Catherine Verlaguet nous offre le joli portrait d'un adolescent de quinze ans et demi en nous invitant dans ses pensées. Elle parvient à aborder des sujets délicats comme la relation parent-enfant, le désir, le féminisme, la première fois, la masturbation (hé oui !) sans complaisance ni angélisme. le ton est bien trouvé, juste.
Le jeune Pierre est un protagoniste attachant qui échappe aux clichés sur les garçons adolescents. C'est même le point fort de ce roman que de rappeler que, derrière la façade de leur forteresse, les garçons éprouvent des sentiments complexes tout autant que les adolescentes, et que la puberté est pour eux une période de questionnements.
L'autrice entoure son héros de plusieurs personnages secondaires. Aucun n'est monolithique, chacun est davantage que l'apparence qu'il renvoie, et cela aussi est intéressant. Il y a le grand frère philosophe et posé, mais qui oublie toute retenue face au sexe féminin, la maman qui veut aussi exister en tant que femme, la bonne copine qui cache un tempérament de feu sous ses airs de jeune fille sage…
Catherine Verlaguet inverse parfois les codes avec espièglerie et s'éloigne ainsi des généralités : ici, c'est le garçon qui s'interroge sur son désir avant de franchir le cap de « la première fois ». Les femmes sont ici souvent plus fortes que les hommes et les bousculent un peu, sans être pour autant des viragos. Grâce à tout cela, notre intérêt est maintenu jusqu'à la fin.
Dans cette époque où wokisme et appropriation culturelle tendent à enfermer les genres et les cultures, il est bien agréable d'entendre la parole masculine écrite par la plume d'une femme. Car c'est bien là l'un des plaisirs de la littérature : se mettre à la place de l'autre, entrer dans sa peau, le comprendre, nous ouvrir à l'empathie.
Catherine Verlaguet relève le défi avec brio.