En triant l'étagère de la bibliothèque où s'entassent (un peu) pèle-mêle les livres de ma Pile A Lire, je suis tombée, tout au fond, sur ce court roman de
Caroline Lamarche. Acheté il y a bien longtemps dans le cadre d'une formation « Atelier d'écriture », il a été enfermé dans mon armoire au Lycée, en vue de l'utiliser pour travailler avec les élèves sur les différents points de vue qu'un ou plusieurs narrateurs peuvent avoir un même événement. Ce que je n'ai jamais eu le temps de faire… Quand j'ai vidé mon armoire en quittant mon emploi de prof, il a atterri dans ma PAL et, en l'exhumant ce soir, je me suis dit que si je ne lisais pas tout de suite, je ne le lirais jamais.
Ce court roman s'articule autour d'un fait somme toute anodin : un chien court, le long du terre-plein central de l'autoroute. Il court, sans prêter attention aux voitures, au danger et sa route croise celle de six personnes. Ce jour-là, «
le jour du chien », comme un déclencheur, sera pour chacune d'elles l'occasion de réfléchir sur le drame qui remplit leur quotidien. Il n'y a pas vraiment d'intrigue, la course de ce chien abandonné sert de prétexte à l'auteur pour proposer une réflexion aux multiples facettes sur un thème central : l'abandon.
Il y a ce camionneur qui s'invente une famille pour tenter d'oublier que sa femme l'a quitté et que, justement, il n'a pas de famille…
Il y a ce prêtre qui se sent abandonné par Dieu, en crise de foi après avoir rencontré une mystérieuse jeune femme…
Il y a cette jeune femme en rouge, en route vers une rupture par peur de l'immensité de l'amour et qui, abandonnée autrefois, abandonne tout le monde depuis…
Il y a ce jeune homme, homosexuel que son père a jeté dehors, qui vient une fois de plus de plaquer son boulot et ses amis et qui roule à vélo sur l'autoroute, comme un défi à la vie…
Et il y a cette mère et sa fille : l'une vient de perdre son mari, emporté par un cance, et remplit le vide en aidant tout le monde sauf sa fille qu'elle ne parvient pas à aimer comme elle le voudrait ; l'autre a perdu son père, remplit le vide en mangeant et souffre de n'exister pour personne, même pas pour sa mère…
Six histoires différentes qui laissent peu de place à l'espoir et qui ne m'ont pas touchée avec la même intensité. On plonge au coeur des réflexions des personnages, ils dévoilent une partie de leurs sentiments, de leur mal-être, de leurs envies mais c'est somme toute assez froid, sauf peut-être pour le chapitre consacré à la femme en rouge et à la jeune fille. C'est elle qui donne le plus d'importance au chien dans son récit et qui y voit enfin une raison de redresser la tête.
C'est un livre intéressant du point de vue narratif et pour pousser assez loin une réflexion sur la thématique qu'il propose, je ne regrette pas de l'avoir finalement découvert mais je n'ai pas non plus de regrets de ne pas l'avoir utilisé en classe. Il n'aurait pas réconcilié mes élèves de l'enseignement technique et professionnel avec la lecture...