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Romane Lafore (Traducteur)
EAN : 9782375023310
Editions Paulsen (14/03/2024)
4.58/5   13 notes
Résumé :
Orphelin de père, Giacomo est élevé par son grand-père à Prazzo, petit hameau perché dans les montagnes du Piémont. Après de brillantes études, il est contraint de rentrer dans son village natal en 1915 : l`Italie entre en guerre, la misère gagne du terrain, tout vient à manquer. Échappant à la conscription en raison d`une infirmité à la jambe, Giacomo est formé par son grand-père à un art délicat : la collecte des cheveux destinée à la confection de perruques. Chaq... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Librairie Les Mots et les Choses- Boulogne-Billancourt / 4 mai 2024

Une merveilleuse surprise que cet écrivain italien découvert par hasard, en furetant en librairie, comme à mon habitude...

Une vraie merveille que ce récit que j'introduis avec un joli passage, illustrant quelque peu le choix du titre, poétique et fort engageant :

"J'eus cependant le temps de remarquer son regard émerveillé et j'en fus heureux.S'émerveiller, c'est faire un petit vol plané au-delà du réel.je la regardai un instant, puis observai à mon tour l'azur au- dessus des montagnes, dans lequel flottait de petits nuages aux formes curieuses.
- Les nuages sont vraiment drôles ! remarquai- je à voix haute.
- Ce sont les fleurs du ciel, répondit-elle d'une voix de petite fille."

Orphelin de père, Giacomo est élevé par sa mère, mais surtout par son grand-père dans les montagnes du Piémont. Ce grand-père, figure impressionnante, captivante, mais aussi redoutée de tous !
En 1915, quand l'Italie entre en guerre, le jeune Giacomo est refusé à cause d'une infirmité, étant aussi le seul soutien de sa mère !

Son grand-père va l'emmener avec lui, et lui apprendre un " métier " des plus délicats : la collecte des cheveux destinés à la confection des perruques.

Comme la 4e de couverture le présente très subtilement ; cette collecte de cheveux va bien au- delà de celle-ci " " Pour devenir un " caviè" digne de son grand- père, ce n'est pas seulement la chevelure des femmes que recueille Giacomo, mais aussi leur histoire et celle d' un monde en voie de disparition.Cette singulière moisson qui guide ses pas à travers des sentiers alpins lui révèle peu à peu les vertus de la patience et de l'enracinement "

Nous allons avec Giacomo partager son travail singulier, traverser des paysages montagneux magnifiques, au fil des saisons, des années, des histoires individuelles de familles, de femmes isolées incroyablement courageuses...
Même lorsque Giacomo n'en aura plus la nécessité, il continuera à entreprendre ces périples dans les coins montagneux les plus reculés, pour poursuivre cette collecte de cheveux, par goût des gens et de Dame Nature....

Il succédera à son grand-père qui avait construit un empire, réunissant de nombreuses branches d'activités, dont , entre autres, le ravitaillement de l'armée en vivres et matériels divers ...
Giacomo réussira fort bien, avec l'aide dun ami, Natale, et ancien partenaire de l'aieul, à faire prospérer, maintenir le prestige des entreprises du grand- père, avec une bienveillance et empathie plus grandes, envers ses salariés et partenaires...

Giacomo , après ces résultats très satisfaisants, à le mérite de ne pas avoir pris la grosse tête...C'est un solitaire, un amoureux des montagnes de son enfance, un idéaliste...fidèle à ses convictions, à ce que son grand-père lui a appris, tout en s'en démarquant " humainement", dans ses rapports aux autres !

Giacomo, un personnage attachant , des plus lumineux...que nous aurons du mal à quitter.Comme dans ces cas d'enthousiasme immédiats, j'ai dévoré la moitié du récit, et j'ai ralenti subitement le rythme pour prolonger ce vrai bonheur de lecture !

"Moi, j'étais bien, dans ces granges, très bien, surtout après les travaux.Et heureux.Je n'étais plus un Cordero, de ceux qui faisaient la pluie et le beau temps sur tout le val Maira, ceux qu'on vénérait autant qu'on les redoutait, comme je l'avais parfois entendu dire du vivant de Grand-Père .J'étais devenu Giacomo Cordero, d' Orage. C'est-à-dire un individu maître de son destin, avec une histoire différente à écrire.Sans pour autant renier quoi que soit, au contraire: c'était grâce à mon passé et aux personnes que j'avais rencontrées que j'étais devenu celui que j'étais. "

Récit captivant qui nous fait deviner l'amour- passion de l'écrivain pour ces paysages et combien, parmi les épreuves terribles des humains, cette nature grandiose a un pouvoir certain de consolation !

Un style poétique, charmeur, coloré nous emportant dans une véritable conquête d'une Harmonie entre l'amour, le respect de la Nature et celle de l' Humain; ce que réussit à vivre et à mettre en action notre " cueilleur de cheveux", Giacomo....

Sans oublier la beauté et l'esthétique de la couverture, irrésistibles.
Un vrai trésor de lecture qui fait un bien fou, qui nous fait respirer l'air vivifiant des montagnes italiennes...de l'auteur, Franco Faggiani, à qui j'exprime toute ma gratitude...pour ces heures d'évasion et de communion enchantées...

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Un titre très poétique pour un livre qui ne l'est pas tant puisqu'il décrit la vie, rude et austère, des paysans du Val Maira au moment de la Première Guerre Mondiale. L'auteur, amateur de ces grands espaces sauvage, narre la vie d'un personnage et de son entourage afin de rendre compte de ce que pouvait être l'existence de ces gens en ce temps là, pas si éloigné de nous finalement...
Pour qui parcours les montagnes, sommets et cols des Alpes du Sud, les noms évoqués dans ce roman sont parlant, ainsi que les paysages qui vont avec. Pour les autres, les descriptions sont très prenantes et précises, donnant à l'imagination tout ce qu'il faut pour travailler correctement.
Nous sommes donc bien épaulés pour suivre "Giacumin", caviè c'est à dire ramasseur de cheveux. le commerce de beaux poils était en effet florissant dans ces hautes vallées, où les habitants troquaient les chevelures de leurs femmes contre des objets ou quelques lires, chevelures qui finissaient chez les perruquiers les plus réputés !
Pour remplir son office, notre héros doit parcourir le pays en long et large, rencontrer les habitants, les convaincre, négocier les prix, etc, ...
C'est donc à une ethnographie de la vie en haute vallée que procède ce roman, très beau, un peu grave, immensément tendre envers ces habitants rudes mais pas imbéciles.
Une belle découverte pour moi !
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L'inventaire, c'est ce que fait le marchand qui compte ses biens, ses marchandises. La famille de Giacomo est une famille de commerçants. le grand-père semble d'abord être un simple colporteur, toujours sur les chemins quelque soit le temps pour échanger des bas de laine ou des miroirs contre des cheveux. Cette activité semble surprenante, une activité pour survivre à la misère – Giacomo étant un lecteur des Misérables, comment ne pas penser à Fantine, dont la vente des cheveux est une des étapes de la déchéance ? Mais progressivement, on comprend le prestige qui entoure la famille, le clan, dirigé par le patriarche, est riche. Vendre des cheveux rapporte, beaucoup, et fait vivre de nombreux employés ou collaborateurs : les femmes qui cèdent leur cheveux survivent ainsi aux épreuves de l'hiver, les paysannes du village ont un travail proto-industriel en lavant, triant et tressant les cheveux, qui sont ensuite transportés par les colporteurs vers les villes pour être vendus aux perruquiers. L'historienne Laurence Fontaine a montré que les coloporteurs des vallées alpines sont insérés dans des réseaux d'échange : même venus de lieux reculés et peu accessibles, ils sont reliés aux villes et aux familles bourgeoises ; les familles à la tête des réseaux peuvent s'enrichir fortement. Il est donc beaucoup question de commerce, d'argent, de profit dans ce roman.
Giacomo est plus éduqué que son grand-père, et, surtout, plus inséré dans son temps, dans une Italie qui se modernise et s'industrialise : il prend donc le chemin de fer, passe des contrats par télégramme… Et, surtout, il élargit ses perspectives, se diversifiant, investissant.
Le début du titre semble donc annoncer une sucess-story, l'enrichissement d'un marchand - ce qui ne m'aurait pas intéressé. Mais le titre repose sur une forme d'antithèse, opposant ce vocabulaire mercantile à ce qui est de plus évanescent et intangible, de ce qui est une des choses les plus oniriques et poétiques qui soit : « des nuages ». Giacomo est éduqué, Giacomo a lu, Giacomo a une sensibilité esthétique. Il admire la beauté, et il la ressent : odeur des alpages l'été, caresse voire morsure de la neige sur la peau, goût des plats élaborés comme celui du lait chaud, douceur de la chevelure d'une femme, contemplation des reflets de la chevelure d'une femme et de la douceur d'un paysage.
Oui, comme le suggère la très belle couverture, c'est bien aussi un roman de montagne, de la montagne. Les activités pastorales sont ainsi évoquées dans leur saisonnalité, tous comme les paysages aux couleurs, aux bruits et aux odeurs changeant selon le temps et les saisons. J'ai particulièrement apprécié ces descriptions poétiques d'un monde qui se transforme sous l'effet de la guerre et de la modernisation. Les personnages ne reconnaissent pas les frontières, partageant la même culture côté italien et côté français, faisant des affaires ensemble, parlant même une langue commune - l'occitan. Ce sont les Alpes du Sud, mais je retrouve des points communs avec ma vallée de Maurienne.
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« D'où je viens, les montagnes sont bancales, irrégulières, entaillées de gorges déchiquetées et profondes. Les plantes qui germent sur le fond encaissé ou le long des flancs escarpés s'élancent, fines et droites, avides de lumière, comme les hommes qui vivent dans les vallées cachées. Les cimes, quand elles ne chatouillent pas le ventre des nuages de passage, ne sont ni compactes ni lisses, mais pointent vers le ciel leurs mandibules hérissées de pitons rocheux aux formes curieuses, qui ressemblent tantôt à des dents de travers, tantôt à des nez cabossés. »

L'inventaire des nuages, Franco Faggiani @franco.faggiani @editionspaulsen #servicepresse

La collection La grande ourse nous offre cette fois un récit différent: entre beauté de la nature, fond historique, présentation d'un métier peu connu, « caviè », collecteur de « pels », entendez par là ramasseur de cheveux, dans l'Italie du Nord, en 1915.

« Mais voilà que j'étais ici, seul, à arpenter les sentiers; je pouvais m'arrêter et me reposer quand bon me semblait. Tout ce que j'avais à faire, c'était aller à la rencontre des femmes de la montagne, leur parler un peu, tâter le terrain et prélever leurs cheveux en échange d'une contrepartie. Rien de fatigant ni d'impossible. Un peu de muscle pour la marche, un peu d'égards pour la conversation, je n'avais guère besoin de plus. »

Un rythme lent, une vie sur les chemins, rurale et simple, authentique aussi, comme une plongée dans le temps, à arpenter les montagnes du Piémont.

Ce roman offre à la fois un regard sur la vie des zones reculées de cette époque, mais aussi sur la guerre, en toile de fond, l'impact qu'elle a eu sur l'Italie, ses citoyens, riches et pauvres…

« J'étais allé sans frémir au-devant de ce petit monde reclus et lointain, peuplé de femmes sans hommes et de solitude. »

J'ai aimé découvrir ce métier qui m'était jusqu'alors inconnu, mais surtout le quotidien des gens simples en ce temps-là: les arrangements, les trocs, les petites choses de la vie, les misères, les bonheurs aussi… tout un monde se révèle à nous, plein de beauté et de profondeur, au rythme des saisons, au diapason de la nature.

« Chez nous, l'année se divise en uéc d'invern et en catré d'infern, c'est-à-dire les huit mois de l'hiver, où la vie semble s'écouler lentement, et les quatre de l'enfer, de juin à septembre, où on travaille jusqu'à l'épuisement dans les alpages, les forêts et les champs. »

Un roman qui se déroule lentement et nous offre au fil des pages, des quelques années de guerre, tant de scènes de vie, tant d'événements, de récits, d'instants volés à un quotidien révolu et qui pourtant, sous la plume de l'auteur, reprend vie pour nous, s'anime, comme un film en noir et blanc, pour nous offrir, tel un défilé de nuages, une fresque merveilleuse dans les montagnes piémontaises.

Un roman d'une grande beauté, un hymne à un monde aujourd'hui disparu.
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Un très beau roman se déroulant dans les Alpes du Sud. Grâce aux aventures de Giacomo, jeune cavie (collecteur de cheveux pour les perruques), on rencontre des personnages étonnants dans les montagnes croisées au rythme de ses aventures commerciales. Les circonstances de la vie vont obliger Giacomo à faire des choix parfois surprenants.
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Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Je continuais à alterner les séjours en ville et la vie en montagne.Le commerce des parfums rapportait gros, mais je n'aurais pour rien au monde renoncé à ma moisson de cheveux, qui continuait de donner du travail aux femmes de Prazzo durant les rudes mois d' hiver.Mais, au- delà du simple attrait des " pels ", un commerce toujours lucratif, sillonner les vallées, les prairies et les hameaux était devenu pour moi une habitude.J'aimais aller à la rencontre des gens qui y vivaient, bavarder avec les paysans qui fauchaient le foin.
Je me délectais toujours des histoires que j'entendais et des chants espiègles des femmes, et j'étais heureux d'apporter mon aide là où le besoin s'en faisait sentir.Je découvris que le bonheur pouvait aussi se résumer à ces heures paisibles passées en bonne compagnie, sur le seuil d'une maison baignée par la lumière évanescente du crépuscule, à parler du temps, des récoltes, de ceux qui ne sont plus là, ou simplement à observer en silence la beauté puissante d'un orage qui s'enfuit au galop.

( p.298)
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Toujours grâce à Gervasio, j'avais également installé le long d'un mur quatre longues planches sur lesquelles j'entreposais mes livres, de plus en plus nombreux.J'y cherchais les explications à des phénomènes que j'ignorais ou simplement de le compagnie, les jours de solitude, parvenant à voyager sans me détacher de la chaleur du poêle.
J'avais donc tout nettoyé, surtout les tristes vestiges du passé, et apporté de nombreuses améliorations aux bâtiments.
- De la belle ouvrage, vraiment, avait conclu Giovanni avec satisfaction..Bien qu'il eût travaillé dur pendant trois semaines, l'homme ne voulut pas un centime: ce qu'il voulait,c'était que je lui apprenne à lire et à écrire. Sa requête me toucha.Je pouvais être utile à quelqu'un, moi aussi.Pour Giovanni, apprendre à lire et à écrire revenait à faire un pas de géant, à s'extraire de son monde exigu.


( p.281)
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- Certains jeunes de ton âge sont à la guerre, d'autres ont déjà parcouru la moitié du monde à la recherche de leur bonne etoile sans la trouver, d'autres encore sont morts d'épuisement pères d'une famille nombreuse qu'ils doivent nourrir de châtaignes et de gruau.Tous ces jeunes n'ont pas eu d'opportunités...Essaie d'avoir ta propre vision, d'exercer ton regard sur le monde.


( p.153)
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La guerre s'était achevée en 1918, mais personne dans la vallée ne semblait s'en être aperçu. D'autant que les hommes ayant survécu aux bombardement, Au gaz moutarde, aux éclats d'obus, aux attaques à la baïonnette dans les vallées et sur les sommets des Alpes orientales, étaient rentrés chez eux au compte- goutte et s'étaient terrés comme des animaux sauvages pour panser leurs plaies, dans leurs maisons prises en tenaille par l' hiver.Ils étaient aussitôt retombés dans l'oubli et avançaient d'un pas chancelant sur le sentier abrupt de la solitude.


( p.271)
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La neige de la fin de l'automne avait ramené un peu de calme, ralentissant le rythme de tous les gestes et de toutes les pensées.

( p.209)
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Video de Franco Faggiani (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Franco Faggiani
Franco Faggiani, auteur du roman L'Inventaire des nuages, présente le métier de son héros, un savoir-faire aujourd'hui disparu.
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