AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782743622374
272 pages
Payot et Rivages (11/05/2011)
4/5   5 notes
Résumé :
Ces deux conférences de Ruskin (1819-1900) Sésame et Les Lys, furent publiées en 1865 et Marcel Proust s’attela à leur traduction en 1904, peu après la parution de La Bible d’Amiens. Dans sa préface, « Sur la lecture », Proust évoque tout d’abord ses souvenirs d’enfance liés à ses lectures, avant de se faire plus critique et de se démarquer de Ruskin, lui portant régulièrement dans ses notes de bas de page, la contradiction et élaborant au long de sa réflexion sa co... >Voir plus
Que lire après Sésame et Les lysVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Marcel Proust consacra 7 années (1899-1906) à étudier l'oeuvre de John Ruskin (1819-1900) dont il fit connaitre en France deux livres, « La Bible d'Amiens » cathédrale historique et littéraire édifiée à la gloire de celle d'Amiens et « Sésame et les Lys », réunissant 2 conférences sur la lecture dont il déplore la désaffection, et sur l'éducation des jeunes femmes.

« Sésame et les Lys » contient 4 parties distinctes :
- « Sur la lecture », préface de Marcel Proust, 50 pages
- Sésame : des trésors des rois, 84 pages
- Les lys : des jardins des reines, 58 pages
- Notes de Marcel Proust, 66 pages (56+10)

J'ai déjà commenté « Sur la lecture » et je vais donc me pencher ici sur les trois parties suivantes en précisant qu'il est inexact de présenter Marcel Proust comme « traducteur » (il a étudié le latin, le grec et l'allemand) et de rendre à sa mère la juste place qu'elle mérite en tant que principale traductrice, corrigée par Robert d'Humières, Marie Nordlinger, Antoine et Emmanuel Bibesco, Léon Yeatman, Robert de Billy, comme l'a prouvé Philip Kolb (cahiers de l'AIEF -1960) en se penchant sur les correspondances de Proust.

Sésame : des trésors des rois, est une conférence de Ruskin pour lever des fonds afin de financer une bibliothèque. Pour lui la lecture est une conversation avec un Maitre qui nous transmet son savoir. Un livre doit former le lecteur et non le distraire. Un roman, une autobiographie, ne sont pas plus utiles et intéressants qu'une carte postale ou un article de journal. La lecture exige attention, silence et aide de dictionnaires étymologiques.

Les lys : des jardins des reines, est une seconde conférence pour financer une école de jeunes filles. Ce plaidoyer pour l'éducation féminine analyse l'importance des femmes dans les oeuvres de Shakespeare et Walter Scott. Ruskin milite pour une éducation différenciée entre garçons et filles. Prononcée au XIX siècle ce texte semblera daté, pour ne pas dire démodé, à nombre de lecteurs et de lectrices. Il occupe une faible place des notes et ne représente que le quart de ce volume.

L'essentiel est donc la préface, la première conférence et les notes (longues parfois de plus d'une page) qui permettent de confronter les vues sur la lecture d'un britannique, de tendance évangélique, à l'époque impériale victorienne, et celle d'un français, laïque de culture juive, sous la troisième république. La préface illustre leurs vues différentes, mais complémentaires, sur la lecture. Sésame est un discours riche et varié prononcé par un conférencier qui part dans diverses directions avant de revenir au sujet, en enrichissant son propos de citations littéraires et religieuses fort instructives et de remarques parfois fort novatrices remettant en cause le mythe du progrès, moteur du XIX siècle. Sésame offre ainsi des réflexions sociales, économiques et même écologiques qui font écho à certaines déclarations du Pape François.

Sésame est une graine qui nourrit non seulement les rois et les reines, mais aussi tout lecteur curieux du mouvement des idées. Les notes de Marcel Proust forgent sa pensée et préparent ainsi son oeuvre littéraire.

Ma critique de "Sur la lecture"
Lien : https://www.babelio.com/livr..
Commenter  J’apprécie          1013

Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Il se trouve que j'ai professionnellement quelques rapports avec des écoles pour jeunes gens de différentes classes sociales et je reçois beaucoup de lettres de parents relatives à l'éducation de leurs enfants.

Dans la masse de ces lettres je suis toujours frappé de voir l'idée de « une position dans la vie » prendre le pas sur toutes les autres préoccupations dans l'esprit des parents, plus spécialement des mères. « L'éducation convenant à telle et telle condition sociale », telle est la phrase, tel est le but, toujours. Ils ne cherchent jamais, si je comprends bien, une éducation bonne en elle-même ; - même la conception d'une excellence abstraite dans l'éducation semble rarement atteinte par les correspondants. Mais une éducation « qui maintiendra un bon vêtement sur le dos de mon fils, qui le rendra capable de sonner avec confiance la sonnette du visiteur aux portes à doubles sonnettes ; qui aura pour résultat définitif l’établissement d'une porte à double sonnette dans sa propre maison ; en un mot qui le conduira à l'avancement dans la vie, voilà pourquoi nous prions a genoux, et ceci est tout ce pour quoi nous prions ».

Il ne paraît jamais venir à l’esprit des parents qu'il puisse exister une éducation qui, par elle-même, soit un avancernent dans la vie ; que toute autre que celle-là peut être un avancement dans la mort ; et que cette éducation essentielle peut être plus facilement acquise ou donnée qu'ils ne le supposent s'ils s'y prennent bien ; tandis qu'elle ne peut être acquise à aucun prix et par aucune faveur s'ils s'y prennent mal.
Commenter  J’apprécie          340
Et c'est pourquoi, avant tout, je vous dis instamment (je sais que j'ai raison en ceci) : vous devez prendre l'habitude de regarder aux mots avec intensité et en vous assurant de leur signification syllabe par syllabe, plus, lettre par lettre. Car, bien que ce soit seulement pour indiquer que ce sont les lettres qui y remplissent les fonctions de signes, au lieu des sons, que l'étude des livres est appelée « littérature » et qu'un homme qui y est versé est appelé d'un commun accord, par toutes les nations, un homme de lettres au lieu d'un homme de livres, ou de mots, vous pouvez toutefois relier à cette dénomination toute contingente cette vérité, que vous pourriez lire tous les livres du British Museum (si vous viviez assez longtemps pour cela) et rester une personne complètement illettrée, un ignorant ; mais que si vous lisez dix pages d'un bon livre, lettre par lettre (c'està-dire avec une justesse réelle), vous êtes à tout jamais, dans une certaine mesure, une personne instruite.

Toute la différence qui existe entre l'éducation et la non-éducation (en ne s'occupant que de la partie purement intellectuelle) consiste dans cette exactitude.
Commenter  J’apprécie          320
Quel rang occuperait sa dépense pour la littérature comparée à sa dépense pour une alimentation luxueuse ?

Nous parlons de la nourriture de l'esprit comme de celle du corps ; or, un bon livre contient une telle nourriture, inépuisablement ; c'est une provision pour la vie, et pour la meilleure partie de nous-mêmes. Eh bien, combien de temps la plupart des gens resteront-ils devant le meilleur livre avant de se décider à en donner le prix d'un beau turbot ! Sans doute, il y a eu des hommes qui ont serré leur ventre et laissé leur dos à découvert pour pouvoir acheter un livre, à qui leur bibliothèque coûta, je pense, en fin de compte, moins cher que ne reviennent la plupart des dîners.

Peu de nous sont soumis à cette épreuve, et c'est tant pis , car une chose précieuse nous l'est d'autant plus qu'elle a été acquise au prix du travail et de l'économie et si les bibliothèques publiques étaient moitié aussi coûteuses que les banquets officiels, ou si les livres coûtaient la dixième partie de ce que coûtent les bracelets, même des hommes et des femmes frivoles pourraient quelquefois soupçonner qu'il peut y avoir autant d'utilité à lire qu'à grignoter et à briller.

Tandis que précisément le bon marché de la littérature fait oublier même aux gens sages que si un livre vaut d'être lu il vaut d'être acheté. Un livre ne vaut quelque chose que s'il vaut beaucoup et n’est profitable qu'une fois qu'il a été lu, et relu.
Commenter  J’apprécie          230
Le bon livre du moment donc - je ne parle pas des mauvais - est simplement l'entretien utile ou agréable de quelque personne avec laquelle vous ne pouvez converser autrement, imprimé pour vous. Souvent très utile, vous disant ce que vous avez besoin de savoir, souvent très agréable comme l'entretien d'un ami intelligent qui serait là.

Ces brillants récits de voyages, ces publications où une question est discutée avec bonne humeur et esprit ; ces narrations vivantes et pathétiques sous la forme de roman, ces récits documentés d'histoire contemporaine écrits par ceux qui y ont joué un rôle effectif, tous ces livres du moment, multipliés parmi nous à mesure que l'éducation se répand davantage, appartiennent en propre au présent ; nous devrions leur être très reconnaissants et être tout honteux de nous-même si nous n'en faisons pas un bon usage.

Mais nous en faisons le pire usage si nous leur permettons d'usurper la place des vrais livres ; car, strictement parlant, ils ne sont pas du tout des livres, mais simplement des lettres ou des journaux mieux imprimés.
Commenter  J’apprécie          220
Maintenant de façon à vous comporter correctement vis-à-vis des mots, voici l'habitude que vous devez prendre. À peu près chaque mot de votre langue a été d'abord un mot d'une autre langue, saxon, allemand, français, latin ou grec (pour ne pas parler des dialectes orientaux et primitifs). Et beaucoup de mots ont été tout cela; cest-à-dire ont été d'abord grecs, puis latins, français ou allemands ensuite, et anglais enfin ; subissant un certain changement de sens et d’usage sur les lèvres de chaque nation mais conservant une même signification vitale profonde, que tous les bons lettrés sentent encore aujourd'hui quand ils l’emploient.

Si vous ne savez pas l'alphabet grec, apprenez-le, jeune ou vieux, fille ou garçon, qui que vous puissiez être ; si vous avez l'intention de lire serieusement (ce qui naturellement implique que vous ayez quelque loisir à votre disposition), apprenez votre alphabet grec, ayez ensuite de bons dictionnaires de toutes ces langues et si jamais vous avez des doutes sur un mot, allez à sa recherche avec une patience de chasseur.
Commenter  J’apprécie          220

Videos de John Ruskin (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de John Ruskin
*RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE* :  « Jusqu'à ce dernier ! », _in_ John Ruskin, _PAGES CHOISIES,_ avec une introduction de Robert de la Sizeranne, troisième édition, Paris, Hachette et Cie, 1911, pp. 256-257.
#JohnRuskin #LittératureAnglaise #JusquàCeDernier
autres livres classés : traductionVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (28) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1750 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}