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EAN : 9791021046436
336 pages
Tallandier (13/10/2022)
3.36/5   14 notes
Résumé :

Sylvie Bermann a été la première femme ambassadeur de France dans trois pays membres du Conseil de sécurité des Nations unies : la Chine, le Royaume-Uni et la Russie. Dans ces mémoires vibrantes, elle nous fait vivre plus de quarante ans d’histoire diplomatique.

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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Première femme ambassadeur de France en Chine, en Russie et au Royaume-Uni, Sylvie Bermann a aussi occupé d'importantes fonctions aux Nations Unies. Elle raconte les quatre décennies d'expérience diplomatique qui lui ont permis de connaître en profondeur ce monde extérieur et ces grands dirigeants qui ne raisonnent pas forcément comme nous.


Diplomate polyglotte issue du difficile « concours d'Orient », Sylvie Bermann a réalisé un parcours d'autant plus remarquable que, femme dans un milieu très masculin, elle est longtemps restée une exception, l'une des rares à briser le plafond de verre. Aujourd'hui encore, elle se garde d'ailleurs de féminiser son titre, le terme ambassadrice renvoyant habituellement à l'épouse de l'ambassadeur. Son récit jamais partisan témoigne d'un esprit ouvert et curieux que, s'il ne s'était intéressé dès le départ aux relations internationales et aux dynamiques de guerre et de paix dans le monde, l'on n'a aucune peine à imaginer se passionner de sociologie ou d'anthropologie. Sa connaissance fine des pays où elle a séjourné, s'appliquant chaque fois à en apprendre la langue et le quotidien, rend particulièrement enrichissante et pittoresque une narration vivante, claire et plaisante, qui incite les pages à tourner toutes seules.


Nonobstant quelques passages plus répétitifs et monotones consacrés à des épisodes plus mineurs et moins intéressants, l'on se passionne donc volontiers pour ses descriptions pénétrantes des climats politiques et de l'état d'esprit dans les pays où elle est nommée, pour ses portraits psychologiques des dirigeants, ministres et diplomates qu'elle rencontre, enfin pour les perspectives, qu'avec discernement, elle ouvre sur l'avenir. Après quarante ans d'observation et d'action géopolitiques depuis des postes-clés en Russie post-soviétique, en Chine tout juste post-maoïste et plus contemporaine, à Londres au moment du Brexit, aux Nations Unis à New York pour diverses actions de maintien de la paix, notamment en Afrique, ou encore à la tête de la politique étrangère et de sécurité commune européenne, sa compréhension des nouvelles polarisations mondiales est particulièrement instructive, notamment en ce qui concerne Poutine, ses motivations en Ukraine et son rapprochement avec Xi Jinping.


Intéressante, souvent pittoresque et particulièrement éclairante pour l'avenir, cette mise en perspective des relations internationales sur près d'un demi-siècle est une occasion pour le lecteur de mieux appréhender la situation géopolitique actuelle. Si la femme s'efface derrière son impressionnant parcours, on la perçoit réellement passionnée par son métier, l'esprit éminemment curieux et ouvert, et tout à fait éloignée des prises de position partisanes. Une personnalité qu'il est en tout cas plaisant de lire et d'écouter.


Merci à Denis3 de m'avoir fait découvrir ce livre.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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L'Ambassadeur s'appelle Sylvie ?
Ah bon ?

L'autobiographie de Sylvie Bermann, première femme ambassadeur de France. Un ouvrage très lisible, agréable, intéressant, certes. Il vous fera découvrir - un peu - les coulisses des ambassades et de la diplomatie. Vous y lirez, à grands traits, l'histoire de l'ascension de Xi, nouvel “empereur rouge” et celle, peu reluisante, du Brexit - une gaffe monumentale des conservateurs britanniques . Vous y découvrirez Sylvie, jeune étudiante de science po apprenant le chinois en Chine, puis diplomate junior faisant ses armes d'abord à Hong Kong puis à Moscou, avant d'accéder à des responsabilités de plus en plus conséquentes, et, finalement, au rang d'ambassadeur. Au passage, quelques esquisses de politiciens et de diplomates vous amuseront.

Si j'ai apprécié l'exposé de la vie de diplomate, souvent loin du côté glamour qu'on lui prête, je regrette un peu la longue énumération des crises et des dossiers dont elle a eu à s'occuper. C'était une belle occasion de nous montrer le monde, d'expliquer un peu le contexte ou les coulisses, mais les dossiers s'enchaînent tels des trombones…Sans doute la réserve diplomatique et les contraintes d'un livre de trois cents pages ont-elles joué un rôle important.

Si je suis resté un peu sur ma faim quant aux aspects géopolitiques, ma déception concerne surtout la dimension autobiographique de cette… biographie. Sylvie occulte entièrement sa vie privée. C'est, bien entendu, son droit le plus strict, mais après trois cents pages d'autobiographie, j'ai l'impression de ne pas la connaître du tout. Sans doute la réserve diplomatique est-elle devenue une seconde nature, mais il me semble avoir lu un très long CV plutôt qu'une biographie. Et c'est dommage. Car, par moments, on croit apercevoir une femme intelligente, cultivée, curieuse, ouverte, humoriste à ses heures… on aimerait apprendre à la connaître un peu. Mais très vite, les coulisses se referment et l'on passe au dossier suivant.

La biographie de Madame l'Ambassadeur est une lecture intéressante, mais n'espérez pas y rencontrer Sylvie Bermann. Dommage.

Je remercie Cannetille des échanges qui ont accompagné cette lecture.



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Je suis ravi d'avoir reçu aujourd'hui même, 14 octobre 2022, les souvenirs d'une dame, qui a connu une carrière fabuleuse au sommet de la diplomatie française et qui comme ambassadeur de France à des endroits stratégiques, tels Pékin, Moscou et Londres a été un témoin privilégié, en première ligne d'ailleurs.

Vu son rang et ses compétences propres, elle a été une participante avisée de certains bouleversements pendant sa vie active, qui s'est étalée de 1979, lorsqu'elle avait 26 ans, jusqu'au début de l'année présente, soit pendant plus d'une quarantaine d'années.

Sylvie Bermann a été la première femme à qui la dignité de "ambassadeur de France" a été attribué, le 19 juin 2019, un an avant Catherine Colonna, l'actuel ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Née le 13 octobre 1953 dans le Jura, la future diplomate a été déjà comme enfant fascinée par la Chine. Comme l'a expliqué Anne Fulda dans le Figaro du 31 mars 2017 à travers "Tintin et le lotus bleu". Dans l'avant-propos de ses mémoires, l'auteure elle-même note avoir "embrassé l'histoire et la culture chinoises" avec Pearl Buck et Lao She.
Sa fascination pour la Russie lui vient de sa grand-mère russe, Pouchkine, Dostoïevski et Gogol, ainsi que Soljenitsyne, Akhmatova et Pasternak.

Après de brillantes études à la Sorbonne, l'IEP (Institut d'études politiques), l'Institut des langues et civilisations orientales, et l'année académique 1976-1977 à l'université de Pékin, Sylvie Bermann a réussi, en 1979 à l'âge de 26 ans, son concours d'entrée au Quai d'Orsay.

Premier poste diplomatique, la même année, Hong Kong. Un an et demi plus tard, elle a rejoint l'ambassade de France dans la Chine de Deng Xiaoping. En 1986, ce sera l'ambassade de France dans la Russie de la perestroīka et en 1992 pendant 4 ans conseillère à l'ONU à New York, puis des missions spécifiques à Paris et Bruxelles.

En 2011, c'est la réalisation du rêve : ambassadeur de France à Pékin, en 2014 ce sera le tour de Londres et de 2017 à 2019 ambassadeur auprès de Poutine.

Il est très tentant, une fois présenté la formation et la carrière de madame l'ambassadeur, d'aller éplucher et citer des perles dans le récit de ses expériences, observations et considerations, face justement à un Poutine par exemple, mais j'ai décidé de ne pas le faire pour ne pas gâcher votre plaisir de découverte.

Sachez, cependant, qu'il s'agit d'une autobiographie passionnante et instructive. Aimant également Pearl Buck et ayant visité Pékin il y a 8 ans, j'admets volontiers avoir énormément appris sur ce pays, somme toute mystérieux pour nous autres Occidentaux à bien des égards, tout comme les motivations et aspirations profondes de son leader Xi Jinping.

La langue de Sylvie Bermann est d'une précision exemplaire dans la simplicité d'une approche raisonnable et réfléchie. Probablement l'expérience des rapports diplomatiques à son chef, le Président de la République.

En dépit des thèmes abordés, le malaise dans la mondialisation, les conflits d'intérêts nationaux, la guerre... les 350 pages des mémoires de Sylvie Bermann se lisent dans un temps-record, tout en vous offrant de nombreuses matières à réflexion.

C'est sans la moindre hésitation que je mets 5 étoiles.
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Sylvie Bermann (née en 1953) jouit à présent d'une retraite active. On la voit souvent sur les plateaux de télévisions et de fait, elle est sans doute la personne de notre pays qui connaît le mieux, intimement, la Chine et la Russie.

Son parcours professionnel est impressionnant. D'abord diplômée en histoire – une adepte de l'école des Annales – puis en sciences politiques et langues orientales, elle a été la première femme à recevoir la dignité d'Ambassadeur de France, et affectée dans des postes aussi sensibles et complexes que la Chine, le Royaume-Uni puis enfin la Russie. Elle parle le chinois et le russe, ce qui lui confère une expertise que bien peu de nos diplomates maîtrisent.

A la fois chronique des relations internationales de la période post guerre froide, mémoires et essai politique, cette femme exceptionnelle nous explique, dans un langage très accessible, les ressorts de la politique extérieure de la France et les rituels des négociations multilatérales. On reste pantois devant la complexité et la prolifération des organismes internationaux – ONU, OSCE, UE, … - qui prétendent maintenir la paix dans le monde, avec le succès que l'on sait.

Petite-fille d'émigrés russes blancs avec un grand-père originaire de Kiev, elle comprend mieux que tout autre l'âme et la civilisation russes et regrette que l'invasion de l'Ukraine ne fasse désormais de ce pays un paria sur la scène internationale.

Son expérience lui dicte quelques principes : dans la négociation internationale, rien n'est agréé tant que tout n'est pas agréé. Elle ne se berce d'aucune illusion : son livre s'achève sur la prophétie qu'il convient de penser désormais l'impensable, anticiper et planifier, mais aussi de se préparer à voir arriver de nouveaux cygnes noirs, comme l'invasion soudaine de l'Ukraine par la Russie en février 2022.

Ses remarques nous éclairent sur le droit d'ingérence qui laisse les pays faillis en état plus désastreux qu'avant l'intervention onusienne, la bisbille permanente entre l'OTAN et les initiatives de l'union européenne en matière de défense, le sacrilège pour les américains de voir les européens se doter d'une défense commune, les mensonges manipulateurs des tenants du Brexit, l'affaiblissement de l'UE lors du choix de l'élargissement « en régate » c'est-à-dire tous les nouveaux entrants ensemble plutôt que « par vagues » alors que ces pays ne bénéficiaient pas du même niveau de développement et que tous aspiraient prioritairement à une adhésion à l'OTAN …

C'est un récit très instructif, pas toujours du meilleur style mais qui permet à ceux que la politique passionne de retrouver les principales étapes des relations internationales. Quarante années d'histoire diplomatique qui se parcourent très rapidement, laissant en bouche un goût amer sur l'avenir qui attend les jeunes générations.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Je sortais du livre “Crépusculaire “ de Philippe Claudel, mi figue mi raisin, belle écriture certes mais climat lourd et oppressant, en quête d'un livre calme et reposant, en même temps propice à l'évasion. Il n'y a pas que des romans, les souvenirs de Sylvie Bermann, dont j'avais écouté une interview il y a quelques temps étaient là pour me dépayser. 40 années de vie diplomatique pour” Mme l'Ambassadeur”, première femme française ambassadrice à Pekin, puis à Moscou et enfin à Londres, avant de refaire une nouvelle boucle. Bien écrit, plaisant, simple, nous suivons la carrière diplomatique de Sylvie Bermann avec beaucoup d'intérêt, chez une femme qui a véritablement débuté au bas de l'échelle, jeune étudiante déjà tournée vers l'Asie, avec l'ambition d'atteindre les plus hautes responsabilités dans les plus grandes institutions internationales. Son parcours, exemplaire, sa curiosité insatiable et toujours insatisfaite, ses analyses raisonnées et percutantes sur le communisme Chinois comme sur celui de Russie, nous enchantent, elle a côtoyé en 40 ans les plus grands de ce monde. mais aussi les plus petits, tous ceux qui vivent dans des contrées souvent très reculées. On apprend beaucoup, même si parfois on ronge son frein à ne pas voir se dévoiler quelques secrets d'état, mais diplomatie oblige, il nous faudra lire entre les lignes. Dans tous les cas, un livre plaisant pour ceux qui aiment la géopolitique plus que la petite histoire , la vie des peuples lointains et les changements stratégiques dans les années 80; notre monde a infiniment bougé en 40 ans et Sylvie Bermann en nous prenant par la main, nous y fait assister et comprendre , comment, aujourd'hui, la guerre et ses suppôts sont de retour, mettant notre Terre en danger, et leurs peuples en souffrance. Vraiment recommandé.
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Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Années intenses qui ont coïncidé aussi avec l'élargissement aux dix nouveaux membres de l'est de l'Europe , qui a marqué entre autre la fin de toute ouverture ou stratégie vis-à-vis de la Russie.

(p.13)

Une fois le procès terminé, la Révolution culturelle soldée, l'héritage de Mao tranché - bon à 70% mauvais à 30% - sur le modèle du jugement de Krouchtchev sur Staline - les Chinois ses sont désinteressés de la politique et se sont lancés dans une entreprise d'enrichissement individuel et collectif selon le mot d'ordre de Guizot.(...) La période était au pragmatisme et à l'empirisme, concepts traduits en une formule imagée : "Peu importe qu'un chat soit noir ou blanc, pourvu qu'il attrape la souris."

(p.67)

Le KGB était omniprésent. Il suivait les faits et gestes de chacun. Les internalistes, les spécialistes de la politique intérieure dans les chancelleries diplomatiques , qui entretenaient des liens avec les dissidents ou des personnalités critiques du régime, étaient les cibles de manoeuvres de harcèlement, mesquines mais signées: pneus crevés en hiver, petits vols d'objets favoris sans valeur marchande . Juste pour dire "Nous sommes là, nous sommes passés et nous pouvons revenir quand bon nous semblera."

(p.97)

La courtoisie et la capacité à se mettre à la place de l'autre pour comprendre ce qui est acceptable pour lui sont un élément-clé de la réussite.

(pp.126-127)

Le président Chirac commencait généralement par dire à ses interlocuteurs
qu'il adorait leur pays et que les femmes y étaient très belles...Son énergie et son appétit étaient proverbiaux. Il exprimait le souhait, à chaque séjour à New York, de déjeuner dans un excellent steak house qui sert des pièces de boeuf de pas moins de huit cents grammes. Moins de deux heures plus tard, dans son avion en partance pour Paris, il dévorait un plat de charcuteries.

(p.142)

J'aimais cette ville pour sa démesure et sa vitalité . Vivre à Manhattan est un privilège envié au Quai d'Orsay en dépit d'un travail chronophage. J'étais grisée par le sentiment d'appartenance à New York, où je me sentais de plus en plus ancrée et où je vivais intensément le retour des saisons. Je fredonnais souvent la chanson culte de Barbara Streisand: "I am in a New York state of mind". J'ai toujours trouvé exaltant d'être pleinement chez moi , dans deux maisons sur des continents différents. C'est la compensation du déracinement et de l'éloignement qui sont l'essence de notre métier.

(P.151)
En quelques mois, le nouveau secrétaire général (Xi), qui détient plus de pouvoirs que ses prédecesseurs; a cessé d'être le primus inter pares d'un système collégial pour devenir le seul empereur de Chine, le troisième dans la dynastie communiste, après Mao et Denxiaoping. (...) Reviendront les pratiques oubliées comme l'autocritique forcée et le culte de la personnalité avec l'inscription de la pensée de Xi, tel le rêve chinois dans la constitution et l'étude de ses discours. S'ajoute une intolérance, même pas à la contestation, mais à la dissonance.

(P.225)


Xi Jinping, comme bien des dirigeants chinois de sa génération, a été traumatisé par la chute de l'Union Soviétique.

(P.227)

Les Chinois nous considèrent comme des romantiques. Ils sont pragmatiques.

(pp.230-231)

J'avoue qu'échaudée par le résultat du référendum sur le Brexit, j'ai été moins surprise de la victoire de Donald Trump. C'était un autre domino qui témoignait de la crise profonde des démocraties représentatives, l'entrée dans l'ère du populisme et du mensonge.

(P.261)

Vladimir Poutine entend restaurer la grandeur de la Russie, mais il n'aime pas la révolution et déteste Lénine (...) On prête à Poutine la volonté de retirer le mausolée de Lénine de l'enceinte du Kremlin.

p.273)

Vladimir Poutine entend s'inscrire aujourd'hui dans la lignée des grands tsars, depuis Ivan le Terrible jusqu'au tsar rouge, Staline, en passant par Pierre le Grand et Catherine II. Il a en ligne de mire la restauration de l'Empire russe et non celui de l'Union Soviétique.

(P.280)

La conviction de beaucoup dans ce pays-continent, le plus vaste du monde, s'étendant sur onze fuseaux horaires, était la nécessité d'un leader fort, un Vojd, un guide.

(p.284)

Homo Sovieticus et guébiste, Vladimir Poutine ne croit qu'à la puissance militaire. (Guébiste : membre du GPU (?), successeur de le Tcheka et du NKVD, prédecesseurs du KGB puis du FSB actuel)

(p.289)
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Des grandes puissances en totale autarcie sont plus dangereuses que des pays ouverts. Rien ne serait pire qu’une nouvelle grande muraille ou un rideau de fer étanches derrière lesquels bouillonneraient les ressentiments contre l’Occident, favorisant un ultranationalisme mortifère partagé par les jeunes générations.
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Xi Jinping, comme bien des dirigeants chinois de sa génération, a été traumatisé par la chute de l’Union soviétique. (...) À ses yeux, sans le Parti, point de salut pour la Chine. L’échec de la Russie est lié à la disparition du Parti. (...) L’important était de conserver cette structure forte de pouvoir de type léniniste. Lors d’un dîner privé restreint aux deux couples présidentiels au cours de la visite d’État de François Hollande en avril 2013, Xi Jinping, selon ce qu’en m’en a dit le président, a fait part de ses inquiétudes quant à l’attitude des jeunes vis-à-vis du Parti. La première génération était reconnaissante au parti de Mao pour l’indépendance et l’unité retrouvées de la Chine ; la deuxième adhérait au contrat implicite de Deng Xiaoping : la prospérité au prix d’un renoncement aux libertés individuelles, mais quid de la suivante ? La question était sans doute pertinente, mais la réponse a été le renforcement du contrôle du Parti et de l’idéologie alors que la croissance économique ralentissait et que la Chine était confrontée à des maux structurels : inégalités sociales de plus en plus criantes illustrées par un coefficient de Gini très négatif, disparités régionales, vieillissement de la population que ne parvenaient pas à corriger l’abandon de la politique de l’enfant unique, transition écologique, alors qu’un dôme de pollution stagnait au-dessus de la Chine, affectant la santé des enfants, conséquence du développement accéléré et d’une croissance à deux chiffres pendant trente ans.
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C’est déroutant pour un dirigeant, un peuple, de ne pas savoir quoi faire de son histoire. Comment l’interpréter, comment la situer dans un continuum historique ? Tout cela reste dans les limbes. Vladimir Poutine entend restaurer la grandeur de la Russie, mais il n’aime pas la révolution et déteste Lénine, qu’il accuse d’être responsable de la dissolution du pays en ayant abusivement octroyé aux républiques le droit à l’indépendance. On prête à Poutine la volonté de retirer le mausolée de Lénine de l’enceinte du Kremlin. Cette relecture du passé par quelqu’un qui se pique d’être historien a conduit à réhabiliter l’autre grand tsar du communisme, Staline, et à le débarrasser de son image criminelle. Il a au fil des ans présenté Staline essentiellement comme le vainqueur de la grande guerre patriotique, en gommant les purges et le goulag. Le grand défilé de la victoire, le 9 mai, sur la place Rouge, est devenu la véritable fête nationale, avec une parade impeccablement organisée, une grande ferveur patriotique et des enfants agitant des drapeaux dans une atmosphère bon enfant. (…) Depuis plusieurs années, Vladimir Poutine prend à l’issue de la parade la tête du « régiment des immortels », composé des familles qui portent le portrait d’ancêtres morts pendant la Grande Guerre patriotique au nom du devoir de mémoire.
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Pendant mon séjour, j’ai interrogé inlassablement mes interlocuteurs pour comprendre ce qu’il s’était passé depuis mon départ d’Union soviétique en 1989, lorsqu’Eltsine suscitait les espoirs d’un changement. Je comparais avec la Chine, rappelant l’état de délabrement à la fin de la Révolution culturelle et surtout la fermeture des écoles et des universités pendant presque dix ans alors qu’aujourd’hui, la Chine est en avance sur le plan technologique, avec Huawei et la 5G. La Russie avait les meilleurs ingénieurs, des génies mathématiques dont Eugène Kaspersky, expert mondialement reconnu de cybersécurité qui a étudié à l’université (d’excellence) des Mathématiques du KGB, et une recherche spatiale de haut niveau. Je n’ai jamais obtenu de réponse convaincante à cette énigme.
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Vidéo de Sylvie Bermann
Ce mois de mai 2024, le président chinois Xi Jinping est en visite officielle pour deux jours en France. Lors de la réception organisée à l'Élysée par Emmanuel Macron en compagnie de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, les discussions ont notamment porté sur le commerce et la diplomatie.
Pour comprendre l'économie chinoise et pour décrypter et l'intérêt qu'elle suscite en France et en Europe, Guillaume Erner reçoit deux invités : David Baverez, investisseur installé depuis 2012 à Hong Kong Sylvie Bermann, diplomate française et ambassadrice de France en Chine entre 2011 et 2014
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