A l'occasion du festival des littératures du monde : "L'usage du monde" organisé par Lettres du monde, rencontre avec Alberto Prunetti autour de son ouvrage "Amianto : une histoire ouvrière" aux éditions Agone.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2288933/alberto-prunetti-amianto-une-histoire-ouvriere
Notes de musique : Youtube library
Visitez le site : http://www.mollat.com/
Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux :
Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts
Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat
Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/
Dailymotion : http://www.dailymotion.com/user/Librairie_Mollat/1
Vimeo : https://vimeo.com/mollat
Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/
Tumblr : http://mollat-bordeaux.tumblr.com/
Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat
Blogs : http://blogs.mollat.com/
+ Lire la suite
Des histoires de minéraux et d'usines qui ont empoisonné la zone et abîmé les poumons des grands-parents de presque tous mes amis avec le silicose, pour ensuite infester de boues rouges la mer bordant l'archipel toscan et la Corse, faire couler des cendres de pyrite dans les mines creusées des décennies auparavant et intoxiquer aux métaux lourds la Merse, la rivière qui arrive jusqu'à la province de Sienne depuis les Collines métallifères, puis se jette dans l'Ombrone et descend vers la mer.
Les années 1970 […] sont des années heureuses, où le travail ne manque pas et où la vie suit son propre cours. Des années de salaires élevés et de conflictualité forte, de très belles années, que seuls ceux qui n’ont pas travaillé en usine pouvaient appeler les « années de plombs ». Des années où de simples ouvriers comme mon père, adhérents du syndicat métallurgiste Fiom-CGIL, jouissaient à travers de leurs protections salariales d’avantages tirés du rôle de soupape – joué par le parti et le syndicat – pour contenir l’hydre révolutionnaire. En menant la guerre contre l’autonomie et les mouvements extra-parlementaires, le parti dit communiste garantissait aux ouvriers valables de bonnes rémunérations, des postes de travail stables et la possibilité de s’acheter un logement et de faire étudier leurs enfants en les envoyant un jour à l’université. Mais sur le front de la sécurité, de la santé et des dégâts environnementaux, la situation était catastrophique.
Aujourd'hui, si vous n'êtes pas diplômé en sciences et que vous adressez la parole à un enfant qui n'est pas le vôtre, vous risquez l'arrestation. Alors en repensant à toutes ces choses, mes trois buts sur les petits terrains devant les carrières et sur les mines, je les dédie justement à Guido, et j'emmerde ce monde.
Mais ce surnom de « gros galet » était désormais trop étroit pour moi et je devenais la « grosse tête ». Parce qu'en province, quelqu'un qui fait des études était décrit de manière rhétorique, du moins dans la sous-culture populaire, comme un type avec une tête énorme et une bosse à la Leopardi sur le dos. Le camarade Gramsci y avait eu droit aussi, alors ça ne me dérangeait pas trop. (77)
Iles parlent de ceux qui sont aspirés dans les engrenages et les rouleaux des laminoirs, hachés par les cylindres qui écrasent les rubans d'acier. De ceux qui sont brûlés par une coulée incandescente échappée des voies d'une installation de fusion. De ceux qui sont encastrés dans un ruban transporteur avec la qualification de "corps étrangers", dont la présence est signalée par un moteur qui "force". De ceux qui ont le crâne écrasé par une presse ou défoncé par des tubes qui explosent. De ceux qui sont brûlés dans la salle des pompes d'une raffinerie pendant qu'ils raccordent les tuyaux.
Les malheureux, pour moi, pour nous, fils de l'usine, c'était les enfants des riches, Les Bourges. Ceux qui ne pouvaient pas sortir de chez eux parce que qu'au parc ils ne savaient pas jouer au foot et se faisaient cogner et dominer. Qui devaient s'habiller "bien comme il faut" et rentrer propres. Qui n'avaient pas de fondes ni de sarbacanes et ne se familiarisaient pas avec le cross sur les collines de scories ferreuses. Qui ne faisaient partie d'aucune bande de quartier, comme les Eagles du hockey ou les Bronx de Casserello ou le CCC, le cercle paysan (contadino) de Capannino.
On y fondait le métal dès le Moyen Âge, avant la domination des grands-ducs sur les rives du golf de Follonica ; et avant encore, c'étaient les Étrusques qui les faisaient avec l'hématite de l'île d'Elbe, qui s'appelait justement Ilva en latin.
Que voulez-vous, les stéréotypes sont souvent faux mais toujours rentables, ça vaut pour la cuisine comme pour la politique.