Pendant plus de 1 500 ans, l'idée d'Aristarque de Samos (- 310, à - 230) selon laquelle la Terre gravite autour du Soleil a été délaissée au profit de la conception géocentrique. La position centrale de la Terre - et surtout celle des humains avec elle - était alors philosophiquement mieux accepté. Pour des raisons comparables, les intellectuels considéraient que les orbites des objets célestes étaient circulaires, le cercle représentant une forme parfaite. En occident, il leur était d'ailleurs difficile d'exprimer d'autres idées, puisque l'Eglise l'interdisait. Comment Dieu aurait-il pu créer un monde imparfait ? Ainsi,
Giordano Bruno (1548-1600) fut exécuté par les inquisiteurs - bras armé de l'Eglise catholique - notamment à cause de ses idées héliocentriques.
Pourtant, les observations de certaines planètes (Mars notamment) montraient des reculs ponctuels sur leurs orbites circulaires théoriques autour de la Terre. Pour sauver les apparences, Ptolémée (100-168) puis ses partisans imaginèrent de complexes mécanismes constitués de cercles imbriqués les uns dans les autres.
Nicolas Copernic (1473-1543) remit en cause la position centrale du soleil, mais pas la circularité des orbites planétaires. Sa théorie donnait une explication simplifiée de mouvements des planètes, sans cependant parvenir à supprimer des décalages avec les observations.
Pendant plus de dix ans - avec la protection du roi Frédéric II du Danemark -
Tycho Brahé (1546-1601) observa le ciel, à Uraniborg, un observatoire situé sur l'île de Sven. Il y dressa une carte des cieux précise. Après la disparition de Fredéric II,
Tycho Brahé s'installa à Prague comme mathématicien de Rodolphe II (empereur du Saint Empire) où il se fit assister de
Johannes Kepler (1571-1630).
A la mort du vieil astronome, Kepler mit la main sur ses précieux relevés d'observations. Reprenant l'héliocentrisme copernicien, Kepler remplaça les orbites circulaires par des parcours elliptiques des planètes du système solaire autour de leur étoile, découvrant ainsi les trois Lois qui portent désormais son nom. Ces Lois de Kepler montrèrent le chemin à Newton (1642-1727), découvreur de la théorie de la gravitation universelle.
Arthur Koestler nous raconte l'histoire de ces découvertes, en particulier celles de Kepler. Il n'omet pas les explications scientifiques nécessaires à la compréhension des phénomènes décrits. Il explique - et c'est là le coeur de la réflexion de Koestler - les cheminements des idées chez ces penseurs et dans des sociétés aux conceptions philosophiques et religieuses paralysantes. Il ajoute les passions de ces chercheurs, leurs grandeurs et leurs bassesses. L'ambiguïté des relations entre Brahe est Kepler est mise en évidence.
Le résultat est un ouvrage de vulgarisation scientifique qui se lit comme un polar, avec des analyses psychologiques profondes (peut-être avec un peu d'imagination, mais en tout cas très crédibles). J'ai lu cet ouvrage il y a plus de vingt ans puis l'ai relu il y a cinq ans de cela, avec le même plaisir. J'en garde un excellent souvenir et vous recommande très vivement ce monument (surtout si, comme moi, vous n'avez pas une formation scientifique).