La littérature est un combat permanent contre le silence, dont elle prétend restreindre l'empire en étendant le domaine de la représentation. Dans cette histoire des progrès de l'écriture et de la pensée, Don Quichotte occupe une place que nul ne lui peut ravir. Sa beauté et sa force consistent à faire droit à tout ce qui forme un être humain : l'idéal, l'amour, le politique, l'économique, le social, l'expérience des minorités - et aussi le physiologique. C'est un livre décidément, sur tout.
Une chose est certaine : quoi que l'on puisse dire et écrire du Quichotte (et j'espère en dire beaucoup et en révéler bien des facettes ignorées), et même s'il fait partie de ces œuvres qu'on connaît sans les avoir lues, on est éternellement voué à rester en deçà. Ce livre nous débordera toujours : c'est le propre des plus grands d'entre les chefs-d'œuvre. Rien ne remplacera la lecture elle-même, le contact intime avec le texte.
Rire de l'existence plutôt que d'en pleurer : telle est aussi la leçon que nous donne Cervantès. Elle est assez rare de nos jours pour quelle vaille d'être entendue en ces temps plombés par l'esprit de sérieux, sinon par un sentiment de tragique.
Par le miracle de la lecture, le sens de l'œuvre change à chaque époque, et le roman de Cervantès devient un livre proprement infini.
Sous la farce du Quichotte se cache une étonnante réflexion critique, à laquelle rien n'échappe, ni la religion, ni la politique, ni l'Etat, ni la société, ni les relations entre les sexes, et qu'il importe de déceler si l'on veut faire sens de la totalité de l'oeuvre.
Cette semaine, "La Grande Librairie" se tient à Strasbourg, en public, dans l'enceinte de la Bibliothèque nationale et universitaire. La ville vient d'obtenir, pour une durée d'un an, le label "Capitale mondiale du livre UNESCO". Augustin Trapenard accueille Paolo Rumiz, pour "Chant pour Europe", publié chez Arthaud ; Olivier Guez, pour "Le Grand Tour – Autoportrait de l'Europe par ses écrivains", paru chez Grasset ; Annick Cojean, pour "Nous y étions", édité chez Grasset ; William Marx, pour "Un été avec don Quichotte", paru aux Editions des Equateurs. La journaliste Florence Aubenas et le compositeur et écrivain Abd al Malik sont également présents.
Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
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