Combien j'aime la pensée et la sensibilité de cette femme ! Les livres de Marie Rouanet sont pour moi des cadeaux, cadeaux des traces de ma vie, de mes bonheurs, de page en page.
Ma première découverte fut son « Petit traité romanesque de cuisine ». A cause des beignets d'acacia ? Pas seulement. le pauvre depuis le temps que je le triture il ne tient plus guère debout !
Puis ce fut « du côté des petites filles », un enchantement !
Depuis ces deux-là, j'ai su que je les lirai tous. Puis, j'ai eu la bonne surprise de la rencontrer il y a deux ans, à la foire aux livres de Brive, petite femme frêle et douce, et non moins vive et malicieuse, telle que je l'imaginais (j'ai choisi sur son stand ce jour-là « Murmure pour Jean-Hugo ») ….
« Dans la douce chair des villes » Marie Rouanet, une fois n'est pas coutume, nous partage sa vision de l'urbain, pas celle des architectes, mais celle des hommes qui vivent leur ville, dévoilement de leur intimité dans leur environnement.
Marie Rouanet, c'est le coeur, et l'intelligence, et la chair qui se livrent en concert : « Il suffit d'appréhender le monde où l'on vit avec la totalité de ses sens et de son intelligence pour y trouver le reste de l'univers. Tout ce qui est ailleurs est forcément ici. Ce qui n'est pas ici n'existe nulle part. »
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A marcher dans la ville, librement, un pas après l'autre, sans que rien sinon son propre gré interrompe le mouvement, l'on prend possession de ce qui porte un si beau nom : l'espace public. Celui qui appartient à tous, habitants ou étrangers, à vous donc, à moi, celui où il n'y a jamais de barrière fermée, ni de jour ni de nuit, le lieu du mélange, de la rencontre, de l'accélération ou de la flânerie, de l'arrêt à sa convenance, du défilé, de la manifestation, de la fête.
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Les rues, les trottoirs, les places, les halles, les monuments, les emplacements des fontaines, la statuaire appartiennent à ceux qui en usent au moment où ils en usent. Mendiants, errants, étudiants, gens modestes qui ne peuvent s'offrir le café ou le restaurant les investissent pour se reposer ou casser la croûte.
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A côté de la régularité des feux, des sens de la circulation, de la perspective des rues, de la verticalité immobile des murs, leur déambulation aventureuse crée la vie. C'est les hommes qui justifient la cité.
Au-delà de MIllau, il y a Montpellier. Oui, mais, lorsque des Parisiens s'y installent et parlent de douceur d'y vivre, on se dit que ces embouteillages, ce bruit, ne sont pas encore le fait d'une "grande" ville ; alors on se dit Toulouse, Marseille, Lyon, Paris et puis New York. Une ville a toujours dans son horizon une ville plus grande qui est plus ville qu'elle.
Pour Molière, Pézenas l'a emporté sur Béziers. C'est pourtant au théâtre bitterois des Caritats que l'on doit certains canevas des pièces de Molière, c'est à Béziers qu'eut lieu la première de l'Amour médecin. Mais Pézenas a commandé la statue. C'est assez pour que l'appropriation soit entérinée. Sur l'autoroute, un panneau laconique mais suffisant annonce "Pézenas-Molière". Béziers est officiellement spoliée. En dépit de ce vol, la statue de Pézenas est un joli piège à l'imaginaire.
....souvent l'abandon des jardinets est venu peu à peu. Si petit que soit un espace il vient un moment où il est trop grand pour l'âge.