Contes d'une poche et d'une autre poche (1929) contient quarante-huit petites histoires policières décalées, pleines d'humour et de finesse. Karel Čapek (1890-1938) était un magicien du verbe, qu'on se le dise !
Sur le mode de la conversation, du petit dialogue entre amis, Karel Čapek vous raconte une histoire policière insolite.
Par exemple, dans « Le poète » Nerad est témoin d'un accident au cours duquel une voiture a renversé une femme dans la rue Žitná. L'inspecteur de police Majzlík l'interroge, mais le poète était ivre cette nuit-là, donc il ne se souvient de rien. Mais pendant la nuit, il a écrit un poème ésotérique qui révèle le lieu du crime, l'heure, le numéro de plaque d'immatriculation et la couleur de la voiture.
Dans « L »'expérience du professeur Rouss, le professeur aide la police à confondre le coupable grâce au jeu des associations d'idées.
Les contes peuvent être loufoques : un voleur de cactus bien barré, une cellule de prison napolitaine « magique » (car ses occupants se repentent, sauf les Tchèques) ou plus graves : un psychanalyste guérit son patient de sa névrose, ce qui le conduit au pire. Un prisonnier innocenté remis en liberté s'avère coupable etc.
Čapek utilise l'ironie goguenarde aux dépens des policiers, des journalistes, des médecins, des experts, de l'administration, des postières, des écrivains (y compris de lui-même) de toute cette humanité qui se pique de juger son prochain. Et Dieu le sait bien ( voir le Jugement dernier)*.
Čapek voulait écrire des nouvelles qui enfreignaient les lois traditionnelles du genre. Par exemple avec un détective amateur : un jardinier (Le Cactus volé, le Chrysanthème bleu), un écrivain qui résout une affaire de plagiat, une épouse de policier, un policier qui s'en remet au prédictions fantaisistes d'une cartomancienne etc. Des gens tout à fait ordinaires, comme les criminels d'ailleurs. le meurtrier peut être clairement identifié dès le début, ou bien l' histoire ne présenter aucun meurtre ou encore aucune résolution (un vieux « cold case » remontant au XVème siècle). Čapek multiplie les points de vue : celui du témoin, du criminel, de l'entourage du détective etc. Certains contes ne portent pas du tout sur le crime ou le délit mais ils traitent surtout de la difficulté de rendre la justice.
Ils ressemblent alors à de petits apologues, toujours souriants, toujours légers qui préparent le lecteur à accepter la morale du récit.
Je vous invite vraiment à vous procurer cet ouvrage drôlement chouette.
*Le Jugement dernier et le Voyant sont sur un podcast de France Culture (épisode 5/5 de
la Maladie blanche).
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-feuilleton/le-jugement-dernier-et-le-voyant-de-karel-capek-5263217
Merci beaucoup Bobby !