Je ne connaissais pas
Antoine Choplin. C'est en lisant une critique d'un de ses romans par Hordeducontrevent que m'est venue l'idée de découvrir cet auteur.
Mon choix s'est porté tout simplement sur «
le héron de Guernica » parce que j'aime les oiseaux et l'Art.
*
Ce qui frappe le lecteur est cette ambiance de calme avant la tempête.
Nous sommes le 26 avril 1937 à Guernica.
Le jour se lève. La place du marché se remplit de monde.
Avant de s'y rendre, Basilio part dans les marées alentours peindre le héron. Il a promis à Célestina de lui offrir une de ses peintures.
« Les eaux lisses et peu profondes ont perdu leur robe de mercure des premières clartés et s'allument maintenant de mille scintillements. »
Basilio est un contemplatif, un doux rêveur.
Le héron est là, toujours près du pont.
« Comme chaque fois, il s'émerveille de la dignité de sa posture… C'est d'abord ça qu'il voudrait rendre par la peinture. Cette sorte de dignité, qui tient aussi du vulnérable, du frêle, de la possibilité du chancelant. »
Et puis, dans tout ce silence résonne les vrombissements des avions.
"Visages bons à tout
Voici le vide qui vous fixe
Votre mort va servir d'exemple"
C'était jour de marché, beaucoup de femmes et d'enfants.
"Les femmes les enfants ont le même trésor
De feuilles vertes de printemps et de lait pur
Et de durée
Dans leurs yeux purs"
*
La lecture de ce roman m'a rappelé le magnifique roman «
L'infinie patience des oiseaux » de
David Malouf qui offre également un contraste saisissant entre la beauté des paysages, la sérénité de la nature, le chant des oiseaux et l'horreur de la guerre et des massacres, la souffrance, la barbarie.
Le récit de Basilio fait alors corps avec l'oeuvre « Guernica » de
Pablo Picasso. Je ne vous en dis pas plus pour ne pas vous gâcher le plaisir de la lecture.
Le récit, très visuel, marque les esprits.
"La peur et le courage de vivre et de mourir
La mort si difficile et si facile"
Les cinquante dernières pages sont magnifiques.
Magnifiques de cruauté.
Magnifiques de pudeur.
Magnifiques de poésie.
Magnifiques de résilience.
L'oeuvre de Basilio rejoint alors celle de Picasso, l'une anonyme, l'autre célèbre, connue dans le monde entier, symbole de la dénonciation des violences franquistes. L'art, témoin de la réalité de notre monde.
"Parias la mort la terre et la hideur
De nos ennemis ont la couleur
Monotone de notre nuit
Nous en aurons raison."
La victoire de Guernica,
Paul Eluard
*
J'ai été séduite pas l'écriture d'
Antoine Choplin, sombre, profonde et vibrante d'émotions, son style assez original où les dialogues dénudés de ponctuation se mélangent au récit.
Ce que je retiens également, ce sont les personnages, leur sensibilité et leur compassion.
*
Ce court récit, de 150 pages environ, est une très belle découverte sur le drame de Guernica qui offre une belle réflexion sur l'art et le devoir de mémoire.
« La peinture n'est pas faite pour décorer les appartements, c'est un instrument de guerre offensif et défensif contre l'ennemi. »
Pablo Picasso