Philippe Collin - Léon Blum : une vie héroïque
Le reporter du New York Times rapporte que Blum brille devant ses juges au point de retourner l'audience contre le régime en place. L'ancien président du Conseil, par la qualité de sa défense et la sincérité vibrante de son patriotisme, met à mal les choix politiques de Philippe Pétain.
Dehors on traque les juifs, on fusille des gamins au mont Valérien, on meurt de faim, mais un palace se doit d'être irréprochable pour ce qui est des bigoudis
Le Ritz , lieu des illusions.
– Et vous, Frank, qu’avez-vous appris ?
– Qu’il faut aimer la vie telle qu’elle est. Heureuse ou malheureuse.
– Voilà une grande sagesse.
– Elle m’est venue tard. Aucune vie n’est faite que de bonheurs ou d’épreuves. Je m’efforce de me le rappeler pour ne pas sombrer totalement…
– Sombrer, c’est le danger qui nous guette.
À sa respiration, Frank comprend qu’elle s’est endormie. Il se penche sur elle, embrasse son front. Goûte sur ses lèvres la douceur de sa peau. Un second baiser fait jaillir ses larmes, mais la tristesse a disparu, seule reste la beauté.
Frank a connu deux guerres et chacune lui aura ôté des êtres chers. Il le sait déjà : d’abord on pleure, puis on trouve la force de vivre. Le malheur a la mémoire courte – pour le meilleur ou pour le pire.
Frank doit reconnaître qu'Ritz, même cernés d'uniformes, a vécu la guerre comme un embusqué. Il a mangé à sa faim, il n'a jamais eu froid- il a même réussi à se constituer un magot non négligeable...mais qui saura le lot de pertes, d'angoisses et de danger que cette guerre a chagrins? il a dû cacher son identité, il a perdu Blanche, Luciano et ce qui lui restait d'illusions... Il paie chaque jour l'impôt de la souffrance.
– Qu’avez-vous appris de tout ça ? demande-t-il.
– Qu’il faut s’intéresser aux gens au-delà des drapeaux. Il n’y a que nos actes qui comptent, en vérité.
Bien sûr qu’il m’est fort agréable de vivre au Ritz, mais pour être honnête avec vous, Speidel, j’ai fini par nous voir avec les yeux de Jünger : comme un essaim de frelons avides et vaniteux.
Sur ce, il se tait et scrute le fond de son verre vide.
C’est l’heure où la vérité jaillit de l’eau-de-vie.
« Il faut savoir que les choses sont sans espoir, et être pourtant déterminés à les changer »
L'arrivée des aAlliés sonne la fin d'un monde, celui d'une vieille bourgeoisie réactionnaire gangrenée par l'appât du gain depuis plus d'un siècle.