Samantha Shannon

Ead pouvait voir chaque éclat de vert dans ses iris, chaque cil, le reflet des bougies piégé dans ses pupilles. La lueur du feu dansait sur son épaule.

"Je vivrais seule cinquante années pour passer ne serait-ce qu'une journée avec toi."

C'est bien toi qui m'a conseillé de trouver une occupation qui me plaise ?
- Mara, je te suggérais de chasser du faucon, pas de te lancer dans l'effraction.
- L'une est plus utile que l'autre.

On compare souvent la guerre à un jeu, non sans raison.
Dans les deux cas on parle d'adversaires, de camps; du risque de perdre.
Il n'y a qu'une seule différence.
Chaque jeu est un pari. La certitude est la dernière chose que vous cherchez avant d'entamer une partie. Si vous êtes sûr de gagner, l'affrontement n'a aucun intérêt.
À la guerre, en revanche, la certitude est convoitée. Aucun imbécile ne s'est jamais lancé dans un conflit sans croire dur comme fer en ses chances de victoire - ou, du moins, sans être convaincu que les risques de défaite étaient si faibles que cela valait largement la peine de faire couler le sang. On ne se lance pas dans une guerre pour le frisson que cela procure, mais pour les bénéfices que cela apporte.
Reste à savoir s'il existe une récompense, une issue permettant de justifier la manière dont vous jouez.

Dumai l'embrassa une fois de plus, et même si elle ne s'était jamais baignée dans la mer, elle sut quel goût les vagues auraient sur sa langue.

Disparaître entre l'ombre et la pierre. Je suivais le parcours des lettres du bout des doigts. Arpenter les recoins enfouis du monde et respirer encore. Être partout et nulle part, tout voir, le connu et l'inconnu. S'élever depuis les profondeurs, sans jamais chercher le soleil. Vivre comme si on était déjà mort et aux côtés des morts.
— Cela décrit le profond désir d'un anormal. (Léandre changea de position.) Ou peut-être seulement le mien.
— Non, le détrompai-je. Ça me parle aussi.

Si intensément que je puisse le désirer, la norme n'existait pas. N'avait jamais existé. « Normal » et « naturel » étaient les deux plus gros mensonges jamais inventés. Ah, les humains, avec nos esprits étriqués... En outre, peut-être qu'être normale ne me conviendrait pas non plus.

Le Saint est avec nous, leur affirma Glorian. Faisons hurler ces créatures, une dernière fois avant la fin. Donnons au monde une bonne raison de se souvenir de nous

Tu te trompes, elle t'aime tout autant. Mais certains d'entre nous le montrent, d'autres le gardent pour eux. La reine Sabran est de ceux-ci , et je suis de ceux-là. C'est ce qui rend notre union si puissante

- On ne peut pas trop désirer quelque chose, répliquai-je.
C'est comme ça qu'ils nous musellent. Ils nous ont dit qu'on avait de la chance d'être à la colonie pénitentiaire plutôt que dans l'éther. De la chance de succomber au NitVite plutôt qu'à la corde. De la chance d'être vivants, à défaut d'être libres. Ils nous ont dit d'arrêter d'en vouloir plus que ce qu'ils nous offraient déjà, car ce qu'ils nous offraient était plus que nous le méritons.

« Nous ignorions encore tout de notre destin. Je n’avais pas la moindre idée de ce qui m’attendait dans ce nouveau théâtre de guerre. Quels noms ou quels visage j’arborerais. Qui je deviendrais.
Sinon, j’aurai peut être fait demi tour. »
P20

Tout ce que j'ai fait- tout ce que j'étais- tout ce que je suis, c'est à cause de lui. Il était déjà quelqu'un avant moi. Je ne suis personne sans lui. J'en ai marre de vivre sans lui à mes côtés. Il m'a délaissé au profit de ce livre et, par le Saint, je lui en veux profondément. Je lui en veux chaque minute de chaque jour.

Je ne pense pas assez à vous pour me forger une quelconque opinion à votre sujet votre Grâce.

Il était masqué, bien entendu. IIs l'étaient toujours. Seul un imbécile s'introduirait clandestinement dans le donjon de la reine sans s'assurer de son anonymat, et si ce coupe-jarret avait réussi à atteindre l'anti-chambre, c'est qu’il était loin d'être idiot.
Dans la grande chambre à coucher de l'autre côté, Sabran dormait profondément. Les cheveux détachés et ses longs cils noirs reposant sur ses joues, la reine d'inys était l'illustration parfaite du sommeil.

Vara semblait avoir compris qu'elle ne pouvait pas lui donner de réponse.
"Tu auras ma bénédiction, Tané, si tu me fais une promesse : celle qu'un jour, tu sauras te pardonner. Tu es au printemps de ta vie, mon enfant, et tu as encore tant à apprendre sur ce monde. Ne te prive pas du privilège qu'est l'existence."
La mâchoire de Tané se mit à trembler.
"Merci pour tout."

"Il mourut là, et ses os restèrent à jamais perdus dans le sable. Et le désert hérita de son nom." Il tapota l'échine de son chameau quand celui-ci s'ébroua. "L'amour et la peur ont des conséquences étranges sur notre âme. Les rêves qu'ils apportent nous laissent dégoulinants d'eau salée et le souffle court, comme à l'agonie - voilà ce qu'on appelle les rêves tourmentés."

Enfanter n'est pas toujours facile. Jai l'impression que c'est le secret le mieux gardé du monde. Nous en parlons comme Sil n'existait rien de plus merveilleux, mais la vérité est autrement plus complexe. Nul n'évoque ouvertement les difficultés. Les désagréments. L’incertitude Si bien qu’aujourd’hui, vous éprouvez le poids de votre condition, et vous vous pensez seule à en souffrir. Et vous vous le reprochez.

Tu t'es déjà relevé de tes cendres. Le seul moyen de survivre est de te convaincre que tu ne mourras jamais.

– Tiens, cadeau.
C'était un paquet oblong, proprement emballé dans du papier journal.
– Arcturus... (Je m'assis.) Tu n'étais pas obligé.
– J'avais l'impression que la tradition voulait qu'on offre un présent pour célébrer l'anniversaire de la sortie de l'utérus.
– La sortie de l'utérus. Magnifique.

Vous avez jamais vu la mort, mon seigneur. Seulement l'masque qu'on pose dessus.