Il semblerait qu'Éric Rohmer n'attachait pas beaucoup d'importance à la musique dans ses films. J'ai donc été surprise par «
le trio en mi bémol », l'unique pièce de théâtre dont il est l'auteur. Ce texte date de 1988 mais que je le découvre avec plaisir seulement aujourd'hui.
Dans l'émission Preuves à l'appui, Rohmer nous avait expliqué que pour lui, lorsqu'il y a des dialogues, il faut les entendre pleinement, sans musique de fond, et que lorsqu'il n'y a pas de dialogues, les bruits de la nature sont intéressants en eux-mêmes. Il en a conclu qu'il n'y a généralement pas de place pour la musique dans un film.
Eh bien, il nous prouve le contraire au théâtre avec cette comédie en sept tableaux dont le titre est inspiré d'une oeuvre de Mozart.
Les scènes successives se déroulent en huis clos dans l'appartement parisien de Paul, de deux mois en deux mois, durant un an. Paul et Adèle vont s'y rencontrer. Ils se sont aimés mais sont désormais séparés. On comprend tout de suite qu'ils s'aiment encore car, en générale, quand on se quitte ce n'est pas pour se rendre visite et rester en tête à tête.
Cependant, ils sont aveugles et sourds vis à vis de leurs sentiments réciproques. Il suffira d'une simple passion commune (
le Trio en mi bémol de Mozart) pour qu'ils commencent à prendre conscience de ce qui était pourtant flagrant depuis le début.
Cette pièce est un miroir des relations entre hommes et femmes et surtout un portrait de la frontière qui sépare l'amour de l'amitié, thèmes récurrents chez Rohmer.
La présence importante de la musique installe une certaine atmosphère durant la succession des sept tableaux et est, pour ainsi dire, le troisième personnage du trio.