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EAN : 9782073045133
Gallimard (15/02/2024)
3.97/5   50 notes
Résumé :
« — Il serait temps que je meure, sinon je vais vous fatiguer.
— C’est toi qui te fatigues : tu ne t’ennuies pas, toute la journée à ne rien faire ?
— Je ne m’ennuie jamais. Quand je n’aurai plus rien à faire, je deviendrai enfin bonne. »

Une nuit, la narratrice rêve que sa mère, handicapée et malvoyante, parcourt à pied dans l’obscurité les cent kilomètres qui les séparent. Ce rêve inaugure un temps durant lequel, dans la « grande et br... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Récit des derniers moments de la vie de la maman de l'auteure, une maman qui fut toute sa vie distante, mal à l'aise avec les émotions et qui ne montrait de la tendresse, de la douceur qu'envers ses abeilles…

Epreuve pour la fille que de voir sa maman vieillir et disparaitre peu à peu. Les bons et les mauvais souvenirs remontent à la surface, comme ces phrases si délétères : « l'éducation c'est facile : les enfants, il suffit de les éduquer comme des chiens » ou encore « quand tu seras mariée, tu seras enfin heureuse », ou bien « un jour tu devras… avec ton mari… Ce sera désagréable, mais ne t'inquiète pas, ce n'est qu'un petit moment ennuyeux, qu'on oublie très vite, et surtout, surtout, tu ne devras jamais, jamais, lui dire non ».

Une maman qui abandonne peu à peu sa place, d'abord de façon volontaire, qui range, nettoie et vide les armoires, et qui jette la plupart des traces de sa vie. Une maman qui « s'excuse de ne pas être plus loin », comme chantait Brel dans « les vieux ». Une maman dont ensuite la seule activité sera de « médire, de quoi exorciser la tristesse de vieillir ».

Et puis une maman placée en maison de retraite, où elle est privée peu à peu de son autonomie, de sa dignité, pour être infantilisée puis chosifiée. Portrait sans concession de la façon dont on traite nos aînés et aînées aujourd'hui.

Et pourtant un dernier moment de tendresse, le seul peut-être de toute une relation, un moment de grâce, sur le banc dans le jardin, sous un soleil printanier, une paix « non pas retrouvée, mais une paix trouvée ». Tout simplement.
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Comme le titre ne l'indique en rien, Caroline Lamarche nous offre le récit des dernières années de la vie de sa mère, qui s'est achevée pendant la période si troublée des confinements. Ce faisant, elle élargit sa réflexion aux sujets finalement aussi intimes qu'universaux qui concernent toute condition humaine. Des pages touchantes et vraiment intéressantes.
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Souvenirs pieux d'un matriarcat où la mère, après son veuvage, assemble autour d'elle un monde exclusivement féminin : ses filles, la servante, la garde-malade, l'infirmière, « la bonne et brave maison », et les abeilles qu'elle a entrepris d'élever un demi-siècle après l'élevage de ses enfants. « Elle ne veut pas déranger » mais sa présence reste massive et dominante. Elle détruit progressivement les souvenirs matériels de sa longue vie et les remplace par des confidences où la narratrice peine à faire coïncider les récits contradictoires de sa mère — son mariage, sa nuit de noces, l'admiration pour son époux —, et ses souvenirs personnels d'une enfance de devoirs, sans droits ni tendresse. Viennent le handicap et la dépendance que la mère ne refuse pas d'admettre, mais d'imposer aux siens : la cécité, l'arthrose délabrante. L'auteure réfléchit à la bonne mort qu'elle souhaite à sa mère, mais se trouve débordée par les choix douloureux qu'impose la pandémie. On n'est plus jeune quand sa mère a 98 ans, « la bonne et brave maison » devient impraticable, les aidants sont progressivement exclus par le confinement, le transfert en EHPAD s'impose dans un mélange d'optimisme affiché et de culpabilité ressentie. Et là, dans « la maison de repos et de soins », les difficultés s'accumulent. La narratrice est successivement compréhensive, puis impatiente, enfin hostile et désespérée devant les manquements d'un personnel insuffisant en nombre et débordé par les gestes barrière. Elle est envahie devant sa mère d'un sentiment d'impuissance et de trahison. Dans les dernières pages, la reprise de la métaphore de la ruche apporte une image que le lecteur peut trouver consolante ou désolante. Après les obsèques expédiées, une dernière visite à la maison vide ; une abeille s'y trouve enfermée ; la narratrice éteint les lumières et ouvre successivement les portes pour que l'abeille la suive de pièce en pièce, et peut-être puisse s'échapper. La narration d'une impasse, parfaitement décrite.
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Ce n'est pas la couverture qui a capté mon attention. La première de couverture des Editions Gallimard ne pousse pas le lecteur vers un roman dont l'auteur lui est inconnu. Mais le lecteur est curieux. J'ai aimé le titre La fin des abeilles.
Sur ma table de chevet, j'ai une encyclopédie des symboles. Et l'abeille en est la première occurrence, juste avant Abîme et Abraham. L'abeille est l'un des rares animaux a avoir une forte symbolique. Déjà, les égyptiens pratiquaient l'apiculture dès 2600 av. J-C. En Occident, elle est le symbole de l'âme.
Je m'égare, ou peut-être pas tant que ça. Caroline Lamarche est une écrivaine belge. La fin des abeilles raconte sa relation avec sa mère, son attachement qui grandit alors que sa mère vieillit. Un lien fort, intime se noue au fil des pages. Elle évoque son enfance et cette mère un peu distante, plus proche de ses abeilles et ses ruches que de ses enfants. Elle retrace aussi le rapport de sa mère avec la nature, les arbres, le lieu où elle habite. Elle occupe l'espace. le mari, le père, quelques traits. Femme active, elle perd peu à peu son autonomie. Ce sont la cécité et l'arthrose. Malgré les soins des infirmières à domicile, du kiné et des femmes de la famille, son placement en institution est envisagé puis effectif.
"mais je crains d'en faire trop, après tout il s'agit d'un livre sur ma mère."
Dans cette institution médicalisée, elle retrouve les livres audio prêtés par une association pour aveugles. En dépit du traumatisme, la vieille dame donne le change à ses enfants. Et la pandémie du Covid-19 intervient dans l'équation. Les institutions se ferment au monde extérieur. Seul le téléphone permet aux familles de garder le contact avec leurs anciens.
C'est un très beau texte. "J'écris pour être, avec elle, plus douce." En courts chapitres, nous découvrons une femme qui a traversé les années dans un monde qu'elle a construit doucement.
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« La fin des abeilles » Caroline Lamarche.

Le titre du livre a un parfum de la fin d'une époque, la nôtre. Il est annonciateur d'une catastrophe environnementale qui, selon les plus alarmistes, va se produire déjà dans trois ans, et devant laquelle nous restons stupéfaits, sidérés, comme frappés par une impuissance.

Les abeilles dont il est question ici, sont celles qu'entretenait la mère de Caroline Lamarche. Au fil des ans, elle avait fini par renoncer à s'occuper de ses ruches parce qu'elle avait constaté une disparation exponentielle des abeilles, avec, pour conséquence une diminution vertigineuse de la quantité de miel produit.

Au début de ce récit, la mère de CL est en fin de vie. Elle a atteint la très grande vieillesse. Dans deux ans, elle sera centenaire. Mais elle ne le deviendra pas. Elle décédera avant d'atteindre un siècle de vie. Ce livre, c'est l'hommage rendu par sa fille, à cette femme issue de la haute bourgeoise. La mère est attachée à sa « bonne et chère maison » si grande, qu'elle n'aura jamais assez de temps pour l'entretenir comme elle le voudrait. Comme elle entretient l'immense propriété dans laquelle elle aura, sa vie durant, planté plus de 2000 arbres et bien entendu, placé des dizaines de ruches. La nature au coeur de ses plaisirs et de ses préoccupations. Une écologiste avant l'heure.

Cette mère devenue très vieille perd de son autonomie : diminution sévère de la vue, perte de la marche, perte de mémoire, etc. Se pose pour les enfants la question de l'accompagnement au jour le jour de cette très vieille dame, avec toutes les contraintes que cela entraîne pour les accompagnants ; la lassitude, l'épuisement mental et physique, etc. Pour l'écrivaine, c'est l'occasion de s'interroger sur l'attachement affectif qu'elle éprouve à l'égard de sa mère devenue très vieille et proche de la mort. C'est également l'occasion pour elle, de mener une belle et sincère réflexion sur les fluctuations de cet attachement en passant en revue les différentes périodes de sa vie parallèlement à celles de sa mère.

Caroline Lamarche dresse ici un beau portrait d'une femme de cette génération-là. Celles qui avaient inscrit leur vie dans un modèle social codifié et très corseté, dans lequel les femmes devaient correspondre à des critères desquels étaient effacées leurs aspirations personnelles, professionnelles, sociales, affectives et sexuelles. Cette génération de femmes qui, plus tard, au milieu des années 60, verra leur modèle de vie moqué, critiqué et surtout, comme on le formulerait aujourd'hui, déconstruit, par leurs propres filles. Ce qui engendrera de nombreuses oppositions avec en prolongement inévitable, des périodes d'éloignement.

Voilà donc « La fin des abeilles » comme une métaphore d'un monde qui s'achève, qui va incessamment disparaître et qui, d'ailleurs, est déjà en voie de remplacement. Pour un monde meilleur ? Rien n'est moins sûr. Car l'avenir se dessine en contours flous et menaçants. de cet avenir-là, nous ne sommes pas certains de le vouloir tout à fait.

Une lecture magnifique rendue par une belle écriture.
Un immense coup de coeur.


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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Aux Etats-Unis, on transporte des ruches sur les champs d’amandiers pour le polliniser. À peine leur mission accomplie, on noie les arbres de pesticides : les abeilles meurent. D’où un nouveau et florissant business : la mise en location d’essaims destinés, comme les esclaves d’autrefois, à périr après la récolte. En Chine, des milliers de travailleurs debout sur des échelles caressent au pinceau les fleurs de cerisiers, les poils de martre remplaçant les pattes poudrées des abeilles. Ailleurs, on fabrique des mini-drones dont la vente aux producteurs de fruits relancera une pollinisation de plus en plus artificielle. Nous sommes devenus les serviteurs de la méchante reine Compétitivité et nous finirons, pour entretenir cet enfer maquillé en pays des merveilles, par repeindre les roses blanches en rouge.
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« Quel dommage que Tolstoï et sa femme aient tenu un journal ! »
Pour ma mère la confession intime est un piège tendu à l’ordre conjugal autant qu’au génie masculin. J’ai beau me dire qu’elle a tort, qu’ordre et génie triomphent depuis trop longtemps par le silence des femmes, force m’est de reconnaitre qu’une voix à l’intérieur de moi me reproche de tenir ce journal d’un moment de ma vie. À ma décharge, ce que je fais ici est purement prophylactique. Comme je marche, j’écris. J’écris pour tenir le choc du vieillissement accéléré de ma mère. J’écris pour être, avec elle, plus douce. J’écris pour lui consacrer sa juste place et libérer la part secrète que je dois à mon père.
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Elle ne regarde plus la télé. Désormais elle l'écoute. Comme Jeanne d'Arc ou Bernadette Soubirous, elle voit des formes, entend des voix et en retient de quoi sauver le monde. Elle me parle d'un documentaire sur le réchauffement climatique. Au Pérou les montagnes ont d'ores et déjà perdu leur couverture neigeuse, ce qui entraîne une sécheresse sans précédent. Un paysan péruvien, qui a compris que le blanc rejetait le rayonnement solaire, s'est mis à peindre un pan de montagne avec un mélange de chaux et d'eau. Il a déjà recouvert, en s'accrochant au flanc noir et brûlant du rocher, l'équivalent de trois terrains de football. Le versant blanchi s'est refroidi, le gel est revenu et la neige, en fondant, alimente à nouveau les ruisseaux.
Ma mère, éternelle planificatrice : On ferait bien d'envoyer des hélicoptères sur toutes les montagnes du monde avec de la peinture à pulvériser, ce serait merveilleux."
Moi, je pense que la merveille est qu'un homme l'ait fait tout seul avec cet outil dérisoire : un pinceau. Ne s'agit-il pas d'une action plus remarquable et pour tout dire plus artistique que le fait de piloter un hélicoptère d'épandage ?
Si je ne regarde plus jamais le journal télévisé, c'est que les nouvelles y sont peintes en noir. Tous les téléspectateurs n'en meurent pas mais beaucoup en sont frappés. Sauf ma mère. "Le monde va de mieux en mieux", affirme-t-elle. Elle déteste que je la contredise. Pire: elle ne me croit pas.
Pour faire contrepoids aux drames planétaires, je décide d'être comme ce paysan péruvien armé de son seul pinceau. Je remplace la surenchère des menaces et des plaintes par une action dynamique qui recrée du bien-être au moyen d'un outil naturel : l'écriture. Elle seule permet à mes idées de se remettre à circuler comme des ruisselets limpides.
(pp.73-74)
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Inouï, au sens propre, signifie : ce qui n’est pas entendu.
Lorsqu’un homme et une femme s’accompagnent au fil de longues années dans le déroulement quotidien de leurs tâches parallèles ou communes, cela ne fait pas beaucoup de bruit. Ce n’est même pas un sujet de livre. C’est pourtant ce refus de l’extraordinaire, du dramatique, au profit du mouvant, du laborieux, de l’infime, qui fait de l’amour conjugal quelque chose d’inouï.
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Ma mère qui fut excursionniste et bûcheronne, ménagère et lectrice, solide cuisinière et fine apicultrice, vieillit à la vitesse de la lumière - lumière qui, soit dit en passant, se manifeste dans nos contrées avec une parcimonie désolante. De semaine en semaine, elle se meut plus difficilement, réduite aujourd'hui à l'espace de la bibliothèque remplie de livres reliés de cuir ciré. Cirer les livres est la seule activité qui lui est encore accessible, à petits mouvements contraints - la main, le bras, la nuque souffrent intensément d'arthrose, l'épaule se paralyse -, cirer les livres donne de la beauté et une odeur merveilleuse à ce qui constitue désormais son unique univers.
(p.18)
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Videos de Caroline Lamarche (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Caroline Lamarche
Avec la participation des autrices Caroline Lamarche, Stéphanie Leclerc et des auteurs-illustrateurs Simon Bournel-Bosson, Thomas Lavachery.
Et la classe de 4èmeA du collège Saint-Michel, Guéméné-Penfao (44). Un grand merci à la professeure Claire Blet.
Avec la participation de Cécile Ribault Caillol pour Kibookin.fr
Avec le soutien de Wallonie-Bruxelles International et du Centre Wallonie-Bruxelles Paris.
Avec la séquence La Tête dans les images Salah Elmour, Sauvage, texte de Layla Zarqa, trad. de l'arabe Nada Issa, le port a jauni
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