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3,64

sur 227 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Sous le sapin de Noël, il y eut ce cadeau merveilleux offert par ma fille...
Le titre est sobre, un prénom suivi d'une virgule ; il sonne comme un chuchotement, une confidence...
Pierre, c'est une lettre écrite par Christian Bobin, adressée au peintre Pierre Soulages pour lui dire son admiration. Sa longévité, tout de même : cent ans depuis le vingt-quatre décembre dernier !
C'est une lettre d'amour, les mots chantent ici comme un ruisseau. C'est une lettre d'amour pour la peinture de Pierre Soulages.
« On ne crée que pour guérir d'une angoisse ».
Pierre Soulages peint ce qui nous ressemble, ce que nous sommes. Les mots de Christian Bobin le disent mieux que personne.
Pierre Soulages peint la lumière, alors que d'autres pensent qu'il peint du noir.
Le noir de Pierre Soulages absorbe. Absorbe les maux de la terre.
Christian Bobin nous dit que Pierre Soulages ressemble à Blaise Pascal, comme ses pensées qui nous remettent debout, criblent nos vies de lumière, nous permettant de mieux affronter la mort qui vient toujours trop tôt.
Derrière l'apparence de ténèbres, il y a dans chaque œuvre de Pierre Soulages une respiration.
Noircir une feuille de papier blanc, tout est peut-être parti de ce geste d'un enfant.
« Penser qu'un homme a passé sa vie à chercher quelque chose dans sa nuit, a fait sa nuit – par brisures, fractures, féroces patiences – de la lumière".
Qui mieux que Christian Bobin pourrait dire la lumière qui jaillit des griffures dans le noir que peint Pierre Soulages. Ce sont des interstices où la vie s'introduit, s'immisce, naît, renaît.
J'aime cette idée de griffures. J'adore les griffures. Elles sont autant de traits de lumière, inversant les ténèbres.
C'est un noir qui invite la nuit.
Pierre, c'est bien plus qu'une lettre, bien plus qu'un prénom. C'est un voyage.
C'est un portrait intime, celui d'un ami.
Le noir de Pierre Soulages est un noir, bien qu'effrayant, qui inspire la bonté, la charité. Un noir qui inspire Christian Bobin, comme la vision de la neige.
Sans doute, comme l'évoque Christian Bobin, ce vertige est dans l'âme de celui qui les contemple.
Parfois le noir appelle le feu. Soulève le soleil. Répare ce qui nous manque d'essentiel. Écarte le rideau qui nous cache la lumière absente.
Combien faut-il de rails, de routes, de cailloux pour parvenir à la lumière qui tend ses yeux vers nous ?
Christian Bobin prend un train pour rendre visite à Pierre Soulages, à Sète, ville où sont enterrés Paul Valéry et Georges Brassens.
La vie fut-t-elle si proche de ce voyage ?
Christian Bobin nous partage son émotion, nous fait entrer dans cette intimité avec ses mots. Nos yeux sont emplis d'oiseaux. C'est beau.
J'ai rencontré Pierre Soulages au travers des vitraux de l'abbatiale de Conques. J'ai rencontré sa nuit, sa lumière, ses griffures. Je marchais sur le chemin de Compostelle. Il m'a invité à entrer dans l'abbaye de Conques pour que je puisse comprendre la magie de cette lumière.
Le noir de Pierre Soulages soulève la neige, éteint les bavardages, fait trembler le reste de la terre.
Fait trembler les mots de Christian Bobin.
Éteint peut-être l'inutile lumière qui nous aveugle sans cesse.
« Quel bonheur cette solitude, cette paix, ce noir ».
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Mais comment peut-on écrire si.... magnifiquement ?
L'immense talent assurément. Mais, comme il le sous-entendrait sans doute lui-même, il y a autre chose en plus – une grâce, un souffle, une lumière…

Chaque mot de chaque phrase de chaque chapitre résonne et raisonne en moi.

Heureusement cet ouvrage est bref - Plus long il serait un tel ébranlement – alors pour bien en profiter et ménager mes émotions, j'ai pris le temps de lire en laissant les pauses faire leur oeuvre de macération, de rumination pour qu'il opère dans mon coeur.

Christian Bobin a simplement écrit ce livre pour son ami Pierre Soulages. Et moi je plonge et me noie dans ses mots. le flot du verbe m'entraîne vers l'Outrenoir, vers l'outre amitié. Il se faufile entre certaines évidences triviales les éclaboussant de gouttes dans lesquelles se reflète Dieu.

Que ce mot ne vous effraie pas.

Ce n'est pas une catéchèse et Christian Bobin n'est pas un prosélyte.
S'il cherche à nous révéler quelque chose, ce ne sont que ses doutes et son intuition.
Il y a dans les Outrenoirs de Pierre Soulages de la lumière et Christian Bobin guète et aime la lumière. Il y voit plus que la simple lumière, il y voit quelque chose qu'il ne nomme pas mais qui l'ébloui et le comble.

Moi je n'ai pas peur de l'évoquer ce mot, Il est une telle évidence dans l'oeuvre de Christian Bobin que j'aime tant, qu'il m'est devenu intime.

Que dire de plus de ce livre que j'aurai du mal à refermer définitivement ?

Rien…
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"Pierre", c'est par son prénom que Christian Bobin choisi de s'adresser à l'un des peintres français vivant les plus connus mondialement : Pierre Soulages. Celui-ci a bâti autour du noir une oeuvre radicale Il écrit à l'homme en noir, à l'ami : "Je me contente pour te voir de mon coeur" lui dit-il. Une proximité, une intimité s'instaure entre l'écrivain, l'artiste et le lecteur. Un récit extrêmement court pour une méditation, une réflexion de l'écrivain sur son rapport à l'artiste, à son oeuvre. Mais c'est aussi l'occasion pour Bobin d'interroger son rapport à la mort. Au détour d'une phrase, d'un questionnement, Christian Bobin nous amène à penser avec notre coeur, à nous émerveiller avec la sincérité, la simplicité du regard d'un enfant. de livre en livre, Bobin creuse son sillon , imperturbable poète. Christian Bobin, ce tailleur de mots qui les peaufinent, les sculptent comme des oeuvres d'art. Ses livres ne sont pas des cathédrales de pierres froides et figées mais bien plutôt une chaumière avec des pierres bien vivantes, ensorcelantes, avec à l'intérieur, un grand feu qui réchauffe les coeurs. Les mots de Bobin ruissellent et ses livres peu à peu forment des rivières de mots qui coulent dans cette immense chute d'eau qu'est l'imaginaire. Si, tout comme moi, vous apprécié l'oeuvre de l'écrivain, nul doute que ce "Pierre", sorti chez Gallimard, saura occuper une place de choix dans votre bibliothèque. Vertigineux.
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Une promenade au pays des mots de Christian Bobin est toujours un réel plaisir, plénitude, sérénité, méditation. Un jardin de fleurs au senteur simple, campagnard, vrai. Il nous offre en cette nuit si particulière de Noël, un voyage vers Pierre Soulages. C'est par petites touches que l'auteur nous convie et dévoile ses rapports avec ce peintre.
Ne vous attendez pas à une biographie de Pierre Soulages, loin de là, c'est juste un aller retour de Creusot à Sétes par le train de nuit, et hop, un taxi qui vous dépose à la grille de la demeure de Pierre Soulages. Et pourquoi donc cette nuit ? Et bien vous le saurez quand vous dégusterez cette petite merveille.
Un beau récit qui ressemble à son auteur, simple, sans prétention, poétique et humble.
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Très beau dialogue à sens unique entre l'écrivain Christian Bobin et le peintre Pierre Soulages. Dans ce texte poétique, Bobin s'adresse à lui au cours d'un voyage en train qui le conduit du Creusot à Sète, la nuit de Noël 2018, voyage onirique, poétique qui trouve son accomplissement devant la maison de Soulages à deux pas du cimetière marin.

Ce texte est à la fois un hommage magnifique à l'oeuvre du peintre et une méditation sur la vie de l'auteur.

L'hommage au peintre est tout en finesse et subtilité avec les visions de Bobin sur les différents noirs qui ont pu créer les Outrenoirs sous les outils entre les mains de Soulages. On passe ainsi de la simple poussière au goudron, aux flaques lumineuses dans la nuit noire, à la lumière des étoiles, le tout à travers une écriture tellement simple et riche à la fois. Si on ressent quelques réticences sur les oeuvres du peintre, Bobin les lève naturellement sans forcer le trait et suscite l'envie de retourner au musée Fabre de Montpellier ou à Rodez et Conques pour s'imprégner des créations exceptionnelles de Pierre Soulages.

Et la méditation de Bobin, sans s'écarter du but de son voyage, éclaire la réflexion du lecteur sur la vie, l'enfance, le père, le devenir de l'homme, la mort, la relation à Dieu.

Un très beau livre avec cette virgule dans son titre, telle un signe, un appel à aller au-delà du texte pour réfléchir et méditer avec Bobin et Soulages, par les richesses de l'écriture et de la peinture de deux grands artistes.




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Je suis toujours émerveillé par la riche prose de Christian Bobin: il écrit dans une langue poétique, délicate et éblouissante. En lisant, je suis séduit, comme sans défenses devant son talent. C'est seulement quand j'en ai fini avec ma lecture que je commence à me poser quelques questions. Après avoir éprouvé un grand plaisir sur le texte, que m'en reste-t-il ? Je garde l'impression d'une subjectivité très généreuse, d'un délicieux bavardage lyrique et de nombreux coq-à-l'âne somptueux. Christian Bobin choisit de développer telle ou telle impression; mais aussi bien il aurait pu écrire tout autre chose, avec la même sincérité apparente et la même veine lyrique... Devant ce constat je me sens un peu embarrassé, même je n'oublie jamais le plaisir immédiat de ma lecture.

Le personnage auquel s'attache l'auteur dans son livre, Pierre Soulages, est un immense artiste auquel je voue une grande admiration. Sa peinture, dans sa dernière période, est tout simplement géniale. Avec son grand talent, Christian Bobin évoque magnifiquement la personne et l'oeuvre de Soulages. En quelques mots fulgurants, il sait caractériser tout l'esprit de cette peinture. Par exemple: « Première et dernière leçon soulagienne: le goudron du chemin réveillé par la pluie t'en apprendra plus sur toi que tous les livres saints. Vois comme il attrape la lumière. Vois comment il joue avec elle, sans la retenir. Vois comme jamais il ne s'en croit l'auteur » (p. 15). Quelle extraordinaire finesse ! C'est ça que je voudrais retenir - et tant pis (ou tant mieux ?) s'il y a aussi du "bavardage lyrique"…
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Je suis toujours touché par la fulgurance de l'écriture de Christian Bobin, mais quand j'ai commencé ce livre, j'ai eu un peu peur : il a un seul thème, celui d'une "lettre" écrite à Pierre (Soulages), et je trouve parfois que sur du long cours, je ne retrouve pas le Bobin que j'aime ! Ma crainte s'est heureusement révélée infondée.
Christian Bobin rédige ou imagine cette lettre pendant le trajet en train qui le conduit vers Sète où il a décidé de rendre visite à Pierre Soulages. Ce long trajet est une occasion de reprendre ses thèmes favoris, comme la présence des absent, les souvenirs de son père ou la discrète présence de la musique de Bach. C'est surtout un bel hommage qu'il rend à Soulages : il arrive même à nous faire "voir" sa peinture grâce aux mots !
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C'est l'histoire d'un pèlerinage, par une nuit de solstice d'hiver, du Creusot à Sète, pour un anniversaire ou une nativité, on ne sait, pour rendre visite au "monsieur tout noir du mont Saint-Clair". C'est le récit intérieur d'un voyage à Sète, la ville du cimetière marin, celui de Brassens, dont il ne parle pas, et de Paul Valéry, dont il parle ; celui qui "a fait un rapt sur ce cimetière", avec des vers découpés avec "le même petit ciseau qui mettait chaque matin sa moustache au garde-à-vous".

C'est un récit de voyage, un voyage en train en forme de "thèse de philosophie", par une nuit comme "soixante année de théologie" ; ou plutôt un long voyage intérieur, l'odyssée d'une nuit de Noël comme "un rêve sans profondeur", "un concentré de perte et d'euphorie", comme une sorte de tombeau avant l'heure à la gloire du grand maître de l'outrenoir, qui a su "signer le néant que nous sommes".

C'est un palimpseste sur les bavardages, "bavardages des roues du train, bavardages des économiqtes, bavardages des littérateurs", quand sur les mots insignifiants la poésie arrive à tracer le verbe incarné par une couleur vide de sens.

C'est un long tutoiement, quand "je suis" deviens "tu es" : Pierre, un prénom comme une approximation, un prénom qui sonne comme celui d'un bâtisseur d'église, ou d'un baptiseur de goudron, ce goudron dont la pluie fait jaillir la lumière "comme une veste trempée abandonnée sur la route" ; comme le petit Pierre s'essayait, de la même encre, à dessiner la neige.

C'est le récit de l'attente devant un portail, un portail comme un poitrail, un portail à la "poitrine épaisse de fonte" qui protège "le peintre", une espèce de porte ou de porche, le porche du mystère des origines, 99 ans du mystère d'un homme qui en aura cent cette année.

C'est un long poème des origines, de la genèse d'un noir qui vient du fonds des profondeurs, non comme l'ombre portée par la lumière de la pureté des idées, mais qui , comme à Lascaux, surgit au contraire sur "la paroi intérieure du coeur humain", le noir de l'origine du monde, celle qu'un explorateur de l'intimité avait recouvert d'une écorce impudique et dont ne resterait qu'un zoom sur le noir pubien, ce noir intersidéral de la nuit utérine d'un autre détrousseur de mot, ce "seul grain de blé noir (...) se contractant jusqu'à devenir ce rien d'où nous venons".

C'est une longue confession, une confession de foi agnostique, écrite à l'encre empathique d'où surgit "une présence, l'excès du réel qui ruine toutes les définitions", portée par "une voix, (...) le monde entier repeint par la personne", "l'instrument du dieu qui n'existe pas", "le dieu du Rien".

C'est une contemplation. La contemplation d'une non-couleur à qui, pour plagier Christian Bobin, Soulages a su donner ses lettres de faiblesse. "Le langage est le seul dieu, celui que les nuages, les hauts poèmes et tes outrenoirs parlent."
Lien : http://www.daniel-lenoir.fr/..
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Raconter un poème ,quelle drôle d'idée… parler d'un artiste qu'on aime , le risque d'ajouter des mots aux mots ou aux images…Bobin , une nuit de Noël, décide sur un coup de tête , sur un coup de coeur , de rendre visite à son ami Pierre Soulage . Il ne raconte pas la rencontre mais les rêveries du voyage jusqu'au seuil de la maison du peintre. Et c'est si beau , si tendre , si prenant …
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Un hommage au peintre Pierre Soulages qui comme comme une lettre adressée à un ami.
L'auteur, ce soir de Noël, prend un tain jusqu'à Sète pour fêter l'anniversaire du maître, 99 ans. Il arrivera au portail de sa demeure juste avant minuit.
Dans ce court récit poétique, il relie "l"oeuvre au noir" à l'homme, les vivants aux morts, les détails du voyage et leurs rencontres à l'essence même de l'existence.
Son approche de l'oeuvre éclaire le lecteur et l'invite à découvrir (ou redécouvrir) les nuances infinies de ses toiles.
Magnifique dialogue.
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