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EAN : 9782080449924
480 pages
Flammarion (01/05/2024)
4.67/5   3 notes
Résumé :
Le 10 juin 1944, Oradour-sur-Glane, près de Limoges, est anéanti par une division SS : 643 villageois perdent la vie, les femmes et les enfants asphyxiés puis brûlés dans l’église pendant que les hommes sont assassinés dans des granges. Redonnant voix aux morts, à travers les témoignages poignants des survivants, l’historien Robert Pike s’est plongé dans les archives pour raconter leur vie avant et après la tragédie. Un travail inédit et précis où l’on croise de gra... >Voir plus
Que lire après Oradour s'est tu : Le destin tragique d'un village français - 10 juin 1944Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Il existe des livres où l'on traîne la patte pour tourner les pages. Non qu'ils soient inintéressants, mais plutôt parce qu'ils sont compliqués : on connaît déjà la fin. Certes en lisant des livres d'histoire, on connaît toujours la fin des événements. On sait que Marie-Antoinette va finir décapiter et qu'Anne Franck va finir sa vie dans un camp. Mais ici c'est différent. C'est différent parce que Robert Pike a pris le temps de reconstituer aussi minutieusement que possible la vie de ce village. Politique, mariage, naissance, éducation, religion, fête, sport, orchestre, camp de réfugiés... toute la vie de ce village renaît sous la plume de l'historien. Redonnant ainsi une dimension vivante à ce village fantôme.


Un village en France :


Débutant son livre à une date antérieure à 1939, Robert Pike va nous donner l'occasion de voir comment vivait ce village rural avant la guerre. de ses gantières à ses commerçants, en passant par ses paysans, il apparaît au final que ce livre sur Oradour est plus largement une prise de vue réelle de ces villages français de l'entre deux guerres, qui se développaient à la lisière des agglomérations. Brassage de population, où l'urbain et le rural se croisent tantôt pour un week-end à la campagne tantôt pour travailler en ville, avec son tramway Oradour sur Glane est une bourgade prospère ouverte sur les environs. Et ce comme bien d'autres petites villes.


Une période troublée :


Mais avec la Seconde Guerre mondiale, la vie au village va devenir plus compliquée. Surtout à cause du rationnement et des réquisitions, et des nouveaux comportements. Étant donné que les lois de Vichy s'appliquent à Oradour comme ailleurs, et que la population des villes vient chercher à la campagne ce qu'elle ne trouve plus en ville, il s'y développe un marché gris (moins cher et plus toléré que le marché noir) qui encourage la pénurie.

Toutefois, à côté de ces problèmes de pénurie - moindre à la campagne qu'en ville - que toute la France a connu et qui oblige de ne plus suivre les lois édictées par le gouvernement pour arriver à vivre, c'est surtout l'ambiance d'Oradour sur Glane que l'auteur va prendre le temps d'aborder.

En effet, nous plongeant dans le quotidien de ces futures victimes, on remarquera que la guerre de 39-45 ne change au final pas grand chose au village. Certes, il n'y a plus de bal, il y a un p'tit peu plus d'habitants, il y a les réquisitions, des difficultés multipliées, mais au final on comprend très vite que devant les impératifs de la vie, la politique n'a que peu de prise. Bien sûr, il y a eu ces pétainistes qui n'étaient pas collabos ; ces gens attentifs aux idées antisémites de Vichy ou nazis mais qui sympathisaient avec des juifs ; ces réfractaires au STO ; l'absence de maquis car trop loin des terrains favorables à son installation (sans parler du manque de moyen) ; ce curé heureux de voir son église un peu plus peuplée y poreux aux idées de Vichy... mais au final la vie a continué comme avant l'invasion allemande, malgré la peur, malgré le manque, malgré le danger. le paysan s'occupe de ses vaches, le boulanger de son pain et le bistrot de sa clientèle.
Attention, je ne dis pas que tout a été à l'identique, et que les habitants n'ont pas vu passer la guerre jusqu'à ce jour de juin 1944 ! Ils en connaissaient les effets et n'acceptaient pas les sacrifices demandés pour le Reich, mais le fait est que les allemands ne sont jamais spécialement venus à Oradour. Ce qui sans doute permettait de ne pas y penser constamment et de vivre plutôt normalement.


Un massacre :


Les raisons qui ont été avancées pour expliquer le massacre ont été multiples : sur la route de, un défaut d'aiguillage, des résistants cachés dans le village... Au final, il est plus vraisemblable que c'était une mesure de répression suite à une attaque contre les allemands. (Et aussi une mesure pour couper l'envie aux civils d'aider les partisans.) Habitué à ce genre de pratique et remontant Le France pour aller vers la Normandie, la division Das Reich à arrêter un jour de 1944 son regard sur ce village du Limousin. Scellant ainsi son destin.

Effectivement, le fait que les allemands soient allés dans ce village n'est pas le fruit du hasard d'après l'étude de Robert Pike. Éloigné du maquis, sans réseaux de résistance, appartenant à un relief plutôt plat et sans cache naturelle, tout semble désigner cette bourgade pour un massacre organisé. Mettant en avant le périmètre de la rafle (qui va au-delà d'Oradour) via des barrages routiers, la réunion de tous les habitants sur la place du village ce qui suppose une connaissance de la ville, la pose d'explosif, la séparation des habitants, sans oublier le matériel qu'il a bien fallu avoir pour mettre un village à feu et à sang, tout indique que rien n'est le résultat de l'instinct mais au contraire le résultat d'un calcul bien défini. Un calcul sanglant, où il ne doit rester aucun survivants. Il n'y en aura d'ailleurs que quelques-uns.

Et là lecteur, je préfère te prévenir, qu'il va te falloir le coeur bien accroché pour lire ces pages. Même si tu as lu beaucoup de livres sur des massacres historiques, je dois t'avouer que ces pages où on sait que la quasi totalité du village va mourir dans quelques instants, font leur petit effet désagréable. le même sentiment désagréable que le visionnage d'un reportage sur le massacre du 7 octobre 2023. Tu sais ce qui va arriver et c'est horrible à savoir.


Après le massacre :


Le massacre fait, on va découvrir que le deuil fut rendu quasiment impossible.

Tout d'abord à cause des menaces (réelles) qui pesèrent sur la messe hommage dans la cathédrale de Limoge. Ce qui n'empêcha pas une population en colère d'y aller.

Ensuite, à cause de la difficulté à reconnaître les corps carbonisés et/ou massacrés, par les proches - s'ils n'avaient pas tous étaient décimés en même temps à Oradour.

Enfin, par la faute d'une justice, qui selon les proches des victimes a tué une seconde fois les martyrs. En amnistiant tout d'abord les « malgré nous » alsaciens, et en ne jugeant que des « fantassins » ; tout en protégeant dans le même temps les grands commanditaires du massacre dans une Allemagne mi-occupée, en pleine détente où l'extradition était impossible. Bref, on voit que la justice n'a jamais réellement répondu aux attentes des victimes selon ces dernières, car celle-ci répondait également à des impératifs politiques plus important dans un contexte de Guerre Froide.

Conclusion :


Conclusion, j'ai trouvé ce livre très intéressant par le fait qu'il cherche à donner un visage, une vie, à des victimes noyées dans la masse des massacres de la Seconde Guerre mondiale. Il est en outre une excellente photographie de ce que pouvait être cette France rurale proche des villes, avant et pendant la guerre. En creux, ce bouquin nous montre également comment cette population a vécu la guerre - et la résistance possède plusieurs visages.

Néanmoins je regrette que l'auteur garde encore en tête, cette image d'une droite collabo et d'une gauche résistante. Il y a eu assez de travaux historiques pour savoir que l'image est plus brouillée que ça et j'aurai aimé voir cette nuance. (Non mais je suis chiante j'avoue !)

Mais malgré tout, je conseille ce livre même si c'est toujours étrange de lire la chronique d'un massacre. La vie de ces gens qui parfois fuyaient les bombardements, mais qui finirent, comme Jean, comme Michel, comme Marie, comme Sarah, comme joseph, comme Maurice (et j'en passe) leur vie tragiquement. mais qui finirent leur vie tragiquement.
Lien : http://encreenpapier.canalbl..
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
"Si un jour, Dieu nous demande de même le sacrifice de nos vies, soyons fidèles allons au ciel tous ensemble".
Mots de père Jacques Lorich pendant son sermon à Oradour, le dimanche 4 juin 1944.
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