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Citations sur La ligne des glaces (19)

Sans alcool, je ne pouvais pas surmonter les nuits blanches passées à défier l'hiver, ni supporter tout ce qui m'avait charmé jusque-là chez cette fille, et qui désormais me donnait la nausée : le givre ingénu de ses yeux gris, le rouge trop rouge de ses lèvres pleines, le reproche luthérien de ses fossettes, sa frange de fillette, son nez à l'arête trop dure, ses pommettes hautaines, son front pâle et marmoréen, sa voix cajoleuse de tragédienne-née, son teint livide de mannequin anémique, ses joues fardées à l'excès, son menton guerrier, ses hanches tortillardes, le marnage exagéré de ses décolletés, l'effronterie de son derrière caracolant sous les plis de sa jupe, ses pas parfaitement mesurés, croisés, décroisés, tout cela à faire vibrer les pavés et rougir les passants, sans compter la musique sauvage dont elle abrutissait nos fin de soirée, son exubérance inoxydable, ses petites pudeurs feintes, son rire de cristal, la pluie d'or de ses paillettes, le strass de sa vie facile, son kitsch invétéré, ses sacs à main par milliers (...)
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Partir à la recherche de ces Lives dont j’ignorais jusque-là l’existence – je
n’avais plus que cette idée en tête [...]. Dvina disait qu’ils se répartissaient en une dizaine de villages, les Lives, dans de petites barques en bois bâties sur pilotis, derrière les dunes, au bord d’une lagune, à l’abri des tempêtes. [...] j’imaginais ces Lives comme un peuple de pêcheurs et de poètes.
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En me rendant sur-le-champ dans l'obscur réduit où se trouve le seul poste connecté à la toile, je vérifie cette information. En réalité, le village de P., qui s'ennorgueillit d'être le centre authetique (sic) de l'Europe, se situe au plus près du centre géométrique de l'Europe physique, c'est-à-dire de l'Europe qui va de l'Atlantique à l'Oural, précise le site. p. 34
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"Ce que j’ignorais, c’est que les pays sans légendes n’existent pas – que tous les coins de la terre se valent, que l’exil est un mythe, l’asile notre séjour."
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Mais Lothar et moi-même, étions-nous vraiment en droit de jouer les donneurs de leçons ? N’avions-nous pas rêvé, nous aussi, des blondeurs ingénues, des minois angéliques, des pâleurs secrètes que vantaient tant d’auteurs du XIXe siècle ? Laissons de côté la question de l’entraînement à un besoin très grégaire que n’auraient pas dédaigné ces barbichus d’autrefois : le très fort soupçon qu’aujourd’hui ces filles-là n’y mettaient, et n’offraient en retour plus guère de joie nous défendait d’y goûter. Seulement le racolage était ici généralisé, et les lieux ne manquaient pas d’où l’on pouvait revenir agréablement escorté sans avoir mis la main au portefeuille. Non, nous le sentions bien, Lothar et moi, mais ne savions comment l’exprimer : l’espèce d’aventure qui se perdait ici avec le temps n’était pas de celles qui se jouaient jadis, à quatre pattes ou à deux dos, dans une alcôve, sous un vieux néon rose. Non, ce que nous regrettions à la terrasse des cafés, dans les bars, dans les venelles de la vieille ville en voyant passer les filles au bras des touristes, ce que Lothar, surtout, regrettait, c’était une forme de transgression plus quotidienne, plus candide et bien plus poétique : ce qui se perdait avec la disparition de toute idée d’ailleurs, c’était le petit frisson du franchissement. Tu peux la chercher sur toute l’étendue de la Terre, ta ligne rouge, Samuel, disait Lothar : il n’y a plus, nulle part, de frontières. Et ce petit frisson, ce petit effroi de la frontière, pour chacun de nous, était d’abord affaire de langue. Car tout le monde ici, déplorait-il, parlait la même langue. Celle qui s’entendait partout à la ronde, que beuglaient les glottes allemandes, les glottes espagnoles, les glottes italiennes, danoises, chiliennes, canadiennes, britanniques, américaines : le global english."
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"Ce sera ma vanité. Vanité propre à toute mission qui s'arroge indûment un pouvoir de démiurge, puisque le démiurge, l'inventeur des mondes, est celui, d'abord et avant tout, qui départage les pays, trace des limites."
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À quoi bon guetter tous les matins le premier bourgeon, quand on est incapable de sentir craquer la glace sur laquelle on se prélasse ?
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L’hiver est la saison préférée des enfants, la neige une fontaine de jouvence – aimer l’hiver, me disais-je, se réjouir sous la neige, sont les signes manifestes de ce refus puéril de vieillir qu’on appelle le syndrome de Peter Pan. Qu’importe ! Je pouvais m’estimer heureux : par ces temps de réchauffement climatique, ce genre de retour en enfance se faisait rare ou trop bref.
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Les romans, , c’est comme le pâté en croûte, les dehors sont séduisants, ça brille sous la gelée, mais tu sais déjà quel goût tu auras sur la langue, et voici la raison pour laquelle tout ce que tu viens d’écrire me dégoûte, autobiographique ou pas, ton roman te ronge, parce que c’est un roman, parce que ce qui était au départ un carnet de bord, un journal intime, qui se tenait au plus près des faits, au plus près de la perception des faits, qui visait la véracité, ou du moins la sincérité, la spontanéité, l’authenticité, tout ça s’est transformé, tu as fabriqué du roman comme on fabrique une soupière, il fallait renoncer aux retouches, faire confiance au premier jet.
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Étrange, comme on se sent à la fois triste et soulagé à la nouvelle de la fin du périple.
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