Dans ce roman,
Amélie Nothomb nous raconte son retour au Japon pour un reportage que la télévision veut réaliser sur son enfance japonaise, alors que son livre «
Métaphysique des tubes » vient d'y être publié.
Elle appelle Rinri son premier amour qui est le thème de «
ni d'Eve, ni d'Adam », dont elle arrive à obtenir le numéro de téléphone en s'armant de patience, et ils conviennent de se voir à son arrivée et dans la foulée elle réussit à obtenir le numéro de Nishio-san, sa nounou bien aimée qu'elle considère comme sa seconde mère car c'est elle qui l'a élevée.
Avec Nishio-san, la conversation est plus difficile, ce qui inquiète Amélie qui a des doutes sur ses capacités mentales.
Elle a prévue de rester 6 jours à Kobé et trois jours à Tokyo faisant un pèlerinage sur tous les lieux qui ont marqué son enfance. Cela fait quinze ans qu'elle n'est pas venue au Japon mais vingt-trois ans qu'elle n'a pas vu Kobé et entre temps il y a eu le tremblement de terre.
Elle se rend avec l'équipe de télévision dans le quartier de son enfance, le magasin de bonbons a disparu et surtout sa maison n'a pas résisté au séisme. Elle le savait avant de venir mais c'est un choc brutal : « c'est une chose de le savoir, une autre est de le voir ».
Sa rencontre avec Nashio-san est remplie d'émotions, et l'échange difficile car Amélie a beaucoup perdu sa maîtrise de la langue japonaise, certes la nounou la reconnait mais elle beaucoup vieilli, c'est normal le temps a passé.
Amélie visite ensuite son école maternelle, qui n'a pas changé et où elle reçoit un accueil chaleureux.
Après être passés par kyoto et Tokyo, ils se rendent à Fukushima où c'est le choc, l'apocalypse a bien eu lieu….
Ce que j'en pense :
Ce livre m'a profondément touchée. Amélie décrit très bien ses souffrances, ses douleurs en revoyant certains paysages, sa nounou, Rinri et les pleurs que cela lui arrache (au Japon on ne montre pas ses sentiments). Avec la maison d'enfance détruite c'est une partie d'elle-même qui s'en va dont elle doit faire le deuil. Cf. citation. Sa nounou, elle aussi a changé avec une mémoire devenue selective : elle se rappelle d'Amélie mais ne se souvient plus de Fukushima.
Sa rencontre avec Rinri, son premier amour, qu'elle a fuit en courant pour rentrer en France car à cette époque elle avait une piètre opinion d'elle-même, rencontre qui se passe bien, Rinri est marié et il a des enfants il lui raconte ce qu'est devenu le Japon, en précisant que beaucoup de gens ont quitté le pays car ils se sentaient maudits, tout en faisant une promenade dans la ville qui ressemble à un pèlerinage sur les pas de leur passé.
Elle nous parle de tout ce qu'elle a perdu et qui ne reviendra pas, balayé par l'épisode Fukushima, devenu désertique, fantomatique, de Kobe brisée par le tremblement de terre.
Tous les beaux souvenirs de l'enfance ont été balayés et elle pleure beaucoup car la réalité est là, cruelle. Tant que les souvenirs ne sont pas confrontés à la réalité, à l'anéantissement, ils nous aident à vivre, à faire le deuil et à survivre mais pour elle tout est balayé, il ne reste qu'un immense chagrin.
On fait la connaissance de sa traductrice japonaise qui est en fait hôtesse de l'air pour une compagnie autrichienne et qui a découvert les livres d'Amélie en allemand et les a traduit avec rigueur. L'épisode « anneau de saturne » , prénom qu'elle veut donner à son futur enfant car Amélie se compare « à Saturne avec sa bouée comme anneau » est hilarant par rapport au reste du texte…
J'aime cette notion de nostalgie heureuse, dans notre civilisation, la nostalgie est associée à tristesse, à la mélancolie, (le spleen, le Romantisme sont passés par là) or, on peut se souvenir des belles choses sans être attristé.
J'aime toujours autant son style, délié, avec une précision dans les mots choisis et une description des affects si particulière. Je m'étais éloignée ces dernières années car tout le monde disait qu'Amélie « pondait son livre à chaque automne » avec un sens péjoratif (le dernier lu est «
acide sulfurique ». le fait de ne pas avoir lu «
ni d'Eve, ni d'Adam » ne m'a en fait pas dérangée mais je le lirai sûrement ainsi que ceux que j'ai « ratés ».
La fin dont je ne veux parler pour ne rien dévoiler est très belle, et très bien écrite.
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