Ma publiciste n’est pas d’accord. Elle possède une liste de femmes éligibles, des femmes qui ont grandi dans l’attente d’un mariage politique.
Des femmes qui sont prêtes à épouser un homme noir. Ça en a éliminé bien plus qu’elle ne l’avait cru. Personnellement, je n’étais pas surpris. Manhattan est bon chic bon genre. Les vieux idéaux ont toujours cours.
Certaines des femmes qu’elle a choisies sont magnifiques.
Certaines sont charmantes.
Mais aucune n’est Indie.
Aucune d’elles ne cherchait à me comprendre ni voulait que je les comprenne.
C’est peut-être ridicule d’admettre que nos trois mois ensemble ont laissé une marque sur mon âme, mais c’est pourtant le cas.
Si je le fais, si je dois m’engager à passer une vie auprès de quelqu’un que je n’aimerai jamais, c’est avec elle.
Je devrais être habitué aux regards en coin. Certes, ça fait des mois que je ne l’avais pas vue, mais je discerne tout le temps la même lueur dans le regard des femmes.
Les femmes ont envie de coucher avec moi.
Je suis riche, beau, bien habillé. Si je voulais exsuder un charme insouciant, j’en serais capable.
Mais si je le remise et laisse mes pensées dérangées s’immiscer dans mon comportement…
Les femmes sont encore plus intéressées quand je suis un connard. D’accord, je suis toujours un connard, mais quand je suis ténébreux, c’est attirant.
Les femmes me perçoivent comme un bad boy en mal d’amour (riche, bien mis ; le cliché) et elles veulent m’apprivoiser.
Il était doux avec moi. La plupart du temps. Mais parfois…
Il se mettait en colère sans raison particulière, ou alors il m’évitait pendant des journées entières. Puis il revenait comme si de rien n’était. Comme si on avait passé tout ce temps à être fou amoureux. Il dérobait également l’alcool de ses parents. Quand il y avait une fête, il ne partait pas avant d’être ivre mort.
Puis ça a cessé d’être occasionnel. C’est devenu constant.
Il buvait. Beaucoup.
Je pensais que c’était ça. Son unique secret. Il ne voulait pas que je sache qu’il perdait pied. Il ne voulait pas admettre qu’il perdait le contrôle.
Il me lisait comme un livre ouvert. Il savait exactement ce dont j’avais besoin, quand j’en avais besoin, comment et quand il pouvait me pousser dans mes retranchements.
Je ne m’étais encore jamais confiée à quelqu’un de la sorte.
J’avais ouvert mon cœur : il comprenait ce que cela faisait de perdre un père, de lutter pour soutenir sa mère, de jongler entre le devoir et son ambition personnelle.
Ouvert mon corps : il savait que je jouissais lorsqu’il mettait sa main autour de ma gorge, savait que je voulais être attachée à son lit, savait que j’avais besoin d’être contrôlée.
Alors je suis censée rentrer chez moi, mais sans flirter avec Cam.
Même si lui flirte avec moi.
Même s’il est extraordinairement beau.
Même s’il est l’objet de la plupart de mes fantasmes sexuels.
Je me retrouve dans l’air chaud et moite. Ah, l’été à New York ! Lumineux, vibrant et terriblement humide.
Ma robe est légère, mais j’ai l’impression de fondre. Comment parvient-il à rester aussi cool et mesuré dans son costume trois-pièces ?
Comment parvient-il à rester cool et mesuré tout le temps ? Même alors qu’il m’appâte avec ses prouesses sexuelles.
Comme je l’ai dit, on est seulement amis. Je ne remarque même pas sa présence. Je ne pense même pas au fait que mon short dissimule à peine mes fesses. Ou bien que je suis tout en sueur tandis que lui est tiré à quatre épingles dans son costume.
Je suis une athlète qui se donne à fond. C’est mieux que d’avoir l’air mignonne, sexy ou glamour.
Je me répète ce mantra alors que je me trottine vers Cam, mais je n’arrive pas à me convaincre. Ma rougeur s’étend jusqu’à ma poitrine.
Il plaque une main au creux de mes reins et pose l’autre sous mon menton.
Il attire mon corps contre le sien.
Puis il ferme les yeux, et ses lèvres trouvent les miennes.
C’est doux.
Un tendre baiser.
Il dure peut-être une seconde.
Je parviens à peine à sentir le goût du champagne sur sa bouche.
Mais je le ressens universellement.
Mon corps tout entier devient léger.
Le monde se mue en un endroit parfait, doux et beau.
Sa poitrine se soulève brusquement quand elle inspire. Le pendentif entre ses seins accroche la lumière. C’est moi qui lui ai offert. Pour son seizième anniversaire.
Elle l’a gardé durant tout ce temps. Elle veut me faire savoir qu’elle l’a gardé durant tout ce temps. Ça doit signifier quelque chose.
Je me plonge dans ses yeux sombres, essayant de trouver la raison. Je n’y parviens pas. Elle
est trop rigide, trop blessée, trop inflexible.
Oui, j’ai besoin d’argent, maintenant plus que jamais. Mais j’en avais aussi besoin le mois dernier et le mois d’avant. Je ne pense pas qu’il ait attendu le bon moment, c’est-à-dire que je sois assez désespérée pour accepter sa proposition.
Je suis peut-être naïve ou aveuglée par mes souvenirs. Ou alors, je suis une imbécile.
Mais je pense qu’il y a du bon en lui. Je pense qu’il veut ce qu’il y a de mieux pour moi.
Ce serait plus facile avec quelqu’un d’autre. Avec quelqu’un qui confondrait la sécurité, l’argent ou le plaisir charnel avec l’amour.
Une femme qui serait assez intéressante pour discuter un peu, baiser de temps en temps, puis se dire adieu et ne plus y penser.
Je n’ai pas vraiment été un moine. Oui, je buvais beaucoup. Selon tout mon entourage, j’avais un problème. Je n’étais certes ni heureux ni équilibré.