ça n'a pas du tout été mon ressenti. Pour cette raison, j'ai abandonné plusieurs fois ma lecture, mais à chaque fois me revenaient à l'esprit tous les avis dithyrambiques que j'ai pu lire et je ne voulais pas passer à côté d'une pépite. Alors, j'ai persisté, non sans peine, il faut dire qu'à cette difficulté s'est ajouté celle du récit en lui-même. J'ai trouvé qu'il y avait beaucoup de longueurs, l'intrigue met du temps à démarrer puisque l'on retrace la vie d'Agonie et Félicité de leur naissance jusqu'à leur vie adulte, puis la vie de Carmine. J'ai également eu du mal à me retrouver dans les évènements, c'était assez brouillon, on se retrouvait propulsé dans le passé, puis dans le présent, à suivre chacune des sœurs pour passer ensuite à Carmine. C'est tout à fait déstabilisant, il aurait été sûrement plus judicieux d'apporter des précisions dans la chronologie pour ne pas perdre les lecteurs.



Néanmoins, je ne peux pas nier l'originalité du texte ni le travail conséquent qui a été fait autour des personnages et de leurs liens entre eux. Aucun ne manque de substance ou ne sonne creux, ils ont tous su éveiller une émotion en moi et c'est le point fort du récit. J'ai été très touchée par Agonie et son histoire de vie difficile.

En tout cas, même si j'accorde une grande importance à la construction des protagonistes, ça n'a pas suffi à me faire apprécier ce que je lisais. Je n'ai pas été sensible au fil conducteur de l'histoire qui prend une tournure particulière. Il y avait des passages et révélations tirés par les cheveux, je repense notamment aux péripéties qui se sont déroulées dans le désert, j'étais perdue et perplexe par ce choix scénaristique. Ça a suffi à me faire définitivement décrocher. Je n'avais plus aucun attrait pour le roman et malheureusement, le dénouement n'a fait que confirmer ce sentiment. Je n'ai pas du tout aimé la manière dont cela s'est fini, ni les révélations finales autour de Carmine, c'était aux antipodes de ce que j'espérais lire, et ça m'est paru encore une fois « too much ». Je ne trouve d'ailleurs pas que les révélations au sujet de Carmine justifient son attitude envers Agonie, et après avoir tourné la dernière page, je me suis dit « tout ça pour ça ». Ce fut donc une immense déception.



Je pense qu'il est important de préciser avant de se lancer dans ce roman qu'il s'agit avant tout d'une fresque familiale. Il y a du fantastique, c'est évident puisque c'est le cœur même de l'histoire, mais ça n'était pas la magie, ni l'ambiance que j'espérais retrouver et encore moins racontée par un narrateur habituel. Toutefois, je ne peux pas nier l'originalité du texte ni le développement apporté aux personnages, qui a permis de séduire un lectorat et c'est le principal.
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Derniers jours d’un monde oublié

En 2020, la collection Folio SF de Gallimard fêtait ses vingt ans et organisait un concours d’écriture au terme duquel elle proposait de publier le roman du lauréat. Cette lauréate, c’est Chris Vuklisevic dont « Derniers jours d’un monde oublié » est donc le premier ouvrage. Le roman met en scène une île esseulée, Sheltel, persuadée d’être le seul endroit épargné après la Grande Nuit, une catastrophe à propos de laquelle on ne sait presque rien mais qui a des allures d’apocalypse. Trois siècles plus tard, la petite vie tranquille des habitants de l’île se voit bouleverser par une nouvelle incroyable : un navire mouille au large des côtes, preuve irréfutable qu’un monde existerait bien encore au-delà de ce territoire étriqué. Un monde dangereux pour certains, car il risquerait de remettre en cause les traditions séculaires de l’île, mais un monde plein de possibilités, notamment commerciales, pour d’autres. Trois personnages occupent le cœur du récit. La première est une femme qui occupe l’une des fonctions les plus prestigieuses et que l’on associe à une sorcière. Appelée la « Main » et appuyée par cinq assistants qui constituent ses doigts, elle est chargée de contrôler les naissances et les morts sur l’île grâce à son terrifiant pouvoir, la balance devant être parfaitement équilibré afin d’assurer la pérennité de Sheltel. L’autre est un vieux marchand, à la fois ravi à la perspective de l’ouverture de nouveaux marchés mais aussi profondément inquiet que les innovations techniques de ces étrangers ne soient d’une qualité supérieure à celles qu’il a conçu et ne viennent ainsi menacer son monopole. Enfin, on va suivre le parcours d’une jeune femme appartenant à l’équipage du navire mouillant au large et qui fait le choix de déserter pour échapper à l’emprise de la capitaine, responsable de la disparition de ses parents et qui n’hésite pas à l’utiliser pour distraire l’équipage en lui faisant affronter les matelots lors de combats sanglants. La sorcière. Le vieux marchand. La pirate. Le roman alterne entre les points de vue de ces trois personnages qui permettent chacun de mieux comprendre le fonctionnement de l’île et qui vont tous jouer un rôle dans son effondrement.



Car c’est à la disparition d’un monde que nous convie Chris Vuklisevic, près de trois siècles après la fameuse catastrophe ayant coupé l’île du reste du monde. L’action se déroule dans un temps très court, une dizaine de jours, et met en scène l’effondrement rapide des principales institutions de Sheltel et de sa classe dirigeante. Il faut dire que le monde que nous dépeint l’autrice est enserré dans un carcan religieux/magique et politique très étroit qui en font à la fois un enfer mais aussi une véritable poudrière. L’ambiance est sombre, certaines scènes se révélant même d’une cruauté qui met le lecteur mal à l’aise et ne lui donne guère envie de s’attarder dans un univers aussi barbare. La population est maintenue dans un état de quasi servitude, soumises aux règles drastiques du pouvoir en matière de restriction de l’eau, de circulation, ou encore de mise à l’écart des personnes possédant la capacité de générer du feu (emprisonnés car risquant là encore d’inquiéter le monopole commercial des feutiers, corporation spécialisée dans la pyrotechnie). La régulation des naissances y est également terrible puisque les enfants possédant la moindre malformation sont supprimés tandis que chaque famille doit choisir à la naissance d’un enfant s’il le laissera mourir ou si un membre plus âgé se sacrifiera pour lui. On a dans un premier temps bien du mal à comprendre le fonctionnement de l’île, l’autrice disséminant ses informations de façon très parcellaires. Les petits apartés qui précèdent chaque chapitre (articles de presse, annonces, publicités, documents officiels…) aident souvent à mieux cerner l’environnement dans lequel évoluent les personnages mais, dans la mesure où ils sont déconnectés du récit, cela ne facilite pas vraiment l’immersion du lecteur. Les personnages sont quant à eux distants et par conséquent difficiles à cerner dans la mesure où ils semblent peu impactés par la violence qui les entoure. Cette indifférence se révèle manifestement communicative et on suit sans ennui mais sans passion non plus l’agonie de cette île étrange dont on a déjà du mal à comprendre comment elle a pu se maintenir à flot aussi longtemps. La plume de l’autrice, elle, est agréable et fluide mais là encore trop froide.



« Derniers jours d’un monde oublié » est un roman original qui dépeint le déclin d’une île qui découvre avec stupeur qu’elle n’est pas seule au monde lors de l’arrivée d’un navire à proximité de ses côtes. L’histoire ne manque pas d’attraits mais est plombée par une froideur émanant de la narration autant que des personnages, ce qui ne permet pas une immersion ou une implication émotionnelle très profonde. On décèle toutefois chez Chris Vuklisevic un beau potentiel qui s’épanouira sans doute davantage dans son prochain roman qui paraîtra au Bélial en mai prochain (« Du thé pour les fantômes »).
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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Du thé pour les fantômes

Adepte d’œuvres alliant ésotérisme et surnaturel, j’ai de suite été attiré par l’envoûtante couverte et mystérieux résumé de cette œuvre. Une fois en ma possession, je n’ai pu me résoudre à le laisser et de côté et je me suis empressé d’effectuer un véritable voyage me laissant assez perplexe tant j’ai été séduit par l’univers et ses touchants personnages qui, pourtant, ne sont parvenues à m’emporter totalement au sein leur histoire.



Pour autant, je ne peux affirmer ne pas avoir apprécié cette lecture mais les premières pages me laissaient penser à une lecture coup de cœur tandis que les suivantes m’ont laissé le goût d’incertitude me concernant. Ce sentiment me frustre tant la plume de Chris Vuklisevic n’est absolument pas fautive du fait de sa singulière et enivrante prose qui a plus que résonné en moi et dont le lyrisme m’a fortement envoûté. Il est indéniable que l’auteure maîtrise parfaitement la construction de son œuvre qui nous permet de mettre en lumière une partie de notre merveilleux patrimoine et j’ai adoré cette excursion niçoise à l’ambiance lourde et à l’atmosphère sinistre. Ainsi, j’ai de suite été saisi par le délicat contraste entre la poésie et la morbidité de l’univers dévoilé et des plus passionnant par cet atypique salon de thé où bien des secrets demeurent. Finalement, Du Thé pour les Fantômes se veut autant une œuvre fantastique que de terroir et j’ai apprécié ce savoureux mélange des genres offrant une œuvre unique et singulière et permettant à Chris Vuklisevic d’offrir une fresque familiale divertissante à découvrir.



En effet et bien que principalement axé sur le funeste destin de Félicite et d’Egonia – où Agonie, c’est selon – cette dernière dévoile des portraits de femmes fort succulents à découvrir. Dès leurs naissances, la vie ne leur fera pas de cadeau et leurs noms ne laisseront que trop bien présager ce qui attendra cette attachante et touchante sororité. Peu importe le point de vue dévoilé et qu’il s’agisse de la douce et colorée Félicite ou de la sombre Egonia, chaque portrait m’a autant séduit que captivé. Ces deux personnages forcent l’empathie et je me suis rapidement attaché à celles-ci. Séparées depuis bien des années, la mort de leur mère les forcera à se retrouver afin de pouvoir permettre à celle-ci de reposer en paix. Pour se faire, ces dernières devront remonter les traces de leur passé pour découvrir leur véritable histoire et les conséquences de leurs venues au monde.

Bien que j’ai adoré remonter le passé en leur mélancolique compagnie et que cette fresque familiale permet à l’auteure de construire un univers d’ombres et de lumière, enclin à la magie et au surnaturel ainsi qu’aux délicats sentiments, j’admets que cela a quelque peu freiné l’étendue de ce dernier. L’action reste concentrée sur l’origine des sœurs et se dessine finalement un miroitant jeu de piste qui, pour ma part, m’a semblé parfois s’étirer en longueurs malgré toute la beauté du style de Chris Vuklisevic et les nombreux lieux dévoilés et autres personnages présentés.



C’est pourquoi et si je m’en tenais qu’à la sombre ambiance de cette œuvre ainsi qu’à la singulière et poétique plume de l’auteure, ce roman serait une véritable réussite. Néanmoins, je dois reconnaître que malgré la passionnante fresque familiale dévoilée, cette dernière essouffle quelque peu toute l’étendue du magistral et enivrant univers de cette œuvre. Pour autant, Chris Vuklisevic est un nom à surveiller de près tant j’ai été sensible à sa délicate prose.
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Du thé pour les fantômes

Même si je n’ai pas été pleinement satisfaite, quand j’ai lu Porcelaine sous les ruines de Chris Vuklisevic alias Ada Vivalda, j’ai eu envie de retrouver sa plume sur un autre texte car j’ai trouvé quelque chose en lui qui m’a beaucoup plu. Ce fut donc un vrai plaisir de participer à la lecture commune de son précédent roman : Du thé pour les fantômes avec Audrey et Isabelle et de découvrir enfin un récit qui me parle.



La sensibilité que j’avais cru percevoir dans Porcelaine sous les ruines mais qui m’avait été gâchée par une ambiance trop romantasy que je n’aime pas, je l’ai découverte ici dépouillée de cet habillage artificiel et quelle lecture ce fut ! Poétique, étrange, perturbante, floue. J’ai eu l’impression de plonger avec mes comparses dans une multitudes de petites touches donnant lieu au final à un tableau rempli d’impressions. Merveilleux ! Une ambiance à mi-chemin entre les contes provençaux, les contes des mille et une nuits et du fantastique pur jus également est venu me bercer et m’emporter le temps d’une lecture un peu hors du temps où mes pieds ont souvent quitter terre.



Avec une plume à la fois très directe et poétique malgré sa brièveté et sa concision, l’autrice a élaboré une histoire qui marque, une histoire qui perd, une histoire où on cherche à se retrouver comme ses héroïnes. Les débuts peuvent être étranges, on devine une histoire de famille à suivre autour de deux jumelles que la vie a séparées et qui vont se retrouver autour du mystère de la mort de leur mère. Mais la suite n’est qu’une suite justement de petits morceaux de vie, comme des petits bouts de papier déchirés qu’on collecte et tente de rassembler pour voir l’image générale qu’ils donnent. J’ai souvent eu la sensation, et ma collègue Audrey aussi, de lire ces moments dans un état de semi-conscience, prenant plaisir à suivre ces instants mais ne m’en rappelant que fugacement ensuite. C’est là tout le talent de l’autrice d’ainsi nous faire basculer dans l’étrangeté de son récit dans le rythme même de sa narration et l’impact qu’il a sur le lecteur.



Car cette lecture est une vraie expérience. Elle nous plonge dans les profondeurs des âmes des femmes de cette étrange famille fait d’une mère qui peut déclencher des tempêtes, d’une fille qui aide les fantômes à traverser et d’une autre qui est une sorcière qui fait sortir des papillons mortels de sa bouche dès qu’elle parle. Ces femmes, elles ne semblent pas s’aimer au premier abord, elles ont la rudesse du village reculé de Provence dont elles sont issues et on se dit qu’elles sont fort peu aimables les unes avec les autres. En cela, l’autrice m’a rappelé ces écrits « de terroir » où j’ai aimé la rugosité des personnages qui peu à peu ont fait tomber leur écorce pour dévoiler la tendresse de leur âme. Carmine n’est pas que cette mère injuste et dure que semble décrire Agonie/Egonia ; Félicité n’est pas que cette soeur distante et parfaite ; Egonia n’est pas que cette sorcière qui fait peur.



La beauté du texte vient à la fois du rythme de la plume de l’autrice, des sensations et émotions qu’elle y met dans cette atmosphère de quête de vérité étrange et entêtante où les volutes des parfums des thés employés par Félicité semblent nous pénétrer. Mais elle vient aussi de son écriture en quinconces des personnages, ceux-ci étant toujours sensiblement décalés avec l’image qu’ils donnent, se révélant bien plus riches et complexes. J’ai été totalement happée par cette alliance, le rythme singulier de l’intrigue et son nuage de mystères me pénétrant toujours plus et me rendant les révélations sur les personnages toujours plus saisissantes et émouvantes. Car ne le cachons pas, tout le monde l’aura deviné, avec ces figures de femmes « à pouvoirs » il va être question de marginalité, singularité, sororité et féminisme bien sûr. L’autrice nous invite à revoir notre vision de l’autre, de la différence, de la liberté aussi mais également de la culpabilité et de la monstruosité qui peut se cacher dans la beauté. C’est très philosophique et très intérieur comme lecture. Au fur et à mesure qu’on avance dans le brouillard de cette narration complexe, on voit que les fils entremêlés ne le sont pas pour rien et que cette complexité cache bien des blessures, des blessures profondes, causées notamment au sein même de la famille, ce lieu qui devrait tellement être une protection, mais l’est si rarement.



Bien que parfois perdue dans ma lecture, j’ai vécu une expérience intense auprès d’héroïnes marquantes dont le parcours de vie ancestral fut âpre et entêtant. Une épopée familiale étrange qui m’a emmené aux racines du fantastique tel que je l’aime avec une belle pointe acre de féminisme et d’humanité permettant de mettre en relief nos relations aux autres et les blessures qu’on peut causer en pensant se protéger. Chris Vuklisevic m’a bien démontré toute la profondeur de sa plume telle qu’il me semblait l’avoir perçue et bien plus. Elle m’a charmée par son rythme envoûtant, sa poésie brumeuse et piquante et sa quête tellement résistante. Un superbe voyage de songes, de thé et d’émotions familiales que j’ai adoré faire en compagnie de mes camarades de périples littéraires : Audrey et Isabelle. Merci !
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Du thé pour les fantômes

Une lecture vis-à-vis de laquelle je suis mitigée.



On suit le destin de deux sœurs, Félicité et Agonie, à la recherche du spectre de leur mère (aux noms, on devine assez rapidement les relations qu'il pouvait y avoir). Avec un soupçon de magie, on suit en fait une fresque familiale. Car pour retrouver le fantôme de Carmine, il faut fouiller dans son passé.



J'ai beaucoup apprécié le fait que nos personnages soit des personnages si singuliers. Leurs dons offrent une certaine forme de poésie au récit. La passeuse de fantôme et les thés-étranges m'ont particulièrement séduite. En revanche, je n'ai apprécié aucun des protagonistes, du début à la fin. Je sais que le récit est axé sur le poids du passé, sur le fait qu'il impacte indéniablement les personnalités, les choix, les actes de tout à chacun. Et si j'ai trouvé ce parti-pris intéressant, il n'en reste pas moins qu'objectivement Félicité comme Agonie m'agaçaient.



Concernant l'atmosphère, on se retrouve dans une ambiance d'une ville du sud-est de la France. L'ambiance est réussie, on s'y croit. La plume a des envolées lyriques qui rendent la structure de ce récit très originale. Malgré tout, entre différents passages intéressants, avaient lieu des passages longs dans lesquels là encore je m'ennuyais.



C'est donc une lecture qui a des forces et une originalité indéniables. Je ne doute pas qu'il trouve son public. Malheureusement, ce ne fut pas le cas pour moi. Problème de timing? Peut-être.
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Du thé pour les fantômes

Déguster un bon thé avec une cuillère de miel (celui de Lutin 82 est un régal) est un véritable plaisir. Le faire en lisant un bon roman est une merveille, notre esprit voyage en compagnie des saveurs du breuvage, dans des contrées lointaines en compagnie des personnages. Alors prenez le temps, posez vous autour d’une bonne théière pleine de thé et écoutez l’étrange histoire racontée par Chris Vuklisevic. Cette dernière est une conteuse hors pair, elle a d’ailleurs remporté le concours organisé pour les vingt ans de la collection Folio SF avec Derniers jours d’un monde oublié . Approchez, venez profiter du moment, laissez vous porter par les mots au milieu de la Provence, près de Nice, à une époque pas si lointaine où on offrait aussi Du thé pour les fantômes.



Maintenant que vous êtes assis bien confortablement, laissez votre esprit s’évader dans la Provence d’antan, dans un petit hameau perdu dans les collines lointaines de Nice appelé Bégoumas, charmant nom qui fleure bon le Sud de la France. C’est dans ce cadre particulier que deux sœurs jumelles, Félicité et Agonie, deux filles de berger, voient le jour. Les deux sœurs ont grandi dans ce coin pittoresque, mais malgré leur lien de jumelles tout les sépare, à commencer par la relation avec leur mère. Leurs vies vont être bien différentes, mais elles vont être réunies par le décès brutal de leur génitrice, 30 ans après s’être perdues de vue. Félicité est devenue passeuse de fantômes, elle aide les morts à terminer ce qu’ils voulaient faire ou dire pour leur permettre de disparaître réellement. Si elle veut aider sa mère à passer de l’autre côté, il lui faut trouver son fantôme, et pour cela requérir l’aide de sa jumelle. Ensemble, elles vont essayer de connaître cette femme mystérieuse, qui a aimé l’une de ses filles et rejeté l’autre.



Du thé pour les fantômes est un récit à déguster comme une tasse de thé. On en découvre les saveurs petit à petit, l’odeur en premier puis le goût tout doucement ( c’est très chaud au début), avant de nous envelopper de bien-être. L’histoire en elle-même est assez simple : il s’agit de la quête de 2 sœurs que tout sépare depuis leur naissance, de leur relation, de leur lien avec leur mère et de la vie de celle-ci. Mais ce qui fait le sel du roman est la narration si particulière et la plume de l’autrice. Chris Vuklisevic a choisi une narration non linéaire qui apporte beaucoup de charme à cette histoire. A cela s’ajoute les beautés des paysages du Sud, avec leurs caractéristiques bien particulières que fait si bien ressortir Chris Vuklisevic et dont elle tire parfaitement partie. Il suffit de fermer les yeux pour se laisser porter dans ces paysages si typiques de la région niçoise, d’arpenter les collines de Bégoumas. L’histoire des deux jumelles est aussi particulièrement touchante, pleine de non-dits, de sentiments refoulés. La plume de l’autrice se fait tour à tour poétique, envoutante, presque théâtrale par moments. Elle offre un récit très immersif en déployant un cadre si unique, plein d’étrange-thés, et porté par un narrateur mystérieux dont on se demande longtemps l’identité.



Du thé pour les fantômes est une histoire autour du lien familial, du passé, une histoire toute en nuances. Un roman porté par la superbe plume de Chris Vuklisevic et une narration qui brouille les pistes. Un récit qui s’infuse pendant quelques heures et offre une belle évasion, un superbe voyage tout comme une tasse de bon thé.
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Du thé pour les fantômes

Agonie et Félicité sont soeurs jumelles. L'une a la beauté de sa mère mais tout pourri sous ses mains et sous ses mots ; l'autre a un physique plus commun et peut communiquer avec les fantômes. Entre les deux, c'est le jour et la nuit. Enfants, elles étaient proches, adultes, 30 ans de silence et de rancoeur les séparent. Jusqu'au décès de celle qui les a séparées : leur mère.



C'est un super roman. Un roman qui, une fois qu'on est entré dans l'univers, ne nous lâche plus.



Chris Vuklisevic tisse une histoire familiale dans un contexte qui m'a parfois fait penser aux enfants de "Miss Peregrine et les enfants particuliers" de Ransom Riggs, version provençale.



Les personnages sont atypiques et attachants. Agonie/Egonia a eu ma préférence. La compassion a pris le dessus. Néanmoins, chaque personnage est empreint de profondeur, reflète une complexité qui tient la route.



L'aspect fantastique apporté par l'autrice est vraiment incroyable. Elle déborde d'imagination sans en faire des tonnes. C'est effrayant autant que fascinant. J'aime cette façon qu'elle a de montrer la beauté dans la noirceur et inversement.



Au-delà de l'aspect fantastique, ésotérique, c'est aussi une histoire de liens familiaux, de maltraitance infantile, de manipulation et de secrets. Il y a des passages qui m'ont beaucoup émue.



J'ai quitté à regret ce roman et son univers.

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