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Citation de SeriallectriceSV


Marie a le regard fuyant. Elles traversent la cour de la ferme. Les relents de bouse mélangés à ceux du tas de fumier s'immiscent dans leurs narines. Julia aime bien ces odeurs fortes, authentiques. C'est la première fois qu'elle rentre chez les Levavasseur. Marie la fait passer à la cuisine, son territoire. Ici, Marie cuisine, ici, Marie fait les comptes, ici, Marie rêve à une autre vie en écoutant la musique à la radio, ici Marie déprime un peu. Un côté de la table massive est recouvert de dossiers, de factures, de bons de commande, toute l'activité de l'exploitation laitière est consignée dans ces pochettes en carton.
Marie a perdu son sourire il y a fort longtemps, vaincue par l'ennui, l'étroitesse de sa vie réduite à cette sombre cuisine de ferme. La lumière c'est pour les hommes, les champs c'est pour les hommes, l'horizon c'est pour les hommes. Elle envie Julia, libre de son corps, libre d'exercer le métier qu'elle a choisi, libre de leur tenir tête, aux hommes. Marie est juste bonne à récurer les stalles des vaches l'après-midi, à nourrir les poules, ce à quoi s'ajoutent les tâches administratives, la comptabilité, les commandes, le ménage à la maison et l'éducation des garçons, comme sa mère et sa grand-mère avant elle. Elle abat le travail d'un homme tout en s'occupant de la maison, sans s'apitoyer. Alors elle peut bien en avoir ras le bol parfois. C'est à peine si elle a une existence légale, le métier d'agricultrice n'étant pas encore vraiment reconnu elle reste et demeure femme d'agriculteur.
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