La conseillère

Je ne pensais franchement pas sourire autant en lisant un portait de Marie France Garaud, conseillère occulte de Pompidou et Chirac. Bien oubliée aujourd'hui, elle fut une des femmes les plus puissantes de la Vème République. Elle ne se revendique jamais comme femme, encore moins féministe, use de codes violents considérés comme masculins. Avec son acolyte Pierre Juillet, encore plus oublié, elle écrit des discours, conseille voire manipule, tire les ficelles dans l'ombre. Manipulatrice, d'une intelligence supérieure, psychologue, cynique, violente, d'un caractère impérieux, elle sonde les êtres pour les mener à sa guise. Ce qui l'intéresse n'est pas la lumière mais le pouvoir, l'influence. Sa principale "victime", jusqu'en 1978, fut Jacques Chirac. Elle exerce sur lui une véritable domination psychologique et le sous-estime, persuadée de sa supériorité intellectuelle, le juge versatile naif, séducteur mais peu fait pour le pouvoir. Elle le lance néanmoins en politique. Après le violent appel de Cochin anti européen en 1978 rédigé de sa main, il prend ses distances et Marie-France Garaud perd une influence qu'elle ne retrouvera jamais.
Pourquoi un tel portrait, une telle femme peut-il aboutir à un livre aussi drôle? Cela tient au ton distancié, amusé, détaché de l'auteur, un trentenaire qui observe en entomologiste cette époque de la vie politique française entre la fin du gaullisme et l'envol du chiraquisme, époque ou la politique est encore plus violente et bien moins transparente, au portrait savoureux de cette femme au vocabulaire, au comportement anachronique.

Qui a dit que derrière tout grand homme se cachait la femme? C'est un peu ce que veut nous démontrer Olivier Faye dans ce portrait de Marie- France Garaud, véritable Machiavel en jupons . Mais avait-elle bien des jupons ? On n'en est, en tout cas, pas certain dans les traits de caractère que lui accorde l'auteur ! Encore que, aucun des personnages de ce microcosme ne soit vraiment épargné. Un roman qui aurait pu être fastidieux, pour quelqu'un comme moi, qui accorde peu de crédit aux méandres de la vie politique, et qui, en fait, s'est avéré plutôt jubilatoire. le stratège, ici, c'est l'auteur.