Marcel Proust consacra 7 années (1899-1906) à étudier l'oeuvre de
John Ruskin (1819-1900) dont il fit connaitre en France deux livres, «
La Bible d'Amiens » cathédrale historique et littéraire édifiée à la gloire de celle d'Amiens et «
Sésame et les Lys », réunissant 2 conférences
sur la lecture dont il déplore la désaffection, et sur l'éducation des jeunes femmes.
«
Sésame et les Lys » contient 4 parties distinctes :
- «
Sur la lecture », préface de
Marcel Proust, 50 pages
- Sésame : des trésors des rois, 84 pages
- Les lys : des jardins des reines, 58 pages
- Notes de
Marcel Proust, 66 pages (56+10)
J'ai déjà commenté «
Sur la lecture » et je vais donc me pencher ici sur les trois parties suivantes en précisant qu'il est inexact de présenter
Marcel Proust comme « traducteur » (il a étudié le latin, le grec et l'allemand) et de rendre à sa mère la juste place qu'elle mérite en tant que principale traductrice, corrigée par
Robert d'Humières, Marie Nordlinger, Antoine et Emmanuel Bibesco, Léon Yeatman,
Robert de Billy, comme l'a prouvé
Philip Kolb (cahiers de l'AIEF -1960) en se penchant sur les correspondances de
Proust.
Sésame : des trésors des rois, est une conférence de
Ruskin pour lever des fonds afin de financer une bibliothèque. Pour lui la lecture est une conversation avec un Maitre qui nous transmet son savoir. Un livre doit former le lecteur et non le distraire. Un roman, une autobiographie, ne sont pas plus utiles et intéressants qu'une carte postale ou un article de journal. La lecture exige attention, silence et aide de dictionnaires étymologiques.
Les lys : des jardins des reines, est une seconde conférence pour financer une école de jeunes filles. Ce plaidoyer pour l'éducation féminine analyse l'importance des femmes dans les oeuvres de
Shakespeare et
Walter Scott.
Ruskin milite pour une éducation différenciée entre garçons et filles. Prononcée au XIX siècle ce texte semblera daté, pour ne pas dire démodé, à nombre de lecteurs et de lectrices. Il occupe une faible place des notes et ne représente que le quart de ce volume.
L'essentiel est donc la préface, la première conférence et les notes (longues parfois de plus d'une page) qui permettent de confronter les vues
sur la lecture d'un britannique, de tendance évangélique, à l'époque impériale victorienne, et celle d'un français, laïque de culture juive, sous la troisième république. La préface illustre leurs vues différentes, mais complémentaires,
sur la lecture. Sésame est un discours riche et varié prononcé par un conférencier qui part dans diverses directions avant de revenir au sujet, en enrichissant son propos de citations littéraires et religieuses fort instructives et de remarques parfois fort novatrices remettant en cause le mythe du progrès, moteur du XIX siècle. Sésame offre ainsi des réflexions sociales, économiques et même écologiques qui font écho à certaines déclarations du
Pape François.
Sésame est une graine qui nourrit non seulement les rois et les reines, mais aussi tout lecteur curieux du mouvement des idées. Les notes de
Marcel Proust forgent sa pensée et préparent ainsi son oeuvre littéraire.
Ma critique de "
Sur la lecture"
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