Ce roman aborde avec profondeur et poésie (mais aussi humour) différentes questions telles que celles de nos origines, de l'impact de nos traumas infantiles dans nos choix de vie, de l'errance, puis de la capacité de résilience.
Ce livre témoigne, avec beaucoup de tendresse, l'adversité de la vie et de la société. En effet, Piotr/Pierre subit diverses maltraitances, qui ne laisse pas le lecteur indifférent. On y lit alors l'évolution de ce petit bout, adopté en France qui tente tant bien que mal de panser toutes ces écorchures, comme ses parents adoptifs.
Ce livre témoigne aussi, à travers le personnage de Natalia, de la volonté de croire en l'homme, malgré toute sa destructivité : " On ne peut pas comme ça coller une étiquette définitive.".
Il y aurait tant de choses à dire de ce livre ! En tout cas, je le recommande à tous ceux qui apprécient les récits poétiques et les explorations psychologiques des personnages. C'est un livre qui invite à la réflexion et qui reste dans l'esprit longtemps après avoir été lu.
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Sergeï, rentre à la nuit tombée, c'est-à-dire tard, en ce vendredi d'avril, déjà tiède. Il est fourbu, la journée a été éprouvante. Tellement de cas désespérés. Tellement de vies en équilibre. Quand on sort de là, on se demande finalement, ce que tout cela veut dire. On soupire à quoi bon? Parce qu'on a l'impression que la maladie et la mort colonisent la vie. Dès lors, ce qui paraît insignifiant : une tasse de café chaud et sucré devant le distributeur, un filet de musique sur la rumeur urbaine et un sourire furtif prennent la force d'une victoire sur les revers de l'existence.
Mais après quoi je cours? pense Jeanne, soudain tirée de son jardin vénéneux. Quelle est cette exigence impérieuse de maternité qui m'impose tant d'abnégation? La vie ne prend-elle sens que dans un ventre plein ? Après quoi je cours? se répète-t-elle. Quelle farce que ces moulins à vent que j'actionne à tout va, et quel divertissement! Fatou: un divertissement ? C'est sordide, c'est moche.
On ne peut pas comme ça coller une étiquette définitive. Il y a chez Natalia, une foi en l'homme, sans doute bien naïve, mais résistante. Certes, elle ne pouvait oublier ni pardonner le martyre que Liza avait fait subir au petit Piotr. Mais c'était la Liza de la misère. La violence et la cruauté en sont les purs produits, conclut-elle.
Il y a bien longtemps que Piotr ne pleure plus, ne crie plus, enseveli, qu'il est, sous ces guenilles raides et puantes. Et même s'il criait, qui pourrait l'entendre ? Enfermé ainsi dans le réduit étroit, obscur qui sert plutôt de placard!
On n'en sortira jamais. Il y aura toujours un truc, pour lui faire revivre ses cauchemars. Je ne sais même pas si la psy parviendra à le convaincre qu'on peut s'aimer sans douleur.