AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782072534676
400 pages
Gallimard (01/02/2016)
3.98/5   26 notes
Résumé :
Édition enrichie d'Adrien Goetz comportant une préface et un dossier sur l'oeuvre. Ce volume rassemble, autour du Chef-d'oeuvre inconnu, six autres nouvelles. Elles ont été choisies parce qu'elles traitent de la peinture, ou qu'elles ont une valeur picturale particulière, qu'elles sont "colorées". Dans Le Chef-d'oeuvre inconnu, le vieux maître Frenhofer met dix ans à terminer son tableau ; lorsqu'il le montre enfin, ses amis n'y voient que chaos. Le peintre en meurt... >Voir plus
Que lire après Le Chef-d'oeuvre inconnu et autres nouvellesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
« Vers la fin de l'année 1612, par une froide matinée de décembre, un jeune homme dont le costume était de très mince apparence, entra dans une maison de la rue des Grands-Augustins, après s'être longtemps promené devant la porte avec l'irrésolution d'un amant qui n'ose se présenter à sa première, à une facile maîtresse ».

***

Ce jeune homme, c'est Nicolas Poussin. Il se glisse avec un vieillard, Maître Frenhofer, dans l'atelier de François Porbus.

***

Maître Frenhofer désespère de terminer une oeuvre à laquelle il se consacre depuis dix années : le portrait d'une femme d'un réalisme absolu.
« - Voir mon oeuvre !… s'écria le vieillard tout ému. Non, non, je dois la couver encore… Hier, dit-il, j'ai cru, vers le soir, avoir fini… Ses yeux me semblaient humides, sa chair agitée, les tresses de ses cheveux remuaient… Elle respirait !… Ce matin, au jour… j'ai reconnu mon erreur !… Je n'ai pas encore saisi la ligne vraie, la courbure exacte des formes de la femme… »
(…)
« - Oui, mon cher Porbus, reprit Frenhofer, il m'a manqué jusqu'à présent de rencontrer une femme irréprochable !… — Un corps dont les contours soient d'une beauté parfaite, et dont la carnation… »

***

Poussin se laisse convaincre de laisser sa maîtresse poser pour Maître Frenhofer, qui fier, dévoile son « chef-d'oeuvre », qui se veut d'un réalisme parfait.
« Ah ! ah ! s'écria-t-il, vous ne vous attendiez pas à tant de perfection !… Vous êtes devant une femme et vous cherchiez un tableau !… Il y a tant de profondeur sur cette toile ! l'air y est si vrai, que vous ne pouvez plus le distinguer de l'air qui nous environne… Où est l'art ?… perdu, disparu !… Ces contours sont les formes mêmes d'une jeune fille… J'ai saisi la couleur, le vif, le tranché de la ligne qui termine les corps !… Admirez !… Aussi, j'ai, pendant sept années, étudié les phénomènes de l'accouplement du jour et des objets… Et ces cheveux… la lumière ne passe-t-elle pas au travers… Mais elle a respiré, je crois !… Ce sein !… Voyez… qui ne voudrait l'adorer à genoux ?… Les chairs palpitent. Elle va se lever, attendez !… »

***

La suite, la chute, est aussi terrible que géniale.
Décontenancés, Poussin et Porbus.
Abîmée, l'image du grand maître.


***

On pense à La Bonne Peinture de Marcel Aymé, aux Habits neufs de l'empereur (publié quelques années après la nouvelle De Balzac) de Hans Christian Andersen Les. Avec humour et poésie, Balzac démonte "Le chef-d'oeuvre" qui restera à jamais "inconnu".
Commenter  J’apprécie          189
Voici sept textes courts mais intenses De Balzac qui nous offrent en quelques portraits un aperçu de son oeuvre. Deux récits, le Chef d'oeuvre inconnu et Pierre Grassou sont des réflexions sur l'Art et l'artiste. Dans le premier un peintre, Frenhofer, va tellement loin dans sa recherche de la perfection…qu'il en perd la raison et la vie. L'autre, Grassou, est un peintre médiocre, aimé des bourgeois qui n'y connaissent rien en peinture et qui finira comme eux. Entre la folie et la renonciation au talent, le destin de l'artiste est longé de sombres précipices…

L'Auberge rouge débute comme un policier, deux jeunes militaires de Beauvais débarquant dans une auberge d'Andermach près du Rhin. Partageant leur chambre avec un riche négociant, le lendemain matin ce dernier est retrouvé assassiné alors que son trésor s'est envolé avec l'un des jeunes, Fréderic Taillefer. le deuxième, Prosper, qui avait été tenté de voler la victime, est accusé du crime et condamné. Quelques années plus tard le narrateur veut épouser la fille de l'assassin dont il est amoureux, mais a des scrupules car il connaît l'histoire…Même après la mort de Taillefer il est hanté par sa conscience.

Dans l'Elixir de longue vie on retrouve la figure de Dom Juan, la recherche de la jeunesse éternelle. Un récit fantastique à la conclusion pour le moins burlesque…

Balzac nous emmène au temps de Louis XI pour nous peindre la figure d'un avare extraordinaire Maitre Cornélius, dont le pire ennemi est lui-même : une intrigue amoureuse entre un jeune amant et la femme d'un vieux jaloux et odieux, est le prétexte à cette intrusion dans l'univers de cet avare qui prétend avoir été volé à plusieurs reprises…et a envoyé bien des innocents à l'échafaud.

En fin deux textes nous offrent le récit de destinées malheureuses : un pauvre pêcheur breton ruiné par son propre fils trop gâté, un Italien de Venise très riche devenu aveugle et misérable.

Ce livre offre un bon condensé de la Condition humaine. On y trouve sa plume visionnaire, lucide et sans illusions sur l'humanité mais en même temps traversée d'une tendre ironie qui le rend profondément humain. Car les hommes et les femmes dont il explore les destinées sont très souvent les artisans de leur propre malheur malgré eux. Un classique qu'on ne se lasse jamais de redécouvrir.
Commenter  J’apprécie          170
Le chef d'oeuvre inconnu est avant tout une réflexion sur l'art. Je n'ai pas très bien compris la morale de l'histoire: la recherche de la perfection dans l'art rend-elle fou ou bien l'art supérieur est-il trop différent pour être apprécié des profanes? Pour le scénario, on se retrouve avec un jeune Nicolas Poussin qui est mis en présence d'un vieux maître à moitié mage ou du moins qui aurait hérité d'un savoir ancien. Ce dernier semble être d'un talent fou, mais l'on découvre vers la fin que son oeuvre maîtresse, devant laquelle il s'extasie et qu'il cache à tous n'est qu'un immense gribouillage. le style est souvent alambiqué, notamment pour décrire les transports procurés par les oeuvres ainsi que leur beauté. Cette nouvelle est néanmoins intéressante sur la réflexion dans laquelle elle nous emmène.
Commenter  J’apprécie          00

Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
"Il n'y a que vous pour pêcher de pareilles boules.
- Cent mille francs de dot !
- Oui ; mais quelle famille !
- Trois cent mille francs d'espérances, maison rue Boucherat, et maison de campagne à Ville-d'Avray.
- Boucherat, bouteilles, bouchons, bouchés, débouchés, dit le peintre.
- Vous serez à l'abri du besoin pour le reste de vos jours", dit Elias.
Cette idée entra dans la tête de Pierre Grassou, comme la lumière du matin avait éclaté dans sa mansarde. En disposant le père de la jeune personne, il lui trouva bonne mine et admira cette face pleine de tons violents. La mère et la fille voltigèrent autour du peintre, en s'émerveillant de tous ses apprêts, il leur parut être un dieu. Cette visible adoration plut à Fougères. Le veau d'or jeta sur cette famille son reflet fantastique.
Commenter  J’apprécie          90
Porbus, indécis, n’osa rien dire ; mais l’anxiété peinte sur la physionomie blanche du vieillard était si cruelle, qu’il montra la toile en disant : —— Voyez !

Frenhofer contempla son tableau pendant un moment et chancela.

— Rien, rien ! Et avoir travaillé dix ans !

Il s’assit et pleura.

— Je suis donc un imbécile, un fou ! je n’ai donc ni talent, ni capacité, je ne suis plus qu’un homme riche qui, en marchant, ne fait que marcher ! Je n’aurai donc rien produit !

Il contempla sa taille à travers ses larmes, il se releva tout à coup avec fierté, et jeta sur les deux peintres un regard étincelant.

— Par le sang, par le corps, par la tête du Christ, vous êtes des jaloux qui voulez me faire croire qu’elle est gâtée pour me la voler ! Moi, je la vois ! cria-t-il, est elle merveilleusement belle.

En ce moment, Poussin entendit les pleurs de Gillette, oubliée dans un coin.

— Qu’as-tu, mon ange ? lui demanda le peintre redevenu subitement amoureux.

— Tue-moi ! dit-elle. Je serais une infâme de t’aimer encore, car je te méprise. Je t’admire et tu me fais horreur. Je t’aime et je crois que je te hais déjà.

Pendant que Poussin écoutait Gillette, Frenhofer recouvrait sa Catherine d’une serge verte, avec la sérieuse tranquillité d’un joaillier qui ferme ses tiroirs en se croyant en compagnie d’adroits larrons. Il jeta sur les deux peintres un regard profondément sournois, plein de mépris et de soupçon, les mit silencieusement à la porte de son atelier, avec une promptitude convulsive. Puis, il leur dit sur le seuil de son logis : — Adieu, mes petits amis.

Cet adieu glaça les deux peintres. Le lendemain, Porbus inquiet, revint voir Frenhofer, et apprit qu’il était mort dans la nuit, après avoir brûlé ses toiles.

Paris, février 1832.
Commenter  J’apprécie          10
Frenhofer tressaillit. Gillette était là, dans l’attitude naïve et simple d’une jeune Géorgienne innocente et peureuse, ravie et présentée par des brigands à quelque marchand d’esclaves. Une pudique rougeur colorait son visage, elle baissait les yeux, ses mains étaient pendantes à ses côtés, ses forces semblaient l’abandonner, et des larmes protestaient contre la violence faite à sa pudeur. En ce moment, Poussin, au désespoir d’avoir sorti ce beau trésor de son grenier, se maudit lui-même. Il devint plus amant qu’artiste, et mille scrupules lui torturèrent le cœur quand il vit l’œil rajeuni du vieillard, qui, par une habitude de peintre, déshabilla, pour ainsi dire, cette jeune fille en en devinant les formes les plus secrètes. Il revint alors à la féroce jalousie du véritable amour.
Commenter  J’apprécie          10
Vous faites à vos femmes de belles robes de chair, de belles draperies de cheveux, mais où est le sang qui engendre le calme et qui cause des effets particuliers ?
(...)
Vos figures sont alors de pâles fantômes colorés que vous nous promenez devant les yeux, et vous appelez cela de la peinture et de l'art.
Commenter  J’apprécie          30
ous dessinez une femme, mais vous ne la voyez pas ! Ce n’est pas ainsi que l’on parvient à forcer l’arcane de la nature. Votre main reproduit, sans que vous y pensiez, le modèle que vous avez copié chez votre maître. Vous ne descendez pas assez dans l’intimité de la forme, vous ne la poursuivez pas avec assez d’amour et de persévérance dans ses détours et dans ses fuites. La beauté est une chose sévère et difficile qui ne se laisse point atteindre ainsi, il faut attendre ses heures, l’épier, la presser et l’enlacer étroitement pour la forcer à se rendre. La Forme est un Protée bien plus insaisissable et plus fertile en replis que le Protée de la fable, ce n’est qu’après de longs combats qu’on peut la contraindre à se montrer sous son véritable aspect ; vous autres ! vous vous contentez de la première apparence qu’elle vous livre, ou tout au plus de la seconde, ou de la troisième ; ce n’est pas ainsi qu’agissent les victorieux lutteurs ! Ces peintres invaincus ne se laissent pas tromper à tous ces faux-fuyants, ils persévèrent jusqu’à ce que la nature en soit réduite à se montrer toute nue et dans son véritable esprit.
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Honoré de Balzac (159) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Honoré de Balzac
Découvrez les personnages de la Comédie humaine De Balzac à travers 4 vidéos produite par la Maison de Balzac : Eugénie Grandet, Eugène de Rastignac, le Baron de Nucingen et Vautrin.
autres livres classés : EkphrasisVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (93) Voir plus



Quiz Voir plus

Connaissez-vous La Peau de Chagrin de Balzac ?

Comment se comme le personnage principal du roman ?

Valentin de Lavallière
Raphaël de Valentin
Raphaël de Vautrin
Ferdinand de Lesseps

10 questions
1321 lecteurs ont répondu
Thème : La Peau de chagrin de Honoré de BalzacCréer un quiz sur ce livre

{* *}